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L’insuffisante détermination des conditions d’indépendance de la fonction de conformité
Le régulateur bancaire de l’UEMOA s’est contenté d’écrire que ‘‘le responsable de la conformité doit être indépendant des entités opérationnelles’’ sans autre précision. Cette indépendance ne peut être assurée que lorsque la fonction de conformité bénéficie d’un positionnement adéquat dans l’organigramme de la banque et d’un statut convenable.
Le positionnement de la fonction de conformité dans l’organigramme de la banque En tant que structure de contrôle, la fonction de conformité ne saurait être au bas de l’échelle dans l’organigramme de la banque. Les liens de subordination peuvent sûrement avoir un effet négatif sur la qualité de son travail. C’est pourquoi, dans les banques où cette activité est bien organisée, le contrôle de conformité est un service en staff. En d’autres termes, dans les banques où la fonction de conformité est érigée en service, celui-ci est directement rattaché au directeur général de l’entreprise en question. Cette modalité est prévue par le régulateur bancaire suisse71. En outre, si la fonction de conformité est exercée au sein d’un service donné (celui du contrôle permanent, par exemple), il est possible que le responsable de la conformité rende compte au responsable de ce service. Cependant, pour bien assurer son indépendance, il peut être prévu, dans les procédures internes de la banque, que le responsable de la conformité rende compte de son action directement au directeur de la banque. Cette modalité de rattachement est également prévue par le régulateur bancaire français. En effet, l’article 11, alinéa 3 du Règlement CRBF n° 97-02 du 21 février 1997 dispose : « Les entreprises assujetties déterminent si le responsable du contrôle de la conformité rend compte de l’exercice de sa mission à l’un des responsables du contrôle permanent prévu à l’article 7, point 1, troisième alinéa, ou directement à l’organe exécutif ».
Le régulateur bancaire de l’UEMOA est resté muet sur ces deux (2) modalités de positionnement du responsable de la conformité. Cependant, il en existe une troisième qui consiste à rattacher le responsable de la conformité directement à l’organe délibérant de la banque. C’est cette modalité qui a été choisie par la Commission Bancaire de l’UEMOA. Ainsi dispose l’article 29 de la Circulaire N° 003-2011/CB/C relative à l’organisation du système de contrôle interne dans les établissements de crédit de l’UMOA : « Le responsable de la conformité rend compte à l’organe délibérant, au moins une fois par an, de l’exécution de sa mission… ». Cette dernière modalité de rattachement existe en droit français, de façon complémentaire. Dans ce sens, l’article 11, alinéa 4 du Règlement CRBF n° 97-02 du 21 février 1997 dispose : « Lorsque l’organe exécutif ou l’organe délibérant l’estiment nécessaire, le responsable du contrôle de conformité rend également compte directement à l’organe délibérant ».
La modalité de rattachement choisie dans l’UEMOA, à savoir le rattachement seulement à l’organe délibérant, a ceci comme inconvénient qu’elle est moins efficace que les deux autres. En effet, l’organe délibérant n’étant pas un opérationnel, il ne saurait exercer un contrôle aussi rapproché que l’organe exécutif. En plus, l’UEMOA a opté pour un compte rendu annuel par le responsable de la conformité. Si cette fréquence est adoptée sous d’autres cieux72, il n’est pas rare, non plus, de voir une charte de compliance qui fixe un compte rendu deux fois par an73, toute chose qui donne plus de possibilité de découvrir à temps les difficultés et de prendre les mesures correctrices qui s’imposent.
Par ailleurs, l’efficacité du contrôle de conformité requiert, en plus d’un positionnement adéquat dans l’organigramme de la banque, un statut convenable pour le responsable de ce contrôle.
Le statut du responsable de la fonction de conformité
Les limites de la régulation UEMOA relative à la fonction de conformité se manifestent ici. En effet, le régulateur reste silencieux en ce qui concerne le statut du responsable de la conformité bien que la détermination de ce statut soit importante. En la matière, le régulateur UEMOA n’est pas moins explicite que son homologue français. Pour alors obtenir des précisions sur le statut du responsable de la conformité, il faut recourir soit à la charte ‘‘compliance’’ des grands groupes bancaires soit à un texte professionnel, par exemple un texte relatif à la conformité adopté par l’association des banques d’un État ou d’une zone économique et homologué par le régulateur. C’est ainsi que l’on découvre que deux prérogatives concourent à caractériser le statut du responsable de conformité. Ce responsable est non seulement un contrôleur doté d’un droit d’initiative, mais aussi un contrôleur disposant d’un pouvoir de contrôle exhaustif
Un contrôleur doté d’un droit d’initiative
Le droit d’initiative du contrôle désigne la faculté laissée au responsable de la conformité de décider du moment de ses contrôles. Cette prérogative du responsable de conformité crée une différence importante entre lui et l’auditeur interne. En effet, l’audit interne s’effectue suivant un programme74 et, de surcroît, chaque mission d’audit doit d’abord être validée, autorisée. Cette autorisation se fait à travers la signature de l’ordre de mission par la direction75. Il est vrai que le responsable de conformité, pour des raisons de bonne organisation de ses activités, peut travailler suivant un programme établi. Cependant, il demeure titulaire du pouvoir de décider de l’opportunité de ses contrôles, de la fixation de leur date. Il détermine également le champ de son intervention pourvu que celui-ci reste dans le cadre prévu par les textes internes. Une belle illustration de ce droit d’initiative est donnée par la charte ‘‘ compliance’’ de DEXIA GROUP qui stipule clairement : « La cellule compliance dispose d’un droit d’initiative pour l’ensemble de ses tâches dans les domaines définis par cette charte ainsi que par les comités de direction et les conseils d’administration respectifs, en conformité avec cette charte »76.
Le responsable de conformité doit pouvoir faire aussi un contrôle exhaustif.
L’augmentation du coût du crédit :
L’une des limites des accords de Bâle sur les fonds propres est qu’ils ont eu comme conséquence l’augmentation du coût du crédit. En effet, l’octroi de crédit par une banque est plafonné par lesdits accords. Ce plafond est fonction des fonds propres de la banque en question. La règle oblige la banque à choisir entre une limitation de ses crédits (1) et une augmentation de ses fonds propres (2).
La limitation des crédits :
Lorsque les banques restreignent le crédit, par contrainte, cela conduit à des effets négatifs pour les pays. En effet, les acteurs de l’économie des pays seront, eux aussi, limités dans leurs activités ; toute chose qui aura des effets contraires aux objectifs des mêmes accords de Bâle : assurer la solvabilité des banques, la solidité du système financier en vue de maintenir la stabilité et la croissance. La plupart des établissements de crédit s’accordent sur la nécessité d’un renforcement du cadre prudentiel, notamment en révisant les exigences en capital. Cependant, le montant exigé (pour Bâle III, par exemple), a entraîné de vives contestations. Les contestateurs insistent que les exigences en capital pèseront sur le financement de l’économie ainsi que sur le coût du capital. Ā travers une étude menée par elle, la Banque des Règlements Internationaux admet ces avis, même si elle les tempère. Selon cette étude : « L’impact sur la croissance sera limité : une augmentation de 1% des fonds propres conduirait à une diminution de 0,2% du PIB sur quatre (4) ans, soit une baisse de 0,04% de la croissance.
L’ensemble de l’économie européenne sera davantage impactée car son financement est assuré à près de 80% par les banques, à la différence de l’économie américaine qui repose essentiellement sur le marché.
Sur le long terme, les bénéfices des nouvelles règles se révèleront bien supérieurs, en terme de stabilité financière, donc de croissance »171.
L’augmentation de fonds propres :
Avec les accords de Bâle, pour octroyer suffisamment de crédit, chaque banque a besoin d’accroître ses fonds propres conséquemment. C’est justement cette augmentation qui joue sur la capacité des banques à distribuer des dividendes. Il faut d’ailleurs rappeler que c’est pour éviter que les banques américaines soient les seules confrontées à ce problème, faussant ainsi le jeu de la concurrence au profit des autres banques, que les américains ont plutôt voulu que la règle soit internationale. La diminution de la distribution de dividendes conduit à une perte d’attractivité des banques pour les investisseurs.
Le Comité de Bâle a fait une étude, qui consistait en une simulation effectuée sur la base des situations de deux cent douze (212) établissements financiers (en Europe). Selon cette étude, les banques auraient besoin de 485,6 milliards d’euros pour se conformer aux nouvelles normes de solvabilité de Bâle III’’172 Ce surcoût sera nécessairement répercuté par les établissements de crédit sur les emprunteurs. C’est pourquoi, Urs Ronher, le président de Crédit suisse, disait dans un discours : « Il est vital d’évaluer avec prudence comment une régulation plus stricte conduit à plus de sécurité, de stabilité du système et de confiance sans imposer trop de limites à la croissance économique».173
Les accords de Bâle ne sont pas seuls à avoir des limites, les autres normes prudentielles aussi en ont ; toute chose qui confirme les limites du contrôle interne prudentiel dans la zone.
Les limites des autres normes prudentielles
La principale limite des autres normes prudentielles est que celles-là ne sont pas des indicateurs de gestion. Il convient d’abord de saisir la notion d’indicateur de gestion (A) pour pouvoir comprendre l’inadéquation de ces normes prudentielles pour mesurer la performance (B).
La notion d’indicateur de gestion :
En dehors des accords de Bâle, les banques utilisent bien d’autres normes dans leur contrôle interne ; ce qui est tout à fait normal. Cependant, on reconnaît volontiers que ces normes ne sont pas des indicateurs de gestion. Un indicateur de gestion est un outil d’évaluation et d’aide à la décision grâce auquel on va pouvoir mesurer, à un instant donné et face à un objectif, une situation ou une tendance, de façon relativement objective174. Un indicateur de gestion est un pourcentage, une moyenne, un ratio, un taux ou une alerte face à des objectifs précis d’amélioration.
Pour bien maîtriser son entreprise, le manager doit disposer d’outils lui permettant de suivre l’évolution des différents volets de son activité. Ces outils, appelés aussi ‘‘indicateurs de performance’’ sont classés en plusieurs catégories dont il convient de voir deux (2) ici.
L’inadéquation des autres normes prudentielles pour mesurer la performance d’une banque :
Si l’on convient que la performance d’une banque est la progression de son résultat positif, on constate que la plupart des normes prudentielles ne peuvent servir à la mesurer.
L’une des plus belles illustrations de cette affirmation réside dans la règle de limitation des prêts aux dirigeants, aux principaux actionnaires et au personnel. Cette règle est instituée à juste titre, pour éviter la mainmise des personnes en question sur les ressources de la banque. Cependant, une banque qui n’a pas franchi le plafond fixé par cette règle n’est pour autant pas nécessairement une banque florissante. En d’autres termes, le fait pour un établissement de crédit de n’avoir pas prêté un centime ni à ses dirigeants, ni à ses principaux actionnaires ne signifie point qu’il fera un exercice bénéficiaire. Par conséquent, la règle de limitation des prêts ne donne aucune indication sur la santé financière de la banque ni sur sa performance. Il en va de même pour le contrôle des risques individuels. En effet, s’il est évidemment dangereux qu’une banque prête à un seul client au-delà de 75% de ses fonds propres, en revanche, il n’est pas certain qu’en n’atteignant pas ce seuil, l’établissement de crédit fera un bon résultat financier. La même observation vaut pour le contrôle des grands risques.
Si l’on reconnaît que les normes prudentielles sont des outils de gestion, mais qui ont quelques faiblesses intrinsèques, on admet, par voie de conséquence, que l’usage qu’on en fait ne donne pas un résultat parfait. Le contrôle interne prudentiel de l’activité bancaire dans l’UEMOA souffre alors des limites de la règlementation prudentielle, de façon générale, mais il en souffre d’autres qui lui sont propres.
Les limites propres au contrôle interne prudentiel dans l’UEMOA
En plus des faiblesses communes à toute règlementation prudentielle, il y en d’autres, propres au cas de l’UEMOA. Ces faiblesses concernent, d’une part, l’application des normes prudentielles internationales (I), d’autre part, les règles prudentielles communautaires (II).
Les limites relatives à l’application des normes prudentielles internationales
L’UEMOA applique certaines normes prudentielles qui peuvent être qualifiées d’ ‘‘internationales’’ puisqu’elles sont connues à travers le monde. Toutefois, les limites liées à cette application viennent du fait que l’UEMOA ait abandonné les taux habituellement connus de ces normes pour en choisir d’autres à sa mesure. C’est le cas pour le principe de la division des risques (A) et pour le coefficient de liquidité (B).
Les limites relatives à l’application du principe de la division des risques :
La division des risques comprend le contrôle des risques individuels c’est-à-dire celui des risques sur la tête d’un seul client ou sous une même signature (1) et celui du cumul de ces risques individuels, le contrôle des grands risques (2). L’application de chacune de ces deux (2) mesures prudentielles dans l’UEMOA connaît des limites.
Les limites relatives à l’application du contrôle des risques individuels :
Comme expliqué plus haut, ce principe cherche à éviter que la banque ne concentre ses crédits sur la tête d’un seul client (ou d’un petit nombre de clients) au risque de lui être dépendante ou que les éventuelles difficultés de ce client soient aussi celles de la banque.
Dans les règlementations internationales, le risque sur la tête d’un client est limité à 25% des fonds propres. Au sein de l’UEMOA, ce taux est triplé c’est-à-dire 75%. Nous n’avons trouvé un taux aussi souple dans aucune autre règlementation. Dans la CEMAC, par exemple, ce taux est de 45%176.
Pourtant, malgré ce taux dont la largesse est à la limite du raisonnable, toutes les banques au sein de l’UEMOA ne parviennent pas à s’y conformer. Son taux de satisfaction est de 71% pour l’année 2010, 61,61% pour l’année 2011 et de 72,38% pour l’année 2012177. Si, par hypothèse, la norme internationale de 25% devrait s’appliquer dans l’’UEMOA, il ne serait pas surprenant qu’aucune banque ne la satisfît. Il y a là l’une des manifestations des limites du contrôle de l’activité bancaire dans l’UEMOA.
Les limites relatives à l’application du contrôle des grands risques :
L’ensemble des risques importants que court une banque ne doit pas dépasser 800% de ses fonds propres. L’UEMOA a adopté ce taux international qui est déjà suffisamment grand.
Toutefois, elle a procédé à d’autres aménagements permettant de lui assouplir la règle. En effet, dans la règlementation européenne, par exemple, un risque individuel est considéré comme grand et classé comme tel dès lorsqu’il atteint 10% des fonds propres de la banque178. Dans l’UEMOA, ce taux est plus que doublé. Il est fixé à 25%. En d’autres termes, le risque n’est considéré comme grand que lorsqu’il atteint le quart des fonds propres de l’établissement de crédit.
Le pourcentage de banques satisfaisant cette norme s’établissait à 85% en 2010, à 83,8% en 2011 et à 80,95% en 2012179.
Malgré l’assouplissement apporté à cette norme internationale pour l’accommoder à la zone UEMOA, on constate que le nombre de banques qui la respectent décroît d’année en année. C’est réellement une limite au contrôle interne prudentiel et, par conséquent, au contrôle même de l’activité bancaire dans la zone.
Les autres limites relatives à l’application des normes prudentielles internationales :
Les faiblesses du contrôle interne de l’activité bancaire dans la sous-région ouest africaine se manifestent à travers d’autres limites relatives à l’application des normes prudentielles internationales. Elles concernent le coefficient de liquidité (1) et la couverture des emplois à moyen et long termes par des ressources stables (2).
Les limites liées à l’application du coefficient de liquidité :
Le coefficient de liquidité requiert des banques, dans l’UEMOA, des disponibilités suffisantes ou des emplois dont la durée résiduelle n’excède pas trois mois pour couvrir, à concurrence d’au moins 75%, leurs exigibilités de même maturité. Ce taux de 75% n’est pas rassurant. En effet, si une banque, dans l’UEMOA, peut se contenter d’avoir comme fonds disponible à une date donnée seulement 75% des fonds dont le paiement lui peut être demandé à la même date, la règle n’est pas du tout rassurante. En effet, l’objet de cette règle étant de permettre à la banque de faire face à un retrait massif de fonds, l’établissement de crédit n’est pas hors d’un risque de non-liquidité s’il ne dispose que de 75% des fonds exigibles. C’est pourquoi, dans bien de pays, comme la France, ce coefficient est d’au moins 100% (selon le Règlement n° 88-01 du 22 février 1988 du comité de régulation bancaire – ce règlement a été modifié plusieurs fois après-).
Bien que ce taux soit en deçà d’un quart de la norme largement rependue, les banques au sein de l’UEMOA ne parviennent pas toutes à le respecter. En 2010, dix-neuf (19) banques sur cent (100), en 2011, vingt (20) banques sur quatre-vingt-dix-neuf (99) et en 2012, trente et deux (32) banques sur cent cinq (105) ne satisfaisaient pas la norme180 ; toute chose qui confirme les limites du contrôle de l’activité bancaire dans l’UEMOA. En effet, l’autorité de contrôle reste impuissante devant la violation de cette norme. Les chiffres démontrent d’ailleurs que depuis 2010, cette violation va grandissant d’année en année.
Les limites relatives à la couverture des emplois à moyen et long termes par des ressources stables :
On reconnaît volontiers que cette norme est un important garde-fou contre le problème de liquidité des banques. En revanche, elle pose une énorme difficulté aux établissements de crédit. Pour Paul DERREUMAUX, le ratio de transformation représente, pour les banques ‘‘l’une des principales contraintes pour la composition et la taille de leur crédit à la clientèle’’181. En effet, plus ce taux est élevé, plus les banques sont limitées dans leur concours direct par rapport à la nature de leurs ressources, étant donné que, dans notre sous-région, ces ressources restent collectées majoritairement pour des périodes courtes. Ainsi se trouve entravé le développement du crédit aux entreprises et pour l’habitat.
Certes, il faut maîtriser la transformation par les banques des ressources à vue ou à termes courts en immobilisations car c’est cette opération qui est, d’après Mory DORÉ, ‘‘ la première cause de fragilité des banques’’182. Il est nécessaire de le faire pour éviter les crises financières systémiques. Cependant, il faut le faire de façon raisonnable afin de ne pas pénaliser fortement le financement de l’économie. C’est pour cette raison que la BCEAO a rabaissé le taux de 75% à 50% en décembre 2012. C’est pour cette même raison que son taux a été rabaissé dans la zone CEMAC aussi. En effet, le Règlement COBAC R-93/05 avait fixé le taux de couverture des immobilisations par des ressources permanentes à 100%, ce qui est tout à fait confortable, n’eussent été d’autres contraintes. Par la suite, à travers une nouvelle décision (le Règlement COBAC R-93/07), le taux a été abaissé à 50%.
Concernant son application dans la zone UEMOA, la règle est loin d’être satisfaite. En effet, en 2010, seul 65% des banques de la zone respectait la règle. En 2011, la norme était satisfaite par 61,6% des banques de la place ; un taux moins bon que celui de l’année précédente. En 2012, seulement 59% des banques parvenait à se conformer à cette règle. Donc visiblement, le taux de satisfaction de cette norme prudentielle dégradait d’année en année. On espérait qu’avec l’abaissement de son taux de 75% à 50%, le nombre de banque s’y conformant allait augmenter. Au contraire, c’est l’effet inverse qui s’est produit. En effet, c’est seulement quarante- six (46) banques sur cent huit (108) qui se conformaient à la règle en 2013, soit un taux de satisfaction de 42,59%.
En somme, la norme de couverture des emplois à moyen et long termes par des ressources stables est une sorte d’épée de Damoclès au-dessus de la tête du régulateur. Tout rehaussement de son taux est synonyme d’une plus grande sécurité pour les banques si ce taux est effectivement respecté. Toutefois, ce rehaussement signifie plus de difficultés de financement de l’économie par les banques. Par contre, chaque abaissement du taux équivaut autant de facilité de financement des entreprises par les banques, mais, en même temps, expose autant les établissements de crédit au risque de non-liquidité. En ramenant le taux à 50%, le régulateur bancaire a fait le choix du financement de l’économie au détriment d’une plus grande sécurité.
En dehors de ces normes prudentielles connues à l’échelle mondiale, l’UEMOA en applique d’autres qui ont une envergure seulement communautaire. Le contrôle de l’activité bancaire dans la zone connaît des limites liées à ces normes.
Les limites relatives aux normes prudentielles communautaires
Certaines normes prudentielles appliquées dans l’UEMOA ne sont pas connues comme des standards internationaux du type des accords de Bâle. Toutefois, elles peuvent exister dans d’autres communautés économiques (comme la CEMAC). Parmi ces normes prudentielles, il y a la représentation du capital minimum (A) et la limitation des prêts aux dirigeants, aux principaux actionnaires et au personnel (B).
Les limites relatives à la représentation du capital minimum
La représentation du capital minimum est une règle qui exige des établissements de crédit dans l’Union qu’ils détiennent à tout moment des fonds propres de base au moins égaux au capital minimum légal de cinq milliards ou au montant fixé dans la décision d’agrément. Sous d’autres cieux, cette règle ne figure pas parmi les normes prudentielles183. Elle est quand même connue comme étant une règle applicable aux sociétés dans lesquelles la responsabilité des apporteurs de fonds (futurs associés ou actionnaires) est limitée à leurs apports. Dans ces sociétés (la société anonyme et la société à responsabilité limitée, principalement), le capital social constitue le gage général des créanciers sociaux. C’est pour cette raison que ce capital doit rester intact. On parle de l’intangibilité du capital social. L’existence de cette règle dans le droit OHADA régissant les sociétés commerciales devrait permettre aux autorités bancaires de l’UEMOA de sanctionner toute banque qui ne s’y conforme pas.
Il y a des limites quant au choix de la représentation du capital minimum comme règle prudentielle applicable aux établissements de crédit dans l’UEMOA. En effet, dans cette règle, c’est le capital de la banque qui sert de repère. Il se trouve que ce capital est, lui-même, insuffisant. Depuis bien longtemps, les autorités bancaires dans l’UEMOA ont exprimé la nécessité de relever le plancher de ce capital. Initialement fixé à un milliard de francs CFA, les autorités cherchaient à le porter à dix milliards de francs CFA. Cependant, de nos jours, le capital minimal des banques dans la zone est fixé à cinq milliards de francs CFA. Ce nouveau montant, qui est l’équivalent de dix millions de dollars américains, est déjà bas et insuffisant lorsqu’on le compare à ceux qui sont fixés dans d’autres pays sur le continent. C’est ainsi qu’à Accra, le plancher de capital social d’une banque atteint trente millions de dollars américains184. Ā Lagos, il s’élève jusqu’à deux cent millions de dollars américains185. Dans la zone CEMAC, le capital minimal d’une banque est de dix milliards de francs CFA, ce qui constitue le double du plancher appliqué dans notre zone. Les banques dans l’UEMOA sont donc visiblement sous-capitalisées. Et cette situation ne permet pas de consolider la crédibilité des banques de la zone face à des besoins de financement en expansion rapide. Malgré ce plancher de capital social des établissements de crédit très bas, par comparaison, la règle de représentation du capital minimum n’est pas entièrement satisfaite dans la zone. En effet, en 2010, près d’un quart des banques (24 sur 100) ne respectait pas la règle ; en 2011, c’était 17 banques sur 99, en 2012, c’était 24 banques sur 105. Tout comme pour les autres normes prudentielles, l’on constate que celle de la représentation du capital social minimal est souple, mais que les établissements de crédit de la zone ne parviennent pas à la respecter de façon satisfaisante, toute chose qui met en exergue les limites du contrôle interne prudentiel dans la sous-région.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : LE CONTROLE DE L’ACTIVITE BANCAIRE DANS L’UEMOA, UN CONTROLE LIMITÉ
TITRE I: LES LIMITES DU CONTROLE INTERNE DE L’ACTIVITE BANCAIRE DANS L’UEMOA
Chapitre I : Les limites du contrôle interne tenant à la quasi-inexistence d’un contrôle de conformité
Chapitre II : Les limites du contrôle interne prudentiel
TITRE II : LES LIMITES DU CONTROLE EXTERNE DE L’ACTIVITE BANCAIRE DANS L’UEMOA
CHAPITRE I : LES LIMITES DU CONTROLE EXTERNE EXERCE PAR LA COMMISSION BANCAIRE
CHAPITRE II : LES LIMITES DU CONTROLE EXTERNE EXERCE PAR LES COMMISSAIRES AUX COMPTES
SECONDE PARTIE : LE CONTROLE DE L’ACTIVITE BANCAIRE DANS L’UEMOA, UN CONTROLE AMELIORABLE
TITRE I : LES PERSPECTIVES D’AMELIORATION DU CONTROLE INTERNE DANS LES BANQUES : L’ESQUISSE D‘UN CONTROLE DE CONFORMITE
CHAPITRE I : LA PREVENTION DE L’UTILISATION DES BANQUES À DES FINS
CRIMINELLES : L’AMORCE D’UN CONTROLE DE CONFORMITE
CHAPITRE II : LA PRISE EN COMPTE DES AUTRES ASPECTS DE LA CONFORMITE
TITRE II : LES PERSPECTIVES D’AMELIORATION DU CONTROLE EXTERNE DANS LES BANQUES
CHAPITRE I : L’AMELIORATION DU CONTROLE EXTERNE EXERCE PAR LA COMMISSION BANCAIRE
CHAPITRE II : L’AMELIORATION DU CONTROLE EXTERNE EXERCE PAR LES COMMISSAIRES AUX COMPTES
CONCLUSION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE
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