Les actions participatives des migrants
Ici, faudrait-il préciser que certains ménages ont mis en place des investissements économiques qui rapportent. Ils sont 36,1% à en avoir. Ceux qui en bénéficient, affirment à 47% qu’ils les ont acquis sur financement propre et que ceux qui en ont réalisés par le soutien des émigrés constituent un total 53%. En termes de contribution cela signifie que les migrants cherchent à mettre en place des stratégies d’autonomisation de certains membres de la famille en vue de voir se réduire le montant de la participation et ce faisant avoir des capacités d’épargne élargies et pouvoir se lancer dans d’autres investissements de plus ou moins grande dimension économique et sociale. Au finish, les ménages interrogés affirment à 45,1% qu’ils ont un soutien dans leur prise en charge… Autrement dit, ce n’est pas dans tous cas de figures que les migrants se lancent dans des investissements économiques de types familiaux pour un dessein inscrit dans la logique pure de recherche de fonds destinés à l’appui des ménages. Souvent leur soutien, à ce niveau, fait beaucoup défaut et sa contribution constitue ainsi l’exclusive source de revenus des familles.
La prépondérance de l’apport des migrants
Les enquêtes de terrain nous révèlent que 66,5% des familles vivent quasi exclusivement des revenus de la migration. Ils affirment que le membre ou les membres de la famille installée (s) à l’extérieur constitue le seul et unique soutien. Alors que seulement 33,5% ont, en dehors de celui du migrant, d’autres soutiens pour leur prise en charge. Le migrant intervient ainsi quasi mensuellement auprès de sa famille par l’envoi de fonds financiers. 99,4% des ménages qui ont été visités, révèlent qu’ils reçoivent de l’argent envoyé à partir de l’extérieur par les émigrés, alors que seulement 0,6% donne une réponse négative corroborée par l’explication faisant allusion au caractère très récent du départ du migrant.
Les investissements
Même si 7,4% des migrants n’ont encore rien réalisé en termes d’investissements retour, pour une raison ou pour une autre, on remarque que la plupart d’entre eux ont pensé faire des réalisations pour eux-mêmes et pour leur famille. Cependant la majorité de leurs actions d’investissement se conjugue avec les réalisations immobilières. Ainsi 67,2% d’entre eux ont déjà construit une maison, soit plus de la moitié du total des ménages interrogés. 11,6% ont jeté leur dévolu sur le commerce, pendant que 12,2% ont investi dans d’autres domaines, même si ces secteurs n’ont pas été portés à notre connaissance. L’agriculture reste le parent pauvre des actions d’investissement car n’arrivant à capter que seulement que 1,6% des sommes d’argent transférés et investies. Le constat qui se dégage ainsi est que les réalisations mises en place sont des structures légères ne nécessitant pas un financement colossal et ne présentant pas de gros risques de faillite qui compromettrait fatalement les possibilités de capitalisation financière. Certains migrants affirment s’informer d’abord sur les affaires financièrement rentables avant de s y investir, pour minimiser, disent-ils les risques de fiasco. Ainsi, 68,1% des migrants ont déjà construit une maison. D’autres beaucoup plus inspirés ont même pu avoir une maison dans un autre endroit. Ils sont 31%. Certains migrants ont même acquis dans leur pays de séjour des propriétés immobilières. Ils sont, au vu de nos enquêtes, 8,3% en valeur relative et 15 en valeur absolue et les ont acquises soit par achat (9 migrants) par don (03 migrants), par héritage (02 migrants) et autres (01). Cela prouve à ce niveau une adaptation et insertion de certains migrants dans leur pays d’adoption avec des possibilités de parler de migration durée de vie. Le temps pour entreprendre et arriver à la matérialisation de ses investissements varie selon les opportunités offertes aux migrants dans leur pays de séjour. Ainsi ceux qui ont des papiers réguliers ont contracté des prêts auprès de leur banque pour y arriver. Alors pour les autres moins intégrés faute de titre de séjour (sésame indispensable pour avoir un emploi rétribué suivant les normes législatives du marché européen du travail) mettront plus de temps à accomplir leur désir d’investir. Ainsi, la plus grande majorité des migrants a commencé à investir au bout d’un (01) et 3 ans avec des fréquences respectives de 16,5% et 17,2%. Alors que d’autres ont débuté leurs investissements à partir de la deuxième (2) année d’expatriation (15,2%), pendant que ceux qui ont investi au bout de cinq (05) ans de présence à l’extérieur constitue 13,8% de l’échantillon considéré. Les migrants ayant investi au bout de 7 et 8 ans font un pourcentage respectif de 6,9 et 4,8%. La durée de 6 ans et 10 ans concerne 3,4% et 4,6%. Les délais de 9 ans et 12 ans ont des pourcentages faibles (2,1%), de même que les 15 et 16 ans (0,7%). Pendant que ceux qui n’ont encore rien entrepris totalisent un pourcentage de 4,8%. Nonobstant ce désir de n’investir majoritairement que dans le domaine immobilier, les personnes enquêtées pensent à 53,3% que ces migrants pourraient cibler le commerce pour investir alors que d’autres privilégient les secteurs agro sylvo-pastorale et 15,7% d’autres types d’activités. Même si 26,2% continuent à penser que le seul investissement rentable qui vaille est celui effectué dans le domaine immobilier. Ces réalisations des migrants extérieurs mobilisent beaucoup de ressources financières, même si certains refusent à dire exactement ce que leur investissement a coute, les autres préfèrent donner des estimations difficilement quantifiables. D’autres enquêtés répondent a la question « combien environ avez-vous dépensé pour ce genre d’investissement » ? Réponse : « beaucoup d’argent » Mais ce que nous retenons, au sortir de nos enquêtes, c’est que les migrants mettent beaucoup d’argent dans ces investissements, comparativement au pouvoir d’achat des populations locales. A titre d’exemple, certains migrants, ont pour la réalisation de leurs investissements, mobilise, pour certains entre 5 et 10 millions, 20 et 30 millions, tandis que d’autres ont injecte 32 et 35 millions avec un pic a 50 millions. Cependant d’autres moins nantis ont mis en place des réalisations dont le cout se situe en deca de 5 millions c’est-à-dire 1,5 millions et 4,5 millions. Pourtant, ces migrants prennent en charge des familles bien nombreuses avec souvent des foyers totalisant jusqu’à 22 et 23 personnes pour la plupart sans ressources financières suffisantes. Ainsi toute l’entreprise de prise en charge de ces foyers revient au migrant qui constitue à cet égard la vache laitière et le bailleur social et financier des familles restes sur place. C’est ainsi que les dépenses obligatoires sont souvent issus des investissements réalisés qui viennent ainsi en renfort aux envois monétaires du migrant. 25,5% des familles des familles affirment que les dépenses et la consommation du ménage dépendent de l’investissement mis en place par le migrant extérieur. Ce qui est fort révélateur des difficultés pour investir des migrants.
Les initiatives de développement
Dans le quartier Médinatoul, la connaissance de l’existence d’association de migrants a donné des résultats contrastés. Si certains affirment que des mouvements associatifs « ModouModou » existent (au nombre de 16,4% des questionnés) ; d’autres (83,6%) disent ne pas connaitre l’existence d’associations de migrants. Ce qui signifie que les migrants ne sont pas dans une dynamique de regroupements associatifs connu des habitants du quartier. Autrement, les associations de migrants même si elles existent, n’ont pas une visibilité avérée. En effet, au total des personnes interrogées seules 29 ont répondu positivement sur un ensemble de 91 personnes ayant apporté une réponse à la question posées (existe-t-il des associations d’émigrés dans la localité ?). Parmi les personnes ayant répondu positivement, 21 affirment que ces associations existantes sont assez dynamiques, Cependant, l’analyse des réponses montre qu’en matière de réalisations, il n y a que des appuis financiers effectués auprès de certaines structures communautaires comme les mosquées (08 mosquées appuyées), les dispensaires (01 dispensaire appuyé), soutien aux Associations Sportives et Culturelles (09 Associations Sportives et culturelles soutenues), les cimetières (paiement des factures d’eau du cimetière de Médinatoul). La création de Groupements d’Intérêts Economiques ou de micro-entreprises, sur initiative et financement de « Modou- Modou » reste marginale. Au demeurant certaines initiatives portent l’empreinte de migrants, mais ce sont des entreprises familiales avec comme principale activité l’import-export ou encore la quincaillerie. Ici le migrant avec le développement de la conteneurisation envoie du matériel de seconde main à partir du pays de résidence pour alimenter en ressources le magasin le plus souvent géré par un membre de la famille.
Les obstacles à l’efficacité de la migration
Ce qui plombe les potentielles velléités d’investissement des migrants de Médinatoul à Diourbel, est le manque d’attractivité de la ville qui fait partie de l’une des plus en retard du Sénégal, économiquement parlant, avec des populations pauvres, qui cherchent d’abord à survivre. S’y ajoute également, le poids économique de Touba et son attractivité, qui participent à court-circuiter Diourbel en matière d’investissements économiquement productifs. Touba et Dakar constituent les deux destinations des investissements « ModouModou », parce qu’étant des localités où évolue une population à pouvoir d’achat assez considérable. C’est dans ces deux villes que les migrants extérieurs concentrent leurs investissements, souvent dans les domaines du foncier, de l’immobilier, du transport et du commerce. On peut ajouter à cette liste d’obstacles, l’absence d’information, au plan institutionnel, législatif ou réglementaire, en termes de niches d’investissements, de créneaux porteurs. Il y’a également le manque d’organisation aussi bien du côté des autorités que des migrants en dehors des efforts des associations des ressortissants et des membres de confréries dans les pays d’accueil, mais aussi le manque d’informations des Sénégalais de l’extérieur sur les structures, les procédures ainsi que les opportunités d’affaires. Dans une autre mesure, il y a le fait que, rares sont les migrants qui ont des projets dans le domaine de l’investissement, la plupart d’entre eux n’ont que des idées de projets du fait de leur manque d’instruction et de formation. Car investir obéit d’abord à des préalables parmi lesquels une certaine ingénierie et un minimum de management. Certains émigrés arguent également que les « ont dit » constituent un blocage à leur volonté d’investir. Souvent les populations considèrent que c’est parce qu’ils n’ont rien ramené de leur voyage qu’ils s’adonnent à des activités d’investissements dans le domaine du commerce. Certains vont même jusqu’à dire que c’est parce qu’ils sont à court d’argent qu’ils revendent les produits rapportés de leurs voyages retour. Preuve, pour eux, que la migration extérieure ne sert pratiquement pas à grand-chose. Ces stéréotypes font que certains migrants ne veulent plus s’investir dans le commerce ou à défaut préfèrent, compte tenu de ce fait, responsabiliser leurs épouses dans la prise en charge et la gestion de leurs investissements. Autre frein à l’investissement des migrants, c’est le problème de « confiance en l’Etat, aux institutions qui l’incarnent et à ses animateurs, manifestation d’une vieille suspicion des migrants, la plupart du temps illettrés… Sans compter, que le fait que les élites sont tenues pour responsable de la situation qui a conduit nombre de sénégalais sur les chemins de la migration internationale, même si le phénomène ne date pas d’aujourd’hui ».
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Table des matières
Objectif général
Objectifs spécifiques
Objectif spécifique 1
Hypothèse générale
Hypothèse spécifique 2
REVUE CRITIQUE DE LA LITTERATURE
CADRE CONCEPTUEL
METHODOLOGIE DE RECHERCHE
1) La recherche documentaire
2) La collecte des données sur le terrain
3) Le traitement des données
4) L’analyse des données
5) Les difficultés rencontrées
INTRODUCTION GENERALE
PRESENTATION DU CADRE DE L’ETUDE
PREMIERE PARTIE : PRESENTATION GENERALE DE LA COMMUNE DE DIOURBEL
I -LE CADRE GENERAL
II- LE NIVEAU D’EQUIPEMENTS DE LA COMMUNE
III – LA PRESENTATION HUMAINE
1) Estimation de la population
2) Evolution démographique
3) Les caractéristiques sociodémographiques
4) Les activités économiques
DEUXIEME PARTIE : STYLE DE VIE ET CARACTERISTIQUES SOCIODEMOGRAPHIQUES DES MENAGES
CHAPITRE I : PRESENTATION DU QUARTIER MEDINATOUL
A) HISTORIQUE ET PARTICULARITE DU QUARTIER
1) Historique
2) Particularité du quartier
B) LE STYLE DE VIE DES HABITANTS DE MEDINATOUL
CHAPITRE II : CARACTERISTIQUES SOCIODEMOGRAPHIQUES DES MENAGES
A) L’IDENTIFICATION DES ENQUÊTES
1) Le sexe et l’âge
3) Lien avec le migrant et profession
2) Les pays de destination
3) Situation dans la famille et durée migratoire
4) Occupation professionnelle et niveau d’instruction des migrants
B) LES MOTIVATIONS DE LA MIGRATION
1) Des raisons personnelles et spécifiques
2) Les autres raisons
3) Le niveau de revenu familial d’avant migration
TROISIEME PARTIE : MODE DE FINANCEMENT DE L’EMIGRATION, LES FLUX DE TRANSFERTS ET LEURS UTILISATIONS
CHAPITRE I : PROFIL DES MIGRANTS, PRISE EN CHARGE DES MENAGES ET FINANCEMENT DU VOYAGE EXTERIEUR
B) LE FINANCEMENT DU VOYAGE, L’APPUI D’UN TIERS
CHAPITRE II : LES FLUX DE TRANSFERTS ET LEURS UTILISATIONS
A) LES FLUX DE TRANSFERTS
B) LES CANAUX DE TRANSFERTS MONETAIRES
C) LES MONTANTS TRANSFERES
D) LES UTILISATIONS DES TRANSFERTS
1) Pour les familles
2) L’équipement des ménages
3) Les domaines d’investissement ciblés des migrants
A) LES CONTRIBUTIONS SOCIO-ECONOMIQUES DES MIGRANTS
1) Les actions participatives des migrants
2) La prépondérance de l’apport des migrants
B) LES INVESTISSEMENTS ET LES INITIATIVES DE DEVELOPPEMENT
1) Les investissements
1) Les initiatives de développement
QUATRIEME PARTIE : MIGRATIONS INTERNATIONALES ET DEVELOPPEMENT
CHAPITRE I : REFLEXION CRITIQUE SUR L’EFFICACITE DE LA MIGRATION EXTERIEURE A MEDINATOUL
A) TRAITS CARACTERISTIQUES DE LA MIGRATION « MODOU-MODOU » DE MEDINATOUL
1) Les obstacles à l’efficacité de la migration
2) Des propositions de réorientation de la migration internationale
a) Au niveau national
b) Au niveau local
3) Une nouvelle donne : La crise financière mondiale et les politiques migratoires restrictives
a) La crise financière mondiale
b) Les politiques migratoires restrictives
CHAPITRE II : LES MIGRANTS DE MEDINATOUL SONT-ILS DES ACTEURS DE DEVELOPPEMENT A LA BASE ?
A) LES CHANGEMENTS APPORTES PAR LA MIGRATION
B) PORTEES SOCIALES ET ECONOMIQUES DE L’INVESTISSEMENT RETOUR DES MIGRANTS
C) CONTRAINTES DES MENAGES
CONCLUSION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE
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