Les incompatibilités foeto-maternelles
Introduction
L’ictère néonatal a été décrit d’abord dans des manuels chinois il y’a 1000 ans, et dès le 18 ème- 19 ème siècle dans des thèses médicales, des essais et des manuels. En 1875 Orth décrit pour la première fois l’ictère nucléaire. Les particularités du métabolisme de la bilirubine chez le nouveau-né expliquent la grande fréquence avec laquelle survient, à cet age de la vie, un ictère. Habituellement, l’hyper bilirubinémie non conjuguée reflète un phénomène normal de transition, sans gravité ni conséquence. Cependant elle peut être grave lorsqu’elle est à forte concentration sérique et mettre ainsi le nouveau-né en danger par le biais de la neurotoxicité. La bilirubine provient de la dégradation de l’hème contenu dans l’hémoglobine et les hémoprotéines. Cette transformation de l’hème résulte de réactions enzymatiques mettant principalement en jeu l’hème oxygénase et la bilirubine réductase. La bilirubine est un pigment hydrophobe, toxique, qui circule dans le sang sous forme liée à l’albumine. La fraction non conjuguée et non liée à l’albumine est potentiellement neurotoxique. Au niveau hépatique la bilirubine est captée et peut être liée à la ligandine. Ensuite arrive l’étape de la glucuroconjugaison puis les dérivés mono ou diglucuroconjugués de la bilirubine sont éliminés dans la bile. Contrairement à l’adulte, l’ictère du nouveau-né est dans l’immense majorité des cas, à bilirubine indirecte. Son incidence élevée trouve plusieurs explications : En intra-utérin, la bilirubine produite est conjuguée et épurée par le foie maternel; après la naissance, il faut quelques jours pour que les mécanismes d’épuration propre du nouveau-né parviennent à équilibrer la production de ce pigment; pendant ce temps, la bilirubine s’accumule dans l’organisme, entraînant un ictère cutané (muqueux et conjonctival) et une hyper bilirubinémie indirecte. L’ictère néonatal : Expérience du CHU Mohammed VI Chez le nouveau-né, la production de bilirubine est accrue car la masse totale de l’hémoglobine est importante et la durée de vie des hématies est plus courte. La bilirubine qui circule dans le sang fixée à l’albumine, peut être déplacée de sa liaison par des situations fréquentes telles l’acidose ou l’utilisation de médicaments interférant dans la liaison bilirubine- albumine ; de plus , l’hypo albuminémie n’est pas exceptionnelle en période néonatale, surtout chez le prématuré. Au niveau hépatique, la synthèse de la ligandine n’apparaît qu’au cours des premiers jours de vie, favorisant le reflux hépatique de la bilirubine non conjuguée et contribuant à l’élévation de la bilirubinémie plasmatique. Certaines molécules tel que le Phénobarbital augmentent la concentration de la ligandine. Par ailleurs l’activité de la bilirubine glucuronosyltransférase est basse à la naissance et ne va s’accroître que progressivement au cours des premières semaines de vie, surtout chez le prématuré mais aussi par l’inhibition de ce système enzymatique dans certains cas de l’allaitement au sein; cette activité enzymatique peut être favorisée par certains médicaments (Phénobarbital, Dexamethasone, Clofibrate). L’absence initiale de flore bactérienne dans le tube digestif du nouveau-né ne permet pas de dégrader la bilirubine conjuguée. Certains facteurs présents dans le lait maternel contribuent à l’accroissement de la circulation entero-hépatique de la bilirubine. Les données suggèrent que le risque d’ictère du lait maternel est significativement augmenté chez les nouveaux-nés qui ont des polymorphismes génétiques dans les séquences codantes de gènes UDPGT1A1 ou OATP2. Bien que le mécanisme qui provoque ce phénomène n’est pas encore élucidé. Ce pigment en s’accumulant dans l’organisme va intéresser tous les organes, mais surtout le fois, le sang, la peau, et le cerveau avec risque potentiel constant d’ictère nucléaire qui justifie la plus grande rigueur dans la conduite diagnostique et thérapeutique.
Epidémiologie Fréquence
L’ictère néonatal est un symptôme qui reste très fréquent puisque la littérature médicale le rapporte chez environ deux tiers des nouveaux-nés et l’étude du CHU Rabat le retrouve chez plus d’un quart des patients hospitalisés [5], ce qui est le cas dans notre étude. On estime que 60 % des nouveaux-nés à terme font une jaunisse et que 2 % atteignent une concentration de BST supérieure à 340 µmol/L [6,7]. C’est l’ictère à bilirubine libre contrairement aux cholestases néonatales qui reste plus fréquent [4]. Son incidence est mal connue en raison des difficultés de définitions, de la variabilité selon les origines géographiques, des taux d’allaitement maternel, des groupes sanguins et des sorties précoces des maternités. L’incidence est plus élevée dans l’Est asiatique et chez les Indiens de l’Amérique et basse chez les Afro-Américains. Elle est estimée à 8.8 % des hospitalisations pendant 2 ans entre 2002 et 2003 dans le CHU HASSAN II de Fès [8]. Elle est de 6,5 ℅ dans le département de pédiatrie de l’hôpital Nehru lors d’une étude incluant 551 nouveaux-nés entre 1994 et 1995 [9]. Les Grecs vivant en Grèce ont une incidence plus élevée que celles d’origine grecque vivant en dehors de la Grèce. L’incidence est plus élevée dans les populations vivant à haute altitude. Un taux d’incidence aux Royaume-Uni en 2001 était de 5,5 ictères pour 1000 naissances vivantes (B>350 umol/l) [10]. Au Danemark, en 2000-2001, une incidence de 25 pour 100 000 naissances était notée pour des ictères sévères au-delà de 385 umol/l [11]. Aux USA, en 1995-1996, des taux de 20 pour 1000 naissances étaient rapportés pour des B> 350 umol/l, de 1,5 pour 1000 naissances des B> 430 umol/l et de 10 pour 100 000 naissances pour des B > 500 umol/l [12]. L’ictère néonatal : Expérience du CHU Mohammed VI Dans notre étude 363 cas ont présentés l’ictère sur 1439 soit 25.2 % des cas hospitalisés. Ils ont été hospitalisés soit pour un ictère cutanéo- muqueux soit pour un autre problème de santé et qui ont présenté l’ictère au cours de leurs hospitalisations. De nombreux progrès tels qu’un meilleur suivi des grossesses et donc du dépistage de l’allo-immunisation rhésus ou l’amélioration des appareils de photothérapie ont fait croire que l’ictère nucléaire était une pathologie du passé. Mais récemment des publications anglosaxones [13, 14] ont rapporté un nombre croissant d’ictères nucléaires, y compris chez le nouveau né à terme. Les raisons en sont probablement multiples, mais la principale semble être la généralisation des sorties très précoces avant 48 heures voir 24 heures sans réseau de soins corrects à domicile. D’autant plus que la prise en charge de l’ictère chez le nouveau-né à terme est loin d’être univoque entre les équipes comme le montre une étude de Hansen en 1996 [15].
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Table des matières
INTRODUCTION
MATERIEL ET METHODES
Matériel et méthodes
RESULTATS
I- Epidémiologie 1-Le sexe
2- La profession du père
3-L’origine géographique
4- Niveau socio-économique
5- L’age à l’admission
II- Enquête anamnestique
1-Cansanguinité
2- Suivi de la grossesse
3-Groupage de la mère
4- Pathologies liées à la grossesse
5- Accouchement
5-1 Lieu d’accouchement
5-2 Mode d’accouchement
6- Etat à la naissance
6-1 Age gestationnel
6-2 Apgar
III- Etude clinique
1-Délai d’apparition de l’ictère
2- Signes cliniques associés
2-1 Signes neurologiques
2-2 Signes digestifs
2-3 Syndrome malformatif
2-4 Signes respiratoires
2-5 Signes hémorragiques
2-6 Signes cutanés
IV- Etude paraclinique
1- Hémogramme
2- Dosage de la bilirubine
3- Taux de bilirubine libre
4- Groupage du nouveau-né
5- BACTERIOLOGIE
6- Dosage de la CRP
7- TSH-T4
8- Bilan radiologique
9- Sérologie syphilitiqueV – Etiologies
VI- Traitement
DISCUSSION
I – Introduction
II – Epidémiologie
1- Fréquence
2- 2- Sexe
III- Diagnostic étiologique
1- Apport de la clinique
2- 2- Apport de la biologie
3- 2-1 Bilirubine plasmatique
2-2 Test de coombs direct
2-3 Test de coombs indirect
2-4 Hémogramme
2-5 C-Réactive Proteine
2-6 Radiologie
3- Etiologies
3-1 Ictère précoce
3-1-1 L’infection néonatale
3-1-2 La prématurité
3-1-3 L’ictère physiologique
3-1-4 Les incompatibilités foeto-maternelles
3-1-5 L’ictère au jeun
3-2 Ictère prolongé
3-2-1 Les ictères liés à une hyperproduction de bilirubine
3-2-2 Les ictères liés à un déficit transitoire de la captation, du
transport ou de la conjugaison de la bilirubine
3-2-3 Les ictères liés à un déficit constitutionnel et permanent de la
glucuro-conjugaison de la bilirubine
IV- Prise en charge thérapeutique
1-Photothérapie
2- 2- Exsanguino-transfusion
2-1 Indications
2-2 Effets secondaires
3- Perfusion d’albumine
4- Les inhibiteurs de la synthèse de la bilirubine
5- Traitement pharmacologique
V- Evaluation de l’évolution et complications
1- Surveillance
2- Complications
VI- Dépistage et prévention
CONCLUSION
ANNEXES
RESUMES
BIBLIOGRAPHIE
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