La flore malgache est unique par sa richesse, sa diversité et son endémicité. Il existe 14000 espèces sur une superficie de 590000 km2 . Huit familles botaniques entières, 25% des genres et 80% en espèces ne se trouvent nulle part ailleurs qu’à Madagascar (Pernet et Meyer, 1957 ; Rasoanaivo, 1999). Malgré le nombre croissant d’études sur cette biodiversité végétale, nombreuses sont les espèces qui n’ont pas encore fait l’objet d’étude approfondies. Actuellement, plusieurs chercheurs se penchent sur la flore endémique de Madagascar afin d’une part, d’en approfondir la connaissance scientifique et d’autre part, de sauvegarder quelques espèces menacées ou en voie de disparition.
En effet, depuis toujours, les vertus médicinales des plantes médicinales et des HEssont connues et utilisées partout, notamment dans les pays en développement comme Madagascar où ces produits naturels constituent la base de la médecine traditionnelle (Turbide, 2010). Plusieurs recherches scientifiques le confirment : certaines peuvent être analgésiques, calmantes, cicatrisantes, alors que d’autres sont bactéricides, fongicides, virucides, antiparasitaires ou immunostimulantes. Par conséquent, en pharmacie, les HEs sont majoritairement destinées à l’aromatisation des formes médicamenteuses et à la production d’antiseptiques. En effet, de nos jours, près de 3000 HEs sont décrites, parmi lesquelles environ 300 présentent une importance commerciale dans le cadre d’applications pharmaceutiques, cosmétiques, alimentaires, agronomiques ou dans le domaine de la parfumerie (Tajkarimi et al., 2010).
Les huiles essentielles (HEs)
Définition
Les huiles essentielles sont des mélanges de substances aromatiques produites par de nombreuses plantes aromatiques et présentes dans les feuilles, la peau des fruits, la résine, les branches, le bois, etc… (Erman, 1985) Selon l’encyclopédie Larousse, le terme essence désigne « le principe volatile et aromatique sécrété par des cellules spécialisées de certains végétaux ». Dans la pratique, essence est synonyme d’HE qui est, par définition, un mélange de produits volatiles et odoriférants contenus dans les plantes aromatiques. Généralement, les plantes aromatiques synthétisent naturellement les huiles dans des cellules sécrétrices qui contiennent de la chlorophylle. Les huiles sont ensuite transportées dans d’autres parties lors de la croissance de la plante. Actuellement, leur utilisation en médecine naturelle, en parfumerie et en alimentation est considérablement accrue ; c’est pourquoi certains organismes de normalisation AFNOR NF T 75-006, ISO et la Commission de la Pharmacopée Européenne ont donné une définition beaucoup plus précise de l’HE : « produit odorant, généralement de composition complexe, obtenu à partir d’une matière première végétale botaniquement définie, soit par entraînement à la vapeur d’eau, soit par distillation sèche, soit par un procédé mécanique approprié sans chauffage. L’HE est le plus souvent séparée de la phase aqueuse par un procédé physique n’entraînant pas de changement significatif de sa composition ».
Cette définition détermine les HEs au sens strict. Mais, elle écarte les produits obtenus, à partir de la matière végétale, par d’autres procédés d’extraction, comme l’utilisation de solvants organiques (Carette, 2000). Ainsi nous pouvons définir autres types de produits :
Concrète : extrait à odeur caractéristique, obtenu à partir d’une matière première fraîche d’origine végétale, par extraction par un solvant non aqueux, nommé aussi essence concrète ou essence ;
Résinoïde : extrait à odeur caractéristique, obtenu à partir d’une matière première sèche d’origine végétale, par extraction par un solvant non aqueux ;
Pommade florale : corps gras parfumé obtenu à partir de fleurs, soit par enfleurage à froid (par diffusion des constituants odorants des fleurs dans le corps gras), soit par enfleurage à chaud (par digestion ou immersion des fleurs dans le corps gras fondu) ;
Absolue : produit à odeur caractéristique, obtenu à partir d’une concrète, d’une pommade florale ou d’un résinoïde par extraction par éthanol à température ambiante. Pour certains auteurs, il est important de distinguer essences et HEs:
Essence : sécrétion naturelle élaborée par l’organisme végétal, contenue dans divers types d’organes producteurs, variables selon la partie de la plante considérée.
Huile essentielle : extrait naturel de matières premières d’origine végétale, obtenu par distillation par la vapeur d’eau, c’est-à-dire que l’HE est l’essence distillée.
Historique (Franchomme et al., 1990)
L’utilisation des HEs remonte aux plus anciennes civilisations : tout d’abord dans l’Orient et le Moyen Orient, la suite au nord de l’Afrique et en Europe Entre 3 000 et 2 000 ans avant notre ère, les Égyptiens faisaient un usage important des plantes aromatiques et aussi des plantes pour soigner les malades. En 1 000 ans avant notre ère, les Perses semblaient être les premiers à utiliser l’hydrodistillation. Puis, les Arabes ont apporté une amélioration significative dans la chimie et dans la distillation des huiles. Et vers la fin du XVI ième et du XVII ième siècle, plus de 100 HEs sont utilisées. En 1928, le chimiste français René-Maurice Gattefosse a utilisé le terme aromathérapie pour décrire les propriétés curatives des HEs lorsqu’il a découvert par accident que la lavande a guéri une brûlure à sa main. En 1964, le docteur français Jean Valunet a connu du succès en traitant des patients en médecine et en psychiatrie. Concernant Madagascar, Gattefossé est le premier à publier en 1921 un article sur l’inventaire des plantes aromatiques de Madagascar qui, deux années plus tard, a été complété par Perrier de la Bathie en 1923. Ensuite, une compilation des plantes aromatiques a été faite récemment par Rakotovao en 1996. Actuellement, à Madagascar environ 71 espèces aromatiques sont exploitées, dont 30 sont endémiques. La production d’HE dans la grande île est actuellement en plein essor.
Localisation des huiles essentielles dans la plante
Selon, Narishetty et Panchagnula (2004), les HEs peuvent être considérées comme des débris du métabolisme végétal. Suite à la photosynthèse au niveau des chloroplastes, l’énergie produite (sous forme de glucides, NADPH et d’ATP) contribue au développement de la plante et indirectement à la biosynthèse de multiples composés secondaires parmi elles, les huiles essentielles.
Elles sont localisées dans le cytoplasme de certaines cellules végétales sécrétrices qui se situent dans un ou plusieurs organes de la plante (Fekam, 1992 ; Bruneton, 1993 ; Clarenton, 1999) à savoir :
➤ Les poils sécréteurs (Lamiaceae) ;
➤ Les cellules épidermiques (Lauraceae…) ;
➤ Les cellules sécrétrices internes (Zingiberaceae, Lauraceae…) ;
➤ Les poches sécrétrices (Myrtacées, Rutacées…) ;
➤ Les canaux sécréteurs.
Propriétés physiques des huiles essentielles
Les HEs sont solubles dans les solvants organiques comme l’alcool, l’éther et les huiles fixes. La nature huileuse des HEs, les rend liposolubles mais insoluble dans l’eau. Elles sont généralement incolores ou jaune pâle. Les essences sont liquides à température ambiante. Elles ont une densité inférieure à celle de l’eau, à l’exception de quelques cas (cannelle, sassafras et vétiver). Elles ont un indice de réfraction et un pouvoir rotatoire très élevés. Les HEs sont extrêmement volatiles et sensibles à l’oxydation. Elles ont tendance à se polymériser en donnant lieu à la formation de produits résineux ce qui conduit à la perte de leurs propriétés (Baser et Buchbauer, 2010).
Composition chimique des huiles essentielles
Les HEs constituent des mélanges complexes de composés organiques possédant des structures et des fonctions chimiques très diverses. Ainsi, par l’analyse instrumentale moderne (chromatographie gazeuse capillaire, couplage chromatographie gazeuse – spectrométrie de masse), il n’est pas rare de reconnaître plusieurs dizaines voire une ou deux centaines et parfois plus de constituants dans une HE (HEs de vétiver, de patchouli, de géranium) (Bruneton, 1999). Par contre, certaines huiles ne contiennent que quelques composés. Enfin, les propriétés odorantes de ces huiles sont souvent sous l’influence de plusieurs composés qui ne sont présents qu’à de très faibles proportions. L’ensemble de ces composés peut être divisé en deux grands groupes d’origine biogénétique spécifique : les terpènes et les composés aromatiques (Bruneton, 1993).
Terpènes
Les terpènes sont des hydrocarbones naturels, de structure soit cyclique soit à chaîne ouverte : leur formule brute est (C5HX)n dont le « X » est variable en fonction du degré d’insaturation de la molécule et « n » peut prendre des valeurs (1-8) sauf dans les polyterpènes qui peut atteindre plus de 100 (le caoutchouc). La molécule de base est l’isoprène de formule C5H8 . Le terme terpénoïde désigne un ensemble de substances présentant le squelette des terpènes avec une ou plusieurs fonctions chimiques (alcool, aldéhyde, cétone, acide, lactone, etc.). Dans le règne végétal, les tetrpénoïdes sont classés dans la catégorie des métabolites secondaires (avec les flavonoïdes et les alcaloïdes).
Monoterpènes
Plus de 900 monoterpènes sont connus. Et, ils se trouvent principalement dans 3 catégories structurelles : les monoterpènes linéaires (acyclique), les monoterpènes avec un cycle unique (monocycliques) et ceux avec deux cycles (bicycliques) (Bruneton, 2008). Grace à la réactivité des cations intermédiaires de ces terpènes, elles peuvent être rattachées à un certain nombre de molécules.
Sesquiterpènes
Il s’agit de la classe la plus diversifiée des terpènes puisqu’elle contient plus de 3000 molécules. Les sesquiterpènes se divisent en plusieurs catégories structurelles, acyclique, monocyclique (zingibérène..), bicyclique, polycyclique (caryophyllène). On trouvera également des sesquiterpènes aves des fonctions chimiques caractéristiques : alcool (farnésol, carotol), carbures (β-caryophyllène), cétones, ester.
Diterpènes
Il existe environ 2700 diterpènes dans la nature dont la majorité est sous forme cyclique. Parmi les diterpènes linéaires, on rencontre la famille Phytane dont le phytol est le représentant le plus connu dans la chlorophylle ou dans les vitamines K et E. Les diterpènes cycliques sont des dérivés de cyclophytane . Le rétinol et le rétinal, deux formes de la vitamine A sont les plus connus dans cette famille.
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
SYNTHESE BIBLIOGRAPHIQUE
1. Les huiles essentielles (HEs)
1.1. Définition
1.2. Historique
1.3. Localisation des huiles essentielles dans la plante
1.4. Propriétés physiques des huiles essentielles
1.5. Composition chimique des huiles essentielles
1.6. Les facteurs de variabilité de la composition chimique des huiles essentielles
1.7. Utilisations des huiles essentielles
1.8. Activité biologique des huiles essentielles
1.9. Toxicité des huiles essentielles
1.10. Situation économique des huiles essentielles
1.11. Les techniques d’extraction de hulle essentielle
2. Matériel d’étude
2.1. Localisation et répartition géographique
2.2. La famille des Lauraceae
2.3. Le genre Ocotea
2.4. Description botanique de l’espèce auriculiformis Kost
2.5. Position systématique
CHAPITRE I : ETUDE PHYSICO-CHIMIQUE ET ANALYTIQUE DES HUILES ESSENTIELLES d’Ocotea auriuliformis Kost
I.1. Introduction
I.2. Matériels et méthodes
I.2.1. Echantillonage du matériel vegetal
I.2.2. Enquêtes ethnobotaniques
I.2.3. Extraction des huiles essentielles
I.2.4. Calcul de rendement
I.2.5. Etude de la cinétique de rendement
I.2.6. Caractérisation organoleptique et physico-chimique
I.2.7. Caractéristiques organoleptiques
I.2.8. Détermination de la composition chimique des huiles essentielles
I.3. Résultats
I.3.1. Extraction des huiles essentielles
I.3.1.1. Calcul du rendement en HE des différents organes
I.3.1.2. Cinétique d’extraction de l’huile essentielle des deux organes de l’Ocotea auriculiformis Kost
II.3.4. Propriétés physico-chimiques des huiles essentielles
II.3.5. Propriétés organoleptiques des huiles essentielles
I.3.6. Composition chimique des huiles essentielles
I.4. Discussion
I.4. Conclusion
CHAPITRE II : ETUDE BIOLOGIQUE DES HUILES ESSENTIELLES D’Ocotea auriculiformis Kost
II.1. Introduction
II.2. Activité antimicrobienne
II.2.1. Introduction
II.2.2. Matériels et méthodes
II.3. Activité antioxydante
II.3.1. Introduction
II.3.2. Matériels et méthode d’évaluation de l’activité antioxydante
II.4. Résultats
II.5. Discussion
II. 6. Conclusion
CHAPITRE III : TOXICITE DES HUILES ESSENTIELLES d’Ocotea auriculiformis Kost
III.1. Introduction
III.2.1. Activité anti-moustique
III.2.1. 1. Introduction
III.2.1.2. Moustiques
III.2.1.3. Caractéristique du gîte larvaire
III.2.1.4. Méthode d’évaluation larvicide des huiles essentielles d’Ocotea auriculiformis Kost
III.2.2.Toxicité aigüe
III.2.2.1. Les animaux de laboratoire
III.2.2.2. Méthode d’évaluation de la toxicité aigüe
III.2.3. Toxicités cutanées
III.3. Résultat
III.4. Discussion
III.5. Conclusion
CONCLUSION GENERALE