Les freins à la réalisation des interruptions volontaires de grossesse en médecine générale

En 2017, Simone Veil, Ministre de la Santé, armée de sa « conviction de femme » à la tribune de l’Assemblée en 1974, qui s’est battue pour légaliser l’interruption volontaire de grossesse (IVG), nous quitte et remet sur le devant de la scène le droit à l’IVG et ses inégalités de pratique en France. Depuis 1870 et pendant de nombreuses décennies, le droit à l’IVG est un sujet grandement controversé. En 1950, la création du planning familial remet en question les droits des femmes en termes de maternité. La 1ère loi autorisant la contraception apparaît en 1967 et représente une grande avancée pour les femmes, qui peuvent désormais contrôler leurs grossesses. C’est enfin en 1975 que la loi Veil est votée et rend légale l’IVG (1). Il faudra attendre l’année 1982 pour que cette dernière devienne gratuite et l’année 2004 pour que sa pratique soit autorisée au médecin généraliste (2)(3). Toutefois, ce dernier n’est pas dans l’obligation de prescrire une IVG en cabinet de ville, même si une patiente le lui demande, une clause de conscience prévue par la loi le rend libre de s’y refuser s’il le souhaite (4). On constate que depuis sa légalisation, le taux d’IVG stagne. D’après la DREES (organisme chargé des statistiques au ministère de la Santé), 211900 IVG ont été réalisées en 2016 en France. Ce taux est globalement stable depuis 2006. (5)

La méthode médicamenteuse augmente au fil des ans et concerne 64% des IVG en 2016 soit 135600 IVG, contre 47% en 2006. Sa prescription exclusivement hospitalière jusqu’en 2004 s’est désormais étendue aux médecins généralistes (et aux sages-femmes), de plus en plus nombreux à le pratiquer certes, mais insuffisants tout de même face aux établissements de santé publics surchargés et aux établissements privés qui s’en désintéressent progressivement. En 2016, 17 % des IVG ont été réalisées en cabinet libéral en France, soit 38200 IVG au total ce qui correspond à 30% des IVG médicamenteuses.

La répartition des IVG est inégale en France, allant du simple au double selon les régions : de 10,3 IVG pour 1 000 femmes en Pays de la Loire à 20,1 IVG en Provence-Alpes-Côte d’Azur en 2016 pour les femmes entre 15 et 49 ans. De même, la répartition des IVG réalisées en cabinet libéral est également répartie inégalement en France et concerne 3% des IVG en Pays de la Loire ,6% dans le Grand-Est, contre 24 % des IVG en ProvenceAlpes-Côte d’Azur et plus d’une IVG sur quatre en Île-de-France et dans les DROM. On constate donc que l’IVG médicamenteuse n’est encore que peu prescrite en ville, bien que la prise en charge soit parfaitement adaptée à cette pratique. C’est ce que montre une étude descriptive réalisée en 2011 en France et concernant 15447 IVG médicamenteuses réalisées par des médecins généralistes ou par des gynécologues en ville. Le taux d’efficacité global des IVG médicamenteuses est égal à 97,43% (96,48% pour les gynécologues, 96,44% pour les médecins généralistes). L’IVG médicamenteuse précoce à la maison est donc une méthode fiable, et il n’existe pas de différence significative sur le plan de son efficacité qu’elle soit réalisée par un gynécologue ou par un médecin traitant (6). La prescription d’IVG médicamenteuses en ville est soumise à certaines règles. Elle n’est possible que jusqu’à 7 semaines d’aménorrhée, soit 5 semaines de grossesse. Elle ne peut avoir lieu que dans le cadre d’une convention, conforme à une convention type validée par décret conclue entre le praticien d’une part, et un établissement de santé, public ou privé, d’autre part. L’échographie avant une IVG doit être encouragée ainsi que le dosage des HCG sanguins, mais pour les femmes certaines de la date de leurs dernières règles et/ou de la date du rapport sexuel à risque, pour lesquelles un examen clinique par un professionnel de santé formé est possible, l’absence d’accès à l’échographie de routine ne doit donc pas être un frein à la programmation de l’IVG demandée (7). De plus, compte tenu de la précocité de la réalisation de l’IVG en médecine générale, la grossesse peut ne pas être visible à l’échographie, ce qui ne contre-indique pas pour autant le bon déroulement de l’IVG médicamenteuse. C’est ce que démontre une étude réalisée à Vienne en Autriche entre 2004 et 2014, et à Göteborg en Suède entre 2012 et 2015 incluant 2643 femmes subissant une IVG médicamenteuse dans un délais inférieur à 49 jours de grossesse. 2 cohortes ont été créées : les femmes pour qui la grossesse était visible à l’échographie, et les femmes pour qui elle ne l’était pas encore. 97,1% des IVG médicamenteuses réalisées dans la première cohorte ont réussi et 98,2% des IVG médicamenteuses de la deuxième cohorte ont également été réalisées avec succès (p< 0,077). Il n’y a donc pas de différence significative entre les IVG médicamenteuses réalisées avant la visualisation de la grossesse à l’échographie ou après que celle-ci ne le soit (8). Le déroulement de l’IVG médicamenteuse suit un protocole précis. Trois consultations sont nécessaires et comprises dans le forfait fixé par la sécurité sociale. Lors de la première consultation médicale, le professionnel de santé informe la patiente du déroulement de l’IVG et des complications possibles (9). Un entretien psycho-social est systématiquement proposé aux femmes, il est obligatoire pour les jeunes filles mineures non émancipées. Lors de la deuxième consultation, le médecin délivre à la patiente le premier médicament, un antiprogestatif nécessaire à interrompre la grossesse: la Mifépristone, à la dose de 600mg (les dernières recommandations établies par le CNGOF en 2016 concernant la posologie de la mifépristone ont abaissé cette dernière à 200mg. Ce dosage n’est pas encore validé par l’HAS) (10). La patiente prend ce traitement au cabinet. Le 2ème médicament, le Misoprostol, une prostaglandine favorisant la contractilité utérine, également délivré lors du deuxième entretien par le médecin traitant à la dose de 400µg, est à prendre au domicile 24h après la consultation. Les différentes voies d’administration du misoprostol sont la voie vaginale, orale et buccale. Il n’y a pas actuellement d’alternative médicamenteuse aussi efficace et sûre que l’association mifépristone-misoprostol pour l’IVG médicamenteuse. Ces résultats sont compatibles avec ceux retrouvés dans une revue systématique de la littérature réalisée en France à partir de juin 2013. (11) Pour juger du succès de l’IVG, le recours au dosage de l’HCG sérique 15 jours après l’IVG médicamenteuse est utilisé. Une baisse supérieure à 80 % du dosage initial 15 jours après l’IVG médicamenteuse est en faveur de la réussite de celle-ci (9). Une consultation médicale de contrôle et de vérification de l’IVG doit avoir lieu entre le 14e et le 21e jour après l’intervention. Pour les praticiens pratiquant les IVG médicamenteuses, les tarifs limites des soins à compter du 1er avril 2016 sont fixés ainsi : consultation de recueil de consentement cotée à 25€, forfait lié à la prise de médicaments coté à 137,92€ (coût des médicaments et coût de deux consultations), consultation de contrôle à 25€. Le total est donc de 187,92 €. (L’IVG est prise en charge à 100% par l’Assurance Maladie dans le cadre de ce forfait).

L’IVG médicamenteuse est donc fréquente et impose une contrainte de rapidité de prise en charge afin de rester dans le cadre légal. Le médecin généraliste est par conséquent un soutien important des centres de santé publics ou privés afin de permettre une meilleure offre de soin aux patientes concernées. Néanmoins, à peine un quart des IVG médicamenteuses se déroulent hors établissement de santé en PACA, région ou le taux d’IVG est le 4 ème plus important de France.

RESULTATS

Sur 320 questionnaires envoyés, 103 ont été obtenus, donnant un taux de participations de 32,2%. Les médecins ont répondu de la manière suivante : réponses des médecins généralistes contactés par téléphone (n=0), réponses des médecins généralistes contactés par mail (n=53), réponses des internes contactés par mail (n=47), réponses des médecins généralistes ayant reçu le questionnaire en main propre (n=3).

Caractéristiques de la population

Sur les 103 médecins ayant répondu, l’âge moyen est de 34 ans (écart-type : 10,7). On compte 36,9% d’hommes (n= 38) et 63,1% de femmes (n=65). Parmi ces médecins, 67% travaillent en zone urbaine (n=69), 4,9% en zone rurale (n=5), et 30,1% en zone semi-rurale (n=31).

DISCUSSION

Forces et intérêts de l’étude

Notre étude donne lieu à une évaluation des pratiques concernant la prescription d’IVG chez le médecin généraliste à travers le questionnaire envoyé aux médecins généralistes et la connaissance de leur position vis à vis de cette pratique. Il s’agit d’un sujet de santé publique intéressant qui présente un intérêt vis à vis des médecins, permettant d’évoquer d’éventuelles solutions afin d’améliorer l’offre de soin dans ce domaine et vis à vis des patientes qui semblent, d’après des études antérieures, satisfaites de la prise en charge des IVG médicamenteuses en cabinet de ville. Notre enquête auprès des médecins généralistes n’est malheureusement par exhaustive, avec un taux de réponses de 32%, mais fournit des tendances concernant leurs connaissances et les freins inhérents à la prescription des IVG médicamenteuses en médecine générale. De plus, cette étude permet d’évaluer l’impact de la nouvelle tarification proposée par la sécurité sociale concernant les IVG médicamenteuses chez les médecins généralistes.

Faiblesses de l’étude 

Notre étude est déclarative, elle est fondée sur les réponses des participants sans que celles-ci ne soient vérifiées. De plus, dans les Bouches du Rhône, l’âge moyen des médecins est de 50,8 ans et 48,1% des professionnels sont des femmes d’après l’atlas démographique du CNOM en 2016 (13). En revanche dans notre étude, l’âge moyen est de 34 ans et 63,1% des réponses provenaient de femmes. Notre étude n’est donc pas représentative des médecins généralistes des Bouches du Rhône.

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Table des matières

I. INTRODUCTION
II. MATERIEL ET METHODE
III. RESULTATS
III.1. Caractéristiques de la population
III.2. Description des connaissances et application des recommandations
III.3. Population cible des IVG en Médecine Générale
III.4. Principaux freins à la réalisation des IVG en Médecine Générale
IV. DISCUSSION
IV.1. Forces et intérêts de l’étude
IV.2. Faiblesses de l’étude
IV.3. Étude des résultats
IV.4. Ouverture : Comment accroître la prescription d’IVG médicamenteuses par les médecins généralistes?
V. CONCLUSION
VI. BIBLIOGRAPHIE
VII. ABREVIATIONS
VIII. ANNEXES
Annexe 1 : Le Questionnaire
Annexe 2 : Convention type entre un médecin généraliste et un établissement de santé

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