Le dossier médical papier
Définition
Le dossier du malade est défini par l’Agence Nationale d’Accréditation et d’Évaluation en Santé (ANAES) comme « le support de l’ensemble des informations recueillies concernant la prise en charge du patient et dont les composantes sont le dossier médical, le dossier de soins infirmiers et le dossier administratif » [4]. Notre champ de réflexion porte plus particulièrement sur le dossier médical, dont une définition classiquement retenue est : « une mémoire écrite des informations cliniques, biologiques, diagnostiques et thérapeutiques d’un malade à la fois individuelle et collective, constamment mise à jour » .
Historique
De tout temps, les médecins ont éprouvé la nécessité de conserver une « mémoire écrite de toutes les informations médicales concernant le patient » [7]. Si les premiers écrits retrouvés en France datent du XVIIIème siècle, le papier s’est vite imposé dans les années 1970 pour devenir une pratique réglementaire. Autrefois, les observations des soignants étaient une simple prise de notes et d’observations. Durant le XIVème siècle apparaît la notion de « dossier patient ». Comme un support écrit, il servait à la réunion et à la conservation (archivage) des notes du médecin. Autrement dit, il permettait au médecin de ne rien oublier de l’histoire de son patient. De même, les informations pouvaient être partagées avec d’autres médecins, équipes soignantes et/ou la famille.
A la fin du XVIIème siècle apparaît « le dossier médical personnel » pour chaque patient. Il était alors utilisé comme un cahier de registre à l’hôtel Dieu à Paris. Cependant le contenu était succinct. La complexité des prises en charges, l’optimisation de la qualité des soins et l’évolution sociétale en termes de droit des personnes hospitalisées ont contribué à la valorisation de dossier médical. Depuis 1970, les dossiers de soins infirmiers font partie des dossiers médicaux. L’ensemble est devenu un outil de communication et de transmission des données entre les professionnels de santé et ce quel que soit leurs types de service (secteur hospitalier et libéral). Le dossier médical qui comportait des notes prises par les médecins lors des consultations est aujourd’hui un document médico-juridique et administratif [8]. L’origine de la rédaction des dossiers médicaux remonte à Hippocrate et, durant de nombreux siècles, ce devoir médical important a été considéré comme une tâche ennuyeuse, laborieuse et sujette à des erreurs. Les premiers pas vers un meilleur dossier médical ont commencé en 1936 avec les cartes perforées. Durant les années 60, l’ensemble minimal de données de base, un identifiant unique du patient a été introduit et même pour les patients ambulatoires, les premiers systèmes de dossiers médicaux ont été développés en appliquant certaines normes importantes et des structures de données bien acceptées. En France, la loi hospitalière du 31 juillet 1991 a rendu obligatoire la constitution d’un dossier médical pour les établissements de santé. Outil de soins nécessaire à la qualité et à la continuité de la prise en charge de la personne malade, le dossier médical porte d’autres enjeux constituant pour le juriste un élément de preuve de la délivrance de l’information, de la réalisation d’un acte et du recueil du consentement [9]. Cette obligation imputée aux établissements de santé s’explique par le besoin de traçabilité et d’amélioration de la qualité des soins. Le dossier patient devient un outil de preuve en cas de litiges entre patients et soignants. Il décrit l’ensemble des actes et opérations réalisées lors du séjour à l’hôpital [5]. Véritable outil de traçabilité, il est créé dès l’entrée de l’établissement et constitue un support de réflexion, de communication et de coordination pour les professionnels de santé. C’est un élément dynamique et précieux destiné à être partagé avec le patient conformément à l’article L.1171-7 du code de la santé publique de la république Française [10]. Par professionnel de santé, on désigne « toute personne ayant une activité liée à la prophylaxie ou aux soins au malade » [11]. En France le code de la santé publique distingue 3 catégories :
– les professions médicales : médecin, sage-femme et odontologiste ;
– les professions de la pharmacie : pharmacien, préparateur en pharmacie hospitalière, physicien médical ;
– les professions d’auxiliaires médicaux : infirmier, masseurkinésithérapeute, pédicure, podologue, aide-soignant, etc…
Seules ces personnes ont un droit d’accès aux informations médicales du dossier médical. Par ailleurs, la Haute Autorité de la Santé en France définit le dossier médical comme « le lieu de recueil et de conservation des informations administratives, médicales et paramédicales, formalisées et actualisées, enregistrées pour tout patient accueilli, à quelque titre que ce soit. Le dossier du patient assure la traçabilité de toutes les actions effectuées. Il est un outil de communication, de coordination et d’information entre les acteurs de soins et avec les patients. Il permet de suivre et de comprendre le parcours hospitalier du patient. Il est un élément primordial de la qualité des soins en permettant leur continuité dans le cadre d’une prise en charge pluriprofessionnelle et pluridisciplinaire. Le rôle et la responsabilité de chacun des différents acteurs pour sa tenue doivent être définis et connus » .
Le dossier médical est constitué de deux éléments :
– les données administratives relatives à l’identification du patient recueillies essentiellement lors de l’admission dans l’établissement ;
– les données à caractère médical constamment mise à jour et recueillies avant et pendant l’intégralité du séjour.
Ce dossier médical contient ainsi, l’intégralité des échanges écrit entre professionnels de santé à l’exception des informations qui ne concernent pas la prise en charge. On y retrouve par exemple l’anamnèse médicale, les habitudes de vie du patient, les comptes rendus médicaux, les prescriptions médicamenteuses, les lettres de sortie, etc… Les professionnels paramédicaux, disposent eux aussi d’un dossier de soins paramédical. Il reprend l’intégralité de leurs observations et soins. Il fait partie du dossier médical comme le prévoit l’article R.1112-2 du code de la santé publique Française .
La tenue d’un dossier médical pour chaque patient par un médecin est une obligation comme le rappelle le code de Déontologie Médicale .
Les objectifs du dossier médical sont les suivants :
– être un aide-mémoire pour le médecin ;
– être la base de la coordination étant donné son caractère partageable ;
– permettre la traçabilité des actions ;
– être le recueil d’informations standardisées ;
– permettre la liaison avec des systèmes d’alerte ;
– permettre l’évaluation des pratiques professionnelles ;
– permettre la création des cas-types .
Ces objectifs ont été réactualisés avec les possibilités offertes par le dossier médical informatisé. Aujourd’hui, le dossier médical apparaît comme un outil à facettes multiples, défini par son utilisation que par ses propriétés intrinsèques [15]. L’émergence des nouvelles technologies d’information et de communication dans le domaine de la santé ouvrent grandement les portes à l’informatisation des systèmes d’information hospitaliers et à la naissance du dossier médical électronique.
Les fonctions du dossier médical papier
Le dossier médical doit rester en premier lieu un outil d’amélioration de la qualité du travail du médecin, et l’instrument principal de centralisation et de coordination des activités au sein d’un établissement de soins pour une meilleure gestion de la santé des patients. Il est appelé à remplir plusieurs fonctions :
– Une fonction symbolique : le dossier médical représente le signe de la présence, de la prise en charge et de la permanence du lien qui existe entre le médecin et le patient. Il est intégré au contrat de confiance entre les parties. Il doit rester avant tout un élément de la relation médecin-malade et, à ce titre, garantir la confidentialité et le secret professionnel.
– Une fonction de facilitation du travail du médecin :
❖ Un aide-mémoire : le nombre d’informations recueillies est tel qu’il est impossible de tout mémoriser. Le rôle du dossier est de pallier ces défaillances. Le dossier est l’endroit où « tout » ce qui concerne le patient peut être à priori retrouvé.
Cette fonction représente la base même de la création des premiers dossiers médicaux dans le temps.
❖ Un garant de la démarche médicale : le dossier médical contient l’ensemble des décisions passées et présentes pour un patient. Il est le garant de la démarche médicale. Il facilite l’élaboration et le suivi du processus diagnostique, thérapeutique et les actions préventives en se basant sur des méthodes scientifiques qui ont prouvé leur efficacité [17].
❖ Un outil de communication et de coordination : le dossier est un outil de communication vis à vis des patients, des confrères spécialistes ou généralistes et de tout autre soignant ou intervenant dans le processus de soin. Cette communication doit être faite dans le respect des règles légales et déontologiques du secret professionnel et dans l’unique but de promouvoir la prise en charge du malade.
– Une fonction de soins : le dossier du patient constitue un élément clé de la qualité des soins .
Les plaintes et les maladies évoluent généralement d’une manière périodique, ce qui impose un suivi longitudinal. Un enregistrement des épisodes successifs, en plus de la restitution des antécédents relatifs aux problèmes de santé du moment, permet de garantir au maximum la continuité des soins. Une bonne tenue du dossier médical permet d’intégrer les aspects curatif et préventif dans le même épisode de prise en charge. Cette approche globale du malade implique aussi une vision multidisciplinaire des problèmes du patient qui font de ce dernier un « tout » non dissociable.
– Une fonction médico-légale : la tenue d’un dossier médical permet d’établir le droit tant pour le patient que pour le médecin. Les données personnelles relatives à la santé peuvent servir de preuve légale dans les affaires juridiques où la responsabilité du médecin est engagée. Les droits des patients sont également mieux assurés sur de telles bases par l’enregistrement adéquat des données en cas d’accident, d’invalidité etc…
Cependant cette fonction de « pièce à conviction » ne doit pas dominer la fonction principale de soins.
– Un outil d’évaluation : l’évaluation des pratiques médicales consiste selon la Haute Autorité de Santé (HAS) française à analyser régulièrement sa pratique effective par rapport aux recommandations. Deux méthodes principales sont possibles :
o l’évaluation à posteriori (démarche rétrospective) qui consiste à analyser les données d’activité clinique (conservées dans le dossier médical) par rapport à une recommandation pratique.
o l’évaluation à priori qui consiste à pratiquer en suivant une recommandation, par exemple en appliquant un protocole préétabli (démarche prospective).
– Un outil d’enseignement et de recherche : les dossiers des patients permettent d’accumuler au fil du temps un grand nombre de données relatives à la santé. Ces données, fiables et pertinentes, mises à la disposition des chercheurs, permettent de mener des études qui contribuent à l’amélioration des pratiques et des connaissances médicales et contribuent également à l’enseignement des nouvelles générations de praticiens et à leur formation continue. Les résultats de ces recherches participent aussi, auprès des décideurs, à l’orientation de la politique de santé en matière de gestion et d’économie .
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Table des matières
Introduction
I. Rappels
1.1. Le dossier médical papier
1.1.1. Définition
1.1.2. Historique
1.1.3. Les fonctions du dossier médical papier
1.2. Le dossier médical informatisé
1.2.1. Définition
1.2.2. Historique
1.2.3. Les types d’informatisation du dossier médical informatisé
1.3. Composition du dossier médical
1.4. Apport de l’informatique en médecine
1.5. Dossier médical et secret médical
II. Objectifs
2.1. Objectif général
2.2. Objectifs spécifiques
III. Cadre de l’étude
3.1. Institut d’hygiène sociale de Dakar
3.2. Centre hospitalier Abass Ndao
3.3. Organisation du dossier patient dans les sites d’étude
IV. Matériel et méthodologie
4.1. Matériel
4.2. Méthodologie
V. Résultats
5.1. Effectif
5.1.1. Données socioprofessionnelles
5.1.2. Données sur l’informatisation
VI. Discussion
6.1. Difficultés liées à l’exploitation des réponses
6.2. L’informatisation du dossier médical
6.3. Limites à l’utilisation de l’informatique
6.4. Inconvénients des dossiers papiers
6.5. Abandon de l’informatique
6.6. Inconvénients liés à l’utilisation des dossiers informatisés
6.7. Contenu des dossiers
6.8. L’informatisation dans la vie personnelle et professionnelle
Conclusion et recommandations
Références
Annexe 1 : Questionnaire
Annexe 2 : Comparaison de dossiers numériques et papier