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La dynamique de la production agricole et les politiques d’autosuffisance à partir de 2000
Cette section nous permettra d’étudier dans un premier temps la dynamique de la production agricole selon les zones agro-sylvo-pastorales et dans un second temps les politiques d’autosuffisance à partir de 2000.
Les zones agro-sylvo-pastorales du Sénégal
Le Sénégal compte 3,8 millions d’hectares (ha) de terres arables dont 2,5 millions ha sont emblavés en moyenne par an (PRACAS, 2014). La population sénégalaise est majoritairement rurale (74 % de la population totale), avec une dominance de jeunes (2/3).
Présentation des zones agro-sylvo-pastorales du Sénégal et les revenus dans chaque zone
Le Sénégal a six zones agro-sylvo-pastorales à savoir : la zone bassin arachidier (ZBA), La zone du Fleuve (ZF), la zone Sud (ZS), la zone du Sénégal oriental (ZSO), la zone sylvo-pastorale (ZSP) et la zone des Niayes (ZN)
La zone bassin arachidier (ZBA)
Le bassin arachidier est la principale région agricole du Sénégal. La zone couvre cinq régions administratives. Cette couverture représente 21,6 % de la superficie totale du territoire (Cabral 2005). L’auteur nous donne la constitution suivante de la zone : la sous-zone diors (Thiès, Diourbel et Fatick), la sous-zone diors sud (Fatick et Kaolack) et la zone d’expansion rurale (Nioro du Rip et Kaffrine). Le bassin arachidier occupe plus de la moitié des terres arables du pays (Fall, 2016 ; CSE 2007). Les pluies qui y sont enregistrées sont faibles (entre 500 et 1 000 mm) pour une durée allant du mois de juin au mois d’octobre. Les principales cultures de la zone sont le mil et l’arachide.
La zone du Fleuve (ZF)
La zone comprend la sous-zone du Delta (Dagana), celle de moyenne Vallée (Podor et Matam) et la sous-zone de la Vallé (Bakel). Selon CSE (2007), repris par Fall (2016), la zone du fleuve occupe 8 % des terres arables du pays. Les populations de cette zone pratiquent du maraîchage et de la riziculture. Dans cette zone aussi, on note la pratique de l’agriculture industrielle (canne à sucre et tomates). Cette zone enregistre de faibles pluies avec une courte durée de l’hivernage.
La zone Sud (ZS)
La haute Casamance (Kolda et Vélingara), la moyenne Casamance (Sédhiou et Bignona) et la Basse Casamance (Ziguinchor et Oussouye) composent cette zone. On y note une forte pluie allant à plus de 1 000 mm par an. Elle occupe 20 % des terres arables. La riziculture est la culture dominante. Ayant une forêt dense, l’activité de cueillette y est pratiquée.
La zone du Sénégal oriental (ZSO)
Cette zone couvre presque toute la région de Tambacounda, elle occupe 10 % des terres arables du Sénégal. Sa pluviométrie est faible et n’est que 700 mm. Ses principales cultures sont : le sorgho, la mil, le maïs et la riziculture des bas-fonds (Fall, 2016 ; ISRA, ITA, CIRAD, 2005).
La zone sylvo-pastorale (ZSP)
Elle couvre la région de Louga (sauf Kébémer) et le département de Ranérou. La zone sylvo-pastorale occupe 4 % des terres arables du Sénégal (Fall, 2016 ; ISRA, ITA, CIRAD, 2005). L’activité la plus utilisée est l’élevage extensif.
La zone des Niayes (ZN)
Elle est composée de la partie littorale (de Dakar à Saint Louis) et des Niayes. Cette zone Représente 1 % des terres arables du pays (Fall, 2016 ; CSE, 2007) et est la principale productrice horticole du Sénégal (80 %). Les ressources de cette zone sont essentiellement souterraines. Elle subit des pressions de la part des activités des populations, des industries, des projets et de l’urbanisation grandissante.
L’oignon et les fruits et légumes de contre saison
Selon PADEN (2013), en plus de l’apport important du delta et de la vallée du fleuve Sénégal et des régions de Tambacounda, de Kolda et de Ziguinchor dans la production maraichère, la zone des Niayes reste la principale zone de culture maraichère du pays. Elle fournit 60 % de la production nationale et exporte 50 % des produits horticoles. L’oignon reste la principale activité de légumes avec une production en 2011 de 190 000 tonnes (PADEN, 2013) et de 210 000 tonnes en 2012 (PRACAS, 2014). L’agriculture est la principale activité et la principale source de revenu du monde rurale, et l’horticulture joue un rôle important dans la diversification de la production agricole. L’horticulture est une activité génératrice de revenu. Du fait de sa proximité des zones urbaines et périurbaines, elle participe à la réduction du chômage des grandes villes.
Les principales zones de production de fruits sont la ZN et la ZS. La ZN reste la principale productrice et exportatrice de fruits. Ses productions proviennent particulièrement des régions de Dakar et de Thiès (PADEN, 2013).
Le riz
Le riz fait partie des filières agricoles prioritaires ciblées par le PRACAS. Il constitue la première céréale consommée au Sénégal. La production rizicole sénégalaise est dominée principalement par deux zones : la zone irriguée de la vallée du fleuve Sénégal (VFS) et le bassin de l’Anambé et la zone pluviale du Sud (les régions méridionales de Fatick, Ziguinchor, Sédhiou, Kolda, Tambacounda et Kédougou). La production rizicole (riz paddy) au Sénégal est de 469 694 tonnes en 2012. Cette production provient principalement de la zone irriguée de la VFS et de l’Anambé (soit 83 % de la production totale), et des zones pluviales du Sud (soit 17 % de la production nationale). Cette production n’assure pas l’autosuffisance, car à la même période les importations s’élevaient à 650 000 tonnes. Les besoins en riz paddy pour le Sénégal est de 1 600 000 tonnes pour assurer l’autosuffisance. La dépendance du Sénégal en riz pousse les autorités (à travers le PRACAS) à opter le développement rizicole sur toutes les formes afin d’avoir l’autosuffisance.
Les politiques d’autosuffisance et le niveau de pauvreté à partir de 2000
L’an 2000 est marqué par la fin de 40 années du régime socialiste et l’avènement du libéralisme : c’est la première alternance politique au Sénégal. Cette ère marque aussi la fin des PAS. Malgré le désengagement de l’État, le régime socialiste continuait de faire du secteur agricole un secteur clef pour le développement du pays. Dans la continuité de l’État, le Gouvernement libéral a fait de l’agriculture le levier de la croissance économique, la lutte contre la pauvreté et la dépendance alimentaire. On note ainsi le retour de l’État dans le secteur agricole malgré son idéologie libérale. C’est pour cela que le Gouvernement s’est montré engager en mettant plusieurs programmes et politiques agricoles pour relancer le secteur qui traversait des difficultés, de créer des emplois agricoles, de faire face à la crise alimentaire mondiale de 2007/2008, d’avoir la souveraineté et de contribuer à la lutte contre la pauvreté. Parmi ces programmes et politiques nous pouvons citer : les programmes et plans spéciaux, la LOASP, le plan REVA, la GOANA et le PRACAS. Durant cette période, l’indice de pauvreté est passé de 55,2 % en 2001 à 46,7 % en 2011. Ce taux élevé de pauvreté est surtout noté en milieu rural où la population est majoritairement agricole.
Les politiques d’autosuffisance à partir de 2000
Avec l’avènement du régime libéral en 2000 au Sénégal, le secteur agricole connait un tournant important avec le retour de l’État en mettant en place plusieurs programmes et politiques agricoles. Des programmes spéciaux de la GOANA en passant par la LOASP au plan REVA sont :
Les programmes et les plans spéciaux
Le Sénégal hérite de la colonisation une agriculture principalement arachidière dont les produits sont exportés en France. En 2000, le nouveau régime (le régime libéral succède celui socialiste le 19 Mars 2000), mise sur la diversification des produits agricoles avec des programmes et plans spéciaux. Le premier programme dénommé programme maïs débute en 2003. Celui-ci est suivi par d’autres programmes (manioc, sésame, bissap (hibiscus sabdarifa), jatropha ou biocarburant jusqu’en 2007.
Citons quelques programmes :
– lancé en 2003, le programme maïs ambitionne d’atteindre 1 million de tonnes. Selon RS (2008) repris par Fall (2016), les réalisations en première (2003/2004) et en deuxième (2004/2005) année sont respectivement 421 954 (pour 175 575 ha) et 422 623 tonnes (pour 145 830 ha) soit environ 42 % de réalisation de l’objectif. Lancé en même temps que le programme maïs, celui du sésame avait comme objectif d’améliorer la sécurité alimentaire et d’augmenter les revenus des producteurs. Le sésame a connu une production de 31 472 tonnes en 2005/2006 (pour 52 292 ha) contre 24 130 tonnes (pour 43 402 ha) en 2004/2005 (Fall, 2016 ; RS, 2008) ;
– le programme spécial manioc est lancé en 2004 avec comme objectif 1 million de tonnes pour 22 000 ha. Le programme a connu une augmentation de 220 % durant ses deux premières années (la production passe de 181 721 à 401 448 tonnes entre 2003/2004 et 2004/2005) (Fall, 2016 ; RS, 2008) ;
– il y a aussi, le programme bissap avec l’aide du Programme de Croissance Économique (PCE) de l’USAID (United States Agency for International Development) (l’objectif est de produire 2 000 tonnes pour 5 000 ha) et le programme Jatropha (lancé en 2007 avec un objectif d’atteindre 1 190 000 m3 pour 321 000 ha en 2012) (Fall, 2016 ; RS, 2008).
Notons que ces programmes ont permis aux petits producteurs d’avoir l’accès aux intrants agricoles subventionnés (semences, engrais, produits phytosanitaire) et aux équipement agricoles.
La LOASP
Les résultats obtenus jusque-là dans le domaine de l’agriculture n’ont pas permis de réduire la pauvreté et d’enrayer le déficit de la balance commerciale des produits alimentaires. L’État du Sénégal a donc procédé à une réforme de l’agriculture dont les principales orientations sont contenues dans la LOASP. Adoptée et promulguée en 2004, la LOASP donne une orientation stratégique globale de l’agriculture sénégalaise sur 20 ans (2004 – 2024). Elle permet un nouvel élan dans le développement des filières du secteur primaire. Elle est basée sur le renforcement des exploitations agricoles familiales. Elle fonde la politique de développement agro-sylvo-pastoral et constitue la base de l’élaboration et de la mise en œuvre des programmes opérationnels. Elle est supposée remplacer l’ensemble des politiques agricoles sectorielles. Elle repose sur les principes directeurs suivants : l’efficacité économique, l’équité sociale, la durabilité, la libéralisation économique, la décentralisation, la solidarité, la subsidiarité et la compétition sous régionale (marché commun agricole au sein de l’UEMOA et de la CEDEAO). Ces principes découlent des objectifs politiques, économiques et sociaux du Gouvernement contenus dans les DSRP I (2003 – 2005), DSRP II (2006 – 2012), le SNDES (2013 – 2017) et le PSE (2014 – 2035) (Fall, 2016). La LOASP, harmonisée avec le PNIA (Programme National d’Investissement Agricole), constitue l’application des directives données par l’ECOWAP mises en œuvre par le PDDAA (Programme Détaillé pour le Développement Agricole en Afrique) qui représente le volet agricole du NEPAD (Nouveau Partenariat Économique pour le Développement en Afrique) (DPEE, 2013). Le PNIA (2009 – 2020) traduit l’engagement et les efforts du Sénégal dans la sous-région et le continent.
La Grande Offensive Agricole pour la Nourriture et l’Abondance (GOANA) et l’autosuffisance en riz
L’année 2008 est marquée par une crise alimentaire dans le monde et la flambée des prix des produits alimentaires (ceux du riz et du blé). L’augmentation des prix des aliments s’est surtout ressentie dans les centres urbains et s’est traduite par des manifestions dites « émeute de la faim » dans le monde. Selon Diop (2013), l’État décide d’éliminer temporairement les droits de douanes sur le riz importé. Cette décision profite surtout aux importateurs de riz asiatique mais en contradiction avec l’objectif de promouvoir le riz local. Ayant pris conscience de ce fléau, le Gouvernement du Sénégal décide de lancer la Grande Offensive Agricole pour la Nourriture et l’Abondance (GOANA) en 2008. Cet ambitieux programme exprime la volonté de relever le défi de la souveraineté alimentaire et de produire en abondance. À côté de la GOANA, il y a le Programme National d’Autosuffisance en Riz (PNAR) 10 qui est le volet riz de la GOANA. Cette initiative inédite de partenariat public-privé repose notamment sur la réalisation d’aménagements structurants, l’appui aux producteurs et l’instauration d’un cadre fiscal favorable. C’est le retour de l’État aux affaires agricoles. Selon Blein et al., (2008) repris par Fall (2016), c’est un retour de l’État dans la planification agricoles et l’encadrement des producteurs : la fourniture et la subvention des intrants et des équipements et le redéploiement de l’appui-conseil. L’État décide d’allouer 345 milliards de francs CFA à la GOANA.
L’objectif n’était pas seulement d’augmenter la production rizicole mais aussi de permettre au pays d’avoir une indépendance alimentaire en renforçant les programmes spéciaux (mil, maïs, manioc, sésame…) et en prévoyant l’atteinte de 400 millions de litres de lait et 43 500 tonnes de viande (Diop, 2013). Nous pouvons dire que le Sénégal s’est fixé l’objectif de relever le défi de la souveraineté alimentaire, d’éviter la famine et de produire en abondance pour l’exportation à travers la GAONA.
En sa première année, la production de riz paddy a connu une amélioration, elle passe de 213 000 tonnes en 2007 / 2008 à 502 000 tonnes en 2009 / 2010 et plus de 600 000 tonnes en 2010 / 2011, avant de retomber à 439 000 tonnes en 2011 / 2012 (Diop, 2013). Malgré ces bonnes performances, la production rizicole nationale n’arrive toujours pas à renverser la dépense des importations de riz, estimées à 650 000 tonnes en 2010, mais précédée par des importations record de plus d’un million de tonnes en 2008 (Diop, 2013).
Notons que le budget (345 milliards pour le volet production végétale pour la campagne 2008 / 2009) alloué à la GOANA n’était pas totalement utilisé. D’après Oya et Ba (2013) repris par Fall (2016), seuls 35 milliards de francs CFA avaient été injectés au budget d’investissement du ministère de l’agriculture pour l’année 2008. Le reste était alloué aux dépenses de distribution d’intrants. Cela a aussi créé une fiscalité difficile dans la mesure où le gouvernement avait renoncé aux droits de douane et à la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA) sur le riz importé et le blé à hauteur de 56 milliards en 2008 (Fall, 2016 ; Blein et al, 2008).
Le niveau de la pauvreté à partir de 2000
Comme nous l’avons dit précédemment, l’agriculture représente l’activité principale de la population. Cette agriculture est presque totalement pluviale et saisonnière où le changement climatique et la persistance de la sécheresse lui impactent en sa défaveur. Ce qui entraine une faible production agricole le fait que la production agricole nationale soit soutenue à hauteur de 80 à 90 % par les exploitations familiales (Sow, 2014). Cette production agricole contribue faiblement à la création de la richesse et sa participation à la formation du PIB national est passée de 10 % en 1997 à 8 % en 2011. La population agricole rurale représente 74 % des ménages agricoles. Ces ruraux sont majoritairement pauvres et sont estimés à 57,3 %. Nous notons des efforts considérables de la part des autorités étatiques et des partenaires techniques et financiers pour réduire cette disparité. Le tableau suivant nous donne la répartition de la pauvreté (incidence de pauvreté, écart de pauvreté et sévérité de la pauvreté) selon les zones de 2001 à 2011. Notons que ces zones sont divisées en 3 groupes : Dakar, autres centres urbains et ruraux.
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Table des matières
INTRODUCTION GÉNÉRALE
I. Contexte
II. Problématique
III. Objectifs de cette thèse
IV. Hypothèses
CHAPITRE 1 : LES POLITIQUES AGRICOLES SÉNÉGALAISES ET LA DYNAMIQUE DU SECTEUR
Section 1 : Les politiques agricoles sénégalaises
I. Les politiques et programmes agricoles du Sénégal de 1961 à 2014
II. Les performances de l’agriculture sénégalaise de 2004 – 2013
Section 2 : La dynamique de la production agricole et les politiques d’autosuffisance à partir de 2000
I. Les zones agro-sylvo-pastorales du Sénégal
II. Les politiques d’autosuffisance et le niveau de pauvreté à partir de 2000
Conclusion
CHAPITRE 2 : LES FILIÈRES PRIORITAIRES ET LES MÉCANISMES DE FINANCEMENT DU PRACAS
Section 1 : Les filières ciblées par le programme et leurs sources de financement
I. Les filières prioritaires du PRACAS
II. Le financement agricole
III. Les sources de financement du programme et la répartition du coût global
IV. L’évolution des produits ciblés par le PRACAS
Section 2 : Les impacts des programmes agricoles
I. L’inégalité et de la pauvreté
II. Analyse des programmes agricoles sur la croissance
III. L’implication des institutions dans la croissance de l’agriculture et la corrélation entre l’agriculture et les autres secteurs
IV. La sécurité alimentaire au Sénégal
Conclusion
CHAPITRE 3 : ESTIMATIONS ET SIMULATION DES CHOCS
Section 1 : Méthodologie
I. Tableau d’Entrées-Sorties (TES)
II. La matrice de comptabilité sociale (MCS)
III. La structure de la MCS
IV. La mesure des inégalités et du bien-être social
V. Indicateurs classiques de la redistribution et de l’équité
Section 2 : Simulations et les Résultats
I. Impacts sur la production
II. Impacts sur les revenus des ménages
III. L’autosuffisance alimentaire : le riz
Conclusion
CONCLUSION GÉNÉRALE
Références bibliographiques
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