Les facteurs qui régulent l’instabilité dynamique et l’organisation du réseau de microtubules

Télécharger le fichier pdf d’un mémoire de fin d’études

Fonctions généralement associées au cytosquelette chez les eucaryotes

Organisation du cytoplasme et trafic intracellulaire

Les fibres du cytosquelette forment un « squelette » plus ou moins rigide sur lequel la membrane plasmique est en quelque sorte tendue. A l’intérieur de la cellule, de nombreux compartiments sont amenés à se former, à se déplacer, à fusionner les uns avec les autres ou à changer de taille et de forme. Compte tenu de leur localisation et de leurs propriétés, les filaments du cytosquelette constituent des acteurs essentiels à l’ensemble de ces processus ; une coordination des différents éléments du cytosquelette est donc nécessaire à l’organisation et au fonctionnement des différents compartiments subcellulaires.
Dans les cellules animales, les microtubules jouent un rôle prépondérant dans l’organisation des compartiments internes. La figure 10 illustre la coordination et le rôle joué par les microfilaments d’actine et par les microtubules dans le positionnement des mélanosomes des mélanocytes. En effet, certaines espèces de poissons et d’amphibiens sont capables de changer la teinte de leur peau en fonction de stimuli extérieurs. Les mélanocytes de leur peau contiennent des pigments (de la mélanine), fabriqués dans des compartiments spécialisés, les mélanosomes. Les mélanosomes peuvent être concentrés au milieu de la cellule ou être dispersés dans le cytoplasme ce qui modifie les propriétés optiques des mélanocytes et donc de la peau (Figure 10 B). La dispersion des mélanosomes en réponse à différent stimuli requiert des réseaux de microtubules et de filaments d’actine fonctionnels (Figure 10). Dans les mélanocytes, comme dans une grande partie des cellules animales, le réseau de microtubules est organisé à partir d’un centre organisateur depuis lequel les microtubules se déploient. En revanche, c’est en périphérie de la cellule que se trouve un réseau dense de filaments d’actine entrecroisés. Ainsi, lorsque les réseaux d’actine et de microtubules sont fonctionnels, les mélanosomes se déplacent du centre jusqu’à la périphérie de la cellule en réponse à un traitement à l’adrénaline et de la périphérie jusqu’au centre lors d’un traitement à la mélatonine. En revanche, lorsque le réseau d’actine est détruit par un traitement à la latrunchuline avant le stimulus par l’adrénaline, les mélanosomes ne peuvent atteindre la périphérie de la cellule ce qui démontre le rôle joué par l’actine dans le déplacement des mélanosomes, au moins sur les derniers micromètres, leur permettant d’atteindre la périphérie de la cellule. Il existe des complexes protéiques particuliers, appelées moteurs moléculaires, capables de se déplacer le long des microtubules en utilisant l’énergie issue de l’hydrolyse de l’ATP. Ces protéines ont souvent un sens de déplacement privilégié. Ainsi la kynésine conventionnelle se déplace vers l’extrémité (+) des microtubules et la dynéine cytoplasmique vers l’extrémité (-). Lorsque la fonction de la kynésine conventionnelle est altérée, par la microinjection d’anticorps spécifique, les mélanosomes ne bougent quasiment plus suite à un traitement à l’adrénaline et reste très proche du centre de la cellule (Rodionov et al., 1991). A l’inverse, si c’est la fonction de la dynéine cytoplasmique qui est altérée, par la surexpression de la dynamitine, les mélanosomes une fois dispersés ne se reconcentrent pas suite à un traitement à la mélatonine (Reilein et al., 2003). Ces observations révèlent le rôle joué par les microtubules dans le déplacement des compartiments membranaires et l’orientation de microtubules dans le cytoplasme de certaine cellules (ici les extrémités (+) sont dirigées vers la périphérie). Nous verrons plus tard à quel point l’organisation et les fonctions du réseau de microtubules sont intimement liées et dépendantes l’une de l’autre.

Propriétés mécaniques et rôle morphogénétique du cytosquelette

Les fibres du cytosquelette peuvent être beaucoup plus rigides que ne le sont les membranes phospholipidiques. En effet les filaments intermédiaires ont une longueur de persistance d’un micron (Mucke et al., 2004). De plus ils peuvent être étirés de plus de trois fois leur taille, ce qui fait d’eux les filaments les plus souples et élastiques du cytosquelette. L’actine quant-à-elle a une longueur de persistance de quelques dizaines de microns (Gittes et al., 1993), elle aussi résiste bien aux extensions mais peu aux compressions. Toutefois, lorsque les filaments d’actine s’organisent en réseau réticulé, la résistance du réseau aux compressions excède celle d’un filament isolé. Les microtubules ont, quant à eux, une longueur de persistance de plusieurs millimètres (Gittes et al., 1993), ce qui excède la taille de certaines cellules, faisant de ces polymères complexes les fibres les plus rigides du cytosquelette mais qui pourtant résistent assez mal aux extensions (Molecular Biology Of The Cell, 6ème édition). Les propriétés des différentes fibres permettent au cytosquelette de jouer plusieurs rôles, il peut déformer les membranes ou bien au contraire les aider à résister à des déformations (Guinea et al., 2004).
Il existe quelques cas bien documentés de déformation des membranes impliquant le cytosquelette, comme la formation des lamellipodes des cellules en migration ou des pseudopodes nécessaires à la phagocytose par exemple. Les lamellipodes sont des protrusions de la membrane plasmique qui dépendent de l’action mécanique, dirigée vers l’extérieur de la cellule, d’un réseau cortical très dense de filaments d’actine (Figure 11 B). Ils sont notamment impliqués dans la migration cellulaire en permettant à la cellule de former de nouveaux points focaux d’adhérence qui vont supporter la traction du reste de la cellule et ainsi son déplacement. Les pseudopodes sont également des protrusions membranaires dépendantes de la polymérisation, dirigée vers l’extérieur de la cellule, d’un réseau d’actine. Ils sont mis en place, notamment par les macrophages lorsque ceux-ci cherchent à phagocyter une particule reconnue comme étrangère. Les pseudopodes permettent la reconnaissance puis la traction de la particule vers l’intérieur de la cellule.

Rôle dans la morphodynamique des compartiments membranaires

Dans les cellules eucaryotes, le réticulum endoplasmique est un compartiment membranaire complexe ayant une structure composée de saccules reliés entre eux par des tubules. Le réseau est très dynamique, des tubules sont créés et déplacés en permanence. Le rôle du cytosquelette, et plus particulièrement des microtubules, dans la formation des tubules de réticulum endoplasmique est connu. Il implique notamment le couple de protéines EB1 – STIM1. EB1 est une protéine associée préférentiellement à l’extrémité (+) des microtubules en polymérisation (Chapitre II 2), alors que STIM1 est une protéine membranaire, située sur la face externe de la membrane du réticulum. L’interaction de ces deux protéines permet la formation de tubules de réticulum (Figure 11 A) (Grigoriev et al., 2008). En effet, la polymérisation du microtubule est capable, via l’interaction EB1 / STIM1, de tirer et/ou de pousser sur la membrane du réticulum, permettant ainsi l’émergence d’un tubule.

Rôle dans l’établissement des propriétés mécaniques des cellules

Comme nous venons de le voir, de par leur grande rigidité comparée aux membranes phospholipidiques, les polymères du cytosquelette sont à même de déformer ces dernières pour permettre le fonctionnement cellulaire. L’organisation des filaments du cytosquelette et leur rigidité confère également à la cellule une partie de ses propriétés mécaniques. Ainsi lorsque le cytosquelette n’est pas un élément impliqué dans la déformation de la membrane, il peut être impliqué dans la résistance à cette déformation. En effet le rôle des filaments intermédiaires, en particulier des kératines, dans l’élasticité des épithéliums des mammifères est connu depuis longtemps. A titre d’exemple, chez des patients souffrant d’une épidermolyse bulleuse, les filaments de kératines sont désorganisés en raison de l’expression de kératines mutées. Les cellules épithéliales affectées ne sont alors plus à même de résister aux stress mécaniques et cèdent lors de ces stimulations, causant l’apparition de bulles sous la peau (Figure 11 C). De plus, il a été démontré expérimentalement que les propriétés mécaniques de cellules isolées de plantes ou de mammifères étaient modifiées lorsque le cytosquelette d’actine ou de microtubules était détruit par l’application de drogues. Ainsi les propriétés mécaniques des cellules animales semblent dépendre principalement de leur cytosquelette d’actine alors que celles des protoplastes (cellules végétales sans paroi) semblent dépendre plutôt du réseau de microtubules (Durand-Smet et al., 2014). En sus de l’effet dû à leur simple présence, dans les cellules végétales, les microtubules sont impliqués dans la synthèse de la paroi cellulaire. En effet, les cellules végétales sont entourées d’une paroi cellulaire rigide composées principalement de polymères de sucres pontés par différents composés (extansines, pectines, lignine). Cette paroi confère aux cellules végétales un cadre rigide, capable de résister aux pressions élevées générées par la turgescence des cellules. La rigidité conférée aux cellules végétales par la paroi permet aux plantes de s’ériger contre la gravité et de dépasser de plusieurs ordres de grandeur la rigidité d’une cellule sans paroi (protoplaste). Les enzymes synthétisant les chaînes de cellulose, le principal constituant des parois cellulaires végétales, se déplacent le long des microtubules. Lorsque l’organisation du réseau cortical de microtubules est modifiée, comme par exemple chez des mutants de protéines associées au cytosquelette, alors l’organisation de la paroi est également modifiée puisque les fibres de cellulose ne sont plus « tissées » dans la bonne directions ce qui peut modifier les propriétés mécaniques des cellules et tissus végétaux impactés. Le cytosquelette est donc impliqué dans l’établissement des propriétés mécaniques des cellules animales et végétales de multiples façons.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

Introduction
I. Le cytosquelette
1) Le cytosquelette, quelques généralités
a) Les acteurs principaux
i. Les microfilaments d’actine
ii. Les filaments intermédiaires
iii. Les microtubules
iv. Les septines
b) Conservations des séquences et cytosquelettes procaryotes
c) Fonctions généralement associées au cytosquelette chez les eucaryotes
i. Organisation du cytoplasme et trafic intracellulaire
ii. Propriétés mécaniques et rôle morphogénétique du cytosquelette
iii. Rôle dans la morphodynamique des compartiments membranaires
iv. Rôle dans l’établissement des propriétés mécaniques des cellules
2) Les propriétés architecturales et dynamiques des microtubules.
a) Structure – Organisation moléculaire
b) L’instabilité dynamique
i. Une propriété intrinsèque des microtubules
ii. La coiffe GTP
iii. La coiffe conformationnelle
II. Les facteurs qui régulent l’instabilité dynamique et l’organisation du réseau de microtubules
1) Un même filament, plusieurs organisations pour plusieurs fonctions
a) Tour d’horizon des différents types de réseaux rencontrés chez les eucaryotes.
b) Le modèle « Search and Capture »
2) Les facteurs qui régulent la dynamique des microtubules.
a) Les MAP, généralités
b) Facteurs stabilisateurs et déstabilisateurs
III) Formation de faisceaux de microtubules : conséquences sur l’organisation des réseaux microtubulaires
1) Organiser les microtubules en faisceaux
a) Faire et maintenir un faisceau de microtubules
i. Mécanismes généraux de formation des faisceaux de microtubules
ii. Les protéines de pontage
b) Conséquences de la formation des faisceaux
i. Faisceaux et propriétés mécaniques
ii. Faisceaux et instabilité dynamique
2) Faisceaux et organisation du réseau
IV) Le modèle d’étude, contexte et objectifs de la thèse
1) Le modèle Arabidopsis thaliana
2) Le contexte
3) Les objectifs de la thèse
Résultats
I) Organisation du réseau de faisceaux de microtubules corticaux chez les mutants de EB1 et de MAP65-1
1) Implication de EB1 dans l’organisation globale du réseau transverse
a) Observations qualitatives
i. Désorganisation partielle du réseau de microtubules dans les cellules de l’hypocotyle
ii. Désorganisation partielle du réseau de microtubules dans la racine
b) Comment quantifier l’organisation du réseau ?
i. Utilisation de l’espace de Fourier
ii. Quantification basée sur l’anisotropie du réseau de microtubules
2) Désorganisation de la paroi cellulaire chez le double mutant eb1a-2 eb1b-3.
3) Diminution du nombre de microtubules par faisceau en absence de AtEb1 a et AtEb1b.
a) Le STED, une méthode de super-résolution de choix pour des échantillons vivants
b) Observations qualitatives
c) Comment estimer le nombre de microtubules par faisceau ?
i. Utilisation des distances intra et inter faisceaux
ii. Utilisation de l’intensité du signal fluorescent pour estimer le nombre de microtubules par faisceau
d) Estimation de l’occurrence des faisceaux chez les plantes contrôles et double mutant.
4) Désorganisation du réseau cortical et diminution du nombre de microtubules par faisceau en absence de MAP65-1
a) Nombre de microtubules par faisceau
b) Organisation des faisceaux en réseau
II) Dynamique des microtubules et organisation du réseau
1) Instabilité dynamique des microtubules chez le double mutant eb1b-2 eb1b-3 et chez le mutant map65-1
2) Instabilité dynamique et réorganisation du réseau cortical
III) EB1 et hypersensibilité de la racine au toucher
IV) Mise en évidence des propriétés intrinsèques de EB1.
1) Effet sur la dynamique des microtubules
2) Effet sur la formation des faisceaux
V) Exploration du rôle de EB1 dans l’organisation du réseau endomembranaire.
Discussion
1) Limites du modèle
2) Mécanismes d’organisation du réseau de microtubules
3) Intégration multi-échelle des phénotypes : proposition d’un modèle de travail
4) Des phénotypes faibles mais néanmoins intéressants
Perspectives
Matériel et méthodes
1) Lignées et constructions
2) Milieux de cultures
3) Conditions de cultures
a) Arabidopsis thaliana
b) Agrobacterium tumefaciens
c) Escherichia coli
4) Conditions d’observations
a) Plantules entières
b) Microscopie
i. Organisation du réseau cortical
ii. Instabilité dynamique des microtubules
iii. Super-résolution
iv. Méristème apical racinaire
v. Analyse de la paroi
vi. Microscopie électronique
vii. Expression transitoire
viii. Système purifié
5) Analyse d’image
a) Organisation du réseau cortical
b) Nombre de microtubules par faisceau
c) Instabilité dynamique des microtubules
d) Réorientation du réseau par l’auxine
e) Déviation de la racine
f) Taille de la racine
6) Analyse statistiques
a) Organisation du réseau cortical
b) Désorganisation de la paroi
c) Nombre de microtubules par faisceau
d) Instabilité dynamique
e) Réorientation du réseau de microtubules par l’auxine
f) Taille et déviation des racines en fonction de la dureté du milieu.
g) Taille du méristème apical racinaire
7) Purification de la protéine EB1b-6xHis
Bibliographie
Liste des annexes

Télécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *