Les facteurs individuels et environnementaux dans les conduites addictives

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Précarité et accès aux soins

Au-delà de l’aspect matériel, il est important de considérer l’impact psychologique de la précarité pour comprendre la relation complexe qu’a l’individu avec sa santé et le système de soin. Du fait de l’insécurité liée à la précarité, l’individu est vulnérable aux événements et au stress de la vie. Il connaît une baisse de l’estime de soi car il est progressivement isolé et mis à la marge de la société (64) (65) (51) (57).
Le sujet va se heurter à l’incompréhension voir à la stigmatisation d’une société qui ne parvient pas à l’intégrer. La société n’est plus en mesure de lui garantir certaines ressources et conditions permettant à un individu de prendre soin de lui.
La chartre d’Ottawa en 1986 définit les ressources et les conditions nécessaires pour permettre à une personne de pouvoir vivre le plus possible en bonne santé, elles doivent permettre à l’individu de : « se loger, accéder à l’éducation, se nourrir convenablement, disposer d’un certain revenu, bénéficier d’un éco-système stable, compter sur un apport durable de ressources, avoir droit à la justice sociale et à un traitement équitable. Tels sont les préalables indispensables à toute amélioration de la santé ».
Lorsque plusieurs critères font défaut dans le temps, le sujet risque de se trouver durablement fragilisé sur le plan psychologique. Il va perdre confiance en lui, dans les institutions et dans son devenir. Pour échapper à ce sentiment d’exclusion il peut développer un syndrome d’auto-exclusion. L’individu va perdre la capacité à demander de l’aide et va mettre en échec les propositions qui lui sont faites. C’est une « rupture active des liens » (66). Ce syndrome décrit par le Dr FURTOS se manifeste par une anesthésie du corps, des émotions et une inhibition de la pensée. Ces réactions paradoxales en réponse à la souffrance psychique de l’exclusion peuvent déstabiliser les professionnels du sanitaire et du social. (67) (68) (66).
La précarité influence la façon dont le système de soins et les professionnels abordent l’individu. La méconnaissance des professionnels quant à la situation et la réalité du patient précaire peuvent entraver une bonne communication. Les priorités ne sont pas les mêmes, la réalité du quotidien et la vision du monde diffèrent, entraînant des incompréhensions pouvant mener à l’exclusion du soin. En effet, d’une part le professionnel à une vision globale de la prise en charge de l’individu avec une idée du parcours qu’il veut impulser à son patient, alors que l’individu aura surement une autre vision du moment, en fonction de ses problématiques actuelles et de ses croyances.
Certaines études ont montré que les professionnels pouvaient avoir des perceptions négatives des personnes en situation de précarité menant à une prise en charge différente de celle des populations plus favorisées. Ils peuvent avoir tendance à penser cette patientèle comme « inaccessible » se sentant impuissants. Ils peuvent également penser que les patients démunis sont moins en mesure d’adopter des comportements préventifs, ou d’observer les traitements prescrits. Ils surévaluent de manières négatives la charge de travail qu’ils vont avoir à fournir pour les prendre en charge.
Ces préjugés naissent de causes multiples qui sont à la fois causes et conséquences. Pour les soignants, il est plus valorisant de prendre en charge une pathologie aiguë car sa résolution est souvent rapide. A l’inverse, prendre en charge des pathologies chroniques peut s’avérer frustrant, avec une prise en charge longue et parfois peu d’amélioration. Or les personnes les plus démunies cumulent des problématiques de santé souvent plus avancées et mêlées à des situations sociales complexes. Ce fossé socioculturel va ternir la relation entre professionnel-patient. Cette stigmatisation va freiner le recours aux soins des patients démunis et dégrader encore leur état de santé. (51) (69) (70) (71) (72) (42).
Cette stigmatisation, en plus des aspects évoqués dans le premier paragraphe, potentialise ce sentiment de honte et de culpabilité éprouvé par le sujet en situation de précarité. Tous ces éléments participent aux difficultés d’accès aux soins et aux inégalités en santé des personnes en situation de précarité.

Le lien entre précarité et addiction

La France à légiféré en 1970 l’usage des drogues sur le territoire. La pénalisation associée à la stigmatisation sociale de l’usage des drogues contribue à l’invisibilisation des usagers ce qui les rend plus difficilement atteignables par les campagnes de prévention et de réduction des risques. Les représentations de la société sur la précarité et l’addiction sont souvent liées, elles sont parfois sous tendues par des stéréotypes sur l’usager de drogue et sur les sujets en situation de précarité. Cette vision négative participe à la stigmatisation de l’usager et donc à son exclusion.
Il a été montré dans certaines études épidémiologiques que le niveau social, la catégorie professionnelle, le niveau d’éducation modèlent le rapport aux substances psychoactives (59) (73). Il a, par exemple, été mis en évidence que la consommation d’alcool régulière était plus fréquente chez les personnes sans emplois (73). Parmi les personnes fréquentant les CSAPA pour une problématique liée à l’alcool, le taux d’emploi pour les hommes est de 52% et celui des femmes est de 50%, alors qu’il est respectivement de 82% et de 74% dans la population générale (74).
Pour les CAARUD en 2015, 79% des usagers considérés en situation de forte précarité était sans couverture sociale alors que seulement 1,1 % des usagers considérés en faible précarité étaient sans couverture. (39)
En 2017, 8,2% des Français bénéficiaient de la CMU-C, cette mesure permet la prise en charge des dépenses liées aux soins. Toujours en 2017, 40% des bénéficiaires de TSO étaient affiliés à la CMU-C, ces chiffres bruts sont à interpréter avec prudence mais ils montrent le lien entre niveau de vie et les troubles liés à l’usage de substances psycho actives. (75,76)
Au-delà du constat épidémiologique, il est parfois complexe de comprendre pourquoi et comment les comorbidités psychiatriques influent sur la consommation de substances psycho actives et inversement.
Certains ont émis l’hypothèse que certaines consommations pouvaient être un moyen d’automédication en particulier pour diminuer les symptômes des pathologies psychiatriques. Cependant, les conséquences négatives des conduites addictives vont accentuer l’exclusion qu’ils subissent déjà à cause de leur pathologie psychiatrique.
Pour d’autres la consommation de substances permettrait d’exprimer et/ou de soulager les souffrances, une façon de ressentir des émotions positives en opposition aux émotions négatives éprouvées à cause d’un parcours de vie chaotique. Dans le syndrome d’auto-exclusion décrit par le Dr. Furtos, les consommations de substances psychoactives serviraient en partie, à maintenir à distance les relations avec autrui, car cette consommation n’est pas considérée comme socialement acceptable. (66)
Concernant le statut socio-économique, le parcours professionnel des patients ayant des conduites addictives peut être ponctué par des difficultés de maintien dans l’emploi pouvant entrainer des difficultés financières.
S’ensuit ensuite l’accumulation des difficultés (financières, économiques, sociales) qui plonge l’individu dans un contexte global d’insécurité, rejoignant alors le concept de précarité.
Les conduites addictives et la précarité sont intimement liées et sont à la fois cause et conséquence l’une de l’autre. Il est essentiel de rappeler que c’est un processus dynamique et évolutif tout au long de la vie de l’individu.
Tout au long de ce travail nous nous intéresserons à ces patients ayant des conduites addictives et vivant dans une situation de précarité. Nous définissons cette population comme notre population d’intérêt.

Parcours sanitaire et social de la population d’intérêt

Les établissements médico-sociaux

Les établissements médico-sociaux sont des structures ayant pour vocation l’accueil et l’accompagnement d’un public présentant des facteurs de vulnérabilité (mineurs en danger, personnes handicapées, personnes âgées, adultes atteints de maladie chronique, personnes en situation d’exclusion). Ils permettent d’assurer une continuité entre l’accompagnement social et sanitaire. (77)
Dans le secteur médico-social spécialisé en addictologie on retrouve :
Ø Les Centre de Soins, d’Accompagnement et de Prévention en Addictologie (CSAPA) :
Ce sont des lieux d’accueil pluridisciplinaires avec : des médecins, des infirmiers, des psychologues et des professionnels socio-éducatifs. Ils ont pour missions l’accueil et l’information des personnes et leurs familles ayant des consommations à risque, un usage nocif ou une addiction. Leur but est de réaliser une prise en charge médicale, sociale, psychologique et éducative.
Ils sont financés en partie par l’assurance maladie. Ils sont principalement ambulatoires et accueillent anonymement et gratuitement les patients.
Ø Centres d’Accueil et d’Accompagnement à la Réduction des risques pour Usagers de Drogues (CAARUD) :
Ces centres accueillent les usagers ayant des troubles liés à l’usage de substances, ils proposent un accueil inconditionnel quelques soit les consommations. Leur but est d’offrir aux usagers un lieu collectif d’échanges, d’informations et de soutien. Ils ont pour mission de proposer des actions de réduction des risques (RDR) afin de limiter l’impact de la consommation de drogues, notamment au niveau infectieux. Ils proposent aux usagers du matériel afin de limiter les dommages liés aux consommations. Ils offrent aux plus marginalisés un accès aux soins et aux droits communs.
Il existe d’autres établissements médico-sociaux qui accompagnent les personnes en situation de précarité dans leurs parcours de soins pour en assurer la continuité.
Ils répondent aux besoins spécifiques, sanitaires et sociaux des personnes sans domicile grâce à des équipes pluridisciplinaires. Ces établissements n’ont pas pour vocation de se substituer au secteur hospitalier. Ils ont pour vocation d’accompagner l’individu dans son parcours de soins.
Ø Les Lits Haltes Soins Santé (LHSS) :
Ils accueillent des personnes souffrant de pathologies aiguës et/ou ayant un état de santé psychique incompatible avec la vie à la rue. Ils ont pour vocation d’héberger et de proposer des soins médicaux et paramédicaux le temps de la prise en charge. Ils ont aussi pour but d’accompagner le patient dans son parcours de soins en participant à l’éducation en santé et à l’éducation thérapeutique. Ils élaborent avec la personne un projet de sortie qui prend en compte son état de santé et aussi son environnement social.
En complément si l’individu souffre de pathologies lourdes handicapante et invalidantes chroniques il pourra être orienté vers les lits d’accueil médicalisés.
Ø Lits d’Accueil Médicalisés (LAM) :
Ils accueillent des patients présentant des pathologies lourdes et/ou chroniques invalidantes impactant l’autonomie de l’individu et qui sont incompatibles avec la vie à la rue. Ils ont pour mission de proposer un hébergement au long cours et de proposer des soins médicaux et paramédicaux. Ils ont aussi pour but d’apporter une aide à la vie quotidienne. Ces établissements mettent en place avec l’individu un accompagnement social adapté afin d’établir et de mener à bien un projet de vie. Une équipe d’infirmières est présente 24h/24h.
Ø Les appartements de coordination thérapeutiques généralistes (ACT).
Ces structures proposent un accès à un logement ordinaire directement depuis la rue avec un accompagnement soutenu pluridisciplinaire au domicile. Il est proposé aux personnes sans-abris ayant des problématiques lourdes de santé mentale. Cet accès durable au logement permet d’inscrire l’individu dans un projet de soin global et de développer son accès aux droits communs et son insertion sociale.
Lorsqu’un individu ou un ménage connaît de graves difficultés économiques, familiales, ou d’hébergement il peut se tourner vers les structures d’accueil, d’hébergement et d’insertion.
Ø Les Services Intégrés d’Accueil et d’Orientation (SIAO) :
Ils ont pour mission, entre autres, d’orienter les personnes sans-abris vers les différents centres d’hébergement en fonction de la demande et des besoins de la personne. Ces services coordonnent et centralisent les demandes.
Ø Les SIAO gèrent le 115 qui est une plateforme téléphonique d’urgence sociale permettant aux personnes sans-abris d’obtenir des informations et d’être réorientées vers les centres d’hébergements.
Ø Cette plateforme permet aussi aux particuliers de signaler des personnes vulnérables pour lesquelles ils sont inquiets, le SIAO peut alors envisager de déployer les équipes mobiles sanitaires et sociales du SAMU SOCIAL. Ils proposent un accompagnement social aux personnes les plus vulnérables.
Pour l’hébergement, ils orientent les personnes vers :
Ø Les Centres d’Hébergement et de Réinsertion Sociale (CHRS) :
Ces centres ont pour mission d’accueillir et de proposer un hébergement pour les personnes en situation de précarité. Ils assurent un accompagnement social et éducatif afin de les aider à accéder aux droits communs et de les accompagner dans leur insertion sociale afin de les aider à recouvrer leur autonomie.
Ø Les Centres d’Hébergement d’Urgence (CHU) :
Ces centres accueillent de manière temporaire des personnes en situation de précarité. Ils accueillent de manière immédiate et inconditionnelle les individus. Ils les mettent à l’abri et leur proposent l’accès à l’hygiène et à la restauration. Ils leur proposent aussi un accompagnement social.

Le secteur hospitalier

Le secteur hospitalier de psychiatrie accueille les patients ayant des problématiques addictives et parfois de précarité, avec accès au plateau technique de l’hôpital et à ses différentes spécialités.
Il dispose de différents dispositifs :
Ø Consultations d’addictologie :
Les consultations d’addictologie établissent un premier contact avec l’usager, et permettent l’évaluation de la pathologie addictive afin d’établir avec l’usager le projet de soins.
Ø Unité d’hospitalisation à temps complet :
Le temps de l’hospitalisation complète est un temps privilégié, en urgence ou programmé, dans le parcours de l’usager. Ce temps lui permet de travailler sur ses conduites addictives. Il peut mettre à distance ses consommations pour faire un sevrage, ou pour faire une évaluation psychiatrique ou somatique.
Ø Hôpital de jour en addictologie :
Ce séjour s’inscrit dans un projet de soin global. Il propose à l’individu un accompagnement social et un projet thérapeutique spécifique. L’accompagnement est réalisé par une équipe pluridisciplinaire.
Ø Soins de suite et réadaptation en addictologie :
Les séjours en SSR, souvent plus longs, permettent de prendre en compte la complexité du parcours de vie d’un patient. Ils ont pour but de mettre à distance les pratiques addictives et de permettre aux individus de consolider le projet de soin. Ils ont aussi pour objectifs de travailler sur la santé somatique et psychologique de l’individu. L’insertion sociale se poursuit grâce à l’accompagnement social et éducatif.
Ø Équipe de Liaison et de Soins en Addictologie (ELSA) :
Elles ont pour but de former et d’accompagner les services hospitaliers lorsqu’ils sont confrontés à des problématiques de conduites addictives. Ces équipes ont été créés en partant du constat que les problématiques de conduites addictives se rencontrent parmi les patients dans toutes les spécialités. Ces équipes sont pluridisciplinaires : IDE, médecins, psychologue, travailleurs sociaux. Elles permettent de créer un lien entre les patients et les services d’addictologie.
Comme vu précédemment le lien entre psychiatrie, addictologie et précarité est important, les services de psychiatrie hospitaliers ont développé des services pour aller vers les populations en difficultés.
Ø Équipe mobile psychiatrie précarité (EMPP) :
Elles ont pour missions de favoriser l’accès aux soins et l’accès aux droits des populations les plus démunies en situation d’exclusion. Elles ont pour vocation de s’adresser directement aux individus mais aussi de créer un lien, de travailler et de former les acteurs sanitaires et sociaux qui maillent les territoires. Ce sont aussi des équipes pluridisciplinaires. Elles ont un lien avec les équipes sanitaires notamment avec les Permanences d’Accès aux Soins de Santé.
Ø Permanence d’Accès aux Soins de Santé (PASS) :
Elles ont pour mission de faciliter l’accès aux soins des personnes démunies. Elle propose des prises en charges médicales et peuvent les accompagner dans les prises en charges sociales.

Les associations

De nombreuses associations existent, elles proposent des modes d’accompagnement variés pour les personnes ayant des pratiques addictives et/ou étant en situation de précarité. Elles ont une place importante dans le parcours sanitaire et social des personnes en leur apportant le soutien dont elles ont besoin. Elles se basent sur l’expérience de leurs membres bénévoles ou salariés. Les accompagnements sont multiples : accueil de jour, maraudes, hébergements, restauration, hygiène, soutien matériel, etc.

Le secteur ambulatoire

Les médecins traitants et les pharmaciens sont parfois le premiers recours, ils jouent un rôle de repérage et d’orientation.
Le médecin traitant peut coordonner le parcours de soins : il accompagne et guide ses patients à travers les différentes structures qui existent.
En ambulatoire, il existe aussi des addictologues libéraux. Les psychiatres et les psychologues peuvent aussi jouer un rôle dans l’accompagnement de cette population.

En Loire Atlantique

Ø Les CSAPA :
– Les APSYADES : Sept antennes de CSAPA : Ancenis, Chateaubriand, Rezé, Pornic, Nantes (Bd Jean XXIII), Nantes (Montaudouine).
– OPPELIA : deux antennes : CSAPA Le Triangle Nantes, CSAPA La Rose des Vents Saint Nazaire.
Ø Les CAARUD :
– OPPELIA : CAARUD L’Acothé Nantes, CAARUD La Rose des Vents Saint Nazaire
Ø Les associations (listes non exhaustives) :
– L’association Saint Benoit Labre (Vertou) – services non exhaustifs :
• LHSS
• LAM
• CHRS
– ANEF-FERRER (Nantes et Saint Nazaire) – services non exhaustifs :
• LHSS – Saint Nazaire
• CHU – Saint Nazaire
• Maraudes – veille sociale – Saint Nazaire
• CHRS – Nantes
• Maison d’Accueil de Jour (MAJ) – Nantes : accueil de jour, accompagnement social, soutien, etc.
– La Maison de Coluche – Les Restos du coeur (Nantes) : Centre d’hébergement d’urgence.
– Écoute de la rue (Nantes) : Maraudes.
– SIAO44 : 115, SAMU SOCIAl.
– Solidarité Estuaire (loire Atlantique) :
• La R’ssource : La R’ssource – Nantes : accueil de jour, accompagnement social, pour les 12-25 ans, etc.
• CHRS
• Hébergement d’urgence
– Les Eaux Vives :
• CHRS Le Val.
• Foyer 24 bis : Hébergements d’urgences
• La halte de nuit 44 : accueil de nuit
• Foyer saint Martin : Hébergements d’urgences
• La Clairefontaine : accueil de jour et restauration
Ø Le secteur hospitalier :
– CHU Nantes :
• ELPP
• ELSA
• Secteur d’hospitalisation complète
• HDJ
• Urgences psychiatriques

Mise en place des mesures sanitaires.

Les gouvernements ont instauré des mesures sanitaires afin de limiter la propagation du virus. En France, le président et le ministère de la santé ont instauré différentes mesures afin de limiter la propagation du virus :
– Isolement / quarantaine pour les cas positifs ou cas contact.
– Confinement.
– Restriction de circulation : couvre-feu, restriction de rassemblement, limitation des voyages aux motifs impérieux.
En France hexagonale jusqu’à mai 2021 il y a eu trois différents confinements (plus ou moins stricts pour enrailler les vagues épidémiques successives) : du 17 mars au 11 mai 2020 (1 mois et 23 jours), du 30 octobre au 15 décembre 2020 (1 mois et 14 jours) et
du 3 avril au 3 mai 2021 (28 jours). (81) Entre ces confinements et après le confinement d’avril-mai 2021, des mesures pour limiter la propagation du virus ont été mises en place : couvre-feu, limitation des déplacements (rayon de déplacement autour du domicile, attestations, limitation déplacements inter-régions etc.) fermetures des bars et restaurants, des lieux culturels, restriction de rassemblement, mise en place d’un pass sanitaire. La mise en place de ces mesures est inédite et entraîne des bouleversements socio-économiques. Elles provoquent des modifications des pratiques de sociabilité, des habitudes de vie et de l’organisation du travail. (82)
Au-delà de l’aspect sanitaire, des inquiétudes ont émergé sur les conséquences d’une telle crise sur les populations plus vulnérables. Certaines études ont rapidement montré que le niveau socio-économique du patient influence de manière négative sur risque de contamination et le degré de sévérité de la Covid. Cela s’expliquerait par : un moins bon état de santé, un environnement moins favorable (habitations précaires, lieux de vie surpeuplé, etc.) et le moindre recours aux soins. (83). L’organisation du travail a été bouleversé par la fermeture des commerces dits « non essentiels » et le recours massif au télétravail. Afin de limiter les pertes d’emplois et limiter les pertes de salaire le gouvernement a mis en place à titre exceptionnel le chômage partiel, permettant de maintenir à environ 80% le niveau de salaire. Les ouvriers, les employés, les 18-24 ans (représentant la majorité des emplois précaires) étaient plus en chômage partiel que les cadres. Ils ont plus souvent estimé que leur situation financière s’était dégradée en mai 2020 (84,85)

Réorganisation du parcours sanitaire et social

Il a fallu, souvent dans l’urgence adapter l’organisation des hôpitaux et cliniques sans savoir quels impacts cela aurait sur les usagers du système de soin et sur les professionnels (86) (87). La réorganisation du système de soins s’est faite afin de libérer des lits d’hospitalisations pour accueillir le nombre croissant de cas Covid. Tout au long de l’épidémie, il y a eu des déprogrammations de soins programmés. Par exemple, en Ile de France, l’ARS a demandé aux hôpitaux et cliniques de déprogrammer 40% de leurs interventions en mars 2021. Ces déprogrammations auront des conséquences à court et long terme sur la santé des personnes (88). Dans les services de psychiatrie et d’addictologie, comme dans les autres services, l’accueil a aussi été réorganisé. Les services d’addictologie ont dû eux aussi repousser, annuler des soins. Peu de données chiffrées existent sur les déprogrammations dans les secteurs de psychiatrie. Selon les recommandations ministérielles, les PASS ont maintenu et réorganisé leurs activités en privilégiant le recours à la télésanté (téléconsultations, téléphone, etc.), elles ont pu maintenir l’accueil physique si la situation le nécessitait. Il y a eu, en fonction des territoires, des déploiements de PASS mobile pour se rendre dans les bidonvilles et toucher les publics les plus éloignés du soin. Les EMPP ont continué leurs actions en s’adaptant aux mesures sanitaires.
En ambulatoire, les soins ont eux aussi été bouleversés. Afin de limiter la propagation du virus certains professionnels ont dû fermer leurs portes (psychologues, dentistes, certains médecins spécialistes, etc.). Les médecins en ambulatoire ont vu le nombre de consultations diminuer de manière importante (89). Ces renoncements aux soins ont inquiété les professionnels et les patients car ils seront probablement responsables de retards de diagnostics. Cela a été d’autant plus inquiétant chez les populations vulnérables qui présentent déjà un état de santé moins bon et qu’on les sait plus sensibles aux situations difficiles.
Les pouvoirs publics ont dès le début permis aux établissements médico-sociaux de continuer leurs actions, sous réserve de suivre le protocole sanitaire (90).
La mise en place du premier confinement a mis en évidence l’importance d’avoir un logement pour se protéger. Il a donc paru urgent de repenser l’hébergement du public vulnérable à la rue. Le gouvernement et les acteurs sociaux locaux ont ouvert en mai 2020 12 600 places d’hébergement dans les hôtels (91). La trêve hivernale a été prolongée jusqu’en juillet 2020.
Pour rester ouvert, selon les recommandations gouvernementales les centres d’hébergement ont dû réorganiser les pièces de vies collectives, adapter le système de la restauration, étendre leurs horaires d’ouvertures 24/24h, etc.
Ils ont dû diminuer le nombre d’accueillis et ont dû constituer des groupes « fixes » pour limiter le turn-over habituel sur les places d’hébergements. Si cela a pu permettre une continuité dans l’hébergement et une stabilisation de certaines situations, ces événements ont mis en avant le manque chronique de places d’hébergements. Malgré tout, toutes les personnes n’ont pu être mises à l’abri (par manque de place ou refus de placement) ce qui a pu créer des situations complexes car les ressources liées à la manche se sont amoindries. Selon les recommandations ministérielles, les acteurs de la veille sociale ont pu continuer leur activité de maraudes auprès du public de la rue. Les accueils de jours, eux, ont dû fermer leurs portes.
Dans le secteur d’addictologie, selon les recommandations (92), les CSAPA et CARRUD ont pu rester ouvert en limitant les consultations en présentiel, en modifiant le fonctionnement de la structure pour éviter la propagation du virus, en renforçant les mesures barrières etc.
Les associations, soutenant les publics vulnérables, ont pu elles aussi rester ouvertes en respectant les règles sanitaires. Ces associations sont restées mobilisées, particulièrement dans l’aide alimentaire. Cependant, certaines ont dû fermer leurs portes car les bénévoles, parfois âgées, présentaient des facteurs de risques au Covid. Il a été difficile de trouver des chiffres exacts (93). Cependant, il existe, de nombreux articles de presse évoquant la mobilisation des associations et des bénévoles. (93–95)
A Nantes, au 15 mai 2020, 500 places d’hébergement avaient été créées.
Une PASS mobile sanitaire a été créée et s’est déployée au niveau des lieux de squats et de bidonvilles. Une permanence de soins par un(e) IDE a été mise en place à l’espace Agnès Varda. Le CSAPA et le CAARUD de Nantes ont recentrés leurs activités sur un même site. Les accueils de jours ont fermés, mais certains de ces lieux ont servi pour la distribution de colis alimentaires. Comme recommandé par le gouvernement, un centre de desserrement Covid a été installé à Saint Aignan de Grand Lieu. Il y avait 48 places. Ce centre était destiné à accueillir les patients atteints du Covid ne nécessitant pas une hospitalisation mais dont les conditions de logement ne permettaient pas d’être isolés ou surveillés.

Les premiers constats de la période

Du côté de la santé mentale

Dès mai 2020, des inquiétudes ont émergé concernant les conséquences psychiques de la crise sanitaire (96). En effet, une revue de la littérature a montré l’impact psychologique négatif des confinements et des restrictions des libertés individuelles à travers l’expérience de précédentes quarantaines locales (SARS en 2003, EBOLA en 2014, etc.). (97) Des études ont rapidement été diligentées afin de suivre les conséquences de la pandémie. Les médecins généralistes Français ont rapidement noté une augmentation des consultations pour anxiété, stress et syndrome dépressif, et ceci d’autant plus si ils exerçaient dans un département fortement touché par le Covid-19 (98)
Les jeunes de 15-24 ans ont estimé, pour environ 22% d’entre eux, avoir des symptômes dépressifs à la sortie du premier confinement. Les symptômes dépressifs étaient souvent liés à une situation financière qui s’était dégradée pendant le premier confinement. (2)
Cette tendance semble se confirmer au fil des mois depuis le début de la pandémie. En effet, Santé Publique France réalise une enquête COVIPREV depuis mars 2020 pour évaluer, entre autre, l’état de santé psychique des Français.
Les dernières données (31août 2021-7septembre 2021) montrent que 23 % des Français présentent des symptômes d’un état anxieux, soit plus de 10 points de plus que pour une période hors épidémie. La prévalence des troubles du sommeil a elle aussi augmenté de 14 points : 63% des Français déclaraient avoir des troubles du sommeil. Cet état de stress était plus important lorsque que la personne avait des antécédents de troubles psychologiques, 44% d’entre eux déclaraient un état anxieux contre 17% pour les individus n’ayant pas d’antécédents.
Les personnes ayant des facteurs de fragilités (ATCD psychologique, situation financière jugée difficile, jeunes, etc.) présentaient un état de stress plus important. (99,100)
Il a semblé que les mesures mises en place impactaient et aggravaient les inégalités en santé préexistantes chez les populations déjà vulnérables.
Concernant la population d’intérêt : l’enquête ECHO a interrogé des personnes en mai-juin 2020 en situation de précarité vivant en centre d’hébergement d’urgence. D’après les premiers résultats, 37% d’entre eux se sont sentis plus seul, 28,5% d’entre eux présentaient les symptômes d’un état dépressif. (101)

Les premiers chiffres sur l’addictologie

Les associations, les Patients Experts et les professionnels sociaux et médicaux se sont rapidement interrogés sur les conséquences de cette situation inédite. Les interrogations concernaient : l’impact sur les usages et les usagers, sur la continuité des soins et de l’accompagnement social et sur la réduction des risques. Comme évoqué dans les chapitres précédents, ces interrogations se sont avérées indéniablement en lien avec les questions de précarité et d’exclusion. D’après une enquête, en février 2021, 56% des personnes présentant une situation financière difficile estimaient qu’il était difficile de gérer certaines consommations pendant les confinements (102) (13) (87) (103)
Les résultats et les chiffres sont encore peu nombreux et partiels et concernent principalement le premier confinement.

Les produits licites

TSO et médicaments psychotropes

Les associations d’usagers de drogue, devant la fermeture ou la restriction d’horaires de certains CSAPA ou des centres de soins, ont rapidement interrogé les autorités concernant la délivrance et la prescription des traitements substitutifs aux opiacés (TSO). En effet, la fermeture des frontières a pu laisser penser que l’accessibilité des produits illicites diminueraient. Les usagers se seraient plus tournés vers les prescriptions de TSO. (13,14).
Pour les patients déjà stabilisés sous TSO, l’inquiétude de la continuité des traitements s’est posée, devant le manque d’accessibilité des médecins prescripteurs. Toutes ces modifications pouvaient laisser craindre un mésusage des traitements, des reventes, des partages des traitements et/ou des overdoses.
Pour répondre, en partie, à ces inquiétudes les autorités sanitaires ont assoupli les règles de prescriptions des TSO le 20 mars 2020.
Le stress engendré par la situation pouvait aussi laisser craindre une augmentation de la consommation voire le mésusage des traitements anxiolytiques ou hypnotiques.
D’après le 6e rapport sur la consommation des médicaments de ville durant l’épidémie de COVID-19 (période du 16 mars 2020 au 25 avril 2021), la consommation des médicaments psychotropes a augmenté par rapport à la même période de l’année précédente, confirmant les inquiétudes évoquées sur la santé psychologique des Français.
A l’annonce du premier confinement sur la semaine du 16 au 29 mars 2020, la consommation des TSO a augmenté de 10,2 %, les antidépresseurs de 21% et les anxiolytiques de 19,9%. Cette nette augmentation s’est estompée au fil des semaines de confinement, cf tableau ci-après. Les fluctuations des ventes et des remboursements d’une semaine sur l’autre au moment du confinement montrent bien l’instabilité de cette période et l’inquiétude qu’elle a provoquée. Cependant la majoration de la consommation des médicaments psychotropes s’est confirmée au fil des mois. Pour les TSO, en 2020 on notait une augmentation de consommation de +2,9%. Et de +4,7% de janvier à avril 2021.
Les délivrances d’hypnotiques et d’anxiolytiques étaient en forte hausse de janvier à avril 2021, respectivement +12,7% et + 10,3%. (104)

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Table des matières

Partie 1 – Contexte et état des lieux.
I. Introduction
II. La précarité et l’addiction.
A) Addiction.
1) Définitions et concepts généraux.
2) Mécanismes neurobiologiques des addictions.
3) Substances psycho-actives.
4) Les facteurs individuels et environnementaux dans les conduites addictives.
5) L’influence des conduites addictives sur la santé et le parcours de soin.
B) Précarité.
1) Définitions et concepts généraux.
2) Les inégalités sociales en santé.
3) Précarité et accès aux soins.
C) Le lien entre précarité et addiction.
III. Parcours sanitaire et social de la population d’intérêt.
A) Les établissements médico-sociaux.
B) Le secteur hospitalier
C) Les associations.
D) Le secteur ambulatoire.
E) En Loire Atlantique.
IV. Contexte de pandémie mondiale.
A) Généralités.
B) Mise en place des mesures sanitaires.
C) Réorganisation du parcours sanitaire et social.
V. Les premiers constats de la période.
A) Du côté de la santé mentale.
B) Les premiers chiffres sur l’addictologie.
1) Les produits licites.
a. TSO et médicaments psychotropes.
b. Alcool et tabac.
2) Les produits illicites.
VI. Problématiques.
Partie 2 – Méthodologie et résultats
I. Matériels et méthodes
A) Choix de la méthode.
B) Population cible.
C) Encadrement réglementaire.
D) Construction du questionnaire.
E) Diffusion du questionnaire.
F) Compilation des données et analyse.
II. Résultats.
A) Caractéristiques de la population interrogée.
B) Partie 1 – Pratiques addictives et soins en addictologie. (Tous les participants étaient invités à répondre)
1) Évolution des comportements liés à l’usage de substances psychoactives.
2) Les soins en addictologie.
3) La santé psychologique.
4) Approche qualitative.
a. L’isolement source de souffrance.
b. Remettre à zéro les discussions autour des consommations permettant une réflexion autour des pratiques de réduction des risques.
c. Modification de l’offre d’hébergement, permettant parfois, d’après les professionnels et bénévoles, une amélioration de la situation des usagers
C) Partie 2a – Évolution de l’accompagnement social des personnes en situation de précarité et d’addiction selon les travailleurs sociaux et bénévoles, acteurs du social
D) Partie 2b – Évolution de l’accompagnement médical des personnes en situation de précarité et d’addiction selon les IDE, psychologues et médecins
E) Partie 3- Coordination du parcours médico-social et qualité de vie des personnes ensituation de précarité et d’addiction pendant la crise. (Tous les participants étaient invités à répondre)
1) Articulation et coordination du parcours médico-social.
2) La qualité de vie des usagers pendant la crise.
3) Résultats qualitatifs.
III. Focus de résultats.
A) Focus sur la comparaison entre le groupe « santé » et le groupe « social »
B) Expérimentation de consommation d’alcool sur site
C) Les difficultés des travailleurs sociaux
D) Les questions non retranscrites dans l’analyse
Partie 3 – Analyse et conclusion
I. Forces et faiblesses de l’étude
A) Les faiblesses.
B) Les forces.
II. Discussion.
A) Tendance à l’augmentation de la consommation
B) Impact sur la santé psychique des usagers
C) L’utilisation des outils numériques mais avec des limites
D) Forte mobilisation des professionnels, qui a fait naître un travail sur la réduction des risques
E) Similarités réponse entre le groupe social et santé
III. Conclusion.
Index
Bibliographie

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