Selon le rapport mondial de développement humain de la PNUD (Programme des Nations Unies pour le développement), l’écart qui existe, en termes de développement et de croissance, entre les pays développés et les pays en voie de développement s’agrandit de plus en plus. Depuis 1960, l’écart entre les 20% les plus pauvres et les 20% les plus riches a plus que doublé. Ces derniers détiennent plus de 80% de la richesse mondiale et s’enrichissent davantage. Tandis que les pays du Sud s’appauvrissent de plus en plus. Leur revenu tend toujours à la baisse et a pour conséquence l’affaiblissement de leur croissance économique. Ce phénomène est surtout enregistré dans les pays d’Afrique Subsaharienne.
L’approche théorique de la croissance économique
Avant de pouvoir entamer l’analyse de la croissance économique de Madagascar, il est nécessaire d’avoir une base théorique de la croissance économique.
Mais qu’est ce que la croissance ?
Selon Kuznets (prix Nobel en 1971), « la croissance économique est essentiellement un phénomène qualitatif. À cet effet, on peut définir la croissance économique d’une nation comme un accroissement durable de la population et du produit par tête » .
Elle est donc définie comme étant un accroissement de la production nationale, une hausse continue en volume et sur une longue période de la production. Les notions de continuité et de période sont importantes car si la hausse est temporaire et ne se fait que sur une courte période, ceci est une expansion économique et non une croissance.
La croissance a, donc, des critères quantitatifs. Et elle est une condition sine qua none au développement qui, lui, inclut des critères qualitatifs. La détermination des facteurs de la croissance est alors basée sur ces définitions. C’est-à-dire tous ceux qui peuvent influer sur la hausse de la production sont considérés comme facteurs déterminants de la croissance.
Les facteurs de la croissance économique
Il peut être distingué deux types de croissance économique : la croissance potentielle et la croissance réelle. Par conséquent, il est aussi nécessaire de différencier les facteurs qui déterminent ces deux types de croissance.
Les facteurs déterminants de la croissance potentielle
Les principaux facteurs de la croissance potentielle sont le travail, le capital, le progrès technique et l’investissement. Une variation sur ces derniers a un impact sur le niveau de croissance.
Le capital
Pour les classiques, le capital, que se soit capital foncier (toutes les ressources que la nature peut donner) ou capital technique (typiquement les machines fabriquées par l’homme), est source de richesse.
Ce concept est repris par Marx. Il explique que le « capital C se décompose en deux parties : une somme d’argent c (capital constant), qui est dépensée pour les moyens de production, et un autre somme d’argent v (capital variable) qui est dépensée en force de travail. » Ce capital est incorporé dans le processus de production et une fois le processus terminé, un nouveau capital C’ = C + p (p étant le plus values ou le profit) est généré. Notons que le plus value ou profit p fait partie de la production national. Donc, chaque fois que le capitaliste consomme un capital, il génèrera un plus value p et par conséquent une augmentation de la production nationale.
De même pour Eugen Von Böhm-Bawerk, le capital qui est un détour de production est source d’accroissement de la production. En effet, l’entrepreneur en renonçant à une consommation présente – produire des biens de consommation – pour investir dans la production de bien d’équipement voit dans le futur une consommation plus forte.
Le travail
Pour les néo-classiques, le travail et le capital sont substituables. C’est-à-dire qu’une certaine quantité de capital peut être remplacée par une certaine quantité de travail, et vice versa, tout en gardant un même niveau de production. À cet effet, l’économie est nécessairement en situation de plein emploi parce qu’un excédent d’offre de travail entraînerait sur le marché, par la loi de l’offre et de la demande, une baisse du salaire (du coût du facteur travail) qui incitera l’entrepreneur à utiliser plus de travail que de capital. Ce mécanisme se maintient jusqu’au plein emploi. La quantité de travail disponible sur le marché peut être assimilée au taux de croissance démographique. En effet, un accroissement de la population ou plus précisément de la population active augmente l’offre de travail disponible pour la production. Et selon la fonction de production néo-classique, cette variation de la quantité de travail peut augmenter la production et donc une croissance économique.
Mais aussi, comme l’a annoncé Becker en 1964 dans Human Capital, a Theorical and Empirical Analys, la qualité de travail, mesurée par la qualification de la main d’œuvre, l’amélioration des conditions sanitaires et l’éducation, accroît sa productivité et par suite logique, agit favorablement sur la croissance économique.
Cependant, Robert M. Solow a démontré que la fonction de production de CobbDouglas n’explique pas la croissance mais une situation d’équilibre. Donc pour apporter une amélioration de cette fonction, il a introduit un troisième facteur qui est le facteur résiduel ou le progrès technique.
Le progrès technique
Le progrès technique, selon Solow, est assimilé au facteur temps dans la fonction de production. C’est-à-dire qu’avec le temps, l’agent économique peut acquérir, par exemple, des connaissances scientifiques appliquées à la production ou une innovation pour accroître la production ou bien des expériences qui amplifient la qualité de main d’œuvre et donc la productivité du travail.
En général, le progrès technique est un facteur exogène ou mieux un facteur non inclus dans la sphère économique mais qui a des impacts sur le processus économique. En effet, selon Carré, Dubois et Malinvaud, le résidu (la part de la croissance non expliquée par les facteurs de production) « traduit pour l’essentiel l’effet du progrès technique et de l’amélioration qu’a connue la gestion des entreprises et de l’économie ». De même, Schumpeter place le progrès technique et l’innovation au cœur du processus de croissance mais considère qu’il est un facteur endogène. Ceci du fait que l’entrepreneur, toujours en quête de profit, cherche à innover incessamment ces facteurs de production. Et pour cela, il doit investir.
L’investissement
L’investissement est assimilé à l’accumulation de capital fixe c’est-à-dire une augmentation du volume de capital utilisé dans le processus de production en vue d’une augmentation du volume de la production.
Dans toutes les théories économiques, l’investissement tient un rôle particulier dans la détermination de la croissance économique. Ainsi, pour Keynes et les keynésiens, deux types d’investissement doivent être distingués : l’investissement autonome et l’investissement induit par le multiplicateur. Ces investissements ont pour source l’épargne préalable, la création monétaire ou de l’État. Dans la théorie keynésienne, la demande effective est composée par la consommation et l’investissement. C’est dans cette optique que l’investissement a un effet multiplicateur sur la production et sur l’emploi. En effet, une augmentation supplémentaire de l’investissement donne naissance à un cercle vertueux pour l’augmentation de la production. Ce concept a été présenté par Richard Kahn en 1931 et a été repris par Keynes. Un investissement suppose l’achat d’un bien d’équipement et donc une augmentation de la demande de ce bien, d’où une augmentation de la production, du revenu, de la demande (et cette fois ci pas seulement de bien d’équipement), de la production …
Keynes affirme que plus la part du revenu destinée à la consommation, qu’il appel « propension marginal à consommer », est grande, plus l’effet du multiplicateur est important. Pour les libéraux qui considèrent que c’est l’offre qui détermine la demande, la production effective est égale à la production potentielle, il suffit donc d’investir plus pour produire davantage. D’ailleurs, Jean-Baptiste Say écrivait «remarquez en outre qu’il est impossible d’assigner une limite à la puissance qui résulte pour l’homme de la faculté de former des capitaux ; car les capitaux qu’il peut amasser avec le temps, l’épargne et son industrie, n’ont point de bornes. » (Traité d’économie politique, Livre I, chapitre XII).
Albert Aftalion, quant à lui, met l’accent sur le rôle de l’investissement dans les fluctuations économiques. À cet effet, il affirme dans son œuvre les Crise périodiques de surproduction que « de faibles fluctuations dans les quantités de biens de consommation peuvent ainsi être à la source de fluctuations très considérables dans les industries productrices de capitaux fixes. Il suffit d’insensibles oscillations à la base de la pyramide économique pour déterminer de terribles ébranlements, des écroulements retentissants parmi les constructions qui sont au sommet.» Ceci permet d’expliquer une grande partie de l’instabilité de la croissance économique.
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Table des matières
Introduction
Partie I : L’approche théorique de la croissance économique
Chapitre I : Les facteurs de la croissance économique
I.1) Les facteurs déterminants de la croissance potentielle
I.2) Les facteurs de la croissance effective
Chapitre II : Les débats sur la croissance
II.1) Les anciennes théories de la croissance
II.2) La théorie de croissance endogène
Partie II : L’analyse proprement dite de la croissance économique à Madagascar
Chapitre III : Les facteurs explicatifs de la croissance économique malgache
III.1) L’évolution du PIB ou de la croissance
III.2) La part de chaque secteur d’activité
III.3) Structure du PIB
III.4) Le commerce international
Chapitre IV : Les facteurs de blocage de la croissance économique de Madagascar
IV.1) Les déficiences du facteur travail
IV.2) Les facteurs culturels et politiques
Conclusion
Annexes
Bibliographie