Madagascar est un pays reconnu dans le monde pour sa richesse aquacole endémique. Il existe plus de 60 espèces de poisson retrouvées dans les eaux douces malgaches dont 56 endémiques. En eaux saumâtres, 6 espèces sont endémiques. Cette endémicité est marquée pour plus de 30 000 hectares de surfaces exploitables (Asity,2009). La pêche offre des emplois et des revenus que les gens utilisent pour acheter d’autres produits alimentaires (FAO, 2008). Elle englobe de nombreuses débouchées et influent sur de nombreuses filières tant locale, nationale qu’internationale à travers les produits aquacoles.
L’Etat adopte une politique de conservation à travers le principe de la gestion durable des individus aquatiques. Associée à cela, une panoplie de réglementations juridiques régissent les activités anthropiques piscicoles dont la principale est l’ordonnance 93-022 du 04-05-93 portant réglementation de la pêche et de l’aquaculture (MAEP, 2011). Ces dernières sont appuyées par de nombreux décrets qui ont été promulgués au fur et à mesure. L’activité va vers une intensification due aux progrès techniques et technologiques. La plupart des zones exploitables sont actuellement le lieu d’une évolution technique entrainant un agrandissement de la valeur de la production (BILLE, 2006). Ces activités apportent 6% du PIB national ; les filières sont de plus en plus priorisées pour être effectives sur le marché national et international. (RAZAFINDRAMIADANA, 2012) .
La production piscicole de Madagascar passe de 86 000 tonnes en 1989 à 30 000 tonnes en 2011. L’évolution de la quantité diminue de moins en moins, d’année en année, et l’impact sur le prix des poissons de 2010 à 2011 pour certaines espèces ont augmenté de 150% (SARALEA, 2012) . Le taux de consommation de poisson des Malgaches reste encore faible à cause des prix élevé des poissons. L’alimentation en poisson de la population est limitée en quantité, en qualité à travers les saisons. En effet, si le quintile le plus riche consomme 44,4% des ressources totales, le quintile le plus pauvre ne dispose que de 7,3% de la consommation totale (PROSPERER, 2008). Avec la moyenne de consommation qui est de 7 kilogrammes par habitant par an en matière de poissons. (RAZAFINDRAMIADANA,2012) .
La délimitation de l’étude
Présentation de la zone d’étude
La zone d’étude se trouve à proximité du lac Itasy. Ce lac se situe à environ 130 kilomètres d’Antananarivo en suivant la route nationale numéro 1 (RN1). Il se trouve dans une dépression d’une région volcanique. Sa superficie est d’environ 3 500 hectares. Le lac est situé à une altitude moyenne de 1 200 m. Le climat de la région est du type tropical et se caractérise par une température moyenne annuelle de 20°C, avec des moyennes mensuelles de l’ordre de 21°C en décembre et 16°C en juillet (RAKOTOMALALA, 2008) .
Le lac constitue une frontière entre la commune dont celle d’Ampefy et celle de Manazary. Le village d’Ampefy se situe dans la région d’Itasy, dans le district de Soavinandrina à environ 120 km à l’Ouest d’Antananarivo sur la RN1. Sur une surface totale de 4 541 km2 (RAKOTOMALALA, 2008). Les communes d’Analavory et de Soavinandrina dans le district de Saovinandrina sont assez éloignées du lac mais certains exploitants du lac y font le trajet pour pêcher. Ces communes possèdent des hameaux bordant le lac se situant de long en large des rives faisant foyer de nombreux ménages de pêcheurs.
Les activités de production des pêcheurs et la rentabilité de leurs productions
Le classement typologique des pêcheurs
Le classement des pêcheurs selon l’analyse factorielle discriminante :
Afin de cerner la situation des pêcheurs, une analyse portant sur le système de production a été effectuée pour classer les pêcheurs selon la similarité entre leurs pratiques.
Il a été constaté que les pêcheurs sont classés en 3 groupes après la classification hiérarchique ascendante et l’analyse K-means .L’analyse AFD a donné une typologie par rapport aux caractéristiques de activités de production et à la durée de leur période de pêche de chaque groupe. Le groupe 1 a représenté 28 % de l’échantillon contre 49 % pour le groupe 2 et 23% pour le groupe 3.
Les caractéristiques des activités
A partir du précédent classement, la valeur de la moyenne des variables étudiées pour chaque groupe a été considérée pour caractériser le groupe.
Discussions
La nature de la production des pêcheurs et leur situation financière
Dans cette étude, trois types de pêcheurs ont été mis en exergue. La configuration des activités de production a varié selon le groupe. La situation financière a été fonction du groupement dans lequel l’analyse a été effectuée.
Groupe 1
Concernant la partie rendement de production, le groupe a été constitué de producteurs effectuant le plus de culture de potirons entre les 3 groupes. La riziculture irriguée a avoisiné le rendement des autres groupes ainsi que la culture d’arachide. Ces pratiques ont été complémentées par le maïs, le haricot, la riziculture pluviale et le manioc dont les rendements ont été faibles. Il a pratiqué moins d’activité de culture par rapport aux autres groupes. Sa spécificité a été l’absence de culture d’aubergines africaines et de tomates.
Ce groupe n’a pas priorisé l’élevage. Par rapport aux autres groupes, les rendements ont été moins élevés. L’élevage de bovin destiné à la vente et l’élevage porcin naissant n’ont pas été pratiqués. L’utilisation de traction bovine a eu un rendement minimum par rapport aux deux autres groupes. Les autres pratiques d’élevage n’excèdent pas la moyenne, sauf la pisciculture qui a eu le meilleur rendement au niveau du groupe (111%). A propos de la pêche, ce groupe a démontré la situation des pêcheurs qui ont respecté le calendrier de pêche. Il a représenté les pêcheurs qui exploitent les 11 mois d’ouverture de la pêche. Le groupe a eu un rendement légèrement inférieur à la moyenne. La quantité de production a été meilleure que celle du groupe 3, mais légèrement inférieure à celle du groupe 2.
Sur le domaine de la rentabilité financière, ce groupe a été le plus faible par rapport aux autres producteurs. Il a été le plus proche du seuil de pauvreté, et son salaire a été inférieur au salaire minimum. Il a représenté les pêcheurs les plus défavorisés au sein des producteurs. A l’intérieur de ce groupe, des individus ont eu recours à la pêche illicite mais ils ont été minoritaires. Sa situation entrainerait une prédisposition à la pêche illicite, étant donnée l’opportunité offerte par la pêche en cas de problèmes financiers durant la période de fermeture.
Groupe 2
Ce groupe a travaillé sur 17 types de pratiques. Par rapport aux autres, il a effectué le plus de pratiques. En termes de culture, les rendements d’arachides et de tomates ont été meilleures par rapport aux deux autres groupes ; de même pour la culture de maïs et la riziculture irriguée. L’aubergine africaine a été un plus pour ce groupe. La production de porcelets a été spécifique au niveau de ce groupe. Le rendement de l’élevage de porcin engraissé a été maximum par rapport aux deux autres groupes. L’élevage bovin n’a pas été développé, cependant les pratiques ont eu un rendement moyen. La pisciculture a été la plus rentable, mais le rendement a avoisiné celui des deux autres groupes. Par ailleurs, la pêche a été parmi les activités prédominantes pour ce groupe. Il a compté le plus de pêcheurs illicites qui a avoisiné la moitié du nombre de pêcheurs total. Le rendement de la pêche du groupe a excédé le rendement moyen régional.
Le résultat financier des pratiques a été largement supérieur au seuil de pauvreté, et a permis d’obtenir un salaire supérieur au salaire minimum mensuel. Le résultat financier a été le meilleur par rapport à ces indicateurs parmi les trois groupes étudiés. Sans la pêche illicite, son revenu aurait diminué et pourrait avoir des répercutions sur la production et la situation financière.
Groupe 3
Le rendement cultural moyen n’a pas excédé la moyenne régionale. Cependant, il a eu les meilleures valeurs en termes de quantité de production et de surface exploitée. En général, les individus de ce groupe ont été les propriétaires de vastes superficies cultivables parmi les pêcheurs, ne les obligeant pas à focaliser leurs activités sur la pêche. Les cultures de pois de terre, de haricot et de riz pluvial ont obtenu le meilleur rendement au niveau des trois groupes. Les cultures de maïs, de manioc et d’arachide ont eu un rendement avoisinant celui du groupe 2. Le rendement de la culture de riz irrigué a été proche de celui du groupe 1.
A propos de l’élevage, ces producteurs se sont concentrés sur l’élevage bovin aux fins d’une double exploitation : en premier lieu pour le travail à traction (transport, charruage, hersage) et ensuite réformé à la vente. L’élevage porcin n’a consisté que sur l’engraissement pour la vente. La pisciculture a été délaissée par rapport aux autres groupes. Ce groupe a été constitué de pêcheurs qui n’ont pas exercé obligatoirement durant la saison d’ouverture et moins durant la fermeture ; c’est-à-dire, la période de pêche a été spécifique selon leurs convenances, variant de 3 à 11 mois spécifiquement selon les individus. Ce qui expliquerait la faiblesse de la quantité de production de la pêche du groupe par rapport aux deux autres groupes.
Le résultat financier de ce groupe a été légèrement inférieur à celui du groupe 2 : le revenu annuel a été assez éloigné du seuil de pauvreté et le salaire mensuel a été supérieur de 3%. Ce groupe représenterait les producteurs qui se spécialisent surtout dans les pratiques culturales que dans les activités de pêche.
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Table des matières
INTRODUCTION
I. MATERIELS ET METHODES
1.1. La délimitation de l’étude
1.1.1. Présentation de la zone d’étude
1.1.2. Choix du sujet
1.2. La méthodologie de recherche
1.2.1. Les démarches globales communes aux hypothèses
1.2.1.1. Les recherches bibliographiques et Webographiques
1.2.1.2. Etude préliminaire : les entretiens informels
1.2.1.3. Enquête formelle
a. L’échantillonnage
b. L’enquête
c. Le traitement des données
1.3. La démarche de vérification de chaque hypothèse
1.3.1. Les démarches spécifiques à l’hypothèse 1 : « Les activités des ménages basées sur celles de la pêche apportent une valeur financière suffisante pour satisfaire leurs besoins »
1.3.1.1. L’analyse factorielle discriminante (AFD)
1.3.1.2. L’économie des systèmes de production
1.3.1.3. Le rapport avec les indicateurs conventionnels
1.3.2. Les démarches spécifiques à l’hypothèse 2 : « L’activité la plus rémunératrice pour les producteurs étant la pêche et l’investissement des autres activités dans le temps en dépend »
1.3.2.1. La proportion du revenu agricole de chaque pratique
1.3.2.2. La méthode PERT pour établir le calendrier cultural
1.3.3. Les démarches spécifiques à l’hypothèse 3 : « Les producteurs sont lésés par rapport aux autres acteurs de la filière pêche »
1.3.3.1. La délimitation de la filière
1.3.3.2. La typologie des acteurs
1.3.3.3. L’analyse comptable de la filière
1.3.3.4. La carte BCG (Boston Consulting Group)
1.3.3.5. Analyse Forces, Faiblesses, Opportunités et Menaces de la filière
1.4. La démarche générale
1.5. Les limites de la méthodologie
1.6. Le chronogramme des activités
II. RESULTATS
2.1. Les activités de production des pêcheurs et la rentabilité de leurs productions
2.1.1. Le classement typologique des pêcheurs
2.1.1.1. Le classement des pêcheurs selon l’analyse factorielle discriminante
2.1.1.2. Les caractéristiques des activités
a. Concernant les pratiques culturales
b. A propos de l’élevage
c. A propos de la pêche
2.1.2. Le revenu des producteurs
2.1.2.1. Le revenu perçu pour l’année 2011
2.1.2.2. Les indicateurs de pauvreté
2.1.2.3. L’indicateur de salaire minimum
2.2. Le résultat de chaque activité des pêcheurs et leurs dispositions dans le temps
2.2.1. L’analyse de chaque pratique
2.2.2. La disponibilité financière des pêcheurs au cours de l’année
2.3. La situation des différents acteurs dans la filière pêche
2.3.1. Description de la filière
2.3.2. Les différents acteurs
2.3.3. La rentabilité de chaque acteur
2.3.4. Le positionnement de chaque acteur
2.3.5. L’analyse FFOM de la filière
III. DISCUSSIONS ET RECOMMANDATIONS
3.1. Discussions
3.1.1. La nature de la production des pêcheurs et leur situation financière
3.1.1.1. Groupe 1
3.1.1.2. Groupe 2
3.1.1.3. Groupe 3
3.1.1.4. Les points communs des producteurs
3.1.1.5. La situation des pêcheurs
3.1.2. La valeur de chaque activité de production
3.1.2.1. Les activités les plus rentables : la riziculture irriguée et la pêche
a. La riziculture irriguée
b. La pêche
3.1.2.2. Les activités de cultures complémentaires
3.1.2.3. L’élevage, une activité délaissée
a. L’élevage bovin, l’élevage porcin et l’aviculture
b. La pisciculture en étang
3.1.2.4. La disponibilité des capitaux dans le temps
a. Groupe 1
b. Groupe 2
c. Groupe 3
3.1.3. Les acteurs de la filière
3.1.3.1. La filière proprement dite
3.1.3.2. A propos de chaque acteur
a. Le producteur
b. Le rabatteur
c. Le collecteur
3.2. Recommandations
3.2.1. Par rapport à la production et la rentabilité
3.2.2. Par rapport à la pêche illicite
CONCLUSION