Les facteurs de risque après le traitement d’une lésion intra-épithéliale de haut grade du col utérin

Le dépistage du cancer du col de l’utérus repose sur le diagnostic et le traitement des lésions précancéreuses : les lésions intraépithéliales de haut grade (LIEHG) du col de l’utérus. Dans les pays où il a été mis en place, il a permis de réduire l’incidence du cancer du col utérin de près de 80 % (1). La résection à l’anse diathermique (RAD) est le traitement de référence des LIEHG du col de l’utérus. Ce traitement est facile à mettre en œuvre, peut être réalisé en ambulatoire, sous anesthésie locale et guidage colposcopique. Il offre une efficacité thérapeutique élevée et permet la confirmation du diagnostic par l’analyse histologique du fragment réséqué. L’enjeu de la RAD est de réaliser l’exérèse de l’intégralité de la LIEHG avec l’obtention de marges saines, tout en minimisant le volume et la profondeur d’exérèse de la pièce opératoire afin d’en limiter la morbidité obstétricale et néonatale ultérieure par augmentation du risque d’accouchement prématuré (2,3). L’intervention peut aussi entrainer une sténose cervicale qui va compromettre la surveillance post-thérapeutique (4). Celle-ci peut aussi exceptionnellement être responsable d’hématométrie et d’infertilité (5). Les antécédents de RAD peuvent également rendre l’interprétation de colposcopies ultérieures difficiles et ainsi compromettre le suivi des patientes traitées. La qualité de la colposcopie en post thérapeutique peut en effet être altérée par le processus de cicatrisation (6). Le risque de prématurité lors d’une grossesse ultérieure dépend essentiellement de l’importance du geste réalisé à savoir la profondeur de la résection, mais également le volume de la pièce opératoire (7–9). Le geste d’exérèse doit cependant être suffisamment profond pour garantir l’exérèse de l’intégralité de la lésion en fonction du type de jonction et ainsi limiter les risques de récidives ultérieures. Dans cet objectif, la réalisation d’une RAD sous vision colposcopique directe permet de réduire l’épaisseur et le volume de la pièce opératoire sans compromettre le statut des marges d’exérèse (10). Pour cette raison, les recommandations actuelles insistent sur l’utilisation systématique de la colposcopie pour guider le traitement par RAD des lésions précancéreuses du col utérin (11,12). Même si ce traitement est extrêmement efficace, les patientes ayant eu une RAD pour une LIEHG du col de l’utérus restent exposées à un risque de récidive. Ce risque varie selon les études entre 1 et 35 % (13–17). Bien que celui-ci soit le plus élevé dans les deux premières années suivant le traitement par RAD (17,18), il persiste tout au long de la vie de ces femmes qui restent exposées à un risque de cancer invasif supérieur à celui de la population générale, justifiant un suivi prolongé et régulier (19,20). Le principal facteur de risque de récidive est la persistance d’un test HPV positif après la RAD (18,21–24). Le statut des marges de résection a également été établi comme facteur de risque de récidive de ces lésions avec un risque accru de récidive en cas de marges non saines (25–28). Mais la plupart des études ne font pas la distinction entre marges exo et endocervicales. Parce que les lésions intra-épithéliales se développent au dépend de la jonction pavimento-cylindrique, il est possible que le statut des marges endocervicales ait un impact plus important sur le risque de récidive que celui des marges exocervicales. Cette hypothèse est d’ailleurs soutenue par les résultats de quelques études récentes (13,29,30). Une autre question est l’impact de la distance minimale sur le risque de récidive en cas de marges saines. Il n’est en effet pas connu si une distance minimale de sécurité est nécessaire pour garantir un risque de récidive plus faible ou si le simple fait de ne pas avoir de lésion à la tranche de section est suffisant. La question se pose donc de l’obtention d’une marge de sécurité comme critère de qualité d’une RAD qui pourrait s’ajouter aux éléments actuellement connus.

MATERIELS ET METHODES 

Nous avons réalisé une étude multicentrique prospective observationnelle. Au total, 249 patientes ayant eu une RAD pour le traitement d’une LIEHG histologique du col utérin dans neuf centres hospitalo-universitaires Français ont été incluses entre décembre 2013 et juillet 2014. Seules les patientes ayant eu un diagnostic de LIEHG du col utérin confirmé par l’analyse histologique d’une biopsie cervicale réalisée lors de la colposcopie d’évaluation préopératoire ont été incluses. Les patientes ayant une jonction non visible (ZT3) à l’examen colposcopique n’ont pas été incluses, ainsi que les patientes ayant bénéficié d’une RAD à visée diagnostique. Le consentement écrit des patientes a été systématiquement obtenu à l’inclusion, avant la réalisation de la RAD. Le protocole de l’étude a été approuvé par le comité d’éthique de la recherche en obstétrique et gynécologie en octobre 2013 (CEROG 2013-GYN1001).

Protocole opératoire 

Toutes les RAD ont été réalisées à l’aide d’une anse diathermique semi-circulaire, sous anesthésie locale, générale, ou sous rachianesthésie. L’utilisation du colposcope lors du geste était laissée à l’appréciation du chirurgien selon son habitude. Ainsi, les RAD pouvaient être réalisées directement sous contrôle colposcopique, immédiatement après examen colposcopique, ou sans aucun guidage colposcopique, en se référant uniquement aux données de l’examen colposcopique antérieur. Les dimensions et le volume des pièces de résection étaient systématiquement mesurés, directement au bloc opératoire par le chirurgien et avant fixation de la pièce dans le formaldéhyde. Ces mesures ont été faites selon un protocole établi et distribué à chaque chirurgien participant à l’étude (10). En plus du protocole écrit, chaque chirurgien a reçu une formation orale sur les techniques de mesures requises. En plus de l’analyse habituelle, l’analyse histologique de la pièce opératoire devait préciser le statut des marges endo et exocervicales et préciser la distance minimale observée entre les marges et la lésion en cas de marges saines. Les patientes ayant des marges non saines ont été définies par l’existence d’une marge endo et/ou exocervicale non saines. Pour chaque patiente, l’âge, la parité, les antécédents de RAD, l’indication du geste opératoire, les dimensions du col et de la zone de transformation anormale étaient systématiquement documentés.

Suivi des patientes 

Toutes les patientes ont bénéficié d’un suivi post-thérapeutique rapproché selon les recommandations nationales alors en vigueur (31). Celui-ci reposait sur la réalisation d’une cytologie cervico-utérine associée à une colposcopie de contrôle systématiques tous les 6 mois pendant un an. Une surveillance cytologique annuelle était ensuite recommandée et une colposcopie indiquée qu’en cas de cytologie anormale. Le critère de jugement principal de l’étude était le diagnostic d’une récidive post-thérapeutique défini par la mise en évidence histologique d’une LIEHG du col utérin à partir d’une biopsie cervicale.

Analyse statistique 

Les variables qualitatives ont été exprimées en nombre (pourcentage). Les variables continues ont été exprimées en moyenne (écart-type [SE]) ou médiane (25e-75e percentiles). La survie sans récidive a été définie comme l’intervalle entre la RAD et la survenue d’une nouvelle LIEHG ou plus. Les courbes de survie ont été établies selon la méthode de Kaplan-Meier et comparées à l’aide du test log-rank. Les hazard ratio (HR) et leurs intervalles de confiance à 95 % ont été calculés à l’aide de modèles de régression logistique de Cox univariée. Le seuil d’âge a été dichotomisé en utilisant le seuil associé à l’indice de Youden le plus élevé pour prédire la récidive. Dans un second temps, une analyse multivariée a été réalisée. Les variables ont été incluses dans le modèle de régression multivarié de Cox selon les résultats univariés (p < 0,20). Le seuil de signification statistique était p = 0,05. Les analyses ont été effectuées avec IBM SPSS Statistics 20.0 (IBM Inc, New York).

RÉSULTATS 

Patientes
Sur les 249 patientes initialement incluses, 33 ont été secondairement exclues après que l’analyse anatomopathologique de la pièce opératoire ait mis en évidence des marges non évaluables dans 4 cas, un carcinome invasif dans 13 cas et l’absence de lésion dans 16 cas. Au total, 216 patientes ont finalement été incluses. Parmi elles, 6 ont été perdues de vue immédiatement après la réalisation de leur RAD et ont été secondairement exclues de l’analyse (Figure 1). Au total, 210 patientes ont été inclues et suivies sur une durée médiane de 57,6 (0,6-81,9) mois.

Une récidive a été diagnostiquée chez 10 (4,8 %) patientes: 9 LIEHG et 1 cancer invasif. Le délai médian (25e-75e percentiles) de diagnostic d’une récidive était de 25.4 (6,7-55) mois. Les marges de résection étaient saines dans 145 (69 %) cas. La distance minimale moyenne (SE) en cas de marges saines était de 3,05 (0,14) mm. Parmi les 65 cas en marges non saines, les marges exocervicales étaient non saines dans 35 (54 %) cas, les marges endocervicales étaient non saines dans 36 (55 %) cas, et les deux marges étaient non saines dans 6 (9 %) cas.

Identification des facteurs de risque de récidive 

Au total, 60 % des récidives sont survenues chez des patientes de plus de 38 ans et 60 % chez des patientes qui avaient déjà un antécédent de RAD préalable à celle réalisée. Par rapport aux autres, les patientes ayant un antécédent de RAD étaient significativement plus à risque de développer une récidive : 4 (2,2 %) vs. 6 (24 %), respectivement (p<0,001) (Tableau 1). Bien que cette différence ne soit pas significative, les patientes de plus de 38 ans avaient une tendance à être plus exposées à un risque de récidive : 4 (2,9 %) vs. 6 (8,6 %), (p = 0,08). L’absence d’utilisation de la colposcopie pour le guidage de la RAD n’exposait pas les patientes à un risque plus important de récidive (p=0,935). Par rapport aux autres, les patientes dont la résection avait été en marges non saines n’étaient pas significativement plus à risque de développer une récidive : 5 (3,4 %) vs. 5 (7,7 %), respectivement (p=0,241). Le statut des marges exocervicales n’avait pas non plus d’impact sur le risque de récidive (p=0,855). Seules des marges endocervicales non saines étaient associées à un risque accru de récidive : 5 (2,9 %) vs. 5 (13,9 %), (p=0,008) (Figure 2). L’influence du statut des marges endocervicales sur le risque de récidive variait significativement selon l’âge des patientes avec un risque de récidive de 10,7 % chez les patientes de moins de 38 ans vs. 25% chez les plus de 38 ans (p=0,002) (Tableau 2). Enfin, 6 patientes avaient des marges à la fois endo et exocervicales non saines. Ces patientes étaient significativement plus à risque de développer une récidive : 4 (2%) vs. 2 (33,3%) (p=0,005). En cas de marges saines, la distance minimale entre les marges et la lésion n’avait pas d’impact sur le risque de récidive (p=0,304). Après ajustement en analyse multivariée, les facteurs identifiés comme augmentant de manière significative et indépendante le risque de récidive étaient un âge > 38 ans (HRa= 6,1 ; IC à 95 % 1,3-28,7), un antécédent de RAD (HRa= 25,0 ; IC à 95 % 5,0-124,3) et des marges endocervicales non saines (HRa=15,6 ; IC à 95 % : 3,1-79,6) .

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Table des matières

INTRODUCTION
MATERIELS ET METHODES
PROTOCOLE OPERATOIRE
SUIVI DES PATIENTES
ANALYSE STATISTIQUE
RÉSULTATS
PATIENTES
IDENTIFICATION DES FACTEURS DE RISQUE DE RECIDIVE
DISCUSSION
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES

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