LES FACTEURS DE MORTALITE EN REANIMATION

Histoire de la rรฉanimation

ย  ย  ย  ย La rรฉanimation est une discipline rรฉcente, qui remonte aux annรฉes cinquante [50]. Elle est nรฉe en 1953 ร  l’occasion d’une รฉpidรฉmie de poliomyรฉlite au Danemark. Des malades dont la musculature respiratoire รฉtait paralysรฉe (de faรงon partiellement transitoire) ont รฉtรฉ traitรฉs pour la premiรจre fois par ventilation artificielle grรขce ร  une prothรจse implantรฉe ร  l’intรฉrieur de la trachรฉe, et une machine ร  insuffler de lโ€™air dans les poumons ร  ยซ pression positive intermittente ยป mise au point par un anesthรฉsiste suรฉdois Engstrรถmen 1950 [81]. Peu aprรจs est apparu le premier rein artificiel par Gabriel Richet le 10 novembre 1954. Les centres de rรฉanimation sont devenus des centres de supplรฉance respiratoire et rรฉnale, ce qui a permis aux malades de survivre en attendant le rรฉtablissement de ces fonctions [81]. Nโ€™รฉtant pas reconnue comme une spรฉcialitรฉ mรฉdicale par lโ€™Ordre des mรฉdecins, la rรฉanimation mรฉdicale nโ€™eut pas de certificat dโ€™รฉtudes spรฉciales (CES) mais une compรฉtence reconnue par sa Commission de qualification en rรฉanimation. Par son efficacitรฉ, cette discipline venait combler un vide. Jusque-lร  en effet, la seule prise en charge des รฉtats critiques รฉtait assurรฉe par les anesthรฉsistes en milieu chirurgical aux opรฉrรฉs quโ€™ils avaient endormis et aux grands traumatisรฉs. A ce titre, ils avaient obtenu en 1959 la crรฉation dโ€™un CES dโ€™Anesthรฉsie- rรฉanimation [81]. La rรฉanimation mรฉdiale a suivi le chemin de toute discipline nouvelle nรฉe sur le terrain hospitalier, devenue universitaire pour y รชtre enseignรฉe, finalement exercรฉe dans la plupart des รฉtablissements hospitaliers dรฉvolus aux affections aiguรซs oรน peuvent aussi sโ€™effectuer les recherches cliniques nรฉcessaires aux progrรจs mรฉdicaux. Cโ€™est une discipline coรปteuse en personnel mรฉdical et paramรฉdical, et onรฉreuse car elle exige de bรฉnรฉficier sans cesse des avancรฉes considรฉrables de la mรฉdecine [81]. On distingue 3 types de rรฉanimation : la rรฉanimation mรฉdicale, la rรฉanimation chirurgicale, la rรฉanimation polyvalente.
-La rรฉanimation chirurgicale : trรจs souvent couplรฉe ร  l’anesthรฉsie, assure la prise en charge des traumatisรฉs et des malades ayant subi ou devant subir une intervention chirurgicale lourde ou ร  risque รฉlevรฉ et nรฉcessitant une surveillance trรจs รฉtroite [81].
-La rรฉanimation mรฉdicale : prend en charge de patients souffrant de maladies graves (intoxication, insuffisance respiratoire aiguรซ, coma, maladie cardiaque, rรฉnale ou infectieuse) dont le traitement ne relรจve pas de la chirurgie [81].
-La rรฉanimation polyvalente : regroupe la rรฉanimation mรฉdicale et la rรฉanimation chirurgicale

Historique de la revue de morbi-mortalitรฉ

ย  ย  ย  ย  ย Historiquement, le concept de RMM est apparu aux ร‰tats-Unis il y a tout juste un siรจcle sous la forme de โ€œconfรฉrence dโ€™analyse des dรฉcรจsโ€ dans un rapport dโ€™Abraham Flexner sur lโ€™amรฉlioration de la formation mรฉdicale. Ce rapport avait รฉtรฉ commandรฉ par la Fondation Carnegie pour lโ€™รฉducation, dans un souci de standardiser et de structurer une formation des mรฉdecins alors trรจs disparate et de qualitรฉ trรจs inรฉgale [58]. La rรฉforme proposรฉe par Flexner visait ร  standardiser un socle commun de formation avec une approche plus scientifique de la formation mรฉdicale en y introduisant la biologie humaine et la science en gรฉnรฉral. Ce plaidoyer pour une formation mรฉdicale institutionnalisรฉe proposait รฉgalement de faire de la revue de mortalitรฉ โ€“ morbiditรฉ un outil pรฉdagogique de terrain pour la formation des futurs mรฉdecins, permettant aux รฉtudiants dโ€™analyser, avec leurs pairs, les cas marquรฉs par une issue dรฉfavorable et de porter un regard critique sur leurs propres pratiques en dehors de toute notion de sanction [58]. Puis les confรฉrences de mortalitรฉ ont รฉtรฉ intรฉgrรฉes aux standards pour les pratiques hospitaliรจres รฉlaborรฉes en 1917 par le collรจge amรฉricain de chirurgie et ร  lโ€™origine du dispositif dโ€™accrรฉditation des hรดpitaux nordamรฉricains (Joint Session of Committee on Standards, 1917). En 1983, lโ€™Accreditation Council for Graduate Medical Education (ACGME), organisme qui accrรฉdite les programmes de formation initiale des mรฉdecins) a exigรฉ que tout service contribuant ร  la formation des chirurgiens organise des RMM hebdomadaires afin de discuter de toutes les complications morbides ou mortelles. En Europe, une mรชme obligation a รฉtรฉ รฉdictรฉe au Royaume-Uni en 1987 par le Royal College of Surgeons. Cette quรชte de la fiabilitรฉ des mรฉdecins et de la sรฉcuritรฉ des patients se poursuit encore actuellement car la sรฉcuritรฉ des patients dans les systรจmes de soins est loin dโ€™รชtre conforme ร  ce quโ€™elle devrait รชtre. Les RMM รฉtaient donc, ร  lโ€™origine, une activitรฉ pรฉdagogique permettant la certification de la formation initiale et continue des mรฉdecins [58]. Chronologiquement, lโ€™idรฉe des RMM vient donc de loin, avec une รฉvolution dโ€™un concept pionnier du dรฉbut du XXe siรจcle visant la formation initiale et continue des mรฉdecins, vers lโ€™amรฉlioration de la qualitรฉ puis vers la sรฉcuritรฉ des soins. Cependant, les RMM sont actuellement proposรฉes par certains auteurs amรฉricains comme un moyen dโ€™identifier les besoins en termes de formation dans la droite ligne dโ€™un retour ร  lโ€™esprit de ce que disait Flexner au dรฉbut du XXe siรจcle. La dรฉmarche RMM replace donc ainsi lโ€™enseignement mรฉdical lร  oรน il a historiquement commencรฉ : au sein de lโ€™hรดpital [58]

Indices de gravitรฉ

ย  ย  ย  ย  Peu de spรฉcialitรฉs sont autant impliquรฉes par la prรฉdiction du pronostic que la rรฉanimation. Chaque jour, le mรฉdecin rรฉanimateur doit dรฉcider quels patients il doit admettre, et jusqu’oรน il doit prolonger son effort. Toutes ces dรฉcisions sont fondรฉes sur une estimation du pronostic final, et sur la nรฉcessitรฉ du traitement et son bรฉnรฉfice potentiel. Le but de la rรฉanimation est d’assurer la survie, mais รฉgalement de rรฉtablir, ร  l’issue du traitement, une qualitรฉ de vie aussi proche que possible de celle existant antรฉrieurement, malgrรฉ la prรฉsence d’une ou plusieurs dรฉfaillances mettant en jeu le pronostic vital immรฉdiat. Le dรฉveloppement actuel des techniques de rรฉanimation permet d’assurer la survie de patients autrefois condamnรฉs ร  court terme, au prix toutefois d’un coรปt รฉconomique et humain important. Les malades de rรฉanimation souffrent d’une difficultรฉ ร  รชtre correctement classifiรฉs par un diagnostic ou une thรฉrapeutique unique, car les pathologies et les traitements sont en gรฉnรฉral multiples. Dans ce contexte, l’รฉvaluation de ces malades par une รฉchelle de gravitรฉ permet une meilleure description et une meilleure catรฉgorisation de cette population. Un score de gravitรฉ est un indice รฉtabli ร  partir de paramรจtres cliniques et biologiques corrรฉlรฉs statistiquement ร  l’issue. Diffรฉrents indices de sรฉvรฉritรฉ gรฉnรฉraux ont รฉtรฉ dรฉveloppรฉs depuis une vingtaine d’annรฉes, avec pour objectifs de prรฉdire moins intuitivement le pronostic de survie individuel, et de comparer a posteriori des malades de gravitรฉ identique, de faรงon ร  รฉvaluer l’efficacitรฉ des diffรฉrentes thรฉrapeutiques mises en ล“uvre. En effet, en l’absence de telles informations permettant de crรฉer des groupes homogรจnes de malades, la mortalitรฉ rapportรฉe d’une atteinte comme le choc septique pouvait varier sans que le traitement y soit pour quelque chose. Le premier de ces objectifs s’est rapidement rรฉvรฉlรฉ irrรฉaliste, puisque si les diffรฉrents systรจmes prรฉdictifs restent trรจs spรฉcifiques en termes de prรฉdiction de la mortalitรฉ, ils restent insuffisamment sensibles. Par exemple, une probabilitรฉ de mortalitรฉ de 0,2 signifie que l’on peut s’attendre au dรฉcรจs de 20 personnes sur un groupe de 100, mais dans le mรชme temps il demeure impossible de prรฉdire qui va mourir au sein de ce mรชme groupe. A contrario, le deuxiรจme objectif est parfaitement rempli par l’utilisation des indices de gravitรฉ gรฉnรฉraux, puisque leur utilisation rend plus pertinente l’รฉvaluation des maladies et de leur traitement, mais aussi des structures de soins et de leur rendement, permettant une estimation des coรปts, รฉconomiques et humains, du passage en rรฉanimation. Leur utilisation, comme indicateur, devient indispensable dans une perspective d’amรฉlioration continue de la qualitรฉ des soins. D’une maniรจre parallรจle, voire parfois antรฉrieure, ร  cette utilisation des scores de gravitรฉ gรฉnรฉraux, certaines catรฉgories d’affections aiguรซs, aux rรฉpercussions potentiellement vitales, ont รฉtรฉ pourvues de scores de sรฉvรฉritรฉ spรฉcifiques. Il s’agit en particulier de la pancrรฉatite aiguรซ (scores clinico-biologiques et scores tomodensitomรฉtriques), de l’infarctus du myocarde , du polytraumatisรฉ , des comas traumatiques , du SDRA et des รฉtats septiques. La coexistence de deux systรจmes de cotation de la sรฉvรฉritรฉ pour les mรชmes patients a bien sรปr conduit ร  comparer leur efficacitรฉ respective. Enfin, la remarquable efficacitรฉ des scores gรฉnรฉralistes de rรฉanimation a conduit ร  tester ceux-ci dans diffรฉrentes pathologies en dehors de la rรฉanimation, c’est-ร -dire en dehors des circonstances prรฉcises de leur stricte dรฉfinition comme le transport de malades de rรฉanimation, les unitรฉs intermรฉdiaires et enfin la chirurgie. Diffรฉrents indices ou scores ont รฉtรฉ dรฉveloppรฉs depuis une trentaine dโ€™annรฉes pour rรฉpondre ร  une exigence croissante de standardisation des procรฉdures diagnostiques et thรฉrapeutiques. Ces systรจmes classent les malades en groupes homogรจnes de probabilitรฉ de mortalitรฉ hospitaliรจre. Ils permettent des รฉtudes รฉpidรฉmiologiques dans le cadre dโ€™essais cliniques comparatives et constituent des outils de gestion et dโ€™รฉvaluation de lโ€™activitรฉ des services [31].

IGS I ou SAPS I

ย  ย  ย  ย  ย  Lโ€™IGS I comprend 14 paramรจtres cliniques et/ou biologiques dont lโ€™รขge. Chaque paramรจtre est cotรฉ de 0 ร  4 selon son degrรฉ dโ€™anormalitรฉ. Les valeurs ร  retenir pour chacun des 14 paramรจtres sont les plus anormales observรฉes durant les 24 premiรจres heures. Pour des raisons de fiabilitรฉ, seules les anomalies observรฉes aprรจs lโ€™admission en rรฉanimation sont prises en compte. Par exemple, un arrรชt cardio-circulatoire survenu avant lโ€™admission nโ€™est pas considรฉrรฉ, mรชme sโ€™il a รฉtรฉ constatรฉ par le rรฉanimateur, ceci afin dโ€™homogรฉnรฉiser les variables recueillies. Pour les paramรจtres cliniques et/ou biologiques, si plusieurs examens ont รฉtรฉ effectuรฉs au cours du premier jour dโ€™admission, il faut prendre la valeur donnant le maximum de poids pour chaque รฉlรฉment, mรชme si les valeurs les plus anormales ne sont pas apparues au mรชme moment. En cas dโ€™arrรชt cardio-circulatoire, rรฉcupรฉrรฉ ou non au cours des 24 premiรจres heures dans le service de rรฉanimation, il faut compter quatre points pour les items suivants : rythme cardiaque, pression systolique,ย rythme respiratoire, score de Glasgow (16 points au total). Lorsque le patient dรฉcรจde avant la 24e heure, il est convenu dโ€™ajouter aux 16 points de lโ€™arrรชt cardio-circulatoire, les points correspondant aux valeurs les plus anormales des autres items recueillis. Si le patient quitte en vie le service avant la 24e heure, lโ€™IGS est calculรฉ en prenant les paramรจtres les plus anormaux pendant la pรฉriode dโ€™hospitalisation en rรฉanimation. Les paramรจtres biologiques sont des donnรฉes objectives qui ne nรฉcessitent pas de dรฉfinitions supplรฉmentaires. ย En revanche, certains paramรจtres cliniques doivent รชtre dรฉfinis :
โ€“ chez le malade intubรฉ, le score de Glasgow est lรฉgรจrement modifiรฉ car la rรฉponse verbale doit รชtre supputรฉe ; quand le malade est sรฉdatรฉ au cours du premier jour dโ€™admission, le score de Glasgow doit รชtre รฉvaluรฉ ร  partir de lโ€™examen clinique rรฉalisรฉ avant la mise en route de la sรฉdation.
โ€“ la diurรจse prise en compte est celle des 24 premiรจres heures si la durรฉe dโ€™hospitalisation est infรฉrieure ร  24 heures, il faut lโ€™extrapoler ร  24 heures. Le score est รฉgal ร  la somme des points de chaque paramรจtre [29]. (Tableau I).

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Table des matiรจres

INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE
I-Gรฉnรฉralitรฉs
I-1 La rรฉanimation
I-1-1 Dรฉfinition
I-1-2 Histoire de la rรฉanimation
I-2 La Mortalitรฉ
II- La mortalitรฉ en rรฉanimation
III-La revue de morbi-mortalitรฉ
III-1 Dรฉfinition et objectifs
III-2 Historique de la revue de morbi-mortalitรฉ
III-3 Rรฉalisation de RMM en rรฉanimation
IV- Tableau de bord en rรฉanimation
IV-1 Dรฉfinition
IV-2 Rรฉalisation de tableau de bord en rรฉanimation
IV-2-1 La Structure
IV-2-2 La procรฉdure
IV-2-3 Les rรฉsultats
V- Indices de gravitรฉ
V-1 Indices de premiรจre gรฉnรฉration
V-1-1 IGS I ou SAPS 1
V-1-2 APACHE II
V-2 Indices de seconde gรฉnรฉration
V-2-1 APACHE III
V-2-2 MPM II
V-2-3 IGS II
VI-Indices de dรฉfaillance
VI-1 Le SOFA
VI-2 Le MODS
VI-3 Le LODS
DEUXIEME PARTIE
METHODOLOGIE
1 Cadre de lโ€™รฉtude
2 Type et durรฉe de lโ€™รฉtude
3 Malades et Mรฉthodes
3-1 Population cible
3-2 Recueil de donnรฉes
RESULTATS
I-Etude descriptive
I-1 Nombre de malades
I-2 Age
I-3 Sexe
I-4 Antรฉcรฉdents
I-5 Service dโ€™origine
I-6 Motif dโ€™admission
I-7 Traitements et Interventions thรฉrapeutiques
I-7-1 Traitements mรฉdicamenteux
I-7-2 Interventions thรฉrapeutiques
I-8 Complications
I-9 Durรฉe de sรฉjour
I-10 Mortalitรฉ
I-10-1 Mortalitรฉ globale
I-10-2 Mortalitรฉ en fonction de lโ€™รขge
I-10-3 Mortalitรฉ en fonction du sexe
I-10-4 Mortalitรฉ et la durรฉe de sรฉjour
I-10-5 Mortalitรฉ en fonction de la pathologie
I-10-6 Mortalitรฉ et les antรฉcรฉdents
I-10-7 Mortalitรฉ en fonction des complications
I-10-8 Causes de mortalitรฉ
II-Etude Analytique
II-1 Age
II-2 Sexe
II-3 Antรฉcรฉdents
II-4 Motifs dโ€™admission
II-5 Complications
II-6 Durรฉe de sรฉjour
DISCUSSION
1-Incidence
2-Age
3-Sexe
4-Antรฉcรฉdents
5-Motifs dโ€™admission
5-1-Motif mรฉdical
5-2-Motif chirurgical
5-3-Motif traumatique
6-Complications
7-Durรฉe de sรฉjour
8-Causes du dรฉcรจs
8-1 Choc septique
8-2 Dรฉfaillance cardio-circulatoire
8-3 Dรฉfaillance neurologique
8-4 Dรฉfaillance respiratoire
8-5 Dรฉfaillance multi-viscรฉrale
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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