L’ingénierie qui, selon la définition proposée par le dictionnaire Larousse, est : [L’]Étude d’un projet industriel sous tous ses aspects (techniques, économiques, financiers, monétaires et sociaux) et qui nécessite un travail de synthèse coordonnant les travaux de plusieurs équipes de spécialistes.
attire chaque année un nombre sans cesse croissant d’étudiants , représentant à l’heure actuelle près de 40% de tous les étudiants des filières scientifiques dans l’enseignement supérieur en France. La recherche en didactique s’est encore très peu intéressée à ce domaine qui peut apparaître comme une sorte d’« amalgame » d’autres disciplines semblant bien mieux délimitées (comme l’économie, les mathématiques, etc.) et dont les processus d’enseignement et d’apprentissage sont examinés dans chacune, individuellement. Il est cependant un aspect de l’ingénierie que l’on peut qualifier à la fois de transversal et d’autonome, qui s’intéresse à l’analyse et à la commande des systèmes : l’automatique. Cette discipline encore jeune, si on la compare à la mécanique par exemple, s’est construite, comme on va le voir plus loin, à partir des développements des mathématiques menés dans plusieurs autres domaines (physique et chimie essentiellement). Elle est la partie technologique de ce que l’on appelle la cybernétique, qui comme l’a précisé son fondateur, Wiener (1948), est la « théorie entière de la commande et de la communication, aussi bien chez l’animal que dans la machine ». À l’heure actuelle, elle jouit d’une vaste étendue d’application, allant de l’électronique à l’économie, en passant par la médecine. De ce fait, elle est enseignée dans tous les cursus ingénieurs en France et à l’étranger. Cette discipline, axée sur une approche systémique, étudie entre autres, l’équilibre et la stabilité des systèmes dans le but de les commander (les asservir ou les réguler).
Ces deux concepts ne sont pas circonscrits à cette discipline, la mécanique ou la chimie, par exemple, les utilisent aussi et, par conséquent, les étudiants qui suivent les cours d’automatique ont déjà été confrontés à ceux-ci de manière académique. Mais, pas seulement. En effet, on peut avancer, même en étant prudent, que seuls les enfants d’âge préscolaire n’ont pas déjà été en contact avec les concepts d’équilibre et de stabilité. Et c’est même principalement dans des contextes non académiques que ce contact a lieu, ce qui bien entendu, implique sans conteste des premières constructions de sens éloignées du formalisme scientifique.
Analyse de contenu : qu’est-ce que l’équilibre ?
L’équilibre et la stabilité sont des concepts figurant dans plusieurs disciplines, et largement présents dans les curricula français et étrangers tant au niveau élémentaire, secondaire que supérieur (étude des balances et leviers à l’école primaire française et Belge et dans les « middle schools » américaines, du pendule pesant au collège et dans les « high schools », étude du pendule pesant dans le supérieur en France et à l’étranger, équilibres chimiques au lycée, etc.). Ces concepts sont fondamentaux en automatique que l’on enseigne généralement à partir du premier cycle d’études supérieures, dans certaines filières des classes préparatoires aux grandes écoles, des IUT, des écoles d’ingénieurs et des universités.
Il sera beaucoup question de physique dans ce travail, et principalement de mécanique classique. Premièrement, parce que c’est un des premiers domaines scientifiques dans lequel les étudiants rencontrent la notion d’équilibre. Ensuite, parce que ce domaine fournit assez simplement des exemples-problèmes comme ceux auxquels vont être soumis les étudiants de cette étude. En physique, l’équilibre est défini comme l’« état d’un système matériel dans lequel certains paramètres ou certaines fonctions macroscopiques demeurent uniformes dans le système et constants dans le temps et, de plus, ne sont pas modifiés lorsqu’on isole le système» (Mathieu et al., 1991, p.171). Ce concept peut être étendu au cas des systèmes non isolés, comme les systèmes mécaniques pilotés, les systèmes biologiques ou sociologiques (Von Bertalanffy, 1969 ; Isaza Delgado & Campos Romero, 2006) et l’on parle généralement dans ce cas d’équilibre dynamique, de régime permanent ou encore d’état stationnaire. En termes mathématiques, discipline sur laquelle repose pour une bonne part l’automatique, on ne fait pas de différence et dans les deux cas, on est en présence d’un point fixe pour les équations (différentielles) décrivant le système , soit un état stationnaire (i.e. indépendant du temps).
Éléments historiques
Le survol historique de ces concepts, ne se veut absolument pas exhaustif. Les développements mathématiques de ces concepts sont assez récents dans l’histoire de la science et liés aux développements théoriques de ceux-ci, qui sont relativement complexes car touchant plusieurs domaines (de la mécaniques classique à la thermique) et liés à de nombreux autres concepts tout au long de cette longue genèse. Notre but est de faire découvrir une partie de cette complexité, et non de la traiter dans le détail. Pour une vision plus large, le lecteur pourra trouver, par exemple, dans (Duhem, 1905a, 1905b), un panorama des développements de la Statique depuis la période grecque jusqu’au XVIIIe siècle et dans (Renn & Damerow, 2012c, 2012b, 2012a) un point de vue plus « moderne » sur la mécanique médiévale.
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Table des matières
1 Introduction générale
I Les étudiants face aux concepts d’équilibre et de stabilité
Introduction
2 Les difficultés des élèves ingénieurs à propos des concepts d’équilibre et de stabilité
3 Les connaissances des étudiants ingénieurs à propos de l’équilibre et de la stabilité
4 Exploration des origines possibles des difficultés des étudiants à propos du concept d’équilibre
Conclusion
II Étude d’une ingénierie didactique adaptée
5 Introduction : l’approche « évolutionniste »
6 Le cadre de l’ingénierie didactique
7 Étude d’une ingénierie didactique « équilibre et stabilité »
Conclusion
III Conclusions et perspectives
8 Conclusions
9 En quoi le manque de compréhension des concepts d’équilibre et de stabilité est-il problématique chez les élèves ingénieurs ?
10 Perspectives
Références
Annexes
Liste des annexes
Lexicographie
Les questionnaires
Équations du système pendule/chariot
Un outil d’évaluation informatique du raisonnement « évolutionniste »
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