LES ETHNOTHÉORIES ET LES STRATÉGIES ÉDUCATIVES PARENTALES

LES ETHNOTHÉORIES ET LES STRATÉGIES ÉDUCATIVES PARENTALES

Relations école-famille

La préparation à la transition, en amont, puis la participation parentale durant la scolarité ne sont pas les mêmes dans toutes les familles. Nous verrons comment elles dépendent de la perception des rôles de chacun, des ethnothéories et des stratégies éducatives. Nous étudierons également comment s’articulent les relations école-famille en particulier dans les domaines de la collaboration et de la communication.

Les rôles

Quand il est question de rôles, l’école et la famille aimeraient qu’ils soient clairement définis et que des frontières délimitent les zones de chacun. D’ailleurs, dans l’étude de Prévôt (2008), 20,6% des parents attendent de l’école des informations sur les droits et les devoirs des enseignants, des parents et des enfants. Clarifier précisément les rôles de chacun n’est pas réaliste car, dans les faits, ils s’imbriquent les uns dans les autres. Les parents sont reconnus comme les premiers éducateurs de l’enfant. L’école a la charge de les seconder (DECS, FRAPEV, SPVal, 2007). Ils se partagent donc, dans différentes mesures, l’éducation des enfants.
Dans une société où le maintien du lien social se pose, avec force, sous la pression des intégrismes et des individualismes, la fonction de l’école est bien de tenir intimement mêlé le couple éduquer et instruire. (…) La finalité de l’Ecole n’est pas seulement d’éduquer. Pas plus qu’elle n’est uniquement d’enseigner. La finalité de l’Ecole est d’enseigner pour éduquer (Develay, 1996, p.25).

Les ethnothéories

Les ethnothéories sont tirées du modèle de la niche développementale créé par Super et Harkness (1986, 1996, cités dans Conus et Ogay, 2014). Il convient donc de le présenter.
« Ce modèle considère les éléments qui constituent le milieu entourant l’enfant comme n’ayant de sens qu’en fonction du développement de l’enfant et de ses capacités, et en fonction de leur rôle ainsi que de leur influence sur ce développement » (Conus, 2012,p.12). Trois composantes sont présentes dans la niche développementale de l’enfant : les contextes physiques et sociaux dans lesquels vit l’enfant, les pratiques éducatives des parents ou des « caretakers » et les ethnothéories des parents ou des « caretakers ».
L’enfant est placé au cœur de ces composantes et se différencie par ses caractéristiques personnelles. Les trois domaines sont en étroite relation et s’influencent mutuellement. Par exemple, les ethnothéories donnent naissance aux pratiques éducatives, puis, évoluent au contact de l’expérience. Ainsi, il est probable que les ethnothéories des parents se soient modifiées lors de l’entrée à l’école de leur enfant. Les contextes jouent un rôle dans la mise en place des ethnothéories au travers des pratiques. Ils peuvent rendre difficile la mise en œuvre des pratiques, voire même l’obliger ou, au contraire, l’empêcher (Conus, 2012).
Nous nous concentrerons sur les ethnothéories, tirées du modèle présenté précédemment car elles influent notamment sur les pratiques éducatives mais également sur l’agencement de l’environnement et du contexte de vie de l’enfant (Conus, 2012). Selon Super et Harkness (1986, 1996), elles désignent les conceptions de sens commun, formelles ou informelles, conscientes ou non-conscientes qui sont relatives à l’enfant, plus spécifiquement à son éducation et son développement. Elles servent à qualifier ce qu’est une « bonne » éducation.

Les stratégies éducatives parentales

Les stratégies éducatives incluent, pour Gayet (1995), toutes les règles imposées à l’enfant depuis qu’il est tout petit. Elles apparaissent de manière instinctive chez les parents.
Cependant, certaines d’entre elles sont associées à une meilleure réussite éducative.
Jacques Lautrey (1980, cité dans Gayet, 1999) les a décryptées sous l’angle des rituels de vie et en a ressorti trois types de familles. Chez les familles rigidement structurées, les rituels sont respectés à la lettre. Les irrégularités n’ont pas leur place dans ce système. Pour les familles faiblement structurées, rien n’est défini, ni les heures des repas, ni celles du coucher, par exemple. Les perturbations font partie du quotidien. Finalement, les familles souplement structurées ont trouvé un juste milieu entre rigidité et improvisation.
Il en résulte que les familles souplement structurées sont les plus adaptées à développer des conditions favorables au développement intellectuel de l’enfant et à son adaptation au monde scolaire.
L’étude des styles parentaux tire des conclusions similaires à celles de Lautrey (1980). Il s’agit des types d’autorité que les parents emploient dans leurs rapports avec leur enfant et leur influence sur la réussite scolaire (Bouchard et Saint-Amant, 2000). Les parents démocratiques, un juste milieu entre permissifs et autoritaires, entretiennent les meilleures relations avec leur enfant car ils prônent la participation, encouragent leur autonomie et favorisent leur épanouissement (Dornbush, 1988, cité dans Bouchard et Saint-Amant,2000). Dans leur étude, Bouchard et Saint-Amant (2000) confirment que les enfants en situation de réussite vivent, à la maison, dans une ambiance de liberté et d’autonomie. Leur dynamique familiale est composée de confiance, d’indépendance, d’efforts et d’encadrement. C’est ce type d’éducation que soutiennent les professionnels.
Tout comme nous l’avons constaté avec les ethnothéories, plus le style éducatif de la famille ressemble à celui de l’école, plus l’enfant a de chances de réussir.

La participation parentale

La participation parentale fait référence à un ensemble de comportements dont font partie, par exemple, « la préparation de l’enfant à l’école et l’accueil à son retour, la supervision, le suivi et l’engagement actif dans les travaux scolaires, la contribution à la motivation de l’enfant, les interactions avec l’école, le bénévolat à l’école et la participation à des comités  de parents, des réunions et assemblées générales» (Deslandes, 2003, citée dans Deslandes et Bertrand, 2004, p.415). La participation parentale est donc considérée comme une composante du rôle parental (Hoover-Dempsey et Sandler, 1997, cités dans Deslandes et Bertrand, 2004).
Deslandes (1996, citée dans Deslandes, 2006) a établi plus précisément cinq formes que peut prendre la participation parentale au suivi scolaire : le soutien affectif en termes d’encouragements, de compliments, d’aide aux tâches scolaires et de soutien ; la communication avec l’enseignant par le biais de réunions individuelles, d’appels téléphoniques, de discussions ; les interactions parents-enfant axées sur le quotidien scolaire comme les questions sur l’école, les activités de la journée, les éventuels petits problèmes ; la communication parents-école au travers de la présence à la réunion de parents, la participation à un comité ou à l’association de parents d’élèves et, finalement, les interactions parents-enfant au sujet de l’actualité et des perspectives d’avenir

La communication école-famille

Il est bien connu qu’une communication fructueuse est un des éléments-clés d’une bonne collaboration. Lors de la transition famille-école, la communication entre les partis est primordiale car elle « représente l’essence même de la qualité de la transition » (Christensen, 1998, cité dans Deslandes et Jacques, 2004, p.177). Cependant, elle rencontre de nombreux écueils. La communication entre les familles et l’école est souvent monolithique, unilatérale, verticale, formaliste et réactive alors qu’elle devrait être différenciée, interactive, horizontale, informelle et anticipative (Maulini, 1997a).
Pour faciliter le lâcher-prise, les mères, notamment celles des milieux populaires, ont besoin d’être informées de ce que leur enfant fait à l’école (Francis, 2000). Prévôt (2008) précise que les parents se sentent sous-informés. Or, quand la communication manque, ils se retrouvent démunis faces à leur rôle de parents d’élèves (Francis, 2000) et éprouvent de la suspicion à l’égard de l’école (Deslandes et Royer, 1994). Les mères des milieux populaires ont l’impression de déranger l’enseignant et ont tendance à rester en retrait. Elles attendent que la demande d’échange vienne de sa part. Quand elles obtiennent un rendez-vous, elles n’en sont pas pleinement satisfaites, du fait de son caractère ponctuel et exceptionnel (Francis, 2000). Par contre, les mères plus scolarisées pensent avoir une meilleure communication avec l’enseignant (Deslandes et Jacques, 2004). Ces auteurs soutiennent que si dès le début de la 1H, les échanges étaient plus nombreux, il serait possible de prédire positivement l’ajustement socio-scolaire de l’élève

La collaboration école-famille

La collaboration désigne le travail fourni en commun par les enseignants et les parents dans le but de la réussite et de la persévérance scolaire des enfants (Dumoulin, Thériault, Duval et Tremblay, 2013). Pour Perrenoud (1998, cité dans Asdih, 2012), cette collaboration doit être initiée dès le début de la scolarité au moment où les enseignants et les parents réunissent leurs efforts pour atteindre un même objectif : la réussite des enfants.
La collaboration école-famille a pour but de rapprocher les cultures familiales et scolaires et de tisser le lien éducatif dont a besoin l’enfant (Madiot, 2010). En Suisse, cette politique  de proximité a réellement débuté dans les années 2000 (Scalambrin et Ogay, 2014).
Cependant, elle se révèle difficile car les deux agents ne se basent pas sur les mêmes logiques. L’école, dans un but de transmission, aimerait que les familles poursuivent le travail effectué en classe. Les familles attendent de l’école qu’elle apporte des contenus, des règles et des perspectives professionnelles (Adish, 2012). Pourtant, le degré de collaboration entre parents et enseignants est prédictif de l’ajustement socio-scolaire de l’élève, de sa participation en classe et de son auto-direction (Deslandes et Jacques, 2004).
Actuellement, la collaboration entre parents et enseignants est plus courante quand l’enfant est en situation de difficultés scolaires. Il est important de retenir que plus les parents rencontrent les enseignants, plus les connaissances sur leurs pratiques éducatives augmentent, plus l’enfant se sent à l’aise dans le monde scolaire (Deslandes et Jacques,2004).
Une collaboration de qualité passe, nous l’avons vu, par une bonne communication mais également par une bonne compréhension du système scolaire. Nous savons que, dans les ethnothéories des systèmes éducatifs, l’enfant est placé au centre de ses propres apprentissages. L’enseignant est désormais davantage considéré comme un guide. Or, cette conception est bien différente de celle qu’ont connue les parents durant leur propre parcours scolaire. Les enjeux de ce style, basé sur le socioconstructivisme, doivent être clairement explicités aux parents pour qu’ils n’y réagissent pas négativement. L’enseignant ne doit pas simplement l’expliquer aux parents mais doit également les outiller. Il peut, par exemple, transmettre des fiches de stratégies d’apprentissage réutilisables pour les devoirs à domicile (Deslandes et Bertrand, 2004).

La coéducation

Concernant les jeunes enfants, on parle beaucoup de coéducation. Il s’agit de l’alliance éducative entre parents et professionnels. Afin que l’enfant évolue dans un environnement éducatif harmonieux, il faut que les différents acteurs de son éducation se fréquentent.
Cependant, cette condition n’est pas suffisante. La reconnaissance des compétences de l’autre instance aide à modifier et améliorer ses propres pratiques et stratégies. En d’autres termes, leur côtoiement permet un enrichissement mutuel (Prévôt, 2008).
La coéducation, tout comme la collaboration, demande de l’égalité et de la parité (Deslandes, 2006). Par égalité, nous entendons que les deux partenaires doivent considérer leur expertise sur l’enfant comme différente et complémentaire. Ainsi, les relations ne seront pas asymétriques. Parents et enseignants doivent être prêts à apprendre les uns des autres. La parité implique un partage des connaissances sur l’enfant et sur les ethnothéories de chaque partie. De plus, dans ce processus, la confiance mutuelle est un bien nécessaire pour des rapports école-famille de qualité. Elle a pour origine la motivation des enseignants à travailler avec les familles et à considérer les parents comme des partenaires importants, indispensables et compétents dans le processus de scolarisation (Deslandes,2006).

 

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

1. INTRODUCTION 
2. PROBLÉMATIQUE
2.1. DÉFINITION ET IMPORTANCE DU SUJET
2.2. CONTEXTE
2.2.1. Aspects historiques
2.2.2. Aspects légaux
2.2.3. Le système scolaire suisse
2.3. ETAT DE LA QUESTION DANS LA LITTÉRATURE SCIENTIFIQUE
2.4. VISÉE DE LA RECHERCHE
2.5. ANGLE DISCIPLINAIRE
3. CADRE CONCEPTUEL
3.1. TRANSITION
3.1.1. Une transition de qualité
3.1.2. Le modèle écologique de Bronfenbrenner
3.1.3. Le modèle centré sur les effets dynamiques de Rimm-Kaufman et Pianta
3.1.4. La psychologie des transitions
3.1.5. L’accompagnement des transitions
3.1.6. La préparation à l’école
3.1.7. Les implications de la transition à l’école
3.2. RELATIONS ÉCOLE-FAMILLE
3.2.1. Les rôles
3.2.2. Les ethnothéories
3.2.2.1. Du côté des parents
3.2.2.2. Du côté des enseignants
3.2.3. Les stratégies éducatives parentales
3.2.4. La participation parentale
3.2.4.1. Le modèle du processus de participation parentale
3.2.4.2. Les types de rapport à l’école
3.2.5. La communication école-famille
3.2.6. La collaboration école-famille
3.2.6.1. La coéducation
4. QUESTIONS DE RECHERCHE
4.1. QUESTION DE RECHERCHE
4.2. SOUS-QUESTIONS DE RECHERCHE
5. MÉTHODOLOGIE
5.1. MÉTHODE DE RECHERCHE
5.2. RÉCOLTE DE DONNÉES
5.3. ECHANTILLON
5.4. PROTECTION DES DONNÉES ET CONSIDÉRATIONS ÉTHIQUES
5.5. MÉTHODE D’ANALYSE DE CONTENU
6. ANALYSE ET INTERPRÉTATION DES DONNÉES
6.1. LA TRANSITION FAMILLE-ÉCOLE
6.1.1. Vécu de la transition
6.1.2. Accompagnement de la transition
6.1.3. Préparation à l’école
6.1.4. Implications de la transition
6.2. LES ETHNOTHÉORIES ET LES STRATÉGIES ÉDUCATIVES PARENTALES
6.2.1. Représentations sur l’éducation, structure familiale et styles parentaux
6.2.2. Rapport entre ethnothéories scolaires et parentales
6.2.3. Evolution des ethnothéories et des pratiques éducatives
6.3. LES RÔLES
6.3.1. Evolution du rôle de parents à celui de parents d’élèves
6.3.2. Répartition des rôles (enseignants-parents)
6.3.3. Reconnaissance des rôles et des compétences
6.4. LA PARTICIPATION PARENTALE
6.4.1. Rôle parental
6.4.2. Compétence parentale
6.4.3. Invitations de l’école
6.5. LA COLLABORATION ET LA COMMUNICATION ÉCOLE-FAMILLE
6.5.1. Coéducation
6.5.2. Echanges école-famille
7. SYNTHÈSE DES RÉSULTATS
8. CONCLUSION 
8.1. PERSPECTIVES PRATIQUES
8.2. PROLONGEMENTS ET PERSPECTIVES
8.3. ANALYSE CRITIQUE
9. BIBLIOGRAPHIE
ATTESTATION D’AUTHENTICITÉ
10. LISTE DES ANNEXES 

Rapport PFE, mémoire et thèse PDFTélécharger le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *