Les essentiels sur les terres rares

Les essentiels sur les terres rares

Le contrôle de la production

La stratégie de croissance en matière de terres rares s’est tout d’abord définie en amont de la chaîne de valeur. En effet, il fallait en premier lieu avoir le contrôle de la matière première et surtout, sécuriser son approvisionnement. De par sa dotation en ressources naturelles, la Chine profite d’un sol particulièrement riche en terres rares. Comme nous avons pu le voir précédemment, elle est active dans trois zones géographiques (cf. Chapitre 2.1.3.) où elle détient actuellement les gisements les plus abondants de ces précieux métaux, notamment grâce aux mines de Baotou qui représentent environ 40% des réserves mondiales de terres rares.
« […] en quelques décennies, la Chine a multiplié les ouvertures de mines sur son territoire […]» (Pitron 2019, p. 136)
Dès les années 80, la Chine devient le principal producteur de terres rares. Par ailleurs, alors que d’autres pays comme les États-Unis se débarrassaient de ses stocks stratégiques de terres rares à la fin de la guerre froide, la Chine y a vu une opportunité de racheter la matière première pour augmenter ses stocks. Cependant, la Chine n’avait pas les mêmes capacités technologiques que les pays occidentaux sur le plan de la transformation des minerais en produit de forte valeur ajoutée.
Grâce à sa production minière, la Chine est devenue autosuffisante en termes de minerais de terres rares et s’est par la suite focalisée sur le développement de ses capacités technologiques pour rattraper les industries occidentales. Pour ce faire, elle met en place en 1986 le programme national de recherche « 863 » qui s’applique essentiellement aux terres rares. La Chine ne voulait plus « être de simples fournisseurs de matières premières, mais de produits plus élaborés. » (Pitron 2019, p. 169).
La production étant assurée, la Chine poursuit son plan de descente vers l’aval de la chaîne de valeur et s’attaque aux étapes suivantes : s’assurer que les autres pays se fournissent en terres rares par le biais de sa production locale et acquérir la technologie à forte valeur ajoutée de ses concurrents.

Dumping économique et environnemental

Pour ce faire, la Chine a usé « d’une ruse commerciale redoutable qu’elle continue de mettre en œuvre encore aujourd’hui. » (Pitron 2019, p. 105). Il s’agit du dumping, plus précisément économique et environnemental. Par définition, un dumping économique consiste à proposer des prix à l’exportation plus attractifs que ceux du marché intérieur.
C’est ce que la Chine a mis en œuvre en cassant les prix à l’exportation. Ses coûts de production étaient moindres grâce à sa main-d’œuvre bon marché, ce qui a permis de vendre ses terres rares deux fois moins cher que les États-Unis en 2002 (le kilo de terres rares vendu par la Chine était de 2.8 USD contre 5.6 USD aux États-Unis). Cette concurrence féroce avait pour objectif de mettre en danger la viabilité des mines étrangères. En conséquence, la mine de Mountain Pass a dû cesser son activité et d’autres mines se sont vues contraintes de repousser leur projet d’extraction et de production. Ce fut le cas en Australie, où un homme d’affaires du nom de Nicholas Curtis acquerra la mine de Mount Weld pour en extraire des terres rares, par le biais de l’entreprise minière Lynas. Mais à cause du dumping économique, « les prix offerts par les Chinois étaient tellement faibles qu’il n’y avait aucune chance, pour Lynas, de proposer des terres rares à un prix compétitif. » (Pitron 2019, p. 106).En parallèle d’une offre complexe à rivaliser, il ne faut pas oublier que cette situation est également due à un dumping environnemental. Ce prix aussi bas ne résultait pas uniquement de la main-d’œuvre chinoise, les réglementations environnementales pour l’extraction des minerais étaient presque inexistantes84. Les industries minières n’avaient aucunement besoin de se soucier de la pollution et n’ont pas intégré de coût supplémentaire pour traiter les déchets. Résultat : un coût de production bien plus faible que les autres pays, mais une pollution catastrophique pour l’écosystème environnant. Le coût des dégâts environnementaux n’a pas été estimé, mais en prenant en considération que le processus de production de terres rares est très polluant (cf. Chapitre 2.2.5), qu’en Chine « 10% de ses terres arables sont contaminées par des métaux lourds et 80% des eaux de ses puits souterrains sont impropres à la consommation » (Pitron 2019, p. 65), que nous ajoutons à cela les effets néfastes sur la santé de la population chinoise (environ 3 millions de décès par ans à cause de la pollution), nous pouvons supposer que la somme totale est exorbitante.

L’innovation indigène

La Chine continue d’investir dans la recherche, mais elle se penche aussi sur une stratégie complémentaire, celle d’attirer les industries étrangères sur son territoire avec à la clé une transmission de leur savoir-faire, appelée également l’« innovation indigène » (Pitron 2019,p. 185). Pour ce faire, la Chine promettait à ces industries des traitements de faveur si elles délocalisaient une partie de leurs activités. Cet accord permettait aux industries étrangères de bénéficier de l’abondance en termes de ressources et d’un coût de production attrayant87. De plus, la Chine proposait également des financements pour faciliter le transfert. Pour garantir à la Chine que ces industries partagent leur technologie, elle instaure une condition :
« réaliser une joint-venture minoritaire avec une entreprise chinoise dans un secteur « clé » autorisé par le gouvernement et délocaliser leur centre de production sur son sol. » (Ruet 2016, p.19).Par secteur « clé », nous entendons tout domaine lié aux nouvelles technologies numériques et environnementales.
Le Japon et la France sont les premiers à s’y intéresser. En effet, le Japon était dans le top mondial de la production d’aimant dans les années 1980 et trouvait intéressant de se « débarrasser » de ses filières de basse technologie pour augmenter ses gains en se concentrant uniquement vers les produits à forte valeur ajoutée. La France, quant à elle, voulait en tirer profit pour « transférer une partie de ses activités de raffinage vers la chine » (Pitron 2019, p. 162). Ce fut les débuts du transfert technologique.
« Dès les années 1990, une flopée d’usines de raffinages bas de gamme ont commencé à pousser comme des champignons dans la région de Baotou, puis sur l’ensemble du territoire chinois. » (Pitron 2019, p.163)
Mais la stratégie de « ressources contre technologies » (Ruet 2020, p.18) ne s’arrête pas là, car dès les années 2000, la Chine impose progressivement des quotas d’exportations dans le monde, que nous retrouvons au Tableau 591. Les autorités chinoises informent que ces quotas ont pour but de garantir la demande chinoise en terres rares, mais ne cachent pas non plus qu’ils aimeraient attirer les entreprises étrangères sur leur territoire. Cette pression dans les échanges internationaux a incité d’autres entreprises à se délocaliser, par crainte d’être en pénurie de ces métaux.

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Table des matières

Déclaration
Remerciements
Résumé
Liste des tableaux
Liste des figures
1. Introduction
2. Les terres rares
2.1 Les essentiels sur les terres rares
2.1.1 Définition
2.1.2 Utilité des terres rares
2.1.3 Gisement de terres rares
2.2 Analyse du marché des terres rares
2.2.1 La production de terres rares
2.2.2 La demande de terres rares
2.2.3 Évolution du prix
2.2.4 L’enjeu d’économiser les terres rares
2.2.5 Impacts environnementaux
3. La Chine et les terres rares
3.1 Les débuts de la mondialisation
3.2 Stratégie de croissance en matière de terres rares
3.2.1 Le contrôle de la production
3.2.2 Dumping économique et environnemental
3.2.3 L’innovation indigène
3.3 Le leader du marché éolien
4. Relation entre les deux pays
4.1 Le contrôle chinois des aimants permanents
4.1.1 Le cas de l’entreprise Magnequench
4.1.2 La mine de Mountain Pass
4.2 Les conséquences du quasi-monopole chinois des terres rares
4.2.1 Un déficit commercial grandissant
4.2.2 Demande en terres rares des États-Unis
4.2.3 Les effets des quotas d’exportations des terres rares
4.2.4 Investissements financiers chinois en matière de terres rares
4.2.5 Un moyen de pression sur la « guerre commerciale »
4.3 Stratégies des États-Unis face au quasi-monopole
5. Conclusion
Bibliographie
Annexe 1 : Image de couverture
Annexe 2 : Oxyde de cérium (Ce)
Annexe 3 : La guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine : un bref rappel
Annexe 4 : Augmentation des prix à l’exportation des terres rares en mai 2019
Annexe 5 : Utilisation des terres rares aux États-Unis

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