La maladie dโAlzheimer
La maladie dโAlzheimer est une maladie neurodรฉgรฉnรฉrative du systรจme nerveux central(2). Selon le DSM-5, on parle de trouble neurocognitif dรป ร la maladie dโAlzheimer(2). Elle se traduit par ยซ une progression graduelle dโune altรฉration dans un ou plusieurs domaines cognitifs ยป(2). Le DSM-5 diffรฉrencie le stade lรฉger de la maladie et le stade majeur(2). Au stade lรฉger, ยซ la maladie se traduit par une diminution de la mรฉmoire et de lโapprentissage, quelquefois accompagnรฉe par des dรฉficits des fonctions exรฉcutives ยป(2). Au stade majeur, ยซ les habiletรฉs visuoconstructives et perceptivomotrices et le langage peuvent aussi รชtre dรฉficients.ยป(2). Le Docteur Reisberg, chef de clinique de la New York University School of Medicine’s Silberstein Aging and Dementia Research Center, a crรฉรฉ un systรจme, ร partir duquel il a dรฉfini sept stades ร la maladie dโAlzheimer(3).
– Le premier stade consiste en un absence de symptรดme.
– Le deuxiรจme stade correspond ร un dรฉficit cognitif liรฉ ร lโรขge ou ร la maladie, impossible ร dรฉterminer ร ce stade.
– Le troisiรจme stade correspond ร un dรฉficit cognitif lรฉger. Les troubles commencent ร รชtre repรฉrables par les proches, et un mรฉdecin peut dรฉceler la maladie chez certaines personnes, en rรฉalisant des examens approfondis.
– A partir du quatriรจme stade, le dรฉficit cognitif modรฉrรฉ permet dโรฉtablir un diagnostic de la maladie.
– Lors du cinquiรจme stade de la maladie, le dรฉficit cognitif modรฉrรฉment sรฉvรจre est tel que la personne malade a besoin dโaide pour rรฉaliser certaines activitรฉs de la vie quotidienne.
– Le sixiรจme stade consiste en un dรฉficit cognitif sรฉvรจre. La personne malade a alors besoin dโaide pour rรฉaliser toute les tรขches de la vie quotidienne.
– Enfin, le dernier stade de la maladie correspond ร un dรฉficit cognitif trรจs sรฉvรจre. ร ce moment-lร , les gestes volontaires dans le but de rรฉaliser une activitรฉ sont devenus impossibles. La personne ne peut plus interagir avec son entourage. ร terme, elle peut perdre lโusage de la parole.
Les ergothรฉrapeutes travaillant en ESA รฉtant les principaux intervenants auprรจs des personnes atteintes de la maladie dโAlzheimer, je vais me baser sur leur population cible : les personnes ayant un stade lรฉger ou modรฉrรฉ de la maladie(4). Cโest-ร -dire du diagnostic de la maladie jusquโau stade cinq.
Les Equipes Spรฉcialisรฉes Alzheimer
Les ESA se sont dรฉveloppรฉes sur le territoire franรงais ร partir de 2011, grรขce ร la 6e mesure du plan Alzheimer de 2008-2012(4). Ces รฉquipes sโintรจgrent dans le cadre des Services de Soins Infirmiers A Domicile (SSIAD) ou Services Polyvalents Dโaide Et De Soins A Domicile (SPASAD). Les ESA sont composรฉes dโun infirmier coordinateur, dโun ergothรฉrapeute et/ou dโun psychomotricien qui sont assistรฉs dโun Assistant de Soin en Gรฉrontologie (ASG). Ces รฉquipes interviennent sur prescription mรฉdicale, et rรฉalisent des sรฉances de rรฉhabilitation et dโaccompagnement pour dรฉvelopper et maintenir les capacitรฉs restantes, dans le but de rester ร domicile(4). Ces รฉquipes agissent auprรจs de la personne malade et des aidants. Une prise en soin se fait en 15 sรฉances maximum, sur une durรฉe de trois mois, une fois par an.
Le rรดle de lโergothรฉrapeute en ESA
Le rรดle des ergothรฉrapeutes en ESA est strictement dรฉfini par le circulaire nยฐ 2011-110 du 23 mars 2011 relatif ร la mise en ลuvre des mesures mรฉdico-sociales du plan Alzheimer(4). Il intervient dans un premier temps, afin dโรฉvaluer la situation, et dโรฉmettre une planification de la prise en soin. Celle-ci sera ensuite rรฉalisรฉ par lโergothรฉrapeute ou lโASG. Elle consiste ร mettre en place des compensations et ร automatiser les stratรฉgies dโadaptation ou encore ร rรฉaliser des activitรฉs pour solliciter et renforcer les capacitรฉs et les savoirs. Lโergothรฉrapeute intervient aussi pour renforcer la communication verbale et non verbale. Enfin, il travaille avec lโentourage de la personne pour le conseiller, faire un travail dโรฉducation thรฉrapeutique et dโacceptation des aides. La prise en soin a une durรฉe de trois mois maximum, renouvelable tous les ans. A la fin de la prise en soin, lโergothรฉrapeute rรฉalise un bilan qui sera transmis au mรฉdecin traitant. Il veille ร mettre en place des relais afin dโassurer une continuitรฉ des soins.
Les nouvelles technologies ou Technologies de lโInformation et de la communication
Concernant les nouvelles technologies, je me suis beaucoup demandรฉe comment les dรฉfinir. Il nโy a pas de vรฉritable consensus quant ร sa dรฉfinition, malgrรฉ une comprรฉhension gรฉnรฉrale de la population. En รฉchangeant avec diffรฉrents professionnels, il est apparu que la dรฉfinition des nouvelles technologies รฉtait propre ร chaque gรฉnรฉration. Une personne de soixante ans ne les dรฉfinira pas de la mรชme faรงon quโune personne de dix-huit ans, ou comme une personne travaillant dans le domaine des technologies. Finalement, la dรฉfinition suivante des technologies de lโinformation et de la communication (TIC) peut รชtre donnรฉe: ยซ Dรฉsigne lโensemble des technologies permettant de traiter les informations numรฉriques et de les transmettre ยป(5). On peut par exemple penser aux dispositifs GPS ou de tรฉlรฉalarme. Les capteurs de chutes ou dโerrances ainsi que les dispositifs de contrรดle de lโenvironnement peuvent aussi entrer dans cette catรฉgorie. Toutes les technologies telles que les tablettes connectรฉes, les piluliers ou agendas intelligents ou encore les localisateurs dโobjets sont aussi des TIC. Dans la suite de ce travail, le terme ยซ nouvelles technologies ยป sera utilisรฉ sous le sens des TIC. Maintenant que le thรจme est mieux dรฉfini, remettons les รฉlรฉments dans leur contexte.
Socio-รฉconomiques
Selon lโOMS (Organisation Mondiale de la Santรฉ), il y a dans le monde 47.5 millions de personnes atteintes de dรฉmences, oรน la maladie dโAlzheimer reprรฉsente entre 60 ร 70% des cas(6). En France, on compte environ 900 000 personnes porteuses de la maladie, et ce chiffre ne cesse dโaugmenter(6). Outre les impacts sur la vie quotidienne, la maladie reprรฉsente un fort coรปt sociรฉtal, et lโOMS le chiffre ร 604 milliards de dollars, soit 1 % du produit intรฉrieur brut mondial.
Le vieillissement de la population conduit ร de nouveaux besoins, et a donc permis le dรฉveloppement des Silver รฉconomies(8). Dans les diffรฉrentes รฉconomies qui y sont liรฉes, on y trouve le marchรฉ des technologies. En effet, on peut voir de nombreuses innovations technologiques permettant de rรฉpondre aux difficultรฉs du grand รขge. Ce dรฉveloppement se traduit par la crรฉation dโentreprises, dโรฉtudes spรฉcialisรฉes dans le dรฉveloppement des sylvertechnologies, ou encore dโรฉvรจnements y รฉtant dรฉdiรฉs(9). La croissance liรฉe aux diffรฉrents marchรฉs de la Silver รฉconomie est estimรฉe ร 0.25% sur le PIB (Produit Intรฉrieur Brut) dโici les prochaines annรฉes.
Santรฉ publique
Afin de rรฉagir ร ces enjeux, les diffรฉrents gouvernements ont mis en place des plans de santรฉ publique :
– 2001-2005(10) : amรฉlioration du diagnostic, avec notamment le dรฉveloppement de consultation mรฉmoire. Le soutien des personnes atteintes et de leurs familles, avec lโAllocation Personnalisรฉe Autonomie (APA) et le dรฉveloppement des Centres Locaux dโInformation et de Coordination (CLIC). La crรฉation des Hรฉbergement pour Personnes Agรฉes, des accueils de jours et des hรฉbergements temporaires.
– 2004-2007(11) : avec pour but la reconnaissance de la maladie dโAlzheimer comme une maladie ร part entiรจre. Mieux accompagner les malades et leurs familles. Accompagner la vie ร domicile des personnes atteintes de maladie dโAlzheimer, avec notamment le dรฉveloppement de la formation des professionnels et des bรฉnรฉvoles.
– 2008-2012(12) : Ce plan a accordรฉ une grande part ร la recherche, mais sโest aussi axรฉ sur lโamรฉlioration de la qualitรฉ de vie des patients et de leurs familles avec le dรฉveloppement des structures de rรฉpit, la crรฉation de Maisons pour lโAutonomie et lโIntรฉgration des malades Alzheimer (MAIA), du soutien ร domicile, lโamรฉlioration de lโaccueil en structure dโhรฉbergement et la reconnaissance de la maladie pour amรฉliorer la prise en soin. Ce plan a permis la crรฉation des ESA
– 2014 โ 2019(13) : Le dernier plan en date est un plan sur les maladies neurodรฉgรฉnรฉratives, incluant la maladie dโAlzheimer. Il comprend trois grands axes : lโamรฉlioration du diagnostic et de la prise en charge des malades, le maintien de la qualitรฉ de vie des malades et de leurs aidants et le dรฉveloppement et la coordination de la recherche.
La mise en place de ces diffรฉrents plans montre ร quel point la maladie dโAlzheimer prรฉoccupe la sociรฉtรฉ et le gouvernement. Depuis presque une vingtaine dโannรฉes, la crรฉation de ces plans a permis de dรฉvelopper lโaccompagnement des personnes atteintes de dรฉmence type Alzheimer, grรขce ร la crรฉation de structures dโhรฉbergement ou dโinformation. La sociรฉtรฉ prend dorรฉnavant conscience que la personne malade รฉvolue mieux dans son environnement, aux premiers stades de la maladie, et cela aboutit notamment ร la crรฉation des ESA grรขce au plan 2008-2012. Les aidants sont les deuxiรจmes victimes de la maladie dโAlzheimer. En se consacrant ร aider leur proche, ils engagent leur propre santรฉ. Environ 70 % des conjoints passent plus de six heures ร sโoccuper de leur proche(14). Une รฉtude rรฉalisรฉe en France, montre que plus le fardeau de lโaidant est รฉlevรฉ, moins la santรฉ des aidants est bonne(14). Il a รฉtรฉ dรฉmontrรฉ quโils รฉtaient plus enclins ร des symptรดmes dรฉpressifs que le reste de la population ou encore quโils se sentaient plus isolรฉs(14). Plusieurs mesures ont รฉtรฉ prises dans ce sens, comme la mise en place du congรฉ du proche aidant, ayant pour but de permettre ร lโaidant de prendre un congรฉ temporaire pour se consacrer ร la personne malade(15), ou encore la proposition de consultations annuelles pour lโaidant, proposรฉ par la Haute Autoritรฉ de Santรฉ (HAS) (16). Enfin, concernant les enjeux de santรฉ publique, le Ministรจre des Solidaritรฉs et de la Santรฉ a fait connaรฎtre en 2018 ses stratรฉgies nationales de santรฉ 2018-2022(17). Ces stratรฉgies sโarticulent autour de quatre axes. Le dernier concerne la promotion de lโinnovation dans le milieu de la santรฉ. Il y a une volontรฉ de faire entrer les nouvelles technologies dans les prises en soin. Il est donc important pour cela de les รฉtudier pour pouvoir les mettre en place dans les meilleures conditions possibles.
Enjeux professionnels
Lโergothรฉrapie est en constante รฉvolution depuis lโรฉmergence de la profession dans les annรฉes 50(18). Peu ร peu, la profession sort du cadre des structures de santรฉ pour se rendre au domicile des patients. Afin dโorienter notre pratique, nous nous fions aux stratรฉgies annoncรฉes par lโAssociation Nationale Franรงaise des Ergothรฉrapeutes (ANFE). Elle a annoncรฉ en 2017, une stratรฉgie professionnelle jusquโร 2022 (19). Dans ce document, on retrouve dix axes sur lesquels sโappuiera le dรฉveloppement de la profession dans les annรฉes ร venir. On retrouve lโaxe 1 qui demande aux ergothรฉrapeutes dโaffirmer leur pratique, et cela passe notamment par la rรฉalisation de travaux de recherche. Lโaxe 5 pousse les ergothรฉrapeutes ร utiliser les innovations dans leur pratique. Il est important de faire le lien entre la recherche et les innovations afin de juger de lโefficacitรฉ de ces derniรจres dans la prise en soin en ergothรฉrapie. Nous pouvons ainsi voir, en lien avec ces nombreux enjeux, que les thรจmes que nous interrogeons sont socialement vifs.
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Table des matiรจres
1. INTRODUCTION
1.1. CONTEXTE
1.2. THEME
LA MALADIE DโALZHEIMER
LES EQUIPES SPECIALISEES ALZHEIMER
LE ROLE DE LโERGOTHERAPEUTE EN ESA
LES NOUVELLES TECHNOLOGIES OU TECHNOLOGIES DE LโINFORMATION ET DE LA COMMUNICATION
1.3. ENJEUX
SOCIO-ECONOMIQUES
SANTE PUBLIQUE
ENJEUX PROFESSIONNELS
1.4. REVUE DE LITTERATURE
MOTS CLES
BANQUES DE DONNEES
CRITERES DโINCLUSION ET DโEXCLUSION
ANALYSE CRITIQUE
1.5. PROBLEMATIQUE PRATIQUE
1.6. ENQUETE EXPLORATOIRE
OBJECTIFS DE LโENQUETE
CHOIX DE LโOUTIL
POPULATION CIBLEE
BIAIS
CONSTRUCTION DE LโOUTIL
ANALYSE DES RESULTATS
1.7. DISCUSSION DES RESULTATS
1.8. QUESTION INITIALE DE RECHERCHE
1.9. CADRE THEORIQUE
LA TELESURVEILLANCE
LA RESILIENCE
1.10. PROBLEMATISATION THEORIQUE
1.11. QUESTION ET OBJET DE RECHERCHE
2. MATERIEL ET METHODE
2.1. CHOIX DE LA METHODE DE RECHERCHE
2.2. POPULATION ET SITE DโEXPLORATION
2.3. OUTIL DE RECUEIL DE DONNEES
2.4. CONSTRUCTION DE LโENTRETIEN
MATRICE DE QUESTIONNEMENT
LES BIAIS DE LA RECHERCHE
2.5. TEST DE LโOUTIL DE RECUEIL DE DONNEES
2.6. DEROULEMENT DES ENTRETIENS
2.7. OUTIL DE TRAITEMENT ET DโANALYSE DES DONNEES
3. RESULTATS
3.1. ANALYSE THEMATIQUE
LES AIDANTS ET LES TELESURVEILLANCES
LA REPRESENTATION DES CAPACITES DE LA PERSONNE MALADE PAR LES AIDANTS
LE ROLE DES PROFESSIONNELS
LA COMPETENCE TECHNOLOGIQUE
3.2. ANALYSE LEXICALE
OCCURRENCE DE MOTS : PREMIER ENTRETIEN
OCCURRENCE DE MOTS : DEUXIEME ENTRETIEN
OCCURRENCE DE MOTS : TROISIEME ENTRETIEN
4. DISCUSSIONS DES DONNEES
4.1. INTERPRETATION DES RESULTATS
LES AIDANTS ET LES TELESURVEILLANCES
LA REPRESENTATION DES CAPACITES DE LA PERSONNE MALADE PAR LES AIDANTS
LE ROLE DES PROFESSIONNELS
LA COMPETENCE TECHNOLOGIQUE
4.2. ELEMENTS DE REPONSE A LโOBJET DE RECHERCHE
4.3. CRITIQUE DU DISPOSITIF DE RECHERCHE
4.4. APPORT, INTERETS ET LIMITES DES RESULTATS POUR LA PRATIQUE PROFESSIONNELLE
4.5. PROPOSITIONS ET TRANSFERABILITE POUR LA PRATIQUE PROFESSIONNELLE
4.6. PERSPECTIVES DE RECHERCHES ET OUVERTURES
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES