Déplacement et mobilité
Les déplacements sont inhérents à l’homme, aux sociétés humaines, et plus largement à toute forme de vie animale sur Terre. Ce besoin de se mouvoir se traduit de diverses manières dans l’espace : circulation, échanges de biens, de personnes, d’informations…
Aussi pouvons-nous distinguer trois types de déplacements [V. Kaufmann, 2008] :
les déplacements forcés
les déplacements de service
les déplacements de loisir.
En ce qui concerne la mobilité, c’est « le nombre de déplacements réaliser par un individu au cours d’une journée » [LET3 , 2000]. Se déplacer dans l’espace est donc l’une des propriétés de la mobilité.
Les déplacements
Au sens strictement mathématique, tout mouvement d’un corps, quel qu’il soit, s’apparente à un déplacement.
Toujours en mathématique, le déplacement est une grandeur vectorielle résultant de la différence entre le vecteur position au temps initial et le vecteur position au temps final. Il est indépendant de la trajectoire. A l’inverse, le mouvement est corrélé à la trajectoire qui est rectiligne.
Il apparaît donc que le déplacement est une résultante d’un mouvement réalisé : je me suis mu, donc je me suis déplacé. Mais le fait de quitter une pièce pour se rendre dans la pièce d’à côté peut-il être considéré de la même façon que quitter son pays natal pour aller s’installer sur un autre continent ?
Il n’existe pas ou peu de termes cadrant précisément les différentes échelles de la mobilité.
Le plus connu et le plus caractéristique est celui de migration. Définit comme le fait de partir d’un endroit dans le but de s’installer à un autre constitue l’une des plus petite échelle de la mobilité. Cependant, le terme est aussi employé à des échelles plus grandes, pour les déplacements domicile – travail par exemple, appelés « migrations pendulaires »… Dans le cadre de l’étude des mobilités, on parlera de déplacement pour tous les mouvements quotidiens qui nécessitent l’utilisation des infrastructures publiques.
La mobilité en géographie
La mobilité fait référence à une idée de mouvement, de déplacement (physique ou non).
Plusieurs notions géographiques semblent donc étroitement liées au concept de mobilité.
Définition
Le mot mouvement, qui se trouve être dans la racine étymologique du terme, occupe effectivement une place importante dans la définition de la mobilité.
R. Brunet la définit comme une « forme du mouvement qui s’exprime par le changement de position (spatiale ou sociale) ». On parle bien de l’expression d’un mouvement dans l’espace mais aussi d’une mobilité sociale des individus. La première fait appel aux déplacements (la mobilité peut être observée à des échelles et des degrés différents.
Les déplacements), alors que la seconde fait référence à une mobilité non physique…
Les acteurs de la mobilité étant les individus mais aussi les objets (qu’ils soient physiques ou non), on peut distinguer trois types d’espaces : l’espace physique où circulent les personnes et les biens matériels l’espace virtuel où circulent les flux d’informations (réseaux téléphoniques, internet…) l’espace social dans lequel l’individu voit son statut évoluer.
D’autre part, la mobilité est très dépendante de l’aptitude qu’ont les personnes (et les biens) à se déplacer : alors que nous parlons des acteurs, le contexte socio-spatial n’est pas à négliger car les mobilités sont au cœur de la société.
Avec la mobilité sociale, il s’agit de montrer l’évolution des générations d’individus dans le système social. Ainsi, de nombreux facteurs ont eu tendance à influer sur la mobilité dans le temps :
La généralisation de la journée continue, qui a supprimé des déplacements de la mi-journée pour les personnes déjeunant sur leur lieu de travail.
Le vieillissement de la population : les personnes âgées se déplacent moins que les plus jeunes. L’essor des grandes surfaces, qui réduit les déplacements nécessaires aux achats.
Le développement du travail féminin, qui accroît le nombre de déplacements réalisés par les femmes.
L’accroissement du chômage, qui a plutôt un effet inverse…
L’accroissement du temps libre, qui peut conduire à réaliser davantage d’activités.
La spécialisation des espaces, qui peut conduire à accroître le nombre de déplacements pour réaliser un nombre égal d’activités.
Les télécommunications qui pourraient conduire à diminuer la mobilité pour les motifs travail (télétravail), achats (internet, téléachat), etc., mais pas forcément la mobilité totale : activités complémentaires, et non de substitution…
La motorisation qui offre une plus grande facilité de déplacement et peut accroître la mobilité. [Didacticiel de formation à la modélisation des transports, 2002]
Plus récemment, la plus grande flexibilité des temps travaillés laisse émerger de nouvelles mobilités : on constate que les mobilités sont plus diffuses dans l’espace et dans le temps…
Il en résulte des configurations de plus en plus individuelles des transports et des lieux de transports [F. Audard, 2004].
Les évolutions du concept
La mobilité a connu des évolutions dans sa façon d’être pensée : la sédentarisation de l’homme et la création de villes inscrivent l’idée de lieu de départ et lieu d’arrivée ainsi que le développement des échelles dans la mobilité, qui existaient déjà mais qui se multiplient avec le temps et les évolutions technologiques. « Historiquement, la définition de la mobilité était réduite au nombre de véhicules circulant sur un axe. Cette première définition correspondait au besoin de dimensionnement des infrastructures. D’un axe isolé, la problématique a évolué vers le réseau de transport. La définition correspond toujours à un nombre de véhicules, mais cette fois l’origine – destination du véhicule devient nécessaire pour connaître son utilisation du réseau concerné. Cette définition correspondait aux données nécessaires pour faire tourner les premiers modèles de trafic. » [LET, 2000] Il existe donc une relation entre progrès technique et évolution du concept de mobilité : les innovations et les améliorations successives des moyens de communications ont d’ailleurs amené à redéfinir, au fur et à mesure, ce qu’était la mobilité.
En outre, gérer au mieux les flux de personnes et de biens dans l’espace est l’objectif principal des pouvoir publics en matière de mobilité. Ces responsabilités passent évidemment par une bonne gestion des moyens de circuler, aussi bien au niveau local qu’à des échelles plus globales.
En France, comme partout ailleurs, la répartition des infrastructures de transports a été très variable en fonction des époques. Dans l’Antiquité, on a privilégié le transport routier (hippomobile…), puis l’exploitation des voies maritimes et fluviales s’est progressivement imposé, avec notamment la construction, durant l’Ancien Régime, de nombreux canaux de navigation (moyen encore compétitif aujourd’hui, avec la conteneurisation…). Ensuite, au XIXe siècle, l’apparition de la machine à vapeur et le développement du chemin de fer, qui accompagnent la révolution industrielle, expliquent la forte augmentation des échanges de marchandises à travers la monde. Plus tard, l’automobile prendra peu à peu une place toujours plus grande sur les routes pour arriver à ce que nous connaissons aujourd’hui.
Enfin, le développement de l’aviation civil permet, depuis le milieu du XXe siècle, le transport de passagers à très grande vitesse, et finalise cette lutte constante que l’homme mène contre l’« espace-temps ».
L’évolution des transports a donc permis de « réduire » la distance entre deux points, en réduisant le temps des déplacements. Enfin, les données immatérielles, autrefois dépendantes de la mobilité humaine, circulent désormais à travers des réseaux virtuels (téléphone, internet, etc.) qui permettent de se soustraire à l’espace physique, et donc à l’espace-temps…
Ainsi, « la mobilité se réfère en géographie à la pratique des échanges et de s déplacements qu’effectuent les individus […] La mobilité des personnes et des biens a eu tendance à augmenter, en particulier depuis le développement de techniques de transport moins coûteuses et plus rapides » : de nos jours, le concept est donc abordé aussi bien d’un point de vue quantitatif (multiplication des moyens de transport), que qualitatif (vitesse, confort…).
Le concept d’« espace vécu »
On doit le concept d’espace vécu à Armand Frémont, qui au début des années 1970 est à l’origine d’une nouvelle approche en géographie : au lieu de s’intéresser à l’espace « objectif » sur lequel travaille la géographie néopositiviste, qui est dominante à l’époque, son approche à pour objet l’espace « subjectif ». Ce concept définit le territoire comme espace approprié par les individus : « les hommes vivants en société construisent leur propre territoire, et en tant qu’acteurs géographiques, ils se comportent selon leurs représentations de l’espace ».
Ce courant de la géographie semble donc privilégier les approches phénoménologiques. Aussi, à travers cette réflexion, une question fondamentale est-elle soulevée : existe-t-il une géographie objective, ou les hommes ont-ils une géographie de leurs perceptions ?
La genèse du concept
En France, cette approche se fait en rupture avec la géographie régionale de Vidal de la Blache.
A partir de là, une convergence scientifique s’opère avec d’autres chercheurs qui s’intéressent aussi à ce sujet mais en l’abordant à partir de milieux différents : A. Frémont et l’Université de Caen se tournent vers la géographie rurale : le but est de connaître la perception que les habitants de Basse-Normandie peuvent avoir de leur région.
Alain Metton et Jean-Michel Bertrand (professeurs à Paris) s’intéressent aux grandes métropoles : l’éclatement de la ville les conduisent à un repli sur les quartiers qui vont être défini par l’image qu’en ont leurs habitants. Jean Gallais (professeur à Rouen) est un tropicaliste qui se situe dans la lignée de Pierre Gourou. Dans sa thèse sur le delta intérieur du Niger, il montre la pluralité de cette région : il y a autant de deltas que de groupes (pasteurs, pêcheurs, agriculteurs…) qui y vivent et il met ainsi en évidence la multiplicité des perceptions de l’espace.
Les recherches sur l’espace vécu s’inspirent donc de trois courants principaux d’investigations : la géographie régionale, la géographie urbaine et la géographie tropicale.
Avec ces premiers travaux, l’espace vécu apparaît comme étant plus qu’un simple espace de vie : c’est l’espace envisagé dans ses rapports à « la psychologie des hommes ».
Après s’être débarrassé du néopositivisme, Armand Frémont se demande si la géographie ne serait pas la somme des expériences de chaque homme, et de leurs combinaisons ? Par cette question, la géographie se trouve au cœur d’un problème philosophique : « les hommes ont-ils la géographie de leurs perceptions, de leurs sensations, de leurs connaissances, de leur imaginaire ? Ou bien, une géographie « en soi », objective, existe-telle, sur des fondements matériels, qui transcendent l’univers de chacun ? » [Frémont, 2001].
La géographie tournée vers l’économie et éventuellement le marxisme, dans les années 1950 – 60, se réfère à la deuxième hypothèse, et même à la géographie traditionnelle des décennies antérieures (forme de déterminisme économique qui succède au déterminisme naturel).
A l’inverse, une géographie humaniste, formulée à partir des années 1970, notamment aux Etats-Unis sous le nom de Humanistic Geography, se rapproche plutôt vers la première hypothèse. Le géographe, c’est l’homme lui-même, c’est lui qui produit sa propre géographie.
Parallèlement à tout cela, Armand Frémont définit la région comme un système particulier de relations qui unissent les hommes avec leur milieu ; et pour lui, la géographie doit étudier ces relations. Il précise que les jugements que portent les hommes sur l’espace qui les entoure sont le fruit des habitudes, de l’affectivité, des « conditionnements de la culture », des « fantasmes de l’inconscient » (cf. § 3.2.4 La région en tant qu’espace vécu). L’espace vécu apparaît ici comme « le révélateur des réalités régionales »
L’« espace vécu »
Les hommes vivent en société et construisent leur propre territoire, leur espace géographique. Ils ne se comportent pas comme de simples objets qui n’auraient comme motivation que des besoins économique de subsistance ou d’adaptation au milieu. Ils ont leur espace, qu’ils s’approprient, avec leur propre parcours, leurs perceptions, leurs intérêts [Frémont, 2005]. « La géographie vue des hommes », c’est de cette manière qu’Armand Frémont qualifie son travail.
Le concept
La méthode dans l’approche des espaces vécus a consisté d’abord à mieux préciser quelques notions fondamentales telles que les distances* et l’espace*. Les distances sont « universellement mesurables objectivement » mais leurs calculs se compliquent lorsqu’on distingue la distance-temps qui tient compte de la vitesse possible de déplacement, la distance affective qui prend en charge l’affectivité portée sur les lieux rencontrés et qui modifie l’impression de longueur, et la distance sociale (ou distance structurale) qui tient compte des divisions, ou des rapprochements entre les hommes.
L’espace, quant à lui, il est construit par les individus et définit comme un espace de vie dont la subjectivité de ces habitants vient modifier la perception. Frémont distingue « l’espace de vie », qui est « l’ensemble des lieux fréquentés par une personne ou par un groupe », « l’espace social » qui est l’espace de vie plus les « interrelations sociales » qui le sous-tendent et « l’espace vécu », qui est l’espace social plus « les valeurs psychologiques qui s’attachent aux lieux et qui unissent les hommes à ceux-ci par les liens matériels ».
Il abouti ainsi à la conclusion que l’espace vécu intègre à la fois les distances, les complexités du paysage, et la perception de celui-ci par les individus qui le peuple.
Par ailleurs, d’après J. Piaget l’espace se construit peu à peu chez l’enfant par stade successifs jusqu’à se constituer en une « intelligence de l’espace ».
Les variations personnelles de l’espace vécu
Chaque individu construit son propre espace vécu. Les variations personnelles de l’espace vécu obéissent, d’après A. Frémont, à quelques règles. Il dégage quatre facteurs qui semblent particulièrement déterminants :
L’âge : quelques chercheurs ont montré la progression de l’espace vécu chez l’enfant, depuis l’espace immédiat du nourrisson jusqu’à celui plus large du collégien qui découvre son quartier, sa région… Plus globalement, le cycle de l’espace vécu suit celui de la vie. Il s’élargit de la petite enfance jusqu’à l’âge adulte, puis il se rétracte avec la vieillesse.
Mais cette règle enregistre de nombreuses exceptions, selon les civilisations. En effet, la mobilité croissante des résidences, des lieux de travail, de la composition des familles suscite une très grande fluidité de cet espace vécu. Le sexe : même si les sociétés contemporaines tendent à effacer les différences, un espace des hommes se distingue de celui des femmes.
Le cas le mieux étudié, c’est celui des sociétés islamisées où une certaine ségrégation de l’espace entre les deux sexes est assez marquée. Les femmes, en effet, sont tournées vers l’intérieur, le foyer, les enfants, la famille… Alors que les hommes sont naturellement tournés vers l’extérieur, le café, les amis, les affaires, le travail au loin (émigration…).
Mais tous les pays portent les traces de cette division des espaces, les Etats-Unis et l’Europe au premier rang.
Les classes sociales : l’accès à des espaces étendus, de la proximité au vaste monde, du quotidien à l’exceptionnel, est très largement fonction de l’appartenance à des classes élevées. Frémont met donc en évidence que la richesse n’est pas seulement financière ou culturelle, elle est aussi spatiale, « car l’espace vécu est à la fois un produit des autres patrimoines, mais il est aussi un facteur qui contribue à l’accumulation de la richesse ».
La culture : la culture de chacun joue un rôle important dans le façonnement des espaces vécus. Armand Frémont précise qu’il existe aussi des cultures collectives qui constituent un facteur notable de différenciation. Il met ainsi en évidence des cultures de la stabilité, « de l’enracinement », comme c’est le cas, dit-il, de la plupart des sociétés paysannes. Et, à l’inverse, des cultures de la mobilité (les commerçants, les grandes diasporas) qui « animent le monde et le structurent en partie ».
Jean Gallais a ainsi montré en 1967 comment une même région, en l’occurrence le delta intérieur du Niger, pouvait être composée par une superposition de cultures et d’espaces vécus profondément différents…
A partir de là, Armand Frémont en déduit une typologie des espaces.
Classification des espaces
Les espaces de stabilité : ce sont des espaces qui sont peu soumis aux migrations « permanentes et turbulentes » des populations. Ils s’inscrivent assez facilement, d’après Frémont, dans une analyse des combinaisons géographiques et des espaces vécus qui les composent. Pour lui, des lieux stables s’inscrivent sur plusieurs siècles autour de villages, de petites villes, de ports, de capitales, où les hommes ont pu fixer leurs espaces aussi bien individuellement que collectivement. Il existe donc des cohérences entre les espaces vécus des individus et des groupes et entre ceux-ci et les pays, les régions, les nations…
Les espaces de la mobilité : Frémont parle ici de la très grande majorité des territoires contemporains où l’emporte la métropolisation : la très grande ville et son influence proche ou lointaine, la mobilité permanente des hommes, journalière, hebdomadaire, saisonnière, de proximité ou intercontinentale, engendre une liberté d’initiative croissante. La somme des espaces vécus ne constitue plus des assemblages territoriaux continus mais des réseaux superposés.
C’est en exploitant ces mutations qu’Armand Frémont justifie « l’invention » d’une nouvelle géographie. La démarche quantitative, pour maîtriser les grands nombres, mais aussi l’analyse subjective, telle celle des espaces vécus, pour comprendre les motivations et les références de base.
La région en tant qu’espace vécu
Le terme « région » est considéré comme l’un des plus polysémiques de la géographie. Le flou de la notion correspond bien à l’une des formes du projet géographique, celle qui consiste à découper des morceaux du monde selon des critères scientifiques qui lui seraient spécifiques. Le seul point commun entre les variantes de ce thème de la géographie est de correspondre à des entités spatiales d’échelle intermédiaire, entre le national et le local, ou entre le mondial et le national [Encyclopédie Universalis].
Depuis la seconde moitié du XIX e siècle et la naissance de l’école française de géographie, le développement des sciences naturelles comme la botanique, la géologie, la climatologie, et maintenant l’écologie, a permis au géographe d’affiner l’étude de la répartition des grands phénomènes naturels et les relations complexes entre l’homme et son milieu. Un certain déterminisme a conduit à la définition de régions naturelles où relief et végétation, mais aussi densités humaines, modes d’habitat, activités économiques, usages et mentalités, découlait directement ou indirectement de l’ordre de la nature.
Plus récemment, après 1945, la primauté des forces économiques s’est imposée comme une nouvelle émergence. D’inspiration marxiste, cette conception s’est très rapidement étendue au point de dominer les études régionales du milieu du XX e siècle. Les rapports de production, le réseau des échanges, la valeur de l’espace-marchandise modèlent la région en un nouveau déterminisme des choses (cf. les théories de l’économie spatiale).
« Trop objective et trop réductive », la région de l’économie, pas plus que la région naturelle, ne permettent de cerner correctement « l’espace des hommes ».
Ainsi « l’espace vécu, dans toute son épaisseur et sa complexité, apparaît comme le révélateur des réalités régionales. La région n’est donc pas un objet ayant quelque réalité en soi, pas plus que le géographe ou tel autre spécialiste ne sont des analystes objectifs […] La région, si elle existe, est un espace vécu. Vue, perçue, ressentie, aimée ou rejetée, modelée par les hommes et projetant sur eux les images qui les modèlent. Redécouvrir la région, c’est donc chercher à la saisir là où elle existe, vue des hommes. »
Les évolutions de ce concept
Le concept devient un élément reconnu de la géographie française dans les années 1980 (dix ans après son apparition) mais un sentiment « d’impasse épistémologique » apparaît, d’où un déplacement vers une géographie des classes sociales. Cet approfondissement social est mené par plusieurs chercheurs comme J. Chevalier, et le CNRS. Par exemple, le CNRS a lancé un programme sur les changements sociaux dans l’Ouest de la France : l’approfondissement du concept d’espace vécu est donc passé par l’étude de la paysannerie, de son évolution et de ses structures.
Quant à Armand Frémont, il y ajoute son intérêt personnel pour les représentations et la perception des paysages ; les paysages qui sont porteurs, selon lui, de valeurs « partageables ». Il cherche à mettre des valeurs derrière l’espace vécu : il recherche dans la peinture, la littérature, la presse, les images, les valeurs données à l’espace. En 2005, le géographe illustre sa thèse avec le roman de Flaubert Madame Bovary qu’il considère comme une représentation de la discipline : « le meilleur géographe de la Normandie, c’est Flaubert ! ». Pour lui, l’histoire d’Emma Bovary apparaît comme une véritable géographie, puisque les trois espaces constitutifs d’une vie y sont présentés : un monde clos dans lequel l’héroïne est d’abord enfermé, le monde extérieur qu’elle se représente, et enfin le monde auquel elle aspire…
L’emploi de ce concept n’a donc pas débouché sur une géographie des comportements, mais sur une géographie de la perception (cf. Antoine Bailly, Michel-Jean Bertrand, Bernard Debarbieux, Jean Gallais, Alain Matton). D’autre part, quelques géographes comme Jacques Lévy et Michel Lussault n’y reconnaissent « aucun cadre méthodologique et épistémologique explicite » et en font au mieux « un concept flou ».
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Table des matières
Cadre du sujet
Cadre de recherche
Remerciements
Introduction
PREMIERE PARTIE
QUELLE PLACE POUR L’ESPACE DANS L’ANALYSE DES MOBILITES ?
Chapitre 1 Les distances
1.1 Distances mathématiques
1.2 Distance générale
1.3 Distance et espace
Chapitre 2 Déplacement et mobilité
2.1 Les déplacements
2.2 La mobilité en géographie
2.2.1 Définition
2.2.2 Les évolutions du concept
Chapitre 3 Le concept d’« espace vécu »
3.1 La genèse du concept
3.2 L’« espace vécu »
3.2.1 Le concept
3.2.2 Les variations personnelles de l’espace vécu
3.2.3 Classification des espaces
3.2.4 La région en tant qu’espace vécu
3.3 Les évolutions de ce concept
Chapitre 4 Perceptions et représentations
4.1 La perception spatiale
4.2 Les représentations spatiales
4.2.1 Origines
4.2.2 Le concept
4.2.2.1 Les théories de la représentation
4.2.2.2 Objets et méthodes
Conclusion
DEUXIEME PARTIE
ÉTUDIER LES TRANSPORTS, OU PREVOIR LE TRAFIC ?
Chapitre 1 Panorama des méthodes d’enquêtes existantes
1.1 Principales données disponibles en France
1.1.1 Les enquêtes du CERTU : centre d’Etudes sur les réseaux, les transports, l’urbanisme et les constructions publiques
1.1.1.1 L’enquête ménage déplacement « standard CERTU »
1.1.1.1.1 Objectif
1.1.1.1.2 Population cible
1.1.1.1.3 Méthode d’échantillonnage
1.1.1.1.4 Questionnaire
1.1.1.2 L’Enquête Déplacement Ville Moyenne CERTU
1.1.1.2.1 Méthode d’échantillonnage
1.1.1.2.2 Modes d’enquête
1.1.1.3 Les Enquêtes Ménages Déplacements sur de grands territoires (Nantes, Grenoble et Toulouse)
1.1.2 Les Enquêtes Cordon et bord de route
1.1.2.1 Objectif
1.1.2.2 Questionnaire
1.1.3 Les comptages routiers
1.1.4 Bases de données transports collectifs
1.1.5 Les enquêtes de l’INSEE
1.1.5.1 L’Enquête Nationale Transports INSEE/INRETS
1.1.5.1.1 Modes d’enquête
1.1.5.1.2 Organisation
1.1.5.2 Les Recensements de l’INSEE
1.2 A l’étranger
1.2.1 En Belgique
1.2.1.1 Mode d’enquête MOBEL
1.2.1.2 Enquête régionale wallonne
1.2.2 Au Canada : l’enquête déplacements sur la Grande Région de Montréal
1.2.2.1 Mode d’enquête
1.2.2.2 Organisation
1.2.3 Autres exemples d’enquêtes déplacements à l’étranger
Chapitre 2 Problèmes et limites des enquêtes actuelles
2.1 Généralités sur les différents modes de recueils de données
2.2 Critique sur le fond
Synthèse
TROISIEME PARTIE
PROPOSITIONS METHODOLOGIQUES POUR DE NOUVEAUX BESOINS
Chapitre 1 Pistes de réflexion
1.1 Révision du modèle logistique
1.2 Nouvelle approche, nouvelles notions
1.3 Approche critique
Chapitre 2 Mise en application
2.1 Objet d’analyse
2.1.1 Choix de la population
2.1.2 Choix de l’aire d’étude
2.2 Modes d’enquête
2.2.1 Mise en œuvre
2.2.2 Le questionnaire
2.2.2.1 Présentation
2.2.2.2 Structure du questionnaire
Partie 1 – Caractéristiques de la mobilité et possibilité de déplacement
Partie 2 – Fiche transport
Partie 3 – Fiche individu
2.3 Traitement et analyse des données
2.3.1 Codage des données recueillies
2.3.2 Base de données
Conclusion
Conclusion générale
Bibliographie
Sites internet
Annexes
Index
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