Les enfants ayant une déficience intellectuelle (DI) sont plus à risque de présenter des manifestations psychopathologiques que les enfants au développement typique. Les manifestations psychopathologiques varient selon le sexe, l’âge et le QI de l’enfant ayant une DL Des liens entre des déficits exécutifs et des manifestations psychopathologiques ont été retrouvés chez les jeunes d’âge scolaire ayant des troubles du développement. Puisque certains déficits exécutifs ont été observés chez les personnes ayant une Dï, cette recherche a pour but d’étudier les liens entre les fonctions executives et les manifestations psychopathologiques chez des enfants d’âge scolaire ayant une DI, en tenant compte de l’âge, du QI et du sexe de l’enfant. D’autre part, l’étude vise à vérifier si les filles présentant une DI démontrent davantage de manifestations psychopathologiques intériorisées et un fonctionnement exécutif plus efficient que les garçons. Un total de 106 mères et 83 pères ont complété des questionnaires visant à évaluer les manifestations psychopathologiques et les comportements exécutifs de 54 filles et de 68 garçons présentant une DL Les résultats obtenus indiquent que les filles présentent davantage d’anxiété et de difficultés sur le plan du contrôle émotionnel que les garçons ayant une DL La métacognition, qui a trait à la capacité de l’enfant à gérer ses comportements, a été identifiée comme jouant un rôle de médiation dans la relation entre l’âge et les comportements centrés sur soi et un rôle de suppression dans la relation entre l’âge et les problèmes relationnels.
D’autre part, il ressort que le QI n’est pas en lien avec les différentes fonctions executives évaluées. Des éléments sont avancés afin d’expliquer les différents résultats obtenus, notamment le développement et la maturation cérébrale chez les enfants ayant une DI et les conséquences du développement de la métacognition sont abordés. Finalement, des pistes pour les recherches futures sont proposées .
Les enfants ayant une déficience intellectuelle (DI) seraient de trois à quatre fois plus à risque de présenter des manifestations psychopathologiques que les enfants au développement typique (Tonge, 2007), avec des taux de prévalence se situant entre 35 et 40% (Dekker & Koot, 2003; Emerson, 2003; Emerson & Hatton, 2007). Les parents de ces enfants sont susceptibles de vivre davantage de stress en lien avec les conséquences des manifestations psychopathologiques et la qualité de vie de l’enfant ainsi que celle de leurs parents sont à risque d’être affectées (Floyd & Gallagher, 1997; Totsika & Hastings, 2009). Une meilleure compréhension des variables associées aux manifestations psychopathologiques pourrait permettre le développement de stratégies d’intervention et de prévention appropriées à cette clientèle.
L’évaluation de la psychopathologie chez les personnes ayant une DI est complexe, car l’expression des symptômes peut différer de celle de la population typique (Borthwick-Duffy, Lane, & Widaman, 1997; de Ruiter, Dekker, Verhulst, & Koot, 2007; Dykens, 2000; Tonge, 2007). Le manque d’instruments standardisés, la présence de difficultés de communication et d’expression et le fait que la DI peut masquer des symptômes de la psychopathologie constituent des facteurs qui peuvent expliquer cette situation. D’autre part, il n’existe pas de définition consensuelle de la psychopathologie chez les personnes ayant une DI (Dekker, Koot, van der Ende, & Verhulst, 2002; Sturmey, 2007).
La psychopathologie est la manifestation d’un dysfonctionnement comportemental, psychologique ou biologique chez une personne qui se traduit par la présence d’un ensemble cliniquement significatif d’éléments comportementaux ou psychologiques appelés symptômes (APA, 2000). Ces derniers doivent s’accompagner d’une détresse concomitante, d’un handicap ou d’un risque significativement élevé de perte importante de liberté, de souffrance ou de décès; II est possible de regrouper les différents types de psychopathologie en trois catégories, soit les troubles intériorisés, extériorisés et ceux liés à l’utilisation de substances (Achenbach & Edelbrock, 1978; Krueger, 1999; Krueger, Caspi, Moffîtt, & Silva, 1998). La première catégorie fait référence aux symptômes des troubles dépressifs, anxieux, somatiques, de stress post-traumatique et aux ideations suicidaires. La deuxième englobe les symptômes des troubles d’attention, d’hyperactivité, de la conduite et les autres troubles du contrôle des impulsions. Enfin, la troisième catégorie regroupe les symptômes ayant trait à l’abus de substances et à la dépendance à des substances.
Les écrits révèlent que le type de manifestations psychopathologiques varie selon le sexe, l’âge et le QI de l’enfant ayant une DL En ce sens, Bradley et Isaacs (2006) mentionnent que les différences intersexes observées chez les enfants au développement typique sont susceptibles d’être retrouvées chez les enfants ayant une DL Dans le cas des enfants au développement typique, les garçons présentent davantage des troubles extériorisés et les filles, des troubles intériorisés. Ces distinctions intersexes peuvent s’expliquer par des différences liées à l’éducation selon le sexe de l’enfant, son niveau de maturation psychologique et sa courbe développementale ainsi qu’à certaines variations biochimiques (Winstead & Sanchez, 2005). Chez les enfants ayant une DI, les comportements antisociaux, les troubles de la conduite, les problèmes de la pensée ainsi que les comportements autistes et de repli sur soi seraient plus présents chez les garçons (Emerson, 2003; Hastings & Mount, 2001; Molteno, Molteno, Finchilescu, & Dawes, 2001; Steinhausen & Metzke, 2004). Pour leur part, les filles ayant une DI manifesteraient davantage de symptômes dépressifs que les garçons (Lunsky, 2003). Par contre, d’autres études n’ont pas trouvé de différence entre les sexes (Chadwick, Piroth, Walker, Bernard, & Taylor, 2000; Dekker & Koot, 2003). Peu d’indications ont été fournies pour expliquer cette disparité dans les résultats puisque les liens entre le sexe et les manifestations psychopathologiques chez les enfants ayant une DI sont encore peu étudiés.
En ce qui a trait à l’âge, les études constatent que les comportements extériorisés, notamment les symptômes d’hyperactivité et les troubles de la conduite, diminueraient avec l’âge alors que les problèmes émotionnels augmenteraient (Einfeld, Tonge, & Turner, 1999; Tonge & Einfeld, 2000). Toutefois, les manifestations psychopathologiques auraient moins tendance à diminuer avec le temps chez les enfants ayant une DI grave ou profonde que chez ceux ayant une DI légère, et ce, possiblement en raison d’anomalies cérébrales plus sévères qui peuvent limiter les bénéfices découlant de la réadaptation (Einfeld et al;, 2006). De plus, les enfants ayant une DI grave ou profonde présenteraient davantage de comportements stéréotypés, d’automutilation et de retrait social (Chadwick et al., 2000; Einfeld et al, 2006; Einfeld & Tonge, 1996; Koskentausta, livanainen, & Almqvist, 2007), alors que les enfants ayant une DI légère ou moyenne manifesteraient davantage de comportements antisociaux et perturbateurs de même que’des symptômes dépressifs et anxieux (Einfeld et al., 2006; Einfeld & Tonge, 1996; Holden & Gitlesen, 2004; Koskentausta et al, 2007). Enfin, certains auteurs rapportent que les enfants ayant une DI grave ou profonde seraient plus à risque de présenter des manifestations psychopathologiques (McCarthy, 2008) alors que d’autres mentionnent que le risque serait plus élevé chez les enfants ayant une DI moyenne (Koskentausta, et ai., 2007).
L’origine des manifestations psychopathologiques semble multifactorielle, mais comme des anomalies cérébrales et des dommages cérébraux diffus sont fréquemment observés, l’importance des facteurs biologiques est à considérer (Lussier & Flessas, 2005). Certains auteurs rapportent que le développement du cerveau et celui de ses fonctions différeraient chez les personnes ayant une DI (White, Chant, Edwards, Townsend, & Waghorn, 2005). D’autres indiquent que les structures du lobe frontal, dont le cortex préfrontal fait partie, se développeraient de façon atypique (Anderson, Anderson, Northam, Jacobs, & Catroppa, 2001; Japundza-Milisavljevic & Macesic, 2008; Lussier & Flessas, 2005). Puisque le cortex préfrontal est considéré comme étant le siège des fonctions executives, cela suggère que certaines de celles-ci ne pourraient atteindre leur pleine maturité dans le contexte de la DI .
Les fonctions executives sont celles qui contrôlent et supervisent l’organisation et la direction des activités cognitives, des réponses émotionnelles et des comportements (Isquith, Crawford, Espy, & Gioia, 2005). Il s’agit de fonctions distinctes, mais qui interagissent comme un système superviseur intégré (Anderson et al., 2001; Huizinga, Dolan, & Van der Molan, 2006; Miyaké, Friedman, Emerson, Witzki, & Howerter, 2000a). De façon plus spécifique, elles permettent à l’individu de s’adapter plus efficacement et plus facilement aux nouvelles situations lorsque les routines d’action apprises et automatiques ne suffisent pas (Seron, van der Linden, & Andres, 1999). Elles regroupent l’inhibition, la flexibilité, la mémoire de travail, la planification, le contrôle émotionnel, l’initiation, la capacité à organiser du matériel et Pautoévaluation (Gioia et al, 2000a ; Miyaké et al, 2000a ; Monette & Bigras, 2008).
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Table des matières
Introduction
Problématique et objectifs de l’étude
Revue et critique générale des écrits
Démarche effectuée
CHAPITRE PREMIER : Liens entre les fonctions executives et les manifestations
psychopathologiques chez des enfants d’âge scolaire ayant une déficience
intellectuelle
CONCLUSION GÉNÉRALE
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