Les endomycorhizes à arbuscules
Généralités sur les mycorhizes à arbuscules
Les endomycorhizes à arbuscules (MA) se caractérisent par un développement du champignon à l’intérieur de la racine et ne sont généralement pas visibles à l’œil nu. Parmi ces associations endomycorhiziennes, on peut trouver :
* les mycorhizes à arbuscules qui concernent des plantes très variées (Angiospermes, Gymnospermes, Fougères, Lycopodes et Bryophytes). Le symbiote fongique qui s’associe à ces plantes appartient au phylum des Glomeromycota (Schüßler, 2002) ;
* les mycorhizes des Ericacées qui sont restreintes à l’ordre des Ericales, le champignon est généralement un Ascomycète. Les hyphes se développent dans les cellules épidermiques et forment des pelotons ;
* les mycorhizes des Orchidées résultent d’une association entre un champignon de la famille des Basidiomycètes avec les plantes de la famille des Orchidées. Les hyphes forment des amas dans les cellules corticales .
La plupart des plantes supérieures ont l’aptitude à former, avec des champignons du Phylum des Glomeromycota (Schüßler, 2002), une association symbiotique nommée mycorhize arbusculaire (MA). Les champignons MA sont des symbiotes obligatoires et ne peuvent produire de spores et compléter leur cycle de vie que suite à la colonisation des racines d’une plante-hôte. Ces champignons MA représentent approximativement 200 espèces qui sont ubiquitaires des écosystèmes terrestres (Morton et al., 1995; Smith et Read, 1997). Quelques familles de plantes présentant peu ou pas d’associations mycorhiziennes sont connues. Il s’agit des Brassicaceae, des Amanranthaceae et des Juncaceae. Généralement, ces plantes aposymbiotiques sont pourvues de nombreux poils racinaires pouvant remplacer les symbiotes fongiques.
Phylogénie des champignons MA et évolution des plantes
Auparavant les champignons MA étaient classés dans l’ordre des Glomerales appartenant au phylum des Zygomycètes. Cependant cette classification a été bouleversée en 2001 par une étude basée sur la séquence de la sous-unité 18S de l’ADNr qui a montré que l’ancien Phylum des Zygomycètes était paraphylétique (Schüßler et al., 2001). A la suite de cette étude un nouveau phylum fongique regroupant tous les champignons MA a été proposé, c’est le phylum des Glomeromycota (Schüßler et al., 2001) .
Actuellement, la phylogénie des Glomeromycota est basée sur la séquence de l’ARN 18S ; d’autres gènes sont en cours de séquençage (Helgason et al., 2003; Corradi et al., 2004), mais il n’existe pas encore de phylogénie basée sur un séquençage multi-locus. Le phylum des Glomeromycota se compose d’une seule classe, celle des Glomeromycètes, divisée en quatre ordres : les Paraglomerales, les Archaeosporales, les Diversisporales et les Glomerales .
Mise en place de la symbiose endomycorhizienne
L’établissement de la symbiose MA fait intervenir trois étapes : La phase asymbiotique, la phase présymbiotique et la phase symbiotique .
* La phase asymbiotique :
Au début du cycle, les spores des champignons MA se trouvent dans le sol dans un état de dormance qui peut durer plusieurs années. La germination de ces spores a lieu dans des conditions optimales de température et d’humidité et peut être favorisée par différents facteurs comme un accroissement de CO2 ou la présence d’exsudats racinaires (Bécard et al., 2004). La survie de l’hyphe en germination est assurée par les réserves lipidiques contenues dans la spore qui lui permettent de se développer pendant quelques jours (Smith et Read, 2008). Si la spore ne rencontre pas de racines de plantes hôtes, et avant un épuisement de ses réserves, on assiste à une dégénérescence des hyphes et au retour au stade de dormance (Figure 5a). Des germinations successives peuvent avoir lieu jusqu’à l’épuisement des réserves contenues dans la spore ; dans le cas d’espèces formant des spores de grande taille celles-ci peuvent germer jusqu’à dix fois (Bécard et al., 2004).
* La phase présymbiotique :
De profondes modifications métaboliques ont lieu si le champignon détecte la proximité d’une racine. Ces modifications se traduisent par : des changements du pH du cytosol et de la polarisation de la membrane, une augmentation de l’activité respiratoire, une expression de nombreux gènes fongiques et une activité accrue des mitochondries (Tamasloukht et al., 2003 et Bécard et al., 2004, Bücking et al., 2008, Ramos et al., 2008 ; Seddas, 2009). Les hyphes se développent alors extensivement ce qui augmente la chance de contact entre la plante hôte et le champignon. Cette extension des hyphes encore appelée « branching » devient de plus en plus importante jusqu’ à un épuisement total des réserves de la spore ; de ce fait l’entrée dans la phase présymbiotique est irréversible (Figure 5b). Le champignon détecte la présence de la plante hôte grâce à des facteurs appelés « branching factors ». La nature des « branching factors » présents dans les exsudats racinaires a longtemps été recherchée. Finalement, Akiyama et al., (2005) ont identifié qu’ils s’agissaient de strigolactones appartenant au groupe des sesquiterpènes. Produites par les racines de la plupart des plantes, les strigolactones stimulent la ramification des hyphes du champignon MA même à des concentrations très faibles de l’ordre de 10⁻¹³ M (Akiyama, 2005 ; Akiyama, 2006 ; Besserer et al., 2006). La découverte de la nature chimique des « branching factors » fut une surprise, car les strigolactones étaient déjà connues auparavant en tant que stimulateurs de la germination de graines de plantes parasites comme le Striga et l’Orobanche (Figure 6) (Cook et al., 1966). Les champignons MA tous comme les plantes parasites détectent donc la présence de racines par le biais de cette hormone végétale.
* La phase symbiotique : Infection et colonisation :
Cette troisième étape correspond à la phase de symbiose, elle commence par le contact entre l’hyphe et la racine . L’hyphe mature développe au niveau de l’épiderme de la racine un hyphopodium (Figure 7). La présence du champignon induit une profonde réorganisation au niveau de la cellule épidermique en contact avec celui-ci aboutissant à la formation d’un appareil de prépénétration (APP) (Genre et al., 2005). Cette structure tubulaire qui traverse la cellule épidermique est formée par la plante. Au travers de celle-ci s’effectue l’entrée du champignon à l’intérieur de la racine. L’APP est formé 4 à 5 h après la formation de l’hyphopodium et reste visible environ 4 h pour disparaître après la pénétration du champignon. La formation de l’APP commence par un mouvement du noyau qui vient se coller contre l’hyphophodium. Par la suite les microtubules et le réticulum endoplasmique forment une invagination qui traverse la cellule. La formation de cette invagination est suivie par un mouvement du noyau. Lorsque cette sorte de tunnel est formé, l’hyphe du champignon croît à l’intérieur et peut ainsi traverser la cellule épidermique (Genre et al., 2005). Une fois que l’hyphe ait traversé complètement les cellules épidermiques, nait un second APP dans les cellules corticales externes (Genre et al., 2008). Des structures de type APP sont formées à chaque fois qu’un hyphe colonise une cellule corticale (Genre et al., 2008).
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Table des matières
1 ° INTRODUCTION GENERALE
1) Contexte de l’étude
2) Plan de la thèse
2° Chapitre 1 : REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
Avant Propos
I) LES SYMBIOSES MYCORHIZIENNES
1) Les différents types de mycorhizes
1 1) Les ectomycorhizes (EM)
1 2) Les endomycorhizes à arbuscules (MA)
1 2 1) Généralités sur les mycorhizes à arbuscules
1 2 2) Phylogénie des champignons MA et évolution des plantes
1 2 3) Mise en place de la symbiose endomycorhizienne
1 2 4) Fonctionnement de la symbiose endomycorhizienne
1 2 5) Rôles écologiques des champignons mycorhiziens
1 3) Les ectendomycorhizes
2) Interaction champignons endomycorhiziens et champignons ectomycorhiziens
3) Interactions entre les champignons mycorhiziens et la communauté bactérienne du sol
4) Histoire évolutive des symbioses mycorhiziennes
II) LES SYMBIOSES RACINAIRES FIXATRICES D’AZOTE
II 1) La symbiose rhizobienne
1) La plante hôte : la famille des Légumineuses
2) Le partenaire bactérien : les bactéries du genre rhizobia
2 1) Etablissement et fonctionnement de la symbiose rhizobienne
2 1 1) Processus d’infection et d’organogenèse nodulaire
2 2 2) La fixation d’azote chez la symbiose rhizobienne
II 2) La symbiose actinorhizienne
1) Les plantes actinorhiziennes
2) Le partenaire bactérien : Frankia
3) Etablissement et fonctionnement de la symbiose actinorhizienne
II 3) Histoire évolutive des symbioses fixatrices d’azote
II 4) Interaction champignons mycorhiziens et bactéries fixatrice d’azote
III) TECHNIQUES PERMETTANT D’ETUDIER LA FONCTIONNALITE DE LA SYMBIOSE ENDOMYCORHIZIENNE ET ACTINORHIZIENNE
1) Etude de la fonctionnalité de la symbiose endomycorhizienne
1 1) Evaluation de l’impact du champignon MA sur la plante hôte
1 2) Etude de la fonctionnalité de la symbiose endomycorhizienne en visualisant les structures formées
1 3) Etude de la fonctionnalité de la symbiose endomycorhizienne à l’aide de marqueurs histochimiques
1 4) Etude de la fonctionnalité de la symbiose endomycorhizienne et actinorhizienne à l’aide de marqueurs moléculaires
IV) LES CASUARINACEA : EXEMPLE CASUARINA EQUISETIFOLIA
1) Taxonomie des Casuarinaceae
2) Caractéristiques botaniques
3) Distribution géographique des Casuarinaceae
4) Importances écologiques des Casuarinaceae
5) Importances économiques des Casuarinaceae
6) Résistance aux maladies
V) OBJECTIFS DE LA THESE
1) Etudier la diversité des champignons endomycorhiziens et leur influence sur la communauté bactérienne associée aux Casuarina equisetifolia dans leur zone d’origine et dans leur zone d’introduction
2) Explorer l’impact du complexe symbiotique d’origine sénégalaise ou australienne sur la croissance de Casuarina equisetifolia et sur la diversité fonctionnelle des communautés microbiennes telluriques
3) Caractériser la fonctionnalité de la symbiose mycorhizienne et actinorhizienne chez C. equisetifolia inoculé avec un complexe de souches symbiotiques d’origine australienne ou sénégalaise
3 ° Chapitre 2 : ETUDE DE LA DIVERSITE DES CHAMPIGNONS MYCORHIZIENS A ARBUSCULES ET DE LA COMMUNAUTE BACTERIENNE ASSOCIEE AUX CASUARINA EQUISETIFOLIA DANS LEUR ZONE D’ORIGINE ET DANS LEUR ZONE D’INTRODUCTION
Avant Propos
I) INTRODUCTION
II) MATERIEL ET METHODES
1) Préparation du substrat de culture
2) Germination des graines de C. equisetifolia
3) Les souches fongiques : Prélèvement, multiplication, caractérisation morphologique, génétique et inoculation des plants
4) Dispositif expérimental
5) Impact de l’inoculation sur la diversité structurale des communautés bactériennes du sol
6) Analyses statistiques
III) RESULTATS
1) Diversité des champignons MA associés à Casuarina equisetifolia dans leur zone d’origine et dans leur zone d’introduction
1 1) Caractérisation morphologique des souches fongiques
1 2) Caractérisation génétique des souches fongiques
2) Détermination de la diversité génétique de la communauté bactérienne dans le sol
2 1) Détermination de la diversité génétique de la communauté bactérienne par ARISA
2 2) Détermination de la diversité génétique de la communauté bactérienne par DGGE
IV) DISCUSSION
1) Diversité structurale des champignons MA associés à Casuarina equisetifolia dans leur zone d’origine et dans leur zone d’introduction
1 1) Caractérisation morphologique des souches fongiques
1 2) Caractérisation génétique des souches fongiques
2) Détermination de la diversité génétique de la communauté bactérienne du sol
V) CONCLUSION
4° CONCLUSION GENERALE