Les élevages d’animaux à l’école primaire

Définitions de l’expression « élevage d’animaux »

    Le dictionnaire Larousse donne comme définition du mot « élevage » : « la production et l’entretien des animaux domestiques ou utiles », ou encore « un ensemble d’animaux d’une espèce entretenus pour en obtenir une production » L’élevage d’animaux serait apparu environ 9000 ans avant Jésus Christ, initialement principalement à des fins alimentaires, en parallèle des activités de chasse. Dans l’étude qui nous intéresse, il n’est nullement envisagé de maintenir des animaux en classe dans le but de les reproduire à grande échelle pour les utiliser à quelque fin que ce soit. Tout au long de cet écrit, le terme « élevage d’animaux » sera utilisé dans un sens « élargi », pour matérialiser l’action de détenir en captivité plusieurs spécimens d’une espèce animale sélectionnée. La reproduction, et la multiplication du nombre d’individus maintenus ne sera pas systématiquement l’objectif visé, mais pourra faire parti des problématiques abordées.

Gestion des animaux en fin d’élevage

     Selon l’article L.211.3 du code rural, les animaux prélevés dans le milieu naturel peuvent être libérés à la fin de l’élevage, en veillant à les réintroduire dans le lieu et le milieu dans lequel ils ont été prélevés. En revanche, la libération en milieu naturel d’animaux, domestiques ou non domestiques, nés en captivés, est formellement interdite. Le nouvel article L.211.3 du Code rural, issu de la loi du 2 février 1995, établit maintenant des règles générales portant sur toutes les introductions. Il interdit, en effet, « afin de ne porter préjudice ni aux milieux naturels ni à la faune et à la flore sauvage, d’introduire dans le milieu naturel, volontairement, par négligence, ou par imprudence, tout spécimen d’espèces animales ou végétales non domestiques ou non-cultivées, qui ne sont pas indigènes au territoire d’introduction ». En outre, l’autorité administrative a la faculté d’étendre cette interdiction à d’autres espèces, c’est-à-dire à des espèces domestiques ou cultivées ou à des espèces indigènes au territoire d’introduction, ce qui permettra de réglementer, par exemple, les renforcements de populations inopportuns. Des autorisations d’introduire des spécimens d’espèces dont l’introduction est interdite peuvent cependant être accordées par l’autorité administrative à des fins agricoles, piscicoles ou forestières, ou pour des motifs d’intérêt général, après évaluation des conséquences de l’introduction envisagée. La mise en place d’un élevage en classe doit donc être un projet mûrement réfléchi en terme pédagogique, mais également en terme logistique. La reproduction des individus maintenus doit être contrôlée si cela est possible (séparation des individus mâles et femelles lorsqu’un dimorphisme sexuel existe). Dans le cas contraire, l’enseignant devra avoir conscience qu’il est de sa responsabilité de contrôler les naissances (destruction des œufs au besoin) ou de trouver un nouvel accueil aux jeunes animaux qui seront nés durant le projet. Différentes pistes peuvent être envisagées : conservation des jeunes par l’enseignant, transfert à une autre classe pour un autre projet, ou enfin adoption (élèves, entourage…).

Risques sanitaires pour les élèves

    La question des problèmes d’hygiène et de risques sanitaires liés à l’introduction d’animaux dans la classe n’est pas récente. Elle était déjà posée par un parlementaire, Monsieur Nicolas About, en session du 15 septembre 1980. Il interroge le ministre de l’Education Nationale sur l’existence d’une liste d’animaux autorisés dans les classes maternelles afin de prémunir les élèves de tout risque bactériologique, viral ou plus généralement de leur sécurité physique. La réponse de Monsieur Christian Beullac, ministre de l’Education Nationale exprime le rôle et les responsabilités de l’enseignant sur le sujet : Les instructions relatives aux actions pédagogiques, à l’école maternelle définies dans la circulaire n° 77-266 du 2 août 1977 stipulent que  » Dès la section des petits également, les enfants devront avoir l’occasion de s’émouvoir à la vue d’un animal, de le soigner, de comprendre la nécessité de ne pas le faire souffrir « . Aucun texte ne donne une liste restrictive des animaux susceptibles d’être accueillis dans les classes. Le choix des animaux est laissé à l’initiative des maîtres compte tenu des suggestions des parents ou des enfants. Les précautions d’hygiène indispensables sont prises sous la responsabilité des enseignants qui s’assurent que les animaux introduits dans la classe présentent toutes les conditions maximum d’hygiène et règlent ponctuellement avec les familles les difficultés qui pourraient apparaître, par exemple dans des cas d’allergies incompatibles avec la présence de certains animaux. Lors de la préparation du projet, l’enseignant doit consulter les parents d’élèves afin d’être informé des risques d’allergies existants. En cas du doute, il doit se rapprocher d’un vétérinaire ou des services vétérinaires locaux du Ministère de l’Agriculture et de la Pêche, qui seront à même de fournir les informations nécessaires sur les animaux concernés et d’orienter l’enseignant sur les précautions à prendre. Dans tous les cas, la présence d’animaux dans une classe sera l’occasion d’aborder le thème de l’hygiène avec les élèves.

Le Phasme

    Le phasme est l’un des insectes les plus utilisés dans les élevages en classe. Il a l’avantage de ne présenter que de très faibles risques allergènes, d’être facile à obtenir et à maintenir et de pouvoir être le support de nombreuses thématiques de travail. Il existe près de 3000 espèces de phasmes dans le monde, dont trois vivent en France métropolitaine et 10 en Guadeloupe. Leur taille peut varier d’environ 1cm à plus de 55cm21 Pouvant être utilisé de la petite section au CM2, il permet d’évoquer des notions aussi diverses que :
• la nutrition : il y a souvent dépendance alimentaire à un type de végétal en particulier
• la reproduction : chez les plus jeunes, on étudiera l’œuf et sa durée d’incubation, chez les plus grands, il sera possible d’introduire la notion de parthénogénèse
• la locomotion et le rythme de vie nocturne de l’animal
• la croissance : les larves sont identiques aux adultes et grandissent par intervalles en muant tous les 15 à 20 jours
• les stratégies adaptatives : le mimétisme est la technique de défense la plus courante chez les phasmes
Selon la fiche technique disponible en annexe 3, un élevage de phasme ne demande que très peu de matériel et peu de temps. Les animaux sont installés dans un terrarium fermé, dont le sol est recouvert de terre. Des supports végétaux sont ajoutés pour agrémenter l’espèce. Plusieurs branches du végétal identifié comme source de nourriture sont disposées dans le terrarium. Le terrarium est fermé hermétiquement par du grillage, permettant une aération suffisante à la respiration des animaux, mais empêchant tout risque d’évasion des spécimens maintenus. Les ressources suivantes peuvent apporter des éléments et idées de pistes à explorer :
• La fiche Eduscol Ressources maternelle. Explorer le monde du vivant, des objets et de la matière. Les élevages
• La fondation « la main à la pâte », un site internet dédié aux enseignants, consultable à http://www.fondation-lamap.org
• Site internet de l’OPIE, Office Pour les Insectes et leur Environnement
• L’élevage des phasmes, C. et A. Bauduin, Philippe Gérard Editions

Des phasmes en CE2, expérience de Madame Charlotte Aubery

    Madame Aubery a effectué son stage du mois de janvier dans l’école Marcel Lacoma aux Abymes (Guadeloupe). Elle avait la responsabilité d’une classe de 27 élèves de CE2. Lors d’un entretien semi-dirigé, j’ai interrogé Mme Aubery sur sa pratique professionnelle et ses impressions suite à cette expérience. Madame Aubery est arrivée dans une classe plutôt sérieuse, avec une bonne ambiance entre les élèves. Trois profils particuliers parmi ses élèves sont cependant à préciser :
• un élève perturbateur, déjà exclu du RASED (Réseau d’aides spécialisées aux élèves en difficulté).
• Trois – quatre élèves en grande difficulté.
• Une élève en situation de handicap
Avant de commencer son projet dans la classe et d’en parler aux élèves, Mme Aubery a présenté son travail sur les phasmes à la directrice de l’école afin de lui demander son accord. Elle n’a pas consulté les parents concernant les risques d’allergies. Ceux-ci ont très rapidement été informés de l’arrivée d’animaux dans la classe. Tout d’abord par leurs enfants le jour où les phasmes sont apparus, puis quelques jours plus tard lors d’une manifestation prévue dans la classe où les parents étaient invités à participer. Ils ont ainsi pu voir d’euxmêmes le terrarium. Cette approche pédagogique a reçu un très bon accueil de la part de l’équipe enseignante et des parents. Pour le matériel, en plus de l’aquarium que je lui avais prêté, Mme Aubery a complété avec plusieurs éléments : un thermomètre et un petit kit scientifique avec des pinces à épiler et pinces chirurgicales. Elle a demandé aux élèves d’apporter des loupes, ainsi qu’un brumisateur. Pour la mise en place du terrarium, Mme Aubery a également demandé aux élèves d’apporter un peu de terre et des feuilles. Pour introduire les phasmes en classe, Mme Aubery a choisi de déposer le terrarium le matin au fond de la classe. Les élèves avaient pour consigne d’aller les observer par petits groupes et de les dessiner. Elle a ensuite expliqué à ses élèves que les animaux allaient rester en classe pendant quelques temps afin de les aider à travailler. Sur l’ensemble de ses élèves, seuls trois ne connaissaient pas du tout cet animal. Pour la majorité, ils l’ont identifié sous son nom local : l’insecte bâton. Un seul élève a pu le désigner sous le terme de phasme.Pendant un peu plus de trois semaines, Mme Aubery a mis un place un rituel du matin autour de l’élevage. Chaque jour, un groupe de trois élèves, désignés sur un planning, avaient pour mission de venir observer les phasmes, de les compter, de relever la température, de voir s’ils avaient mangé et de brumiser le terrarium. Suite à cela, ils devaient se répartir entre eux différents rôles : noter les informations relevées dans le tableau de suivi, raconter leurs observations aux autres élèves, et remettre en ordre le terrarium. Le tableau rempli par les élèves est fourni en annexe 6. L’enseignante a choisi de ne pas intervenir dans leur travail afin de leur permettre de développer leur coopération. Mme Aubery a profité de la présence des phasmes pour croiser différentes disciplines. Langage écrit et oral, sciences de la vie, mais également beaucoup d’EMC. Elle s’est servit de la présence des phasmes pour conserver une ambiance calme et studieuse dans sa classe. « Les phasmes ont besoin de silence, si la classe est trop bruyante, je les ramène chez moi ». Elle m’a confié avoir mis une fois sa remarque à exécution. Suite à cela, le niveau sonore a baissé de manière significative. En mathématiques, les phasmes ont servi à aborder la notion de comparaison et de grandeur de mesure : Comment différencier les phasmes ? Comment les comparer à un objet, ou les comparer entre eux ? En art visuel, Mme Aubery a choisi de travailler le thème du camouflage. Nous présentons en annexe 7 une fiche séance « sciences du vivant » réalisée par Mme Aubery durant son stage. L’enseignante a parfaitement joué le jeu de la transdisciplinarité avec l’élevage de phasmes. A travers des séances quotidiennes, abordant différentes disciplines, elle a su impliquer les élèves dans la tâche en leur donnant une motivation et un support de conceptualisation. Par la présence des phasmes, Mme Aubery a axé une partie de ses apprentissages sur la gestion des responsabilités : se répartir les tâches, veiller au bien-être des animaux et prendre soin d’eux faisait partie intégrante du travail demandé aux élèves. Chaque jour, il fallait que certains pensent à amener des feuilles d’arbre (du goyavier essentiellement) pour nourrir les animaux. Durant l’entretien, Mme Aubery nous a raconté qu’un jour aucun enfant n’a ramené de feuille. Bien que sans conséquence grave sur la santé des animaux, elle a profité de cette occasion pour rappeler aux élèves leurs devoirs et leurs responsabilités envers les animaux. L’incident de l’absence de nourriture ne s’est plus jamais reproduit. En conclusion de l’entretien, Mme Aubery nous a confié avoir réellement apprécié l’expérience. Les élèves ont adoré cette approche pédagogique, transformant parfois l’enseignement en activité ludique. Cela lui a offert de nombreuses opportunités de travail. Elle a également vu ses élèves s’épanouir dans la classe. Ils ont amélioré la qualité de leur langage oral. Pour certains, la présence des animaux leur a permis de s’ouvrir, de dépasser leur timidité. Nous citerons l’exemple d’une élève qui ne voulait pas s’approcher du terrarium en début d’expérience par peur des animaux, et qui au bout de quatre semaines, a accepté de tenir dans sa main la branche sur laquelle se trouvait un phasme. Mme Aubery nous a décrit la fierté visible sur le visage de cette enfant au moment où elle a tenu la branche et dépassé ses craintes. Interrogée sur les problèmes qu’elle a rencontrés, notre professeur des écoles stagiaire ne relève aucune difficulté majeure dans le projet qu’elle a réalisé. Elle a reçu un excellent accueil des élèves, de l’équipe enseignante, ainsi que des parents par rapport à la présence des phasmes dans sa classe. Elle nous confie vouloir renouveler l’expérience lorsque l’occasion se présentera. En auto critique, elle souhaite la prochaine fois laisser plus de temps d’observation aux élèves, et veut travailler sur son « hyper-protection » envers les phasmes. Soucieuse de les protéger, elle avoue avoir parfois manqué de confiance envers les élèves quand à leur capacité à respecter le bien-être des animaux qu’elle leur confiait.

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Table des matières

Introduction
Partie I : Approche théorique
1- Définitions de l’expression « élevage d’animaux »
2- Réglementation et législation
2.1- Loi n°76-629 du 10-07-1976 : protection de la nature
2.2- Articles L.214-1 et R.214-1 du Code rural : Protection des animaux
2.3- Directive Européenne 98-58
2.4- Textes relatifs à la maintenance d’animaux non domestiques et d’établissements recevant du public
2.5- Réglementation des prélèvements d’animaux en milieu naturel
2.6- Gestion des animaux en fin d’élevage
2.7- Risques sanitaires pour les élèves
2.8- Spécificité scolaire
3- Inclusion de la pratique des élevages dans les nouveaux programmes de 2015
3.1- Maternelle
3.2- Cycle 2
3.3- Cycle 3
4- Différents types d’élevages
4.1- Le Phasme
4.2- L’escargot
4.3- L’aquarium
5- Conclusion de la première partie
Partie II : Expériences concrètes de professeurs des écoles
1- Présentation du sondage
1.1- Sexe
1.2- Age
1.3- Profil professionnel
1.4- Lieu d’exercice
1.5- Remarques
2- Résultats
2.1- Utilisation d’un élevage d’animaux
2.2- L’élevage d’animaux comme support de croisement des disciplines
2.3- L’âge des élèves et les objectifs d’apprentissage impactent le choix de l’animal par l’enseignant
2.4- Un élevage d’animaux permet d’étudier bien plus que les sciences et le monde du vivant
2.5- Les enseignants peuvent manquer de ressources facilement accessibles pour utiliser pleinement tous les bénéfices apportés par la mise en place d’un élevage d’animaux
3- Analyse
3.1- Hypothèse n°1 : Un élevage d’animaux est un support de croisement des disciplines, application concrète des nouveaux programmes de 2015
3.2- Hypothèse n°2 : L’âge des élèves et les objectifs d’apprentissage impactent le choix de l’animal par l’enseignant
3.3- Hypothèse n°3 : Un élevage d’animaux permet d’étudier bien plus que les sciences et le monde du vivant
3.4- Hypothèse n°4 : Les enseignants peuvent manquer de ressources facilement accessibles pour utiliser pleinement tous les bénéfices apportés par la mise en place d’un élevage d’animaux
4- Conclusion de la deuxième partie
Partie III : Mises en situations professionnelles
1- Expérience personnelle
2- Des phasmes en CE2, expérience de Madame Charlotte Aubery
3- Des phasmes en maternelle, expérience de Madame Oriane Magnin
4- Un cochon d’inde en maternelle, expérience de Madame Ophélie Lescuyer
Conclusion : bilan et perspectives
Bibliographie

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