Les effets du collage-montage 

Le pacte autobiographique

De tous les théoriciens qui ont écrit sur l’autobiographie, celui qui continue à faire autorité dans le domaine francophone reste Philippe Lejeune. Dans Le pacte autobiographique, il définit l’autobiographie comme étant un : « Récit rétrospectif en prose qu ‘une personne réelle fait de sa propre existence, lorsqu ‘elle met l’accent sur sa vie individuelle, en particulier sur l ‘histoire de sa personnalité ».

Plusieurs commentaires ont été portés sur cette définition et ses différents éléments ont été passés au crible de la critique. La nécessité que le récit soit en prose a été contestée. Les Contemplations de Victor Hugo ne pourraient-elles pas être considérées comme un exemple de cette posture rare, mais possible, d’une autobiographie poétique ? Plusieurs chercheurs ont soulevé la difficulté de faire la distinction entre un récit de vie mettant l’accent sur la vie personnelle de son auteur, ce qui serait une autobiographie, et un autre attachant plus d’importance aux événements extérieurs, ce qui en ferait des mémoires. Les frontières entre le public et le privé ne sont pas si claires, et il n’est pas rare de parler des autres pour mieux parler de soi-même.

Fragmentation, collage, discontinuité et écriture de soi

Les autobiographies traditionnelles avaient tendance à épouser la forme romanesque. D’ailleurs, la conventionalité du récit est une des critiques les plus fréquentes que les auteurs contemporains vont reprocher à leurs devanciers. Ce constat les pousse à expérimenter d’autres façons de traduire leur vécu. Philippe Gasparini relève deux tendances majeures dans le champ littéraire actuel des écritures intimes : Toute narration autobiographique tend à se développer comme un roman. À partir de cet axiome, deux attitudes sont possibles. Les uns vont se garder, autant que possible, de tomber dans le récit. [ … ] Les autres vont assumer et amplifier la compulsion fictionnelle du récit de soi, pratiquant ce qu’on peut appeler l’ autofiction.

Même son de cloche de la part de Philippe Lejeune qui relève deux façons d’innover en autobiographie:[ … ] l’écriture ambiguë (qui donne à comprendre au lecteur qu’ elle exprime l’auteur mais ne s’ engage pas à une fidélité littérale), ou l’ écriture multiple (qui articule des textes strictement autobiographiques, des fictions données pour telles, mais aussi éventuellement des éléments d’écriture ambiguë).

Voix de la femme publique

Si nous avons pu constater que, dans Ma vie comme rivière, la voix intime de Simonne MonetChartrand est traversée par des préoccupations politiques et sociales, le contraire est aussi vrai. Les textes ayant eu dès le départ une vocation publique sont très variés. Nous retrouvons des documents administratifs (y compris des lettres), des articles de revue, des textes de conférence, des entrevues et des textes radiophoniques. La grande diversité des genres présentés ne doit pas occulter la relative homogénéité de traitement à laquelle ils sont soumis. Nous tâcherons de déterminer comment ces textes en apparence peu propices à l’épanchement autobiographique peuvent être intégrés dans un récit de vie sans aucun problème. Il ne faut pas oublier que Simonne Monet-Chartrand a eu très tôt comme principal champ d’intérêt l’amélioration de la vie familiale. Lorsqu’elle a eu l’occasion de prendre parole dans la sphère publique, c’est bien souvent pour aborder de telles questions. Et même lorsque le sujet semblait a priori très éloigné de la vie privée, elle l’abordait toujours du point de vue de la vie quotidienne des gens qui l’écoutaient.

Les traces du moi

Dans son ouvrage, Lignes de vie, le philosophe Georges Gusdorf développe une thèse originale. Pour lui, toute écriture est à la base littérature du moi, puisqu’elle traduit la volonté du scripteur de s’inscrire dans le monde. Il récuse les tentatives de classification des textes dans des genres littéraires. L’autobiographie ne se distingue en rien du roman, c’est tout simplement une façon pour le lecteur d’interpréter une œuvre littéraire:

Dans une telle perspective, l’autobiographie ne devrait plus être considérée comme un genre littéraire parmi les autres, mais comme un mode de lecture applicable aux œuvres littéraires les plus diverses. Les discussions toujours renaissantes sur la distinction entre roman proprement dit et roman autobiographique n’ont pas grand sens, ni intérêt, dans la mesure où le romancier s’implique lui-même dans le fonctionnement de son imagination productrice ; cette référence aux profondeurs intimes d’une expérience vécue donne aux personnages leur relief existentiel.

Et des textes en apparence peu autobiographiques peuvent en révéler plus long sur un individu que d’autres qui ont visé l’exactitude des faits. En fait, Gusdorf, postule qu’il subsiste toujours une trace du moi dans tout discours:[ … ] la parole première est attestation du moi en son intimité, elle se diffuse en attestations concentriques, où se dilue peu à peu le primat de la première personne ; celle-ci néanmoins ne disparaît jamais tout à fait, elle nourrit en sous-œuvre la totalité du discours humain, [ … ] .

Images et photos

Il faut souligner l’importance du visuel dans notre corpus. Chez Simonne MonetChartrand, l’iconographie prend une place essentielle ; ce qui est tout à fait contraire aux normes traditionnelles de l’écriture autobiographique. Celle-ci l’utilise généralement avec parcimonie, voire pas du tout, et toujours en marge de l’œuvre. Ici, les images sont intégrées dans le cadre du texte et participent de sa constitution. Photos, dessins et photocopies contribuent à diriger la lecture du récit personnel.

Parlons, tout d’abord,· des photographies. Nous retrouvons l’idée de nostalgie développée dans notre premier chapitre dans les photos présentées dans Ma vie comme rivière. Évocation du passé, la photo met l’ accent sur la nécessaire distance qui nous sépare de celui-ci. Les premières pages du premier tome sont en particulier marquées par une série de photos d’enfance de la narratrice. Nous y retrouvons des portraits des membres de sa famille, mais aussi des paysages surgis du passé. La narratrice, retournant sur les lieux de son enfance, constate qu’on a démoli un kiosque: «Je n’étais pourtant plus  » Chez Nous  » [ … ] ». À la page suivante, une photographie montre ce fameux kiosque disparu et le paysage sur la rivière Richelieu.

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Table des matières

INTRODUCTION
CHAPITRE 1 : L’autobiographie, un genre remis en question 
1.1 Le pacte autobiographique
1.2 Un genre remis en question
1.3 Fragmentation, collage, discontinuité et écriture de soi
1.4 Les traces du moi
Conclusion
CHAPITRE 2 : Une vie vouée à la communication 
2.1 Une vie engagée
2.2 De l’action à l’écriture
2.3 Réception
Conclusion
CHAPITRE 3 : Le montage de la polyphonie des voix
3.1 Voix de la femme intime
3.2 Voix de la femme publique
3.3 Images et photos
Conclusion
CHAPITRE 4: Les effets du collage-montage 
4.1 Le fragment
4.2 Le collage
Conclusion
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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