Les effets de la formation sur les modifications de « l’épistémologie des professeurs »

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Analyse d’une formation didactique : cadre conceptuel

Cette partie est présentée par l’auteure pour permettre de voir et de comprendre les concepts et les notions susceptibles d’éclairer les contenus d’une formation didactique et d’envisager ce qu’il convient de regarder pour en saisir les effets.

La Transposition Didactique

La transposition didactique est définie ici comme : « Le jeu qui se joue entre un enseignant, des élèves et un savoir » (Chevallard, 1991)
D’après l’auteure, le concept de transposition didactique, contribution majeure du champ de la didactique, rend compte des phénomènes de transformation que subissent les savoirs lorsqu’ils sont enseignés ou lorsqu’ils sont en jeu de formation.
Dans ce travail, elle a présenté la conception de Chevallard (1991), qui a été issue de la conception de Verret (1975), Deux niveaux de transposition didactique sont soulignés :
– d’une part, le savoir enseigné est nécessairement autre que le savoir à enseigner parce qu’il y a des contraintes didactiques spécifiques (transposition interne).
– d’autre part, il y a une dynamique d’évolution des savoirs à enseigner pour les rendre compatibles avec l’environnement, pas trop éloignés du savoir savant, pas trop près non plus du savoir banalisé dans la société (transposition externe).

La question des pratiques sociales de référence

Selon l’auteure, les activités scolaires scientifiques se veulent des images d’activités sociales réelles dont elles diffèrent obligatoirement, mais auxquelles la référence est nécessaire. Le rapport entre pratiques de référence et activités scolaires correspondantes constitue, ce qu’on appelle la « transposition didactique élargie » (Martinand, 1989).
L’apport de cette notion au champ de la didactique permet de « poser les problèmes de la référence », ceux relatifs:
– aux choix politiques à effectuer entre diverses pratiques de références dont la didactique doit éclairer les significations,
– aux écarts entre les pratiques de références et les activités scolaires que la didactique doit analyser.
Et l’auteure a avancé l’idée de Martinand à savoir que cette notion constitue un élargissement ne limitant pas la transposition didactique au savoir mais l’étendant à l’ensemble des éléments d’une pratique (objets, instruments, problèmes, savoirs, attitudes, rôles sociaux).
Il importe, selon elle, de « conférer à la notion de transposition un sens fort portant sur la construction, l’invention même d’activités scolaires en relation à des pratiques de référence » (Martinand 1989).
Ces deux concepts (transposition et pratiques de référence) permettent, selon Martinand (1989) de renouveler la réflexion sur la formation des enseignants. L’enseignement apparaît comme un métier de double compétence : dans la pratique de référence et dans la transposition didactique

La modélisation des pratiques de référence : différents types de savoirs

Johsua (1996) quant à lui, défend pour sa part l’idée que ce ne sont jamais des pratiques qui sont enseignées à l’école, mais des savoirs sur ces pratiques.
Ce qui est à l’origine de la transposition didactique, c’est une analyse théorique de la pratique sociale de référence. « Ce n’est jamais la pratique qui, en tant que telle, sert de référence pour un enseignement intentionnel, mais toujours un modèle de la pratique, un savoir sur la pratique qui s’en sépare qualitativement.
Dès que l’on cherche à enseigner une pratique de manière systématique, c’est qu’on s’en distancie par des questions du type : qu’est-ce donc que cette pratique que je cherche à enseigner ? (donc par un tamis théorique) » (Johsua, 1998).
Ce sont ces savoirs sur la pratique qui constituent pour lui la référence effective par rapport à l’école, et il distingue trois types de savoirs pouvant servir de références (Johsua, 1996, 2000) :
– Les références « savantes » liées à des communautés à qui la société a délégué le droit de « dire le vrai » dans leur domaine.
– Les références « expertes » issues de communautés qui ne sont pas dotées d’un monopole reconnu à leur propos, de petits groupes qui ne disposent pas de ce droit de dire le vrai.
– Les références « personnelles » lorsque l’institution « experte » se résume à quelques individus voire à une seule personne.

« Suivre le fil du rapport au savoir »

 L’épistémologie : premiers éléments de définition.
Tout ce qui concerne l’étude du savoir relève de l’épistémologie prise au sens anglo-saxon de « Théorie de la connaissance », ou encore d’ « étude de toute forme de connaissance ».
Martinand, pour sa part, définit le terme épistémologie au sens plus restreint d’« étude critique des principes, hypothèses et résultats des diverses sciences »
– « L’épistémologie scolaire ».
Brousseau (1982) parle d’épistémologie scolaire comme « théorie officielle ou en usage des savoirs à enseigner », ou encore comme « théorie officielle de la matière à enseigner » (les usages, l’enseignement usuel supportés par les textes officiels).
Chevallard parle de « rapport officiel au savoir » pour désigner des choses assez semblables. Selon Brousseau, on voit fonctionner cette épistémologie scolaire dans le contrat didactique parce qu’elle pèse sur la façon dont l’enseignant gère l’avancée du savoir dans son enseignement. Cette épistémologie scolaire, c’est à dire cette théorie de la connaissance, se justifie et s’explique non par sa structure et son contenu, mais par sa fonction, elle permet la communication didactique » (Brousseau, 1982).
– « L’épistémologie du professeur ».
Situer ce concept d’ « épistémologie du professeur » suppose d’envisager son rapport à l’ensemble de ce qui est appelé dans les recherches anglo-saxonnes : l’épistémologie personnelle des enseignants.
La question de l’épistémologie personnelle des enseignants déborde l’approche didactique. Il s’agit d’un domaine d’étude lié aux convictions de l’enseignant, à ses croyances, à ses valeurs, à ses théories personnelles.
Un certain nombre de travaux de recherche montrent que les croyances des enseignants, leurs conceptions sur ce qu’ils ont à enseigner, sur leurs élèves, sur l’apprentissage, leur épistémologie personnelle pèsent fortement sur leur façon d’enseigner.
Les recherches soulignent combien les croyances sont tacites, reliées aux pratiques, peu sensibles à l’argumentation, difficilement modifiables et pourtant à l’origine de la créativité professionnelle (Kagan, 1992).
« La formation continue doit provoquer de sérieux déséquilibres du fait que les enseignants d’expérience ne sont pas prêts à modifier leurs systèmes de croyances. » (Kagan, 1992).
Kagan met en évidence plusieurs domaines où les croyances personnelles des enseignants pèsent sur leurs pratiques, et notamment celui qui porte sur la spécificité des contenus et qui englobe « les conceptions épistémologiques sur le domaine devant être enseigné ».
Les travaux portant sur l’analyse de l’activité de l’enseignant dans la classe mettent en évidence d’une part une créativité permanente de l’enseignant qui lui permet des ajustements efficaces, mais aussi des difficultés à transformer sa pratique à partir des produits de la recherche didactique. Amade-Escot (1998), à partir de ces différentes recherches, fait l’hypothèse que ces difficultés observées relèvent de questions liées à l’épistémologie du professeur.
On retrouve en filigrane des analyses semblables chez Carnus et Brau-Antony. L’hypothèse selon laquelle l’épistémologie du professeur serait un déterminant important du changement des pratiques didactiques est une question en débat aujourd’hui.

Dispositif de recherche

Trois parties empiriques structurent cette étude de cas de l’action de formation d’Alès.

Une première partie intitulée « Renouveler l’épistémologie scolaire du Basket-Ball : Itinéraire d’une construction 1939 – 1990 »

L’auteure a effectué une analyse historique pour comprendre quelle est l’origine des contenus mis au cœur de la formation. Elle considère que ce qui est au centre de l’action de formation d’Alès est une contribution au renouvellement de « l’épistémologie scolaire » du Basket-ball.
Cette partie est donc consacrée à l’étude, l’analyse, l’interprétation de ce qu’elle appelle l’itinéraire d’une construction. Elle a pour objectif d’analyser le cheminement de la pensée de R. Mérand, formateur à Alès, et l’évolution de ses propositions concernant l’entraînement puis l’enseignement en milieu scolaire des pratiques de Basket-ball.
Pour ce faire, l’auteure a analysé les corpus des données recueillies sur les articles, les ouvrages sortis, les données sur les conférences faites par R Merand et aussi les différents entretiens faits par ce formateur. L’auteure pense que le recours à plusieurs sources de nature différente permet d’éviter certains risques qui amèneraient à valoriser des événements mineurs ou à minorer certains obstacles.
La mise en tension des textes et des discours permet de percevoir de façon plus pertinente les conceptions dominantes et les faits les plus significatifs, à travers leur répétition dans plusieurs textes et leurs redondances dans le discours.
De cette étude ont été dégagées les conditions d’apparition de savoirs nouveaux sur l’enseignement du Basket-ball, ce qui en fait leur intérêt, l’utilité, mais aussi la cohérence.
Ce travail sur les contenus de la formation qui s’apparente à ce qu’Artigue (1990) appelle en ingénierie didactique « l’analyse épistémologique », est une étape incontournable.
Cette partie de la thèse est présentée sous forme d’études chronologiques et thématiques.
– Des analyses chronologiques qui ont permis de conclure en pointant un certain nombre d’informations permettant de comprendre la contribution de chaque période au renouvellement de l’épistémologie scolaire du Basket-Ball : les ruptures décisives, les obstacles rencontrés, la méthode utilisée tout au long de la construction, les points d’appui scientifiques, philosophiques, les conditions d’apparition des différentes ruptures.
Des analyses chronologiques des articles, situant les différents événements (tournois, stages, productions etc.) dans leur contexte, pointant ce qui apparaît successivement à partir de dates décisives.
L’auteure a repéré ainsi des étapes dans l’évolution des analyses ou propositions de R.
Mérand, des moments charnières, un fil conducteur.
– L’analyse thématique a été organisée selon trois rubriques qui constituent les questions guides de l’analyse qualitative :
Quelle approche du Basket-Ball et de la formation des joueurs ?
Quelle conception de la discipline EPS et des élèves pratiquant le Basket-Ball ?
Quelle conception de la formation des entraîneurs ou des enseignants et de leur rôle dans la construction des contenus d’enseignement ?

Une deuxième partie intitulée « L’action de formation d’Alès » constitue l’étude de cas proprement dite. Elle a pour visée de décrire, d’analyser l’action de formation

L’objet d’étude est ici le milieu de formation et les savoirs qui en sont l’enjeu. Il s’agit, pour l’auteure, d’analyser les conditions créées pour que le renouvellement de l’épistémologie scolaire du Basket-ball, étudiée dans la partie précédente rencontre les pratiques des enseignants.
La visée de cette étude de cas est de faire ressortir les caractéristiques de cette formation et de mettre en évidence les options qu’elle véhicule.
L’auteure a tenté , à partir de traces recueillies auprès d’enseignants ayant participé à l’action de formation, d’analyser le passage de ce savoir de référence au savoir mis au cœur de la formation, d’inférer les choix que fait le formateur dans ce qu’il décide de retenir comme objets de formation, compte tenu des contraintes qui lui sont imposées et du contexte spécifique dans lequel il intervient.
Cette partie de la recherche a donc été réalisé pour répondre à la question : qu’est-ce qui, de cette épistémologie scolaire renouvelée du Basket-Ball a été mis au cœur de la formation ?
La reconstruction de l’action de formation a été faite du point de vue des questions de recherche qui en découlent :
– Quels sont les contenus de la formation en regard du « corps de savoir de référence » construit par R. Mérand ?
– Quelle « transposition didactique » de l’épistémologie scolaire du Basket-Ball est opérée lors de la formation d’Alès, avec quelles étapes, avec quelles formes d’organisation ?
– Mais aussi quels autres savoirs sont apportés lors de l’action de formation ?
Pour ce faire, l’auteure a d’abord effectué une reconstitution de la formation à partir d’une analyse croisée de diverses sources (des vidéos, des prises de notes des stagiaires et des documents personnels utilisés par le formateur pendant les trois stages).
Ces différentes sources ont été analysées afin de faire ressortir la chronologie des séquences des stages, ensuite des analyses thématiques ont été réalisées pour tirer les contenus d’enseignement du basket-ball mis en jeu dans la formation et la stratégie de formation (c’est-à-dire les contenus de formation et les dispositifs de formation).

La dernière partie intitulée « Dix ans après, quels effets sur l’épistémologie professionnelle des enseignants ? »

Cette partie tente de comprendre les effets de la formation sur les modifications de « l’épistémologie des professeurs », dix ans après la formation.
Il s’agit d’une étude empirique portant sur des entretiens réalisés auprès de six enseignants volontaires ayant suivi la formation dans son intégralité, en 1998, mettant les enseignants en situation d’observation sur vidéo d’un groupe d’élèves, en classe de 6ème, en leur demandant de caractériser leur activité.
Ici, l’auteure ne cherche pas à apprécier les effets sur les pratiques réelles d’enseignement, mais à caractériser le regard que porte l’enseignant sur l’activité des élèves lors d’un match et à en repérer l’évolution. La situation de « simulation professionnelle » à laquelle sont confrontés les enseignants, permettra d’apprécier les effets de la formation sur ce registre.
Ne disposant pas de données sérieuses sur ce que pouvait être l’épistémologie professionnelle au début de l’action de formation, l’auteure a pris l’option de s’entretenir aussi, selon le même protocole, avec deux enseignants volontaires n’ayant pas suivi la formation.
L’auteure pense que la mise en tension des différences et des convergences entre ces deux types d’enseignants (stagiaires / non stagiaires) pourront apporter des indications sur les effets de la formation. Mais elle tient à souligner qu’il ne s’agit en aucun cas d’une perspective comparatiste car elle vise à dégager des caractéristiques globales de la façon dont les stagiaires se sont appropriés les contenus de la formation, mais aussi à établir des profils différenciés selon plusieurs axes permettant de situer les enseignants sur des continuums traduisant différents niveaux d’incorporation de l’épistémologie scolaire renouvelée.
La figure N°1 ci-dessous présente l’organisation temporelle de cette recherche qui souligne l’utilité d’une période de dix années pour apprécier les transformations sur l’évolution des pratiques enseignantes en EPS (Marchenah, 1980)

Clarification du cadre théorique sur lequel s’appuie notre travail

Il convient, pour plus de clarté dans cette démarche de réplication, d’apporter quelques précisions sur quelques concepts.

Le rapport personnel au savoir

Dans la théorie anthropologique de la didactique, on ne peut pas dire qu’un individu sait un savoir mais qu’il a un « rapport personnel à ce savoir ». « De ce rapport personnel on relève notamment tout ce que l’on croit ordinairement pouvoir décrire en termes de savoir, de savoir-faire, de conceptions, de compétences, de maîtrise, d’images mentales, de représentations d’attitudes, de fantasmes etc., du sujet à propos de l’objet de savoir.
Tout ce qui peut être énoncé – à tort ou à raison, pertinemment ou non- doit être tenu au mieux pour un aspect du rapport personnel du sujet à l’objet de savoir » (Chevallard, 1989).
Le rapport personnel à un savoir donné ne peut exister seul : il prend place dans un ensemble de rapport personnel à une foule d’objets qui peuvent affecter sa formation ainsi que son évolution. Ce rapport est déterminé par l’institution à laquelle il appartient, de ce fait son appartenance à plusieurs institutions (la famille, l’école, le cercle d’amis, le club sportif,..) lui permet de jouir d’une certaine liberté. C’est parce qu’un savoir vit dans tout un ensemble d’institutions à la fois, que le rapport au savoir d’un individu pourra quelque peu s’autonomiser de l’institution où il est appelé à vivre.
Pour Chevallard (1992) « la liberté de la personne apparaît alors comme l’effet obtenu en jouant sur un ou plusieurs assujettissements institutionnels contre d’autres ». Ainsi dans la mise en jeu spécifique de ces divers assujettissements, la personne, étant considérée comme « l’émergent d’un complexe d’assujettissements institutionnels » (Chevallard, 1992) construit «un rapport personnel» à l’objet de savoir qui lui est propre. L’auteur affirme (1988) qu’un individu ne peut avoir à un objet de savoir donné qu’un rapport personnel.
Quand un individu entre dans une institution, il se transforme en sujet confronté à des savoirs avec lesquels il doit entretenir un rapport tel que l’institution le définit.

Le rapport au savoir à enseigner des enseignants d’EPS

Depuis une dizaine d’années les recherches en didactique de l’éducation physique et sportive se sont centrées sur l’étude des savoirs mobilisés par les enseignants en situation ordinaire d’enseignement.
Selon cette approche, l’enseignement/apprentissage met en relation les trois instances interdépendantes du système didactique : le professeur, l’élève et le savoir.
L’analyse ascendante de la transposition didactique (Schubauer-Leoni & Leutenegger, 2005), en plaçant sous observation les pratiques didactiques en classe ordinaire, permet de définir le possible et le contraint de l’enseignement ainsi que l’impact des choix effectués par l’enseignant relativement aux savoirs mis à l’étude (Johsua, 2002).
Il a été aussi démontré que les choix professoraux sont influencés par la manière dont les professeurs d’EPS s’assujettissent à différentes institutions, chacune véhiculant un rapport aux savoirs de la pratique (Garnier, 2003).
Pour Garnier (2003), dans l’action, les intervenants ne sont pas seulement influencés par l’institution mais aussi par les contraintes interactives et les déterminismes privés de l’enseignant. Ces contraintes sont la plupart du temps contradictoires et donnent lieu à des conflits constituant une source de « malaise professionnel ».
L’action professorale constitue donc un lieu où se manifestent des processus épistémiques se situant au carrefour de contraintes épistémologiques (contenant des registres de savoirs sur les pratiques d’activités sportives) et d’une dynamique interactionnelle (rendant compte des processus d’élaboration en contexte des rapports à ces savoirs) (Amade-Escot, Amans-Passaga et Montaud, 2009).
Des travaux en didactique clinique ont mis en évidence, qu’au-delà des assujettissements institutionnels qui pèsent sur les choix des enseignants en EPS (qu’il s’agisse de l’institution scolaire ou de l’institution fédérale) se jouent des dimensions plus personnelles, voire inconscientes, renvoyant à la définition du rapport au savoir que propose Chevallard : « nos rapports personnels sont ainsi le fruit de l’histoire de nos assujettissements institutionnels passés et présents » (Chevallard, 2002).
Brossais et Terrisse (2009) ont montré, à travers une recherche en judo, que l’intention didactique de l’enseignant est fortement influencée par sa formation fédérale (sportive).
Dans une autre étude sur les savoirs transmis aux élèves, Margnes (2009) et Loizon (2009) expliquent que ces savoirs sont de nature différente et n’ont pas le même poids selon les professeurs. En effet, les enseignants ont chacun des stratégies d’enseignement différentes qui tiennent plus à leurs propres différences qu’à la nature des publics auxquels ils ont affaire.
Ces différences de stratégies renvoient, non seulement à celles qui concernent leur conception de l’activité mais aussi à leur expérience et histoire personnelle dans une activité spécifique (Buzninc et al, 2008).
Ces différents travaux sur le rapport aux savoirs des enseignants en situation de classe posent plus largement la question de l’épistémologie des professeurs.

Epistémologie des professeurs

Définir le concept « d’épistémologie du professeur » revient à prendre en considération son rapport à l’ensemble de ce qui est appelée : « l’épistémologie personnelle des enseignants ».
Kagan (1992) parle de « croyances », de « principes de pratiques », «d’épistémologie personnelle», de « perspective personnelle» ou « de connaissance de pratique» pour en rendre compte.
La question de l’épistémologie personnelle des enseignants a été abordée par différents auteurs du paradigme cognitiviste. Il s’agit d’un domaine d’étude lié aux cognitions de l’enseignant, ses croyances, ses convictions, ses valeurs, ses théories personnelles professées ou agies.
Un certain nombre de travaux met en évidence combien les croyances sont tacites, reliées aux pratiques, peu sensibles à l’argumentation, difficilement modifiables, et pourtant à l’origine de la créativité professionnelle (Kagan, 1992).
Cet auteur identifie plusieurs domaines où les croyances personnelles des enseignants pèsent sur leurs pratiques, et notamment celui relatif à la spécificité des contenus et qui englobe « les conceptions épistémologiques sur le domaine devant être enseigné ».
Crahay et al. (2010) soulignent que les croyances ont un but pratique d’organisation, de maîtrise de l’environnement et d’orientation des conduites. Elles remplissent des fonctions plurielles, (épistémique, identitaire, normative et justificatrice) permettant de comprendre la réalité et de donner un sens aux conduites.
Dans leur revue de littérature, ces auteurs pointent que l’évolution des croyances et des connaissances des enseignants au cours de leur vie professionnelle, découle de leur mise en acte, en effet, elles nourrissent l’agir et la réflexion professionnelle mais aussi elles s’en alimentent en même temps.
En didactique, la notion « d’épistémologie du professeur », a été introduite par Brousseau (1986) dans le but d’expliquer certains phénomènes transpositifs notamment dans les difficultés que les professeurs rencontraient lorsqu’ils tentaient de mettre en œuvre des ingénieries didactiques.
Selon Brousseau il s’agit d’une théorie implicite, une sorte de modèle construit pour la pratique et dont la fonction première est de « résoudre les conflits du contrat didactique » (Brousseau, 1986). Elle est définie comme une idéologie épistémologique des savoirs enseignés par Perrin-Glorian (1994) et regroupe à la fois la définition des savoirs et la conception de l’enseignement. C’est une sorte de théorie sous-jacente aux régulations de l’enseignant, dont l’étude permettrait d’expliquer selon Amade-Escot (1998) les régimes de pratiques sous-jacentes à l’activité didactique créatrice des professeurs d’EPS.

Epistémologie et conceptions des enseignants : état de travaux en EPS

En EPS, plusieurs recherches se sont intéressées aux savoirs ou aux conceptions des enseignants ; ce qui est une autre manière de s’intéresser à l’épistémologie du professeur.
La thèse de Brau-Antony (1998) se situe sur ce registre. L’auteur étudie les conceptions qu’ont les enseignants des sports collectifs et de leur enseignement. Les conceptions sont définies comme des modèles utiles pour l’action didactique, teintés d’idéologies et nourris d’éléments aussi divers que la formation initiale, l’expérience pédagogique, les modèles théoriques plus ou moins implicites, les théories de l’apprentissage et les choix axiologiques. L’analyse montre également que les conceptions des enseignants influencent leurs choix didactiques, plus particulièrement sur le plan des contenus à enseigner et des situations d’apprentissage.
On doit à Sensevy (2007), l’introduction du terme « d’épistémologie pratique du professeur ». Poursuivant le projet de Brousseau, il indique qu’il s’agit d’une théorie de la connaissance qui émane de la pratique et qui l’oriente. Cette épistémologie est pratique, parce qu’elle est d’abord « directement ou indirectement agissante dans le fonctionnement de la classe » et ensuite parce qu’elle « est produite en grande partie par la pratique ». Il est possible d’identifier dans les assertions de l’auteur un arrière-plan théorique relevant de l’approche développée par Bourdieu (1994) sur le sens pratique

Questions de recherche et choix méthodologiques

Comme pour la thèse mère, la visée de cette étude est d’explorer la façon dont les enseignants observent et analysent l’activité des élèves dans un match de Basket-Ball, dans le cadre d’un cycle d’enseignement de l’EPS, pour tenter de repérer quels éléments de la formation ont imprégné leur épistémologie professionnelle.
Les questions de la recherche, directement issues de ce qui est caractérisé comme étant le savoir en jeu dans la formation, sont les suivantes : Sur quels éléments du jeu se porte le regard de l’enseignant ? Quelle analyse fait-il de l’activité des élèves en jeu ? Quels éléments retire-t-il de son observation pour orienter l’intervention ?
Nous avons choisi pour cela de travailler avec un nombre restreint d’enseignants. Notre recherche n’est pas fondée sur des analyses statistiques mais sur une étude en profondeur des acquis d’enseignants confrontés à un renouvellement de connaissance dans une activité qu’ils enseignent.
Le protocole de recueil de données consiste en un entretien qualifié d’entretien « en situation de simulation professionnelle », initié par l’observation d’une séquence vidéo présentant des élèves en train de jouer au Basket-Ball.
Un montage vidéo a donc été réalisé pour les besoins de la recherche, à partir de prises de vues faites lors d’un cycle normal de Basket-Ball d’une classe de 2nd du lycée. Il comporte une succession de phases de jeu dans un match opposant deux équipes (filles) sensiblement équilibrées au sein de cette classe.
Le professeur de cette classe est l’un des enseignants interviewés. Ce montage sert de support à un entretien au cours duquel chacun des enseignants est invité à décrire l’activité des élèves dans l’ensemble de la séquence vidéo puis dans une des attaques qu’il choisit, et à faire ensuite des propositions d’intervention didactique.
L’analyse de contenu de ces entretiens est une analyse thématique. Elle vise à dégager des caractéristiques globales de la façon dont les enseignants se sont approprié les contenus de la formation.
L’étude de ces profils ne se situe pas dans une visée d’évaluation des professeurs vis-à-vis des acquis de la formation, mais cherche plutôt à explorer la dynamique qui préside à l’intégration de ces nouveaux savoirs didactiques.

Choix du terrain d’expérimentation et des acteurs concernés

Notre terrain d’expérimentation

Pour des raisons pratiques, nous avons choisi d’effectuer notre expérimentation au sein du Lycée Technique Professionnel Ampefiloha car l’un des enseignants qui a participé au stage fédéral y travaille et aussi parce que ce lycée possède un terrain de basket.

Les acteurs concernés

 joueurs/élèves.
Nous avons réalisé une vidéo de match d’élèves en classe de seconde. Initialement, nous avons voulu effectuer notre étude dans un collège avec des élèves de classe de 6ème, comme dans la thèse mère, mais à cause de l’inexistence d’infrastructures et de moyens matériels auprès des collèges approchés nous avons décidé de mener notre expérimentation au lycée d’Ampefiloha car comme il a été évoqué ci-dessus, ce lycée possède ce qu’il faut (terrain de basket, moyens matériels).
Soulignons aussi que le niveau débutant de nos élèves de classe de seconde correspond, en général, au niveau de ceux en classe de 6ème rencontrés dans la thèse mère.
 Enseignants.
Pour bien reproduire les paramètres de l’étude initiale, nous avons choisi de travailler avec deux enseignants qui ont effectué plusieurs stages au niveau fédéral dans une période d’au moins dix ans et un autre qui n’ a jamais suivi de stage d’entraineur de Basket Ball pour respecter la forme et les protocoles mises en place dans la thèse mère mais à un nombre réduit.
Comme pour la thèse mère, précisons quelques caractéristiques professionnelles de ces enseignants : (E1) enseignant au lycée, ayant participé à plusieurs stages d’entraineur au niveau de la FMBB, (E2) enseignant au Collège, il est impliqué dans l’entrainement des équipes au niveau fédéral et a été membre de l’encadrement de l’équipe nationale malgache et (E11) enseignante au lycée, elle n’a jamais suivi de formation d’entraineur fédéral.

Elaboration du protocole et l’entretien

Le montage vidéo

Les séquences de jeu filmées concernent approfondissement de la description de d’intervention des enseignants des élèves de 2nd afin de permettre un meilleur l’activité des joueurs et des propositions.
Le montage a une durée de 2 minutes 54 secondes et comporte un enchaînement de phases de jeu, opposant deux équipes : équipe verte et équipe rouge. Ces images ont été filmées en janvier 2017 durant une séance normale d’un cycle de Basket-Ball, dans une classe de 2nd dont le professeur d’EPS était l’un des enseignants interviewés (E1).

Le match

Le match se joue en 5 contre 5, sur un terrain normal, et a été filmé en continu. La séquence de jeu retenue dans le montage préserve la chronologie du match et la continuité du jeu entre les deux équipes. Seules quelques phases de jeu mal filmées ou comportant des arrêts de jeu trop longs ont été supprimées.
Les 2 minutes 54 secondes de jeu comportent 8 possessions de balle pour l’équipe verte et 7 pour l’équipe rouge.
Deux paniers sont marqués durant cette période et le score est de 4 à 0 pour les verts.
Les possessions de balle se traduisent pour l’ensemble des deux équipes par :
– 3 phases de « gagne-terrain »,
– 4 phases de « gagne-terrain » enchaînées avec un jeu de transition rapide,
– 2 « attaques placées »,
– 4 attaques avortées par interception.
– 2 « contre-attaques ou attaque rapide »

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Table des matières

PREMIERE PARTIE : PRESENTATION DE LA THESE MERE
1. Objet de la recherche
2. Problématiques de la recherche
3. Le cadre théorique
3 .1. La Formation Continue des enseignants
3.2. Analyse d’une formation didactique : cadre conceptuel
4. Dispositif de recherche
4.1. Une première partie intitulée « Renouveler l’épistémologie scolaire du Basket-Ball : Itinéraire d’une construction 1939 – 1990 »
4.2. Une deuxième partie intitulée « L’action de formation d’Alès » constitue l’étude de cas proprement dite. Elle a pour visée de décrire, d’analyser l’action de formation
4.3. La dernière partie intitulée « Dix ans après, quels effets sur l’épistémologie professionnelle des enseignants ? »
5 – Résultats
5. 1. Le parcours du Formateur R Merand
5. 2. Le contenu de formation d’Ales
5.3. Les effets de la formation sur les modifications de « l’épistémologie des professeurs »
6- Discussion
DEUXIEME PARTIE : LA REPLICATION
1. Objet d’étude, problématique et hypothèse
1.1. Objet d’étude
1.2. Problématique
1.3. Hypothèse
2. Méthodologie
2.1. Choix de l’étude à effectuer
2.2. Clarification du cadre théorique sur lequel s’appuie notre travail
2.3. Questions de recherche et choix méthodologiques
2.5. Elaboration du protocole et l’entretien
2.6. Saisie et traitement des données
2.7. Analyse des résultats
CONCLUSION GENERALE
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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