Les échanges génétiques ont façonné l’évolution virale

Les échanges génétiques ont façonné l’évolution virale

Phénomène d’intégration des EPRV

Conduite préalablement au Cirad, l’analyse par Fingerprint des clones BAC du génome diploide M. balbisiana contenant des EPRV BSGFV a révélé la présence de deux types d’intégrants dans le cv. PKW. De manière similaire à ce qui a déjà été observé pour l’EPRV BSOLV étudié en 1999 par Ndowora et al., les EPRV BSGFV ont une structure fortement remaniée. Le locus d’intégration est composé de plusieurs fragments tronqués du génome viral, orientés dans les deux sens. Ces remaniements ont conduit, chez le cv. PKW, à la formation de deux types d’EPRV, EPRV-7 et EPRV9. L’analyse des gènes Musa présents de part et d’autre de ces EPRV suggèrent que les intégrants étaient des formes alléliques (travaux préliminaires de M. Lescot à l’UMR DAP). Le génotypage de chaque EPRV a permis l’étude de leur ségrégation dans la descendance du croisement interspécifique utilisant le cv. PKW comme parent M. balbisiana. Nous avons montré que ces deux EPRV sont deux allèles du même locus et résultent d’un unique évènement d’intégration dans le génome du bananier étudié. L’analyse plus précise de l’environnement génétique de l’EPRV BSGFV a montré que l’intégration est associée à un rétrotransposon à LTR de type Ty3/Gypsy. Une telle association, EPRV- rétroélément, est fréquemment observée dans de nombreux modèles d’EPRV des solanacées (Gregor et al., 2004; Jakowitsch et al., 1999; RichertPoggeler et al., 2003; Staginnus et al., 2007), et également rapportée pour le bananier Obino l’Ewai (Ndowora et al., 1999). La particularité de l’EPRV BSGFV décrite dans notre étude et qui n’avait jamais été observée, est une intégration du BSV à l’intérieur d’un rétrotransposon complet. Cette intégration peut résulter d’une recombinaison non homologue au niveau de microhomologies entre les deux séquences, ou de la rétrotransposition du rétroélément après recombinaison entre les ARN prégénomiques viraux et les ARN du rétroélément en activité. Cette dernière hypothèse est celle retenue pour expliquer les intégrations des Potyviridae dans la vigne et des Discistroviridae dans le génome des abeilles (Maori et al., 2007; Tanne & Sela, 2005). Dans le cas où ce rétroélement est encore actif, il n’est pas exclu qu’à plus long terme évolutif, des stress favorisant la réactivation des rétroéléments puissent amplifier l’EPRV BSGFV au sein du génome B, comme cela a été observé pour les EPRV des Solanacées (Matzke et al., 2004; Richert-Poggeler et al., 2003).
Deuxièmement, cette chimère EPRV-rétrotransposon est située à l’intérieur d’un intron du gène mom, pseudogène à l’heure actuelle. Aucun autre cas d’intégration de Caulimoviridae dans un gène de l’hôte n’a été rapporté dans la littérature. Les EPRV des Solanacées (genres Petunia, Nicotiana et Solanum ), sont préférentiellement liés à l’hétérochromatine (Hansen et al., 2005; Richert-Poggeler et al., 2003; Staginnus et al., 2007), qui correspond à des zones chromosomiques plutôt pauvres en gènes et riches en rétroéléments. Les conséquences de la présence de l’EPRV BSGFV dans le gène mom de M. balbisiana sont à l’heure actuelle inconnues, mais il est troublant de noter que l’homologue de ce gène est impliqué dans le contrôle épigénétique des éléments répétés chez A. thaliana (Amedeo et al., 2000; Vaillant et al., 2006). Nous pouvons supposer que ce gène ayant perdu sa fonction suite à l’intégration du BSGFV, ne régulerait plus les rétroéléments et les EPRV infectieux des autres espèces virales de BSV, qui seraient alors transcrits et activés.

Structure des EPRV et mécanismes d’activation.

Depuis les travaux de Ndowora et co-auteurs en 1999 sur l’EPRV BSOLV chez le cv. Obino l’Ewai, aucun autre exemple d’EPRV infectieux du BSV n’a été reporté dans la littérature. Nous avons démontré qu’un deuxième EPRV du BSV appartenant à l’espèce BSGFV est présent dans le génome des M. balbisiana, et qu’il est infectieux.
Le cv. PKW est porteur sain et toujours indemne de virions, et l’activation des EPRV s’observe seulement dans la descendance hybride interspécifique triploïde (AAB)
impliquant le cv. PKW comme parent M. balbisiana. L’analyse de l’activation du BSV dans la descendance a montré qu’un seul des deux allèles (EPRV-7) est infectieux puisque seuls les hybrides porteurs de cet allèle sont capables de restituer un virus BSGFV fonctionnel.
Les régions co dant es de l’allèle non-infectieux (EPRV -9) contiennent des mutations délétères pouvant expliquer le fait qu’aucun virus fonctionnel ne puisse être restitué à partir de cet allèle. L’allèle infectieux, quant à lui, possède des ORF indemnes de mutations fortement délétères. De manière troublante, la formation d’un génome viral à partir de l’EPRV ne peut se faire directement. Ce n’est qu’après une série de modifications de la structure physique de l’EPRV que le génome viral fonctionnel est restitué. Nous avons reconstruit un modèle théorique d’activation basé sur des recombinaisons homologues. Selon ce modèle, deux étapes de recombinaison au minimum sont requises pour produire un génome viral fonctionnel, c1est-à-dire complet et circulaire, à partir de l’allèle infectieux du BSGFV. La validation de ce modèle s’est faite en deux temps. D’une part, nous avons vérifié que les zones de l’EPRV impliquées dans la restitution du génome viral ne contenaient pas de mutations fortement délétères. D’autre part, nous avons vérifié que les molécules recombinées correspondant aux étapes intermédiaires ainsi qu’aux produits finaux étaient détectées dans le modèle bactérien utilisé, ainsi que chez le cv. PKW. Ces molécules sont probablement en très faible quantité, à la limite de la détection par PCR, ce qui expliquerait qu’une des quatre régions recombinées n’ait pas été observée chez le cv. PKW. Enfin, il est important de noter que la recombinaison homologue, bien que rare chez les plantes, n’est pas le facteur limitant de l’activation des EPRV, puisqu’elle s’observe sans induction particulière in planta, et qu’elle semble également concerner l’allèle non infectieux. A l’opposé, la présence d’un génome intégré complet possédant des ORF non altérées semble être un facteur nécessaire à la multiplication virale. La présence de l’allèle infectieux EPRV-7 est une condition nécessaire à l’activation, mais elle n’est pas suffisante. En effet, la majorité (75%) des hybrides porteurs de l’allèle infectieux ne sont pas infectés par le virus BSGFV. Une explication serait que des facteurs génétiques ou épigénétiques, combinés à des facteurs environnementaux jouent également un rôle dans l’issue des infections initiées lors de l’activation d’un EPRV infectieux.
L’activation apparaît être un phénomène qui comporte plusieurs étapes. La première est la restitution d’un génome viral infectieux, par recombinaison homologue dans le cas de l’allèle EPRV-7 du BSGFV. Cependant, des génomes non infectieux et incapables de se répliquer peuvent également être générés lors de cette première étape, à partir de l’allèle EPRV-9 du BSGFV intégré par exemple. La deuxième étape concerne le début l’infection, lors de l’initiation du cycle viral à partir des quelques  génomes infectieux présents dans les tissus de la plante. Une fois qu’un génome viral infectieux a été produit, les plantes peuvent se défendre contre l’infection débutante par l’expression de gènes de défenses, ainsi que par des mécanismes de RN Ai activés par la transcription des EPRV et/ ou par les ARN viraux.

Des intégrations récentes et simultanées du BSV

Nous avons souhaité dans un premier temps apporter des clarifications sur les relations phylogénétiques des BSV, au travers d’une analyse phylogénétique conduite sur les séquences virales intégrées et libres. Ainsi, cette étude a pour la
première fois pris en compte les informations apportées par les EPRV pour les intégrer à la phylogénie des séquences des virus libres. La prise en compte de toutes les séquences proches du BSV alors disponibles dans les banques de données nous a permis d’étudier à grande échelle le phénomène d’intégration. Tout d’abord, un nombre important d’intégrations virales indépendantes se sont produites dans les trois espèces de bananiers étudiées, faisant de l’intégration un phénomène fréquent. Ensuite, la majorité de ces intégrations se sont produites après la spéciation M. acuminata et M. balbisiana, estimée à 4,5 Ma, c1est-à-dire récemment d’un point de vue évolutif. L’âge exact des intégrations reste toutefois inconnu. Il est cependant possible d’estimer celui de l’EPRV BSGFV étudié dans cette thèse et de l’utiliser comme ordre de grandeur pour estimer celui des autres EPRV. Ainsi, si l’on considère que l’EPRV est arrivé avec le rétroélémént (hypothèse I présentée dans l’article 1), nous pouvons alors utiliser la date approximative de 0,63 Ma calculée à partir de la divergence des LTR et du taux de substitution des Musaceae (Lescot et al., 2008), comme date d’intégration de l’EPRV BSGFV. Bien que ce calcul soit très approximatif, il semble confirmer que les intégrations sont récentes par rapport à l’émergence de l’espèce M. balbisiana. Ces intégrations seraient donc relativement jeunes d’un point de vue évolutif, ce qui pourrait expliquer la présence de séquences virales toujours fonctionnelles que l’on trouve dans les EPRV infectieux.

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Table des matières

RESUMŒ
ABSTRACT 4 Retnercie.ments
Liste des figures
Abréviations et acronytnes
Liste des virus
INTRODUCTION
1 Les échanges génétiques ont façonné l’évolution virale
1.1 Virus et biologie évolutive
1.2 Définitions des virus
1.3 Origines des virus
1.4 Pourquoi étudier les EPRV ?
2 Diversité des séquences virales endogènes
2.1 Intégrations comme stratégie de réplication virale
2.1.1 Le cas des Polydnavirus
2.1.2 Les ‘temperate phage’
2.1.3 Les rétrovirus de vertébrés
2.2 Intégrations accidentelles
2.2.1 Dans le génome des insectes
2.2.1.1 Les Flavivirus chez les moustiques
2.2.1.2 Les Dicistrovirus chez les abeilles
2.2.2 Dans le génome des plantes
2.2.2.1 Les Potyviridae chez la vigne
2.2.2.2 Les Geminiviridae chez les Solanacées et Fabacées
2.2.2.3 Les Caulimoviridae chez les plantes
3 Comment les virus deviennent ils endogènes ?
3.1 Endogénisation par des enzymes spécialisées
3.2 Intégration par recombinaison des ARN
3.3 Intégration par recombinaison non homologue
4 Les pararétrovirus endogènes de plante
4.1 Diversité des virus intégrés et des hôtes
4.1.1 EPRV non infectieux
4.1.1.1 Les ERTVB chez le riz
4.1.1.2 Les EPRV proches du TVCV chez les Solanaceae
4.1.1.3 Le DMV-D10 chez les Dahlia
4.1.2 EPRV infectieux
4.1.2.1 Les EPRV TVCV chez le tabac N. edwardsonii
4.1.2.2 Les ePVCV chez le pétunia
4.1.2.3 Les EPRV BSV chez le bananier
4.2 Régulation épigénétique des EPRV
4.2.1 Les EPRV sont contrôlés par les plantes
4.2.2 Activation des EPRV infectieux
4.2.3 Une résistance induite par les EPRV ?
5 BSV-bananier: un modèle d’étude des EPRV infectieux
5.1 Les hôtes bananiers
5.1.1 Description botanique
5.1.2 Phylogénie et évolution du genre Musa
5.1.3 Domestication et origine des bananiers comestibles
5.2 Le virus du BSV 52 5.2.1 Classification et phylogénie
5.2.1.1 Le BSV, famille: Caulimaviridae, genre : Badnavirus
5.2.1.2 Les BSVs, un complexe d’espèces virales
5.2.2 Particule virale et structure du génome
5.2.3 Biologie du BSV
5.2.3.1 Gamme d’hôte
5.2.3.2 Symptômes et conséquences pour les bananiers
5.2.3.3 Cycle de réplication
5.2.3.4 Transmission du BSV
5.3 Les EPRV BSV
5.3.1 Découverte d’EPRV infectieux
5.3.2 Activation des EPRV BSV
5.3.2.1 Facteurs déclencheurs
5.3.2.2 Mécanismes d’activation des EPRV BSV
5.3.3 EPRV infectieux et non infectieux
5.3.4 Conséquences évolutives des EPRV BSV
5.3.4.1 Pour les virus
5.3.4.2 EPRV et évolution du génome des bananiers
5.3.4.3 Délétères et bénéfiques : le paradoxe des EPRV
6 Objectifs généraux de la thèse
Aims of the study
CHAPITRE I Mécanismes et biologie des EPRV infectieux
1 Structure et génétique de l’intégration infectieuse du Banana streak GF virus chez le bananier Musa balbisiana cv. PKW
1.1 Objectifs généraux
1.2 Article 1 : « A single Banana streak virus integration event in the banana genome as the origin of infectious endogenous pararetrovirus »
2 La recombinaison homologue: un mécanisme d’activation de l’EPRV infectieux du Banana streak GF virus chez le bananier Musa balbisiana cv. PKW
2.1 Objectifs généraux
2.2 Article 2 : « Evidence for activation of infectious endogenous pararetrovirus in banana (Musa sp.) by homologous recombination »
CHAPITREll Diversité et évolution des EPRV
1 Phylogénie des BSV libres et intégrés dans le genre Musa
1.1 Objectifs généraux
1.2 Article 3: « Phylogeny of Banana streak virus reveals a recent burst of integrations in the genome of banana (Musa sp.) »
2 Histoire évolutive des intégrations pathogènes du Banana streak GF virus et du Banana streak lm virus chez leur hôte : apports de la phylogénie moléculaire du genre Musa
2.1 Objectifs généraux
2.2 Article 4 : « Evolutionary history of infectious endogenous banana streak viruses and their host banana (Musa sp.) » 162 CONCLUSION GENERALE
Conclusion
Phénomène d’intégration des EPRV
Structure des EPRV et mécanismes d’activation
Des intégrations récentes et simultanées du BSV
Evolution des EPRV
Conséquences évolutives des EPRV pour les bananiers
EPRV: un nouveau type de parasites?
Perspectives: EPRV et mutations d’insertion?
Mécanismes d’activation des EPRV BSV
Mécanismes de défense des bananiers contre les EPRV infectieux
Biologie évolutive des EPRV infectieux
Inventaire de la biodiversité virale intégrée: étude de la nature et des structures des EPRV
Application : Utilisation des EPRV comme marqueur de phylogénie
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES
Annexe 1 – Article 5 : « Exploring the banana streak viruses – Musa sp. pathosystem: how does it work? »
Annexe 2 – Article 6 : « How to Control and Prevent the Spread of Banana Streak Disease when the Origin could be Viral Sequences Integrated in the Banana Genome »

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