La frontiรจre dรฉsigne une discontinuitรฉ sur un espace, par analogie un clivage au sein dโune population. Elle est devenue un enjeu de taille vers la fin du XIXe siรจcle grรขce ร des prรฉcurseurs comme Friedrich Ratzel et Jacques Ancel. Le thรจme connait un regain ร partir des annรฉes 1970, faisant parler dans les milieux de la recherche dโ โobsession des frontiรจresโโ (Foucher Michel). Un regain dโintรฉrรชt dรป ร lโรฉvolution de la fonction de cloisonnement de la frontiรจre dans le nouveau contexte crรฉรฉ par la mondialisation.
Ce qui fait penser ร beaucoup de penseur ร un retour vers le niveau local comme lโillustre Requiert Desjardins โIl y a donc actuellement dans les pays du Tiers-monde, un retour vers le niveau local consรฉcutif ร ce quโil est convenu dโappeler la crise nationale. Un exemple de cette montรฉe de la dimension locale illustre ce lien entre lโeffacement relatif du territoire national, comme cadre pertinent dโapprรฉhension des phรฉnomรจnes de dรฉveloppement et la montรฉe correspondante des dynamiques territoriales [โฆ]. Il sโagit de lโanalyse des processus spรฉcifiques de dรฉveloppement dans des territoires frontaliers, dรฉcoulant des opportunitรฉs liรฉes aux frontiรจresโโ (Requiert Desjardins, 1993:page 51). Le retour du niveau local au-devant de la scรจne et la mondialisation interviennent au moment oรน la notion de frontiรจre est plus que jamais dโactualitรฉ.
Cet intรฉrรชt renouvelรฉ pour lโรฉtude des frontiรจres intervient paradoxalement dans un contexte oรน mondialisation, globalisation et mรฉtropolisation sont des notions clรฉs (Medina Nicolas, 2004 a ; Retiel et Al, 2002). Ces phรฉnomรจnes socio-spatiaux qui se traduisent par lโintensification des mobilitรฉs, la naissance de rรฉseaux et le dรฉveloppement de la tรฉlรฉcommunication ont conduit, en effet, ร prรฉdire la โfin des frontiรจresโโ. Cependant, ces derniรจres subsistent toujours comme dโailleurs les territoires dont la fin a รฉtรฉ annoncรฉe au milieu des annรฉes 1990 (Badie, 1995). Lieu stratรฉgique et trรจs convoitรฉ, la frontiรจre fait appel ร beaucoup de disciplines le droit, lโhistoire, la science, lโanthropologie et la gรฉographie qui se lโest appropriรฉe de plus du fait que cette thรฉmatique โles frontiรจres entre Etats sont des marques dans lโespace et de lโespaceโโ (Nordman, 1999), elles font ainsi partie des concepts รฉminemment spatiaux.
Contexte et justificationย
Contexte
ร la sortie de la confรฉrence de Berlin, l’Afrique est morcelรฉe entre les puissances sans en prendre compte des rรฉalitรฉs ethniques, culturelles, รฉconomiques et mรชme gรฉographiques. C’est dans cette perspective quโIgue, 1995, dira que la colonisation a entrainรฉ la balkanisation excessive du continent africain. Ce dernier a ainsi hรฉritรฉ d’Etats qui, compte tenu de leur รฉtroitesse gรฉographique et de leur faible capacitรฉ de production sont incapables de produire un vรฉritable dรฉveloppement socio รฉconomique. Raison pour laquelle des initiatives ont รฉtรฉ proposรฉes ร la veille et au lendemain des indรฉpendances allant dans le sens d’une intรฉgration soit pour relier un pays sahรฉlien et celui cรดtier dans le but de l’ouvrir au monde ou soit pour une complรฉmentaritรฉ entre deux pays cรดtiers ou sahรฉliens.
Aujourd’hui, la conjoncture mondiale รฉconomique et socioculturelle ne laisse aucune chance ร une vision autarcique d’un Etat ou espace dans ce contexte de mondialisation oรน la nรฉcessitรฉ de se rรฉunir en entitรฉ rรฉgionale ou sous rรฉgionale est devenue inรฉluctable.
C’est dans cette logique que ces propos de kwamรฉ krouma sont illustratifs ย ยปAucun de nos Etats indรฉpendants ne peut aujourd’hui suivre une voie indรฉpendante de dรฉveloppement รฉconomique. Beaucoup dโentre nous qui lโont essayรฉ se sont tous presque entiรจrement ruinรฉs. Cette situation ne changera pas tant que nous nโรฉlaborons pas une politique commune de dรฉveloppement โฆ . Les peuples africains demandent la destruction des frontiรจres qui les sรฉparent les uns des autres; ils savent que seule la rรฉalisation de l’unitรฉ pourra donner valeur ร leur libertรฉ, ร l’indรฉpendance de l’Afriqueย ยป kwamรฉ krouma discours prononcรฉe le 23 mai 1963 ร Addis-Abeba ร la confรฉrence de l’OUA (Organisation de l’Unitรฉ Africain).
Cadre Historiqueย
Profil historique
La Sรฉnรฉgambie est ce vaste ensemble que composent les Etats actuels du Sรฉnรฉgal, de la guinรฉe Bissau, de la Gambie, une partie du mali, de la Mauritanie et de la guinรฉe Conakry (Barry, 1988). Ici, il est question de la Sรฉnรฉgambie mรฉridionale qui englobe la partie sud cโest-ร -dire la frontiรจre entre le Sรฉnรฉgal et les deux guinรฉes. Lโarrivรฉe des colons venait ร mettre fin aux anciens royaumes du Gabou et le fouladou. LโAfrique devient le continent le plus fragmentรฉ sur le plan gรฉopolitique et aussi le plus cosmopolite sur le plan de la diversitรฉ de sa population (ki-zerbo, 1978). Cette nouvelle donne met les populations dos ร dos et frรชne aussi bien son dรฉveloppement que ses liens sociaux. Ainsi lโanalyse des profils historique nous a permis dโรฉtablir une รฉtude du cadre historique. Les missions de terrains nous ont permis de recueillir des informations venant des personnes ressources (imams, notable, chef du village, et autres autoritรฉs. Selon les tรฉmoignages, la zone transfrontaliรจre de la Sรฉnรฉgambie mรฉridionale รฉtais composรฉe des anciennes provinces du Gabou et du fouladou avant la colonisation.
Les informations recueillies รฉtais diverses et variรฉes. Les uns affirmรฉs lโappartenance de la Sรฉnรฉgambie mรฉridionale entiรจre au Gabou, pour ceux-lร le fouladou รฉtait un sous ensemble du gabou et pour dโautres elle regroupait les deux provinces. Notre position par rapport ร ces diffรฉrentes informations nโest pas celle de trancher ou de juger. Cependant pour รชtre dans une posture dโanalyse scientifique nous serons tentรฉs dโaccorder du crรฉdit ร la considรฉration de Barry, 1978 que nous avons rappelรฉ prรฉcรฉdemment. A partir de ce moment on peut dire que la Sรฉnรฉgambie mรฉridionale appartenait au gabou. La zone serait habitรฉe depuis fort longtemps, en occurrence le village de Diaobรฉ, Pirada, wassadou, etc. Dans le cadre gรฉnรฉral on remarque que les espaces transfrontaliers sont ร lโorigine fondรฉs soit par des รฉleveurs (recherche de pรขturages), soit des agriculteurs (recherche de terres de cultures) ou des chasseurs (recherche de faunes) comme ce fut le cas du village de Diaobรฉ.
Ancien village de la communautรฉ rurale de kounkanรฉ, la commune de Diaobรฉ-kabendou a รฉtรฉ crรฉรฉe par le dรฉcret nยฐ2008-78. Il entre dans lโesprit des lois du 22 Mars 1996, notamment la loi 96-6 portant code des collectivitรฉs et la loi 96-07 relative au transfert de compรฉtences aux rรฉgions, communes et communautรฉs rurales. Diaobรฉ chef-lieu de la commune รฉtait avant la rรฉforme de 2008 un vieux village fondรฉ vers La fin des annรฉes 1800 par Colyel Diao, un chasseur Peul venant de la Guinรฉe Bissau. Sa notoriรฉtรฉ a รฉtรฉ boostรฉ ร partir de 1970 oรน dรฉmarrรจrent les activitรฉs de son marchรฉ hebdomadaire qui, de nos jours est un โโdonโโ du fait que la vie de la majeure partie de la population y dรฉpende. Il permet รฉgalement dโattirer bon nombre dโopรฉrateur รฉconomique en provenance des autres rรฉgions du Sรฉnรฉgal et des pays limitrophes.
Le village de pirada dans la mรชme perspective est fondรฉ รฉgalement par un vieux peul ร la recherche de pรขturage et de terre agricole sโest installรฉ vers les annรฉes 1840. Il a servi de zone de transit au moment de lโesclavage mais รฉgalement une limite pour la conquรชte portugaise dans cette partie de la rรฉgion du fleuve. Lโespace รฉtudiรฉ appartenait ร deux colonies diffรฉrentes, celle franรงaise et portugaise. La zone franรงaise comprenait le Sรฉnรฉgal et la Guinรฉe Conakry qui faisaient partir de lโAfrique occidentale franรงaise. Cependant, le dรฉpart prรฉcipitรฉ de la Guinรฉe de lโempire coloniale franรงaise avec son indรฉpendance en 1958, va aboutir ร une construction diffรฉrente des logiques franรงaises. Le pays adopta sa propre monnaie, le Franc Guinรฉe, ร la diffรฉrence du Sรฉnรฉgal qui conserva le Franc CFA. Quant ร la Guinรฉe Bissau, une possession portugaise longtemps dรฉchirรฉe par la guerre tant pour lโoccupation de lโEtat que pour des appartenances ethniques. Par ailleurs, la Sรฉnรฉgambie mรฉridionale se caractรฉrise par une grande mobilitรฉ des populations qui la constituent et a toujours รฉtรฉ fortement disputรฉe par plusieurs ethnies organisรฉes en systรจmes politiques spรฉcifiques, eux-mรชmes intรฉgrรฉs ร des formations plus larges.
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Table des matiรจres
Introduction Gรฉnรฉrale
I. Contexte et justification
II. Problรฉmatique
III. Mรฉthodologie
PREMIERE PARTIE : LES CARACTERISTIQUES DU TERRITOIRE TRANSFRONTALIER
Chapitre I : Cadre Historique
I. Profil historique
II. Le tracรฉ des frontiรจres et ses consรฉquences
Chapitre II : Cadre physique et organisationnel lโespace
I. Cadre physique
II. Organisation de lโespace
Chapitre III : Les aspects dรฉmographiques et Socioculturels
I- Les caractรฉristiques dรฉmographiques
II- Les caractรฉristiques socioculturelles
DEUXIEME PARTIE : ECHANGES ET VIE DE RELATION
CHAPITRE IV: Frontiรจres et Mouvements transfrontaliers
I) La Sรฉnรฉgambie mรฉridionale, un espace dโimbrication ร travers des frontiรจres poreuses
II) Le mouvement dans lโespace transfrontalier : frontiรจre et rรฉseaux marchands en Sรฉnรฉgambie mรฉridionale
Chapitre V : Frontiรจres et dynamiques sociales
I- Frontiรจres et relations socioculturelles
II- Mouvements sanitaires transfrontaliers
III- Mouvement scolaires transfrontaliers
Chapitre VI : Le rรดle des marchands dans lโespace transfrontalier
I. Lโespace transfrontalier: mouvement marchands et structure spatiale
II. Les mutations spatiale et territoriale, consรฉquence des migrations transfrontaliรจres
TROISIEME PARTIE : LA COOPERATION TRANSFRONTALIERE ENJEUX ET DEFIS
Chapitre VII- La coopรฉration transfrontaliรจre
I- La coopรฉration des administrations
II- La coopรฉration entre services sociaux
III- Les communautรฉs locales, facteur de coopรฉration
Chapitre VIII : les enjeux et dรฉfis de la coopรฉration transfrontaliรจre
I- les enjeux
II- Les dรฉfis
Conclusion Gรฉnรฉrale
BIBLIOGRAPHIE