Déroulement de la recherche
J’ai débuté cette recherche en prenant un temps pour observer le fonctionnement de la classe. Durant cette phase d’observation, j’ai pu repérer les élèves qui semblaient à l’aise dans les tâches de lecture proposées par l’enseignante, ainsi que ceux qui l’étaient moins. Ce premier moment m’a permis de me faire une idée quant aux éventuelles difficultés de certains élèves, avant de réaliser une évaluation diagnostique. Suite à ces observations, j’ai mis en place le pré-test permettant de déterminer le niveau de tous les élèves de la classe en lecture. Grâce à ce pré-test, j’ai pu identifier les élèves dont les résultats étaient moins élevés que ceux du reste de la classe, et qui feraient donc partie de la recherche. Ainsi, à l’aide de cette évaluation, j’ai mené des interventions ciblées auprès des élèves les plus en difficulté. Après cette phase d’interventions, ces derniers ont effectué un post-test démontrant leurs progrès, leur régression ou leur stagnation.
Phase de pré-test
Pour effectuer cette recherche, j’ai tout d’abord fait passer un pré-test à tous les élèves de la classe. Ce test comporte quatre épreuves de lecture, qui demandent de mobiliser deux niveaux de connaissances : les « connaissances linguistiques, encyclopédiques et sur les fonctions des écrits » ainsi que le « traitement et [la] reconnaissance des unités linguistiques » (Ouzoulias, 2004b, p.92). Ces quatre premières épreuves de l’évaluation collective permettent donc de constater les performances de l’élève d’une manière globale. Le Médial CE1 contient également trois autres tâches « consacrées à l’évaluation des compétences dites « métalinguistiques » » (Ouzoulias, 2004b, p.92). Ces trois dernières épreuves relèvent uniquement du traitement et de la reconnaissance des unités linguistiques et ne prennent donc pas en compte le niveau des connaissances linguistiques, encyclopédiques et sur les fonctions des écrits. Elles permettent de constater où en est l’élève dans la « maîtrise du traitement de la langue écrite » (Ouzoulias, 2004b, p.92). Ces sept épreuves permettent de situer les élèves dans l’apprentissage de la lecture ainsi que de vérifier les acquis de l’ensemble de la classe (Ouzoulias, 2004b, p.91).
Les élèves ont réalisé l’évaluation en trois fois. Ils ont effectué les tâches individuellement, tous en même temps. Les épreuves ont été présentées à l’ensemble de la classe, selon le guide de passation du Médial, proposé par André Ouzoulias. Les épreuves ont été récoltées et corrigées, et ont permis de constater quels étaient les élèves éprouvant le plus de difficultés.
Quatrième intervention – travail sur le phonème
Résultats de Louis : sur la première fiche, il a entouré tous les mots contenant le son [t] dans la première colonne ainsi que les mots contenant le son [i] dans la deuxième. Sur la deuxième fiche, il a également réalisé la tâche de manière entièrement correcte : il a entouré tous les mots contenant le son [p] dans la première colonne, et tous les mots contenant le son [b] dans la deuxième. Finalement, sur la troisième fiche, il a entouré tous les mots qui contiennent le son [m] dans la première colonne. Dans la dernière colonne, où le son [y] est à rechercher, il a tout entouré, même les images représentant les mots « hibou » et « caillou ». On peut imaginer qu’il a entouré ces deux images car ces mots contiennent la lettre « u » à l’écrit.
Résultats de Deby : elle a réalisé les deux premières fiches de manière entièrement correcte.
Elle a fait des remarques réellement intéressantes lors de la réalisation de la tâche, comme on peut le voir ci-dessous :
Deby : on dit [ʁobot] ou [ʁobo] ?
Enseignante : on dit [ʁobo].
Ce premier échange laisse imaginer que Deby a conscience de l’aspect écrit du mot. Par cette question, elle montre que, selon la prononciation de ce dernier, elle entourera ou non l’image du robot lors de la recherche du son [t]. Deux autres interventions de sa part montrent que sa conscience de l’écrit a une influence sur ce qu’elle entoure ou non lors de la recherche d’un phonème :
Deby : le [wa] ça chante [i] ?
Enseignante : bah, est-ce que t’entends [i] quand tu dis [wa] ?
D : Non.
Deby : on va pas dire [elefɑ̃t], on écrit [elefɑ̃t].
Finalement, on peut constater qu’elle a oublié d’entourer l’image représentant le mot « écureuil » dans la dernière colonne de la troisième fiche, lors de la recherche du phonème [y].
Résultats de Frida : elle a éprouvé quelques difficultés lors de la réalisation de cette tâche.
Lors de la recherche du son [t], dans la première colonne de la première fiche, Frida a entouré l’image représentant le mot « éléphant ». On peut imaginer que sa référence à l’écrit a influencé sa réponse. Lorsque c’est le phonème [p] qui est recherché, elle omet d’entourer l’image représentant le mot « épée ». Elle entoure correctement les images contenant les différents phonèmes recherchés sur la deuxième colonne de la deuxième fiche, ainsi que sur les deux colonnes de la troisième fiche.
Résultats de Rico : il n’a pas entouré l’image représentant le mot « cacahuète » dans la première colonne de la première fiche, lors de la recherche du phonème [t]. Il a également omis d’entourer l’image qui représente le mot « hélicoptère » dans la deuxième colonne, où le son [i] était recherché. Sur la deuxième fiche, lors de la recherche du son [p], il n’entoure pas les images représentant les mots « lapin » et « écharpe ». Il entoure correctement les images contenant le son [b] dans la deuxième colonne de la deuxième fiche, ainsi que les images représentant des mots qui contiennent le son [m] dans la première colonne de la troisième fiche. Finalement, il omet d’entourer l’image représentant le mot « fondue » lors de la recherche du son [y], sur la deuxième colonne de la troisième fiche.
Cinquième intervention – travail sur la segmentation en mots
Résultats de Louis : il découpe correctement la phrase « Louis chante une chanson» en quatre mots. Ensuite, lorsqu’il doit découper la phrase « demain, il va sûrement pleuvoir » en mots, il en compte d’abord quatre. Il associe « il » et « va », ce qui fait qu’il compte ces deux mots en un. Il corrige après mon intervention. Louis doit ensuite découper la phrase « je regarde la télévision le soir » ; il compte le bon nombre de mots. Lorsqu’il doit découper la phrase « on travaille ensemble pour apprendre à lire », il englobe premièrement « à » et « lire » en un seul mot. Il compte le bon nombre de mots après avoir séparé « à » et « lire ».
Finalement, il éprouve une certaine difficulté à découper la phrase « dans une phrase, on peut trouver plusieurs mots », comme on peut le constater dans l’échange qui suit :
On remarque qu’il est capable de découper la phrase correctement suite à l’échange présenté ci-dessus. Ainsi, on peut constater que le questionnement proposé lui permet de réguler. Le fait de lui demander « alors, comment tu découpes ? Alors dis juste les mots sans faire avec les doigts, tu les sépares » lui permet d’essayer une nouvelle fois, et me donne également l’occasion de constater où se trouve son erreur afin de lui donner des pistes pour réguler.
Résultats de Deby : elle découpe correctement la phrase « Deby joue aux poupées» en quatre mots. Lorsqu’elle doit compter le nombre de mots que contient la phrase « il fait plutôt beau aujourd’hui », elle associe « il » et « fait ». Suite à une régulation directe, Deby découpe correctement la phrase. Elle doit ensuite découper la phrase « les élèves vont à la gymnastique ». Voici l’échange qui a eu lieu :
On peut imaginer que Deby répond spontanément « six » quand la question du nombre de mots lui est posée, car chaque élève a, à son tour, dû découper une phrase avec le même nombre de mots. Cependant, on peut tout de même constater qu’elle découpe correctement la phrase au fur et à mesure de la régulation. Deby doit ensuite compter le nombre de mots contenus dans la phrase « il ne faut pas confondre mot et phrase ». Il a fallu répéter plusieurs fois cette phrase afin que Deby puisse en compter tous les mots. En effet, elle n’avait pas intégré la phrase correctement, ce qui ne lui permettait pas de la découper de manière adéquate. Elle gardait en tête la phrase « il ne faut pas confondre les phrases », ce qui modifiait le nombre de mots à compter. Après plusieurs répétitions, Deby a cependant découpé la phrase avec aisance. Finalement, lorsqu’elle découpe la phrase « Louis et Rico se partagent leur récréation », elle compte le bon nombre de mots.
Résultats de Frida : elle compte le bon nombre de mots dans la phrase « Frida décore le sapin ». Elle découpe la phrase « je mange des raisins secs » avec plus de difficulté ; elle scinde le mots « raisins » en syllabes, ce qui l’amène à un total de six mots dans la phrase. On peut voir qu’elle corrige sans problème, suite à l’échange ci-dessous :
Enseignante : Frida, tu fais la phrase « je mange des raisins secs »
Frida doit ensuite découper la phrase « Maman se promène dans la rue », ce qu’elle fait correctement. Lorsqu’elle doit compter les mots de la phrase « Frida et Deby ont fait un bricolage », elle le fait également avec aisance. Finalement, Frida découpe la phrase « aujourd’hui, on sépare les mots dans la phrase » avec un peu plus de difficulté.
Effectivement, elle scande premièrement le mot « aujourd’hui » en syllabes. Après régulation, elle découpe la phrase correctement.
Résultats de Rico : il découpe « Rico prend sa gomme » de manière correcte. Il doit ensuite compter les mots de la phrase « les enfants jouent aux cartes », ce qui ne lui pose aucun problème. Lorsqu’il découpe la phrase « en rentrant, je fais mes devoirs », il scande le mot « rentrant » en syllabes. On peut voir dans l’échange ci-dessous que cela est régulé après mon intervention :
Rico doit ensuite découper la phrase « nous apprenons plein de choses à l’école ». Il commence par scander le mot « apprenons » en syllabes. Je lui rappelle alors que nous ne travaillons plus ces dernières, mais que nous travaillons à présent sur les mots. Ainsi, il sépare la phrase correctement. Pour finir, Rico doit découper la phrase « on compte les mots dans une longue phrase », ce qu’il fait avec aisance.
Sixième intervention – travail sur la segmentation en mots
Résultats de Louis : il sépare correctement la première phrase. Lorsqu’il faut séparer les mots de la phrase « un garçon mange une pomme verte », Louis omet de séparer « une » et « pomme ». Je lui l’indique en expliquant que « une » est le déterminant, et « pomme » le nom, et il corrige. On remarque qu’il éprouve une certaine difficulté à séparer les mots de la troisième phrase, qu’il réalise de la manière suivante :
Il éprouve également de la difficulté lors du découpage de la phrase « la couleur que je préfère est le bleu », qu’il découpe ainsi :
La | couleur | que | jepréfèr | eest | le | bleu
On remarque cependant qu’il a su découper correctement le début et la fin de la phrase en mots. Ensuite, lors de la séparation de la phrase « Rico et Louis jouent parfois ensemble à la récréation », Louis avait tout d’abord séparé le mot « récréation » de la manière suivante : récré | ation. Il a effacé le trait après une intervention de ma part. Sa phrase est donc ainsi séparée :
On peut constater qu’il sépare correctement le début et la fin, tout comme la phrase précédente. Finalement, Louis découpe de manière presque entièrement correcte la dernière phrase.
Après une intervention de ma part, dans laquelle j’indique à Louis qu’il a uniquement oublié de séparer le déterminant d’un nom (ici en l’occurrence « le » et « ballon »), Louis ajoute le trait manquant. Une seule erreur figure dans cette phrase, pour la séparation des mots « petit » et « frère ». Résultats de Deby : elle ne sépare pas correctement les mots de la première phrase :
Elle modifie le trait mal placé après une intervention de ma part. Ensuite, Deby découpe la deuxième phrase de manière entièrement correcte. On remarque qu’elle éprouve une certaine difficulté dans la séparation de la troisième phrase, qu’elle découpe ainsi :
Concernant la phrase suivante, elle en sépare les mots avec aisance et place les traits de manière entièrement correcte. Ensuite, on peut constater que la phrase « Rico et Louis jouent parfois ensemble à la récréation » lui pose problème. En effet, elle la sépare ainsi :
On peut remarquer qu’elle sépare correctement le début de la phrase et qu’elle identifie le mot « récréation ». On peut aussi constater que, d’un point de vue phonétique, elle identifie les mots « jouent » et « parfois ». Finalement, Deby n’éprouve aucune difficulté à découper la dernière phrase et en sépare les mots correctement.
Résultats de Frida : elle sépare de manière correcte la première phrase, car elle demande si le mot « joue » se termine par un « e ». Frida sépare presque tous les mots de la deuxième phrase correctement. Elle place premièrement le trait pour séparer les mots « pomme » et « verte » au mauvais endroit. En effet, elle place le trait ainsi : pom | meverte. Elle corrige après mon intervention. On peut constater qu’elle éprouve plus de difficulté à séparer les mots de la troisième phrase, qu’elle découpe ainsi :
On remarque qu’elle a simplement omis de séparer certains mots, mais n’a aucunement placé de trait au mauvais endroit. Dans la phrase suivante, Frida a découpé la phrase de manière presque entièrement correcte, comme on peut le remarquer ci-dessous :
En effet, on constate qu’elle a ajouté un trait non nécessaire pour séparer le mot « préfère ». Ensuite, Frida a séparé la phrase « Rico et Louis jouent parfois ensemble à la récréation » avec aisance et a placé tous les traits correctement. Finalement, Frida a omis un trait dans la dernière phrase, qu’elle a séparée de la manière suivante :
On peut voir qu’elle n’a pas séparé les mots « a » et « lancé », mais que tous les autres mots sont correctement séparés.
Résultats de Rico : il a découpé les deux premières phrases avec aisance et a placé les traits correctement. Concernant la troisième phrase, il a uniquement omis un trait afin de scinder les mots « à » et « séparer ». Sa phrase est donc ainsi découpée :
Il a ensuite découpé les mots de la phrase « la couleur que je préfère est le bleu » de manière entièrement correcte. Ensuite, dans la phrase « Rico et Louis jouent parfois ensemble à la récréation », on remarque deux erreurs :
Ainsi, on constate qu’il a ajouté un trait non nécessaire dans le mot « jouent » et qu’il a omis une séparation entre « à » et « là ». Finalement, Rico a séparé les mots de la dernière phrase correctement. Il n’avait cependant pas séparé les mots « a » et « lancé » au premier abord. En effet, après une intervention de ma part, lui demandant si « a lancé » représentait un seul mot pour lui, il a corrigé et ajouté un trait.
Résultats de Deby : elle lit la première phrase du texte avec quelques difficultés à déchiffrer les mots « partaient » et « promener ». Elle met environ trente secondes pour lire ce premier passage. Elle lit ensuite le passage du texte dans lequel elle éprouve une certaine difficulté à déchiffrer le mot « grise », qu’elle prononce [gʁɔz]. Elle peine également à lire les mots« magnifique » et « invité ». Elle lit ce passage en une minute. Ensuite, Deby répond correctement quand je lui demande ce qu’offre le chat à la souris. Cependant, quand je lui pose la question « à quelle occasion », elle répond « parce qu’il voulait avoir le fromage ».
Lorsque je reformule « pourquoi il lui offre le fromage ? », c’est Rico qui répond correctement à la question. Suite à cela, lorsque je lui demande le nombre de bougies que souffle la souris, Deby répond spontanément « huit ». Lorsque je lui demande pourquoi, elle est capable de faire le lien avec le texte et de répondre « parce qu’elle a huit ans ». Résultats de Frida : elle lit sans problème le titre du texte. Ensuite, elle lit la deuxième réplique de la souris en une minute quinze environ. Elle a de la difficulté à déchiffrer le mot « huit ». Elle lit « avais » le mot « vais, et lit « et » le mot « te ». Suite à cela, elle répond correctement à la question « combien y a-t-il de personnages dans l’histoire », en citant le chat roux, la souris grise, ainsi que la famille de la souris grise. Frida répond également correctement à la question « qui a invité la famille de la souris », et ajoute « il voulait lui faire plaisir».
Résultats de Rico : il lit avec difficulté la première réplique de la souris. Il prononce [viʁamɑ̃] le mot « vraiment ». Il peine à lire le mot « moi » et répète à plusieurs reprises « mo ». Lorsque je lui demande ce que font « o » et « i », il prononce le mot correctement. Il a de la difficulté à lire le mot « rêverais » et il prononce [mɔʁko] le mot « morceau ». Il met environ trois minutes pour lire ce passage du texte. Suite à cela, lorsqu’il lit la dernière phrase du texte, il prononce [mɛʁ] le mot « mirent ». Il lit cette phrase en trente secondes. Suite à cela, Rico répond correctement à la question « où se trouvent le chat et la souris lorsque le chat annonce qu’il a pu avoir des croquettes ». La question était initialement posée à Louis, mais c’est suite à un échange proposant de relire le début du texte que Rico a répondu « dans la rue ». Lorsque je lui demande ensuite ce que le chat roux mange habituellement, il répond spontanément « des souris ». On peut alors imaginer qu’il se réfère à ses représentations et à ses connaissances encyclopédiques, car il ne se réfère pas au texte. Cependant, lorsque la question « à quelle occasion le chat offre-t-il du fromage à la souris » émane, Rico est capable de se référer au texte et de répondre correctement.
Huitième intervention – travail sur le sens
Résultats de Louis : il commence à lire la première phrase du texte avec aisance. Il éprouve une certaine difficulté lorsqu’il s’agit de lire « Leo le lion ». En effet, il hésite lors de la lecture du mot « Leo », puis, après l’avoir aidé, il passe directement à la suite de la phrase, sans lire « le lion ». Après mon intervention, il poursuit la lecture de la phrase. Il inverse la place des lettres dans le mot « promenait ». En effet, il prononce [pɔʁmenɛ] au lieu de [pʁɔmenɛ], puis il régule. Il lit ce premier extrait en trente secondes. Louis lit ensuite la cinquième phrase du texte avec aisance, en trente secondes également. Suite à cela, il lit la neuvième phrase. Il prononce [valwa] le mot « valait », puis régule quand je lui dis que la lettre est un « a ». Ensuite, lorsqu’il doit lire la phrase « elle ne souriait et ne rigolait jamais », il transforme les verbes au présent. Il lit donc « elle ne sourit et ne rigole jamais ». Je lui demande donc de réessayer de lire, et d’aller jusqu’à la fin des mots. Ainsi, il prononce [suʁa] le mot « souriait », mais prononce correctement le mot « rigolait ». Il lit ces deux phrases en une minute environ. Suite à cela, pendant le moment des questions sur le texte, Louis associe correctement le nom des personnages à leur identité. Ainsi, il sait que Linette est la girafe, Lola est la panthère, Leo est le lion et Loupi est le loup.
Lorsque je demande aux élèves comment ils font pour se rappeler des personnages, Louis répond qu’il fait comme une photo dans sa tête. Louis répond ensuite correctement à la question « que vont faire Leo et Linette »,lorsque j’indique que la réponse se trouve dans le texte. Puis, Louis répond de manière correcte à la question « quel est le jour de la semaine ? », comme on peut le voir dans l’échange suivant :
Résultats du post-test
Le post-test a été exécuté par les élèves suite à la passation du pré-test ainsi qu’aux huit interventions. L’épreuve de « lecture de consignes » contient un point de moins que l’item initial, suite à la modification du pré-test. Les résultats sont communiqués sous forme de points dans le tableau 4 ci-dessous, qui permettra par la suite de constater l’évolution des élèves, par comparaison avec le pré-test :
Les résultats de Louis (tableau 5), qui est l’élève présentant la marge de progression la plus petite (+26%), montrent une amélioration dans les items « questions sur un texte », « test de closure », « reconstruction de phrases », « accords féminin/masculin et singulier/pluriel » ainsi que « relations phonèmes-graphèmes ». Cependant, on constate une régression dans l’item « lecture de consignes », qui se justifie par le fait que Louis n’a pas respecté la deuxième consigne écrite. En effet, il a biffé les informations fausses alors qu’il devait entourer ce qui était vrai. Si la consigne était telle qu’il a réalisé la tâche, il aurait obtenu deux points de plus, car il a biffé deux des trois informations qui étaient effectivement fausses. Il n’obtient aucun point dans l’item « segmentation en mots », autant lors du pré-test que lors du post-test. On peut imaginer que le nombre de points dans cet item n’a pas évolué car si l’on se réfère aux résultats des interventions, on constate que Louis a éprouvé une certaine difficulté à réaliser cette tâche, aussi bien à l’oral qu’à l’écrit.
Les résultats de Deby (tableau 6) montrent que la marge de progression est la plus élevée (+57%) parmi celles des quatre élèves. Elle améliore ses résultats dans tous les items, sauf l’item « questions sur un texte », pour lequel elle obtient le même nombre de points au posttest qu’au pré-test. Cela peut se justifier par le fait que Deby ne se réfère pas toujours au texte, comme on a pu le constater lors des deux dernières interventions.
Finalement, si l’on observe les résultats de Rico (tableau 8), on constate une progression de +38%. Il s’est amélioré dans tous les items du test, sauf l’item « test de closure », pour lequel il a obtenu le même nombre de points au pré-test ainsi qu’au post-test. Rico a obtenu le même nombre de points que Frida lors du post-test, mais sa marge de progression est plus élevée, ceci dû au fait qu’il avait obtenu un moins bon résultat lors du pré-test.
Ainsi, si l’on regarde le total des points obtenus par les élèves, on constate une marge de progression allant de +26% à +57% entre le pré-test et le post-test. Ces résultats montrent que les élèves ont amélioré certaines de leurs connaissances dans plusieurs composantes de la lecture. Cependant, deux élèves sur quatre ont régressé dans certains items.
Bénéfices des interventions
Suite aux différents éléments mis en place auprès des quatre élèves, nous pouvons effectivement constater des bénéfices, comme l’indiquait la question de recherche « quels peuvent-être les bénéfices d’interventions auprès d’élèves en difficulté dans l’apprentissage de la lecture en 4P (HarmoS) ? » Effectivement, les bénéfices des interventions sont les suivants pour les quatre élèves qui ont participé à la recherche, si l’on s’appuie sur les résultats des élèves lors du post-test : progression dans la démarche de réponses à des questions sur un texte progression dans la démarche de reconstruction de phrases.
Chacun des quatre élèves a amélioré ses résultats dans les items cités ci-dessus. La progression de chacun d’entre eux dans l’item « questions sur un texte » peut s’expliquer par le guidage des deux dernières interventions, qui avaient pour but d’entraîner la lecture à voix haute, les questions sur un texte, ainsi que les stratégies de compréhension. La progression des élèves dans l’item « reconstruction de phrase » peut se justifier par la prise en compte de toutes les informations contenues dans la tâche (majuscule, point, sens de la phrase). On peut également constater une évolution globale pour les quatre élèves, qui ont tous amélioré leur score total. La tâche de segmentation de la phrase en mots est celle présentant la progression la plus nette pour Deby, Frida et Rico. Les deux interventions ont apparemment permis à ces élèves de comprendre le but réel de la tâche, et ainsi d’intégrer le concept de « mot » et celui de « phrase ». Finalement, les résultats élevés des élèves en « relations phonèmesgraphèmes » peuvent s’expliquer par l’entraînement de la conscience phonologique proposé dans les premières interventions, lors de la réalisation de tâches autour de la syllabe et du phonème. Ainsi, chacune des séances a permis aux élèves d’intégrer certains concepts et de les mettre en oeuvre, ce qui signifie que ces interventions ont effectivement été bénéfiques pour les élèves.
Discussion
Cette partie a pour but d’exposer différentes hypothèses liées aux résultats de la recherche présentés dans le point précédent. Tout d’abord, il est essentiel de parler des éléments ayant permis aux élèves de progresser. Afin de réaliser cela, je me base sur plusieurs moments liés aux interventions. De manière générale, les éléments ayant permis aux élèves de progresser tout au long des interventions sont les différentes relances, les validations explicites ainsi que les questions métacognitives. Ces manières d’interagir avec les élèves leur permettent de s’approprier les diverses composantes de l’apprentissage. Comme l’expliquent Bodrova et Leong (2012, p.24), « le langage facilite les expériences partagées nécessaires à l’élaboration des processus mentaux ». Ainsi, les interactions entre enseignant-e et élèves sont essentielles afin que ces derniers puissent développer leurs apprentissages. Grâce aux différentes interventions et au guidage proposé aux élèves, ceux-ci peuvent avancer et être en confiance dans ce qu’ils apprennent, comme le développent Bodrova et Leong (2012, p.259) : « l’enseignante agit comme guide en posant des questions, en orientant les enfants vers la bonne réponse, tout en prenant soin de na pas donner cette réponse ».
Finalement, on peut interpréter la progression des quatre élèves de la manière suivante : les différentes interventions leur ont permis d’entraîner la lecture à plusieurs niveaux, et ainsi de mieux se l’approprier. Grâce aux tâches progressives, les élèves ont eu l’occasion d’entraîner leur conscience phonologique, d’intégrer le concept de mot ainsi que celui de phrase, d’entraîner la lecture à haute voix et à tour de rôle, mais aussi de s’exprimer sur leur manière de comprendre un texte, et donc d’être confrontés à d’autres stratégies.
Ensuite, il est important d’aborder les éléments ayant posé problème dans le pré-test, les interventions et le post-test. Pour ce faire, il est essentiel de porter un regard critique sur les items du pré-test ainsi que ceux du post-test, et d’analyser les interventions. L’élément principal ayant posé problème dans le pré-test est, selon moi, l’item 5 « reconstruction de phrases ». En effet, aucun élève n’a obtenu de points pour cette tâche du pré-test. Lorsque j’ai donné les consignes pour cette tâche, je ne me suis pas tenue à ce qui est prescrit dans le guide de passation (Ouzoulias, 2004c, p.38) : « « Pour l’exercice n°5, regardez-moi… » L’enseignant écrit alors au tableau en script /Le petitchatboitdulait/ et dit : « J’ai écrit « le petit chat boit du lait ». Que remarquez-vous ? » Un enfant est invité à séparer les mots au tableau (avec un trait vertical). L’enseignant lit la première phrase de l’exercice entièrement et signale que le mot /pour/ a déjà été séparé. Même démarche pour la phrase suivante : elle est lue entièrement et l’enseignant dit que le mot /et/ a déjà été séparé ». N’ayant pas mis en oeuvre cette consigne lorsque les élèves ont réalisé cet item, cela a certainement posé problème et les a empêchés d’accomplir la tâche de manière correcte.
L’élément principal ayant posé problème dans les interventions est le fait qu’elles aient été créées avant la correction du pré-test. En effet, il aurait été judicieux de créer les interventions en fonction des résultats du pré-test, plutôt que de les définir avant de connaître les éléments ayant posé le plus problème aux élèves.
Conclusion
La lecture est un concept complexe, et c’est un apprentissage fondamental et essentiel que les élèves découvrent durant les premières années de leur scolarité. Afin que les élèves se l’approprient, il est nécessaire d’y consacrer du temps, de l’investissement, et de l’énergie. Le but final de l’acte de lire, qui est la compréhension, « se traduit par la formation d’un réseau représentationnel qui comporte des informations issues des différentes parties d’une histoire, les connaissances antérieures pertinentes à leur compréhension, et les relations établies entre ces différentes sources d’informations » (Blanc, 2009, p.9). Pour que les élèves comprennent ce qu’ils lisent, il est important de mettre en évidence ce « réseau représentationnel », et de les confronter à leurs propres stratégies. À travers cette recherche, différentes tâches de lecture ont été proposées à quatre élèves en difficulté, dont la mise en évidence des stratégies de compréhension. Grâce à ces moments, ils ont pu se distancer de leurs difficultés, surmonter certains obstacles, et améliorer leur capacité à lire. Cette recherche a ainsi permis de mettre en évidence l’importance des bases dans l’apprentissage de la lecture. En effet, il est essentiel que les élèves aient toutes les clés en main afin de pouvoir lire de manière fluide et afin qu’ils comprennent ce qu’ils lisent.
Rappelons que la recherche menée est en partie une étude de cas, ce qui signifie qu’elle « peut difficilement être reproduite par un autre chercheur […]. En effet, il y a peu de chances d’avoir suffisamment d’études d’autres cas exactement comparables pour rendre les conclusions applicables à toute une population » (Gagnon, 2012, p.3). Effectivement, l’une des particularités de ce type d’étude est de produire des résultats difficilement généralisables.
Ainsi, les résultats obtenus sont propres aux élèves qui ont participé à la recherche. En mettant en place ces mêmes interventions avec d’autres élèves, les résultats peuvent varier.
De manière générale, on peut constater que les différentes interventions ont permis aux élèves de s’approprier certains concepts et de dépasser leurs difficultés. Chaque élève ayant participé à la recherche a amélioré son résultat total lors du post-test, et a donc ainsi globalement progressé. Les bénéfices des huit interventions menées auprès des quatre élèves en difficulté sont multiples. Premièrement, le travail en petit groupe a permis d’instaurer une certaine confiance, qui se traduit dans les résultats des élèves. Ensuite, l’entraînement de la conscience phonologique a permis aux élèves d’être plus à l’aise dans les tâches de correspondance phonèmes-graphèmes et les tâches de lecture. Les moments de discussion autour des stratégies de compréhension ainsi que le fait de poser des questions sur un texte ont permis aux quatre élèves de s’améliorer dans la compréhension en lecture. Ils peuvent ainsi dégager le sens d’un texte avec pleine conscience.
N’oublions pas de préciser que des variables externes aux interventions ont également participé à l’évolution des quatre élèves. En effet, les différentes tâches liées à la lecture réalisées au sein de la classe, les devoirs, le soutien des parents, ou encore le soutien logopédique pour certains élèves. Tous ces éléments sont non négligeables, et ont aussi permis aux élèves d’aller plus loin dans leur apprentissage de la lecture.
Afin d’améliorer cette recherche, il serait judicieux de créer des interventions « sur mesure » pour les élèves en difficulté avec lesquels on a pour but de travailler. En effet, j’ai créé les huit interventions de la recherche avant même d’avoir pu récolter les résultats des élèves lors du pré-test. Il serait donc plus approprié d’en faire le choix après avoir analysé les résultats des élèves et après avoir constaté où se situaient leurs difficultés. Afin d’aller plus loin, je me pose également la question du guidage métacognitif. En effet, même si j’ai pu en faire usage à plusieurs reprises tout au long des interventions, il serait réellement intéressant et enrichissant pour les élèves d’en faire une pratique répétée. Cela permettrait aux élèves de s’approprier entièrement le concept et d’en comprendre véritablement le sens.
Finalement, comme le cite Delory (2003, p.17), « réaliser une recherche constitue un moment privilégié, particulièrement riche et fructueux, sorte d’aboutissement de nombreux acquis théoriques et pratiques, durant lequel le chercheur ou le praticien-chercheur va se mettre à distance de la réalité pour y porter un regard d’observation critique et tenter de l’analyser ». À titre personnel, ce travail de recherche ainsi que sa rédaction m’ont fait prendre conscience de l’importance de l’apprentissage de la lecture durant les premières années de la scolarité. J’ai pu approfondir ma connaissance de ce concept complexe qu’est celui de la lecture, et j’ai ainsi pu créer des bases fortes afin de pouvoir l’enseigner avec une pleine conscience. Cela m’a permis de réaliser à quel point cet apprentissage si important peut être intégré et acquis chez certains élèves, et que cela peut prendre plus de temps chez d’autres. Tout le processus de recherche m’a permis de mettre en oeuvre différents éléments que j’ai pu apprendre durant mes trois années de formation, et m’a également permis de vivre une expérience unique et particulière. La détermination de la problématique, le choix du pré-test, sa mise en place, le choix des élèves avec qui travailler, la création des huit interventions, la mise en place de ces dernières, la création et la passation du post-test, tant de moments différents qui m’ont apporté beaucoup et m’ont permis d’approfondir mes connaissances.
Les moments passés à travailler avec ces quatre élèves a été réellement enrichissant et m’a véritablement fait prendre conscience de la complexité de l’apprentissage de la lecture et des difficultés que les élèves peuvent éprouver face à ce dernier. Dans ma pratique future, je porterai un regard particulier sur la lecture et ferai de mon mieux pour apporter aux élèves les clés nécessaires à la découverte de cet apprentissage qui demande un investissement spécifique ainsi qu’une attention permanente.
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Table des matières
REMERCIEMENTS
1. INTRODUCTION
2. PROBLEMATIQUE
2.1 CONSTAT
2.2 OBJECTIF DE LA RECHERCHE
2.3 QUESTION DE RECHERCHE
3. CADRE THEORIQUE
3.1 DEFINITION DE LA LECTURE
3.1.1 Les dimensions de la lecture
3.1.2 L’enseignement-apprentissage de la lecture
3.2 LES MOYENS D’ENSEIGNEMENT
3.3 LES OBJECTIFS DU PLAN D’ETUDES ROMAND (PER) EN 4P
4. METHODOLOGIE
4.1 TYPE D’ETUDE
4.2 ECHANTILLON
4.3 MESURES
4.4 DEROULEMENT DE LA RECHERCHE
4.4.1 Phase de pré-test
4.4.2 Phase d’interventions
4.4.3 Phase de post-test
4.5 DEMARCHE D’ANALYSE
5. RESULTATS
5.1 RESULTATS DU PRE-TEST
5.2 RESULTATS DES INTERVENTIONS
5.3 RESULTATS DU POST-TEST
5.4 COMPARAISON DES RESULTATS ENTRE LE PRE-TEST ET LE POST-TEST
5.5 BENEFICES DES INTERVENTIONS
6. DISCUSSION
7. CONCLUSION
REFERENCES
ANNEXES
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