Ce travail de thèse et cette étude sont nés d’une l’implication dans le protocole départemental de prévention et de lutte contre les violences au sein du couple, les violences intrafamiliales, et les violences faites aux femmes du département de la Manche, dirigé par Mme JAMES Gaëlle, Déléguée départementale aux droits des femmes et à l’Egalité Femmes-Hommes de la préfecture de la Manche.
Ce protocole est une suite directe du 5ème plan de mobilisation et de lutte contre toutes les violences faites aux femmes, lancé par madame la Ministre en charge des droits des femmes le 25 novembre 2016, journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes. Les grandes lignes de ce plan concernaient le renforcement des actions de prise en charge des violences notamment dans les territoires les plus fragiles et les moins pourvus. Une sensibilisation accrue du public était également programmée à travers le développement de la connaissance des diverses manifestations que peut revêtir la violence. Il s’agit alors de faire prendre conscience que même si les situations ne sont pas directement perceptibles, la violence est réellement présente dans le quotidien de chacun. La connaissance des différentes possibilités d’orientation pour les victimes de violence, constatée ou subie, est un autre point abordé par le 5ème plan.
Concernant le protocole manchois, les grands axes de travail regroupent donc différentes actions :
– Développer le travail en réseau afin de faire connaître les différents acteurs de la prise en charge des violences sur le territoire et améliorer la connaissance du phénomène des violences dans le département par un diagnostic qualitatif et quantitatif partagé.
– Développer la prévention des violences le plus précocement possible.
– Développer la sensibilisation et la communication auprès du grand public et former les professionnels.
– Améliorer le repérage, l’accompagnement dans le parcours judiciaire, sanitaire et social des victimes, des témoins et des auteurs de violences et prévenir la récidive.
Définitions
Les violences faites aux femmes, ont été définies par l’Organisation Mondiale de la Santé comme étant « tous actes de violence dirigés contre le sexe féminin, et causant ou pouvant causer aux femmes un préjudice ou des souffrances physiques, sexuelles ou psychologiques, y compris la menace de tels actes, la contrainte ou la privation arbitraire de liberté, que ce soit dans la vie publique ou dans la vie privée » .
On retrouve donc logiquement cette notion de violences faites aux femmes dans la définition des violences conjugales, même si ces dernières peuvent également concerner le partenaire masculin. Dans les violences survenant au sein d’un couple, dans le cadre privé, ces dernières sont la résultante d’« un processus au cours duquel un partenaire utilise la force ou la contrainte pour perpétuer et/ou promouvoir des relations hiérarchisées et de domination. Ces comportements agressifs et violents ont lieu dans le cadre d’une relation de couple (entre deux époux, conjoints ou expartenaires) et sont destructeurs quel que soit leur forme et leur mode » .
Les différents types de violences
La lecture des différentes définitions du terme « violence » nous amène ici à expliciter les différentes formes que peut revêtir cette dernière : on indique une pluralité en parlant de violences, au pluriel.
La violence physique
La violence physique constitue le fait de porter atteinte à l’intégrité physique d’une personne. Cela implique un contact engendrant des blessures ou d’autres souffrances ou traumatismes physiques. On les qualifie alors de violences corporelles.
La violence psychologique
Elle est caractérisée par un ensemble d’attitudes et de comportementsrépétitifs dans le temps visant à diminuer une personne, à la maintenir dans une position d’infériorité. Il peut s’agir d’actions telles que des violences verbales, des insultes, des faits de harcèlement… ou encore de manques, de négligences. On dénombre de nombreuses formes de violences psychologiques telles que le dénigrement, le rejet, l’intimidation, l’isolement, l’exploitation… Tous ces moyens sont mis en place dans un seul but, contrôler la personne victime, en parvenant à lui faire croire qu’elle est responsable de la situation ayant engendré le climat de violence, en détruisant son identité et son estime de soi. On qualifie cette violence psychologique de violence morale, mentale ou émotionnelle. Ces termes touchant à l’affect de la personne font preuve que ces faits de violences restent encore difficiles à détecter.
La violence sexuelle
L’OMS définit la violence sexuelle comme « Tout acte sexuel, tentative pour obtenir un acte sexuel, commentaire ou avances de nature sexuelle, ou actes visant à un trafic ou autrement dirigés contre la sexualité d’une personne en utilisant la coercition, commis par une personne indépendamment de sa relation avec la victime, dans tout contexte, y compris, mais sans s’y limiter, le foyer et le travail ». Il est à préciser que l’acte de coercition peut inclure le recours à la force à divers degrés ainsi que l’intimidation psychologique, le chantage ou les menaces de tout type. A la lecture de cette définition, il est avéré que des faits de violences sexuelles se retrouvent également au sein du couple.
La violence verbale
La violence verbale se traduit par l’émission de paroles à visée dévalorisante, dans le but de contrôler, d’entretenir un climat de tension en maintenant l’autre dans un état de peur et d’insécurité. Elle est partie intégrante de la violence psychologique.
La violence sociale et économique
Ces deux types de violences visent à maintenir une personne isolée, afin de pouvoir établir un contrôle sur la victime. L’isolement social d’une part et la perte du réseau familial et amical de la femme victime d’autre part, entrainent une diminution, voire une disparition de tout du support affectif et psychologique pour cette dernière, renforçant ainsi le pouvoir de l’agresseur. Plus méconnue, la violence économique a une visée d’accroissement de la vulnérabilité de la victime en contrôlant les ressources financières et ses sources (rémunérations) afin de la placer dans un état de dépendance, la privant de son autonomie.
L’installation et le fonctionnement des violences au sein du couple : la clinique de la violence conjugale
Les violences conjugales sont au cœur des réflexions sociales, médicales, psychologiques et sociétales. Comment la vie d’un couple, lié en première intention par des sentiments amoureux, peutelle sombrer dans un climat de peur, de violences, d’horreur ?
Lenore Walker, docteur en psychologie, s’intéresse aux violences et plus particulièrement aux violences conjugales. Elle publie en 1979 un livre « The Battered Women » dans lequel elle essaie de comprendre les mécanismes des violences conjugales. Elle les décrit comme suivant un cycle de phases distinctes, qui s’inscrit dans le temps et à travers lequel, à chaque retour à zéro, la fréquence et l’intensité des violences augmentent.
Les violences s’installent au sein d’un couple où la relation est inégalitaire. Le conjoint, dans la plupart des cas, est celui qui décide de tout. Il va, dans une première phase dite d’accumulation de la tension, instaurer un climat que l’on qualifie d’emprise. Il s’agit alors pour lui de maintenir sa partenaire, sa victime, à l’intérieur de cette emprise psychologique. L’objectif est alors petit à petit de culpabiliser la victime, qu’elle se sente isolée, seule, responsable de ce qui lui arrive. Les moyens employés par l’agresseur sont alors multiples afin d’accentuer la tension qui plane sur la victime et dans le couple : des dénigrements (disqualifications), des insultes, des reproches sur le fait que c’est de sa faute s’il est énervé… Malgré les tentatives de la victime de contrôler la tension en minimisant les faits, en tentant de ne pas faire « le faux pas » à l’origine de la crise, ou encore en endossant la responsabilité de la situation, accréditant ainsi les fausses accusations dont la blâme son agresseur, arrive inévitablement la deuxième phase du cycle.
C’est la crise ou la phase d’agression physique au cours de laquelle l’agresseur prend alors le contrôle de la situation par la force, par l’acte de violence pur. Il a pour but de terroriser la victime afin d’asseoir sa domination. Cette phase est la plus brève et le manque de contrôle est total. C’est le moment du cycle qui est le plus connu de tous, que l’on qualifie à tort de violence conjugale car ce n’est pas cette seule phase qui entre en jeu dans le processus de désadaptation et d’isolement d’une victime.
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Table des matières
Introduction
1) Définitions
2) Les différents types de violences
2.1) La violence physique
2.2) La violence psychologique
2.3) La violence sexuelle
2.4) La violence verbale
2.5) La violence sociale et économique
3) L’installation et le fonctionnement des violences au sein du couple : la clinique de la violence conjugale
4) Conséquence des violences sur la santé des victimes
4.1) Conséquences physiques
4.2) Conséquences psychologiques
4.3) Conséquences sur la santé sexuelle et gynécologique
4.4) Autres conséquences
5) Epidémiologie et enquêtes internationales
6) Epidémiologie et enquêtes françaises
7) Contexte historique du droit des femmes et évolution législative
8) Facteurs de risque de violences conjugales
8.1) Caractéristiques individuelles
8.2) L’histoire de vie
8.3) Les dynamiques relationnelles au sein du couple
8.4) Les caractéristiques socio-économiques
9) Le parcours de la femme victime de violences
9.1) Quelles démarches
A) L’urgence médicale
B) La procédure judiciaire
9.2) Les différents acteurs du parcours
A) Les professionnels de santé
B) Les autorités judiciaires
C) Les associations d’aides aux victimes
Matériel et méthodes
1) Recherches bibliographiques et sources
2) Type et lieux de l’étude
3) Population étudiée
3.1) Questionnaire patient
3.2) Questionnaire médecin
4) Elaboration des questionnaires
4.1) Questionnaire patient
4.2) Questionnaire médecin
Résultats de l’étude
1) Questionnaire patient
2) Questionnaire médecin
Discussion
Conclusion
Bibliographie
Annexes