Les différentes symbioses fixatrices d’azote chez les plantes
Au cours de l’évolution, certaines plantes ont mis en place des associations symbiotiques avec des micro-organismes de façon à pallier la faible disponibilité de l’azote dans les sols. Il existe plusieurs types de symbioses fixatrices d’azote. Cependant les principales symbioses fixatrices d’azote sont les symbioses nodulaires. Au cours de cette interaction un nouvel organe, le nodule, est formé sur les racines ou plus rarement sur les tiges. C’est au sein de cet organe protecteur que l’azote atmosphérique est fixé par les bactéries (Kneip et al., 2007). D’autres symbioses fixatrices d’azotes, non rhizobiennes, ont été caractérisées chez les plantes. Ces autres symbiontes fixateurs d’azote sont divers : bactéries telluriques, épiphytes ou endophytes, Cyanobactéries ou encore Actinomycètes.
La symbiose actinorhizienne
Les Actinomycètes, maintenant appelés Actinobactéries, sont des Procaryotes telluriques Gram‐positive. Les Actinobactéries du genre Frankia, sont des organismes filamenteux et diazotrophes, capable de réduire le diazote atmosphérique en condition libre ou symbiotique. En interaction avec une plante compatible, Frankia est capable d’induire de novo la différenciation d’un organe racinaire propice à la symbiose, la nodosité. Les Frankia sont ainsi capables de noduler plus de 200 espèces, pour la plupart des plantes ligneuses, reparties en 8 familles regroupées sous le terme de plantes actinorhiziennes: les Betulaceae les Casuarinaceae, les Coriaroaceae, les Datiscaceae, Elaegaceae, Myricaceae, Rhamnaceae et Rosaceae (Pawlowski et Demchenko, 2012). A l’instar des Cyanobactéries, chez Frankia la fixation d’azote est assurée par des cellules spécialisées de 2 à 6 μm appelées diazovésicules.
Les symbioses avec cyanobactéries
Les cyanobactéries constituent un des groupes les plus vastes et variés de bactéries filamenteuses Gram-négative, capables de photosynthèse, et souvent de fixation azotée. Parmi ces bactéries, les genres Nostoc et Anabaena peuvent s’associer aux végétaux et présentent un très large spectre d’hôtes : algues, bryophytes, ptéridophytes, gymnospermes et angiospermes (Franche et al., 2009). Dans des conditions de carence azotée, elles peuvent se différencier en cellules spécialisées appelées hétérocystes. Cette différentiation est associée à une réduction de l’activité photosynthétique, et à la création d’un environnement anaérobique, nécessaire au bon fonctionnement de leur nitrogénase. Le type d’associations symbiotiques avec les plantes hôtes peut être extracellulaire ou intracellulaire, mais ces bactéries n’induisent pas la différenciation d’organes spécifiques.
Les légumineuses
Généralités sur les légumineuses
Les Légumineuses représentent une des familles les plus importantes et les plus variées des Angiospermes avec 750 genres et environ 20 000 espèces réparties sur une aire géographique diversifiée. (Cronk et al., 2006). Seul un nombre réduit des espèces sont utilisés dans l’alimentation humaine et animale, certaines sont des espèces médicinales et quelquesuns sont toxiques (Velazquez et al., 2010). Les légumineuses viennent en second lieu après les cultures céréalières (Ejigui et al., 2007; Paul et al., 2008). En 2004, plus de 300 millions de tonnes de légumineuses à graines ont été produites sur les 190 millions d’hectares (environ 13 ℅ du total des terres cultivées dans le monde et 27℅ de la production mondiale des cultures). Les légumineuses contribuent pour 33℅ au besoin azoté de l’alimentation humaine avec par ordre d’importance : le haricot (Phaseolus vulgaris), le pois (Pisum sativum), le pois chiche (Cicer arietinum), la fève (Vicia faba), le pois d’Angole (Cajanus cajan), le pois a vache (Vigna unguiculata) et la lentille (Lens culinaris) (Graham et Vance, 2003). Notant que 35% des huiles végétales traitées proviennent de Légumineuses principalement le soja et d’arachide. Les graines de légumineuses contiennent au moins 20 ℅ a 40 ℅ des protéines, elles entrent donc dans l’alimentation humaine et comme forrage pour l’alimentation animale .
La phylogénie des Légumineuses
Les Légumineuses sont des plantes Eudicotylédones appartenant à l’ordre des Fabales, ordre appartenant à la famille des Fabacées (Zhu et al., 2005). Les Fabacées sont divisées en trois sous‐familles (Figure 02) : Caesalpinoideae, les Mimosoideae et les Papilionoideae ou Faboideae (Doyle et Luckow, 2003). Les Faboideae regroupent la plus grande diversité avec plus de 12 000 espèces de Légumineuses tropicales ou tempérées, dont celles présentant un intérêt agronomique majeur comme Glycine max (Soja), Phaseolus vulgaris (Haricot), Arachis hypogaea (Arachide) ou Medicago sativa (luzerne) (Zhu et al., 2005). Le caractère monophylétique des Papilionoideae a clairement été démontré, et les analyses phylogénétiques basées sur les variations de la séquence de la maturase chloroplastique K (matK) subdivisent les Papilionoideae en 7 clades (Wojciechowski et al., 2004) dont le clade des IRLC (Inverted Repeat Loss Clades) qui regroupe la majorité des Légumineuses d’intérêt agronomique comme Pisum (ex : Pois), Lens (ex : Lentilles), Trifolium (ex : Trèfle) et Medicago (ex : Luzerne) (Cronk et al.,2006). Les Mimosoideae incluent 77 genres et environ 3 000 espèces principalement en région tropicale et subtropicale comme les genres Albizia et Acacia, utilisées comme bois de coupe (Young et al., 2011). Les Caesalpinoideae composés de 162 genres et près de 3000 espèces sont principalement composés de Légumineuses tropicales comme le caroubier (Ceratonia siliqua) ou le tamarinier (Tamarindus indica) et sont principalement utilisés comme plantes alimentaires, ornementales ou comme bois de coupe (Young, 2003). Notons que toutes les Légumineuses n’établissent pas une symbiose rhizobienne. En effet, 90% des Papilionoideae et des Mimosoideae établissent une symbiose rhizobienne (Doyle, 2011) contre seulement 25% des Caesalpinoideae (Hirsch, 1992).
Les Légumineuses fourragères
Le genre Medicago
Le genre Medicago regroupent 83 espèces presentes majoritairement autour du bassin méditerranéen (Béna et al., 2005) .
La distribution géographique du genre Medicago
Le genre Medicago fait partie de la famille des Papilionacées. Comme beaucoup des espèces de cette famille, les espèces de Medicago fixent l’azote atmosphérique grâce à la symbiose. Il est reconnu que les aires d’origine de toutes les espèces du genre Medicago sont « le croissant fertile », recouvrant les pays ou régions actuelles de Turquie, Iran, Irak, sud du Caucase et le pourtour méditerranéen. Ces espèces ont ensuite conquis l’ensemble de la zone méditerranéenne et les steppes avoisinantes. Au cours du XIXème siècle, elles ont ensuite envahi d’autres parties du monde, en particulier les continents américain et australien à l’occasion des différents courants de colonisation humaine (Prosperi, 1995). La distributiondes espèces du genre Medicago diffère selon l’espèce et selon les parties et les étages bioclimatiques .
Les espèces de Medicago annuelles
Le genre Medicago présente des espèces annuelles diploïdes (2n=16) et pérennes tétraploïdes (2n=4x=32), une seule espèce arbustive (M. arborea) a été recensée. Les formes annuelles sont réputées comme étant autogames, les tétraploïdes sont préférentiellement allogames. Le pourtour Méditerranéen est l’aire d’expansion naturelle des Medicago annuelles. Dans ce continuum écogéographique, les espèces annuelles se retrouvent dans tous les étages bioclimatiques: de l’humide au saharien. Les unes sont à large spectre de répartition les autres ont une distribution spatiale plus délimitée. M. truncatula et M. polymorpha, présentes dans tous les étages bioclirnatiques, sont considérées comme des formes ubiquistes, un ensemble d’espèces formé par M. ciliaris, M. intertexta, M. orbiculnris et M. murex, s’étend de l’étage humide au semi-aride (Nègre, 1959; Heyn, 1963; Lesins et Lesins, 1979; Small et Jomph, 1989). Tandis que M. laciniata et M. minima sont présentes du semi aride au saharien. Les espèces annuelles ou « Medics » produisent une grande quantité de gousses indéhiscentes contenant des graines dures. Les espèces annuelles améliorent les qualités physique et biologique des sols (réduction des pertes en azote par lessivage, apport de matière organique, diminution de la fréquence de certains parasites) et interviennent dans la dégradation des pesticides, enfin en raison de leur cycle végétatif court elles n’entrent pas en compétition avec la strate arborée pour l’eau et l’azote.
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Table des matières
Introduction
Chapitre I REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
I. Généralités
I.1 Le cycle de l’azote
I.2 la fixation biologique de l’azote
I. 3 Les différentes symbioses fixatrices d’azote chez les plantes
I. 3.1 La symbiose actinorhizienne
I. 3.2 Les symbioses avec cyanobactéries
II. Les légumineuses
II.1 Généralités sur les légumineuses
II.2 La phylogénie des Légumineuses
II .3 Les Légumineuses fourragères
II .3.1 Le genre Medicago
II .3 .1.1 La distribution géographique du genre Medicago
II .3 .1.2 Les espèces de Medicago annuelles
II.3 1.2.1 La légumineuse Medicago ciliaris (L.) All.
II.3.1.2.1.1 Généralités
II.3.1.2.1.2 La position systématique
II.3 .1.3 Les espèces Medicago pérennes
II.3 .1.4 Les espèces Medicago arbustives
III. Les rhiziobiacées
III.1 Les caractéres des rhizobia
III.1.1 Caractérisation symbiotique
III.1.2 Caractérisation phénotypique
III.2 La classification actuelle des rhizobia
III.2.1 La sous-classe Alpha Proteobacteria
III.2.1.1 La branche Rhizobium /Ensifer /Shinella /Agrobacterium
III.2.1.2 La branche Mesorhizobium
III.2.1.3 La branche Azorhizobium
III.2.1.4 LA branche Bradyrhizobium
III.2.1.5 La branche Methylobacterium
III.2.1.6 La branche Burkholderia
III.2.2 La sous-classe Beta Proteobacteria
III.2.2.1 D’autres symbionts fixateur d’azote
III.3 La mise en place de la symbiose fixatrice d’azote
IV. L’association symbiotique entre les genres Medicago et leurs microsymbiotes
V. Les bases moléculaires de la symbiose
V.1. Les flavonoïdes
V.2. Les facteurs de nodulation, ou facteurs Nod
VI. La fixation azotée via le complexe nitrogénase
Chapitre II MATERIELS ET METHODES
I. Constitution d’une collection de rhizobia nodulant Medicago ciliaris L.
I .1 Site d’échantillonnage des plantes de Medicago ciliaris L
I. 2 Collecte des plantes de Medicago ciliaris L.
I.3 Conservation des nodules
I.4 Constitution d’une collection de rhizobia
I.4.1 Isolement direct des souches
I.4.2 Isolement des souches après le piégeage
I.4.3 Milieu d’isolement
I.4.4 Préparation du broyat nodulaire
I.4.5 Ensemencement et incubation
I.4.6 Caractérisation morphologique des colonies
I.4.7 Vérification de la pureté des souches
I.4.8 Stockage des isolats
II. Caractérisation symbiotique des isolats
II.1 Test de nodulation in vitro
II.1.1 Germination aseptique des graines
II.1.2 Conditions de culture des plantules de Medicago ciliaris L.
II.1.3 Culture et inoculation des plantules de Medicago ciliaris L.
II.2 Test de nodulation en pot
II.2.1 Préparation des pots et du substrat
II.2.2 Récolte des nodules
II.2.2.1Culture en milieu liquide en tube
II.2.2.2 Culture en pot
II.2.3 Caractéristiques symbiotiques : Infectivité et Efficience
III. Caractérisation préliminaire des isolats
III.1 Croissance sur milieu Tryptone agar additionné de rouge Congo
III.2 Croissance sur milieu YEMA au glutamate FeCl3 et bleu de bromothymol
III.3 Croissance sur milieu Peptone Glucose Agar GPA au pourpre de bromocrésol
III.4 Test distinctif entre Rhizobium et Agrobacterium
IV Caractérisation phénotypique des isolats
IV.1 Tolérance à la salinité
IV.2 Tolérance à la température
IV.3 Tolérance au stress hydrique
IV.4 Tolérance au pH
IV.5 Résistance intrinsèque aux antibiotiques
V. Caractérisation biochimique
V.1 Test Oxydase
V.2 Test de la catalase
V.3 Test sur galerie API 20 NE
V.3.1 Mode opératoire
V.3.1.1 Sélection des colonies
V.3.1.2 Préparation de la galerie
V.3.1.3 Préparation de l’inoculum
V.3.1.4 Inoculation de la galerie
V.3.1.5 Lecture et interprétation
V.4 Test sur galerie API 50 CH
V.4.1 Mode opératoire
V.4.2 Inoculation des galeries
V.4.3 Interprétation
Chapitre III RESULTATS ET DISCUSSION
I. Isolement des rhizobia sur les différents milieux de culture
II. Caractérisation symbiotique des isolats
II.1 Test de nodulation in vitro
II. 2 Test de nodulation en pot
II. 2. 1 Premier essai de nodulation
II. 2. 2 deuxiéme essai de nodulation
II. 2. 3 Troisiéme essai de nodulation
II. 2. 4 Discussion générale des trois essais de nodulation en pot
III. Caractérisation préliminaire des isolats sur les différents milieux de culture
III.1Croissance sur milieu Tryptone agar additionné de rouge Congo
III.2 Croissance sur milieu YEMA au bleu de bromothymol
III. 3 Croissance sur milieu GPA au pourpre de bromocrésol
III. 4 Tests distinctifs entre Rhizobium et Agrobacterium
IV. Caractérisation phénotypique des isolats
IV.1 Tolérance à la salinité et la température
IV.2 Tolérance au stress hydrique
IV.3 Tolérance au pH
IV.4 Résistance intrinsèque aux antibiotiques
V. Caractères biochimiques des isolats
V.1 Test de l’oxydase et catalase
V. 2 Test sur galerie API 20 NE
Conclusion générale
Perspectivres
Bibliographie
ANNEXES
Résumés