Les différentes phases de la construction de l’identité de genre

Plusieurs rapports rédigés par des organisations mondiales ont mis en évidence le rôle essentiel de l’école dans la reproduction des inégalités entre les hommes et les femmes. Selon l’UNESCO, malgré des avancées significatives quant à l’accès des femmes à l’éducation dans le monde, beaucoup d’entre elles sont encore privées d’une éducation de bonne qualité, inégalité venant creuser les écarts existants entre les conditions de vie des hommes et des femmes. L’organisation note par ailleurs que les hommes sont aussi touchés « les disparités entre les genres […] peuvent jouer au détriment des garçons et des hommes, en particulier dans le secondaire et l’enseignement supérieur. » .

Dans le cas particulier de la France, V. Rouyer, Y. Mieyaa et A. le Blanc (2014) notent que « […] si elles donnent lieu aujourd’hui à la mise en œuvre d’actions concrètes au niveau de la société civile et de l’école, [les] préoccupations relatives à l’égalité entre les sexes ne sont pas nouvelles. En effet, depuis plus de 50 ans dans la société française, les luttes contre les stéréotypes et les inégalités de sexe font l’objet d’une abondante réglementation […] ». Ainsi, des expérimentations, des plans d’action et des conventions sont sans cesse créés, reconduits et ajustés, témoignant notamment de la volonté gouvernementale de faire contribuer l’Ecole à la lutte pour l’égalité hommes-femmes. Les textes de lois, en constante évolution, témoignent aussi de cet objectif. Plusieurs articles du Code de l’Education (articles L311-4 et L121-1 modifiés par la Loi du 8 juillet 2013) illustrent ces propos. L’amendement 180 à la loi 2103-595 créé dans le cadre du projet de la loi pour la refondation de l’école de la République visait ainsi à intégrer dans les écoles élémentaires une éducation à l’égalité entre hommes et femmes et à la déconstruction des stéréotypes. Cette volonté fut traduite textuellement comme le devoir de l’école d’assurer « les conditions de l’éducation à l’égalité des genres » . Cette notion « d’égalité des genres » fit naître de virulentes réactions, L’Education nationale ayant été accusée de vouloir enseigner la théorie du genre aux enfants, théorie qui reviendrait à apprendre aux filles à être des garçons et aux garçons à être des filles. Face à ces réactions, l’amendement fut finalement retiré après que l’Union Nationale Interuniversitaire, syndicat étudiant de droite, ait récolté 300 000 signatures contre son application.

En réalité, il n’existe pas de « théorie du genre », sinon des études sur le genre menées dans plusieurs domaines (psychologie, ethnologie etc.). Ces études tentent de définir les notions de masculinité et de féminité dans différentes cultures, à différentes époques. Partant du postulat que les rapports de sexe dépendent d’une construction sociale, elles permettent de mieux comprendre les facteurs influençant la construction de l’identité de genre.

La notion de genre

Les études sur la notion de genre

La notion de genre et les questions autour des différences et des inégalités entre hommes et femmes n’ont, pendant longtemps, pas intéressés. Ce fait peut s’expliquer par l’existence de mythes, solidement enracinés, ayant servi, et servant encore, à justifier l’assignation aux hommes et aux femmes de rôles différents. Encore au 20ème siècle, l’éducation en France avait pour objectif affirmé de préparer les enfants à tenir leurs futurs rôles et à assumer les fonctions auxquels ils étaient destinés non seulement de par leur condition sociale mais aussi de par leur sexe. Les études sur le genre auraient débuté aux Etats Unis avec les travaux de Money (1955) qui utilise l’expression « sex and gender » afin de différencier sexe biologique et identité sexuée dans le cadre d’une étude sur des enfants intersexués. Plus tardivement en Europe (à partir de la deuxième moitié du 20ème siècle), des mouvements sociaux à l’image du mouvement féministe ont été à l’origine d’études sur le genre. Ainsi, dans les années 70, des sociologues féministes se sont penchés sur cette question, dénonçant un « système de genre », système hiérarchisé dans lequel les hommes possèderaient plus de privilèges que les femmes, celles-ci restant définies par leur rôle procréatif.

Comment définir le genre ?

❖ Le sexe : pour expliquer la notion de genre, il faut au préalable définir celle de sexe. Ces deux notions sont intrinsèquement liées mais ne se confondent pas. Le sexe dépend de facteurs anatamo-biologiques. L’homme et la femme sont différents d’un point de vue génétique (différence au niveau de la 23ème paire de chromosome) mais aussi d’un point de vue anatomique (appareil reproducteur). Des différences existent aussi d’un point de vue hormonal, la production principalement de testostérone et de progestérone impactant sur l’apparition des caractères sexuels chez les individus et sur leur comportement. Si (dans la grande majorité des cas), ces différents facteurs permettent de classer les individus dans une catégorie (homme ou femme), il existe des cas spécifiques ayant intéressés les chercheurs. Cet intérêt concerne, par exemple, des individus chez lesquels il existe une adéquation entre gènes et sexe anatomique, ou encore chez lesquels il y a eu un développement parallèle des deux appareils reproducteurs (individus intersexués).
❖ Le genre : selon Stoller « on peut parler du sexe mâle ou du sexe femelle, mais on peut également parler de masculinité et de féminité et ne pas nécessairement impliquer quoi que ce soit d’anatomique ou de physiologique. Ainsi, alors que sexe et genre semblent pratiquement synonymes pour le sens commun, […] les deux domaines ne sont pas dans une relation de symétrie, mais peuvent suivre des voies totalement indépendantes » (1968). Le genre social (gender) correspond alors plutôt à une construction culturelle. Il dépend des normes et valeurs régissant chaque société. A titre d’illustration, alors que dans la plupart des sociétés il existe une dichotomie femme / homme, la tribu indonésienne des Bugis distingue 5 sexes (hommes, femmes, androgynes, hommes travestis et femmes travesties). Ces normes dépendent donc de la culture mais aussi de l’époque, comme le témoigne le cas de la Chine qui a vu au cours du 20ème siècle se succéder deux conceptions très différentes du statut de la femme : considérée comme soumise à l’homme dans la première moitié du 20ème siècle, un mouvement de « féminisme d’Etat » est ensuite apparu donnant naissance à l’égalité des droits, l’accès des femmes à l’école, à l’armée, etc. Quant à l’identité de genre, elle correspond à la conviction intime d’être une femme ou un homme. Cette identité est dite « psychologique ». Elle se construit progressivement. Elle ne doit pas être confondue avec l’orientation sexuelle qui correspond aux attirances de l’individu pour une (ou plusieurs) catégories d’individus en fonction de leur sexe.

La construction de l’identité de genre

Les différentes phases de la construction de l’identité sexuelle

C. Zaouche-Gaudron et V. Rouyer (2002) notent que « de plus en plus de chercheurs considèrent que l’identité sexuée nécessite d’être analysée au sein de modèles plurifactoriels et interactionnistes qui intègrent les dimensions cognitive, sociale et affective ». Plusieurs cadres théoriques permettent en effet de nous éclairer sur la question de la construction de l’identité sexuelle : la théorie psychanalytique, la théorie de l’apprentissage sociale s’intéressant à l’influence de l’imitation des modèles sexuées, ainsi que la théorie cognitivodéveloppementale. Cette dernière approche a été élaborée par Kohlberg (1966) qui a proposé plusieurs étapes dans un développement dit « normal ». Selon lui, la compréhension du genre et de sa constance par l’enfant est un processus progressif dans lequel trois stades se succèdent. Si, selon cet auteur, l’enfant est capable dès les premiers mois de sa vie de distinguer des personnes selon leur sexe, ce n’est qu’à partir de 2 ans qu’il entre dans le stade appelé identité de genre. L’enfant peut alors distinguer les hommes des femmes à partir de caractéristiques physiques et il sait s’il est une fille ou un garçon. Entre 3 et 5 ans, Kohlberg parle d’une phase de stabilité de genre : l’enfant comprend que le genre est stable dans le temps et aux alentours de 5 ans, il comprend qu’il est aussi stable dans les situations. Ce stade correspond à la constance du genre. L’enfant intériorise cette notion de constance et passe par une phase de rigidité pendant laquelle il cherche à se conformer à son genre. Ainsi, la valeur accordée au respect des activités sexuées est à son apogée. Ce modèle s’appuie sur le processus de catégorisation : selon C. Zaouche-Gaudron et V. Rouyer (2002) « les enfants construisent, avant tout, des concepts relatifs aux caractéristiques de chacun des sexes, tout en élaborant une conception de leur propre identité ». Autrement dit, non seulement l’enfant élabore des concepts lui permettant d’organiser le monde qui l’entoure, mais ces concepts vont aussi impacter sur la représentation qu’il a de lui-même et donc impacter sur la construction de sa propre identité.

Impact des facteurs environnementaux

Plusieurs études ont montré combien l’environnement social participait à la construction et à la reproduction des normes et des rôles de sexes. L’identité de genre se construit ainsi dans différentes sphères, l’individu étant amené à se comporter différemment en fonction de ce qu’ils pensent être socialement admis dans ces différents contextes imprégnés d’une certaine séparation des rôles. Darmon (2006) parle ainsi de socialisation de genre qu’il définit comme «l’ensemble des processus par lesquels l’individu est construit […] par la société globale et locale dans laquelle il vit, processus au cours desquels l’individu acquiert […] des façons de faire, de penser et d’être qui sont situées socialement».

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Table des matières

Introduction
Partie 1 – Apports théoriques : genre et stéréotypes
1) La notion de genre
a. Les études sur la notion de genre
b. Comment définir le genre ?
2) La construction de l’identité de genre
a. Les différentes phases de la construction de l’identité de genre
b. Impact des facteurs environnementaux
i. La famille
ii. Les lieux d’accueil de la petite enfance
iii. L’école
iv. Les productions de l’enfance
v. Les pairs
c. Construction de l’identité de genre : sur un plan psychologique
3) Stéréotypes et identité
a. Les stéréotypes
b. L’identité sociale
c. Stéréotypes, discriminations et identité
d. Les stéréotypes de genre
4) Le genre à l’école
a. La mixité scolaire
b. Disparité des résultats scolaires, orientations scolaires et choix professionnels
i. Résultats scolaires
ii. Différences dans les choix scolaires et professionnels
c. Effets de stéréotypes de genre sur les résultats scolaires
i. Effets des stéréotypes intégrés par les enseignants
ii. Effets des stéréotypes intégrés par les élèves
5) Problématisation
Partie 2 – Etude menée dans une classe de CM1 – CM2
1) Présentation des hypothèses et de la méthodologie
a. Hypothèses générales
b. Présentation générale de la méthodologie
c. Présentation du contexte et description de l’échantillon
2) Première méthode de recueil de données : le questionnaire à l’attention des élèves
a. Construction du questionnaire
b. Organisation matérielle pour la passation des questionnaires
c. Traitement des réponses
i. Traitement des réponses au questionnaire en fonction du sexe des répondants
ii. Classement des réponses au regard des stéréotypes de genre
iii. Evaluation de la variable « degré d’intégration des stéréotypes de genre par l’élève » en fonction de ses réponses au questionnaire
3) Deuxième méthode de recueil des données : le questionnaire à destination de l’enseignant
a. Analyse des réponses de l’enseignant
b. Comparaison de la position des élèves sur les deux échelles
4) Troisième méthode de recueil de données : les livrets scolaires
5) Interprétation des résultats au regard de l’hypothèse 1 : quel lien entre réponses des élèves au questionnaire et résultats scolaires ?
a. Explicitation de la méthodologie utilisée
b. Interprétation des résultats obtenus
6) Interprétation des résultats au regard de l’hypothèse 2 : quel lien entre représentation de l’enseignant et résultats scolaires ?
a. Explicitation de la méthodologie utilisée
b. Interprétation des résultats obtenus
7) Lien entre représentation de l’enseignant, réponses des élèves au questionnaire et résultats scolaires
8) Synthèse des résultats obtenus et réflexion autour des limites de l’étude
a. Synthèse des résultats obtenus à travers le questionnaire élève
b. Synthèse des résultats obtenus à travers le questionnaire enseignant
c. Synthèse des données issues des livrets scolaires
d. Synthèse des résultats obtenus : comparaison des résultats scolaires et des positions des élèves sur les échelles de conformité aux stéréotypes de genre
Conclusion

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