Etudiant en deuxième année de Master de l’Enseignement, de l’Education et de la Formation (MEEF) à l’Institut National Supérieur du Professorat et de l’Education (INSPE) du site du Mans. Nous sommes en stage dans une école primaire du Mans. L’école est composée de dix classes dont celle où nous sommes qui est un Cours Elémentaire 1 (CE1) de 28 élèves. Cette école possède une singularité puisqu’elle propose, à l’aide d’enseignants du conservatoire, une Classe à Horaires Aménagées Musique (CHAM) pour les élèves volontaires. Dès la rentrée en septembre 2019, nous avons remarqué que la classe dans laquelle nous sommes en stage était particulière. Il s’est avéré que les apprenants, regroupés dans cette classe, avaient un niveau hétérogène. En effet, nous pouvions établir dans l’enseignement du français trois typologies d’élèves. Certains sont des allophones nouvellement arrivés en France, d’autres des non-lecteurs ayant suivi une scolarité depuis la maternelle en France ainsi que des élèves ayant de grandes facilités en langue. Lors des premiers jours, nous proposions à l’ensemble de la classe un seul et même enseignement mais les élèves n’avaient pas le même rythme d’apprentissage. Cette problématique a remis en question notre pratique professionnelle. Il fallait trouver une façon de résoudre pédagogiquement ce problème.
L’enseignante, qui est la titulaire de cette classe de CE1, a commencé sa carrière en tant qu’éducatrice spécialisée dans des foyers puis a décidé par la suite de rentrer dans l’éducation nationale par un concours interne. Elle s’est retrouvée professeure des écoles et a ensuite continué sa formation afin de devenir enseignante spécialisée pendant 15ans. Elle s’est orientée vers une formation pour devenir directrice, ce qui l’amena à prendre une direction d’école pendant 5ans. Elle est revenue dans l’élémentaire avec des élèves de CM2 puis depuis cette année avec des élèves de CE1. Cette enseignante au long parcours, nous a laissé gérer la classe à plusieurs reprises dont l’enseignement du français et plus particulièrement l’étude du fonctionnement de la langue, sous son regard professionnel et bienveillant. Cette mission était l’occasion pour nous de rechercher des techniques pédagogiques et de pratiquer la différenciation pédagogique auprès d’élèves en difficulté quand cela était nécessaire. Nous avons aussi pu discuter et interviewer les élèves sur nos pratiques et leurs ressentis dans leur classe.
Entre résultats et bien-être à l’école, la place de la réussite scolaire
Le constat d’une école basée uniquement sur l’évaluation et la comparaison d’élève
A la rentrée 2019, le Ministre de l’Education Nationale Jean-Michel Blanquer a affirmé les objectifs de l’année » En effet, plus que jamais, pour se projeter avec confiance vers l’avenir, notre Nation a besoin d’une Ecole de la République qui réussisse. » (MEN, 2019). La réussite scolaire est synonyme d’accomplissement avec succès d’un parcours scolaire avec une atteinte d’objectifs d’apprentissage et une maîtrise des savoirs. Les résultats scolaires et l’obtention d’une reconnaissance des acquis, à travers le diplôme, le certificat ou l’attestation d’études par exemple, sont des indicateurs de réussite scolaire dans le système français. Ce terme est donc porteur d’une idée de résultats et de performance qui nuirait à la réussite de chacun puisqu’en 2004, Rolland Viaud annonce que » le fait d’évaluer constamment un élève, et ce depuis le début du primaire, amène ce dernier à ne plus travailler pour le plaisir d’apprendre, mais pour les conséquences de l’apprentissage, c’est-àdire pour les notes ou les récompenses annoncées « , l’élève est donc aspiré dans cette spirale évaluative et oublie le côté plaisir et utile d’apprendre. L’auteur développe l’idée de la démotivation comme frein aux apprentissages puisque l’élève aura, sans but précis, ni explicitation de l’enseignant, des difficultés à avancer et à apprendre : ainsi Rolland Viaud rappelle que » Bon nombre de chercheurs considèrent que les pratiques évaluatives des enseignants démotivent l’élève à apprendre parce qu’elles sont centrées seulement sur la performance » (ibid., 2004).
Effectivement la définition de la réussite mélange à la fois une part importante d’estime de soi et un jugement personnel des élèves avec : » la réussite est la conséquence finale de la motivation. Généralement un élève qui persévère et qui utilise de bonnes stratégies d’apprentissage réussit » (Viaud, 2004). Plus tôt, en 2000, Rolland Viaud parlait déjà de l’évaluation de l’élève comme un outil de comparaison entre les élèves avec : » Pour l’élève, la norme de réussite est d’ordre comparatif et relève du jugement porté par l’enseignant sur l’ensemble du groupe et sur la place qui lui est attribuée dans le classement », certains enseignants jugent les évaluations nationales, réalisées en français et en mathématiques sur des élèves de CP et de CE1, comme n’évaluant que les savoirs, c’est pourquoi il serait intéressant de développer des moyens d’étudier le ressenti des élèves à travers leur bien-être à l’école.
Le bien-être à l’école se mesure à l’aide de différents volets : » il renvoie à un degré de satisfaction individuel, des élèves ou des personnels, dans différents aspects de la vie scolaire (activités pédagogiques, relations amicales, etc.) » (MEN, 2015). En effet, le bien-être à l’école est étroitement lié au climat scolaire, relations entre les acteurs. Que ce soit pour l’un ou pour l’autre terme, selon le Ministère de l’Education Nationale, il faut préciser l’interrogation sur des dimensions relationnelles, pédagogiques ou sécuritaires à l’école. Il est vrai qu’en prenant en considération le bien-être à l’école des élèves, nous assurons un avenir pour les jeunes : » Considérer les enfants comme acteurs de leur développement et les aider à développer leurs compétences cognitives, expressives et sociales, tout en favorisant leur bienêtre à l’école dans un monde en pleine évolution sociale, économique, technologique est un enjeu essentiel pour l’éducation et la formation des adultes de demain. » (MEN, 2015). Un outil d’évaluation est nécessaire pour mesurer le bien-être à l’école. Un questionnaire de bienêtre à l’école et une échelle de satisfaction scolaire ont été créés à travers des modules complémentaires en 2013 et 2014 pour la Direction de l’Evaluation, de la Prospective et de la Performance (DEPP), ainsi que l’Agence Nationale pour la Cohésion Sociale et l’Égalité des chances (ACSE) et le Défenseur des Droits. Ce projet est porté par Philippe Guimard en collaboration avec Fabien Bacro, Agnès Florin, Séverine Ferrière, Tiphaine Gaudonville et Hué Ngo. L’objectif est d’utiliser un outil d’évaluation du bien-être à l’école pour des élèves à l’école primaire et analyser les différences interindividuelles. Cette mesure multidimensionnelle est de ce point de vue plus intéressante, car elle offre des pistes d’interventions éducatives diversifiées. Cette échelle de bien-être à l’école n’est pas utilisée dans le domaine scolaire et la direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance affirme sous l’influence du Ministère de l’Education Nationale qu’il s’agit de proposer, à travers les évaluations, » dès le début de l’année, des repères permettant aux enseignants de bien apprécier les acquis qui ancrent les apprentissages. Ils peuvent ainsi identifier les besoins individuels de chaque élève le plus rapidement possible et apporter l’aide la mieux adaptée. » (Andreu et al., 2019). A l’inverse de l’aspect de contrôle (récompenses ou punitions), l’enseignant privilégiera un aspect informationnel qui renseignent l’individu sur ses qualités ou les défauts de sa production (Viaud, 2000). Nous parlerons alors de bienveillance.
L’évolution de la liaison entre apprentissage et bien-être à l’école
Dans cette dynamique de répondre aux besoins de chaque élève, il est fondamental de réaliser un diagnostic afin de proposer des réponses pédagogiques adaptées. L’exemple des évaluations nationales en CP et CE1 est un moyen d’évaluer et d’effectuer une évaluation diagnostique en début d’année afin d’adapter les pratiques professionnelles ou activités de l’enseignant, de créer des groupes de besoin en classe, même si le bien-être à l’école est parfois oublié au profit de la réussite. Cette obsession de réussite et de résultat est une norme sociale ayant pour finalité de trouver sa place dans la société. Les élèves comme les enseignants oublient trop souvent la notion de plaisir lorsqu’ils travaillent ensemble, » les élèves aujourd’hui ont moins de plaisir à apprendre » (Viaud, 2004). Les auteurs Canvel, Florin, Pilard et Zanna (2018) affirment pourtant que : » selon l’OCDE, le bien-être à l’école est considéré comme aussi important que la réussite scolaire dans la majorité des établissements des pays concernés « . Comme le recommande les programmes scolaires, il est primordial d’instaurer un climat de classe basé sur la confiance, la bienveillance et dans des conditions d’apprentissage favorables pour assurer une future réussite scolaire, car : » les élèves qui se sentent bien à l’école les années suivantes ont de meilleurs résultats, une meilleure satisfaction de vie et un sentiment d’efficacité personnelle « . L’environnement dans lequel se déroule les apprentissages est fondamental pour la réussite, mais aussi pour se sentir épanouit et heureux à l’école, » un lieu qui les motive à apprendre et qu’ils y prennent plaisir à faire, il faut créer des environnements d’apprentissage » (Viaud, 2004). Selon Viaud, quatre facteurs pour la dynamique motivationnelle de l’élève relatifs à la classe (l’activité, l’évaluation, l’enseignant ou le climat de classe), à la vie des élèves (la famille ou les amis), à l’école (les horaires ou les règlements) et à la société (les valeurs ou la loi). Un élève est motivé si les activités lui paraissent utiles et intéressantes et qu’il se sent capable de les réaliser. Apprendre peut, en effet, être réalisé sous la pression familiale et/ou par l’enseignant qui oublierait d’encourager les élèves, c’est pourquoi une pédagogie positive est recommandée aujourd’hui. Heureusement, apprendre peut aussi être un acte volontaire de la part de l’élève dans le but de réussir ses études et s’insérer professionnellement. Mais cette vision idéaliste oublie une partie des élèves qui ne suivraient pas un parcours jalonné de succès.
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Table des matières
Introduction
Cadre théorique
1. Entre résultats et bien-être à l’école, la place de la réussite scolaire
2. La différenciation pédagogique, la conséquence de l’inclusion scolaire
3. La lecture, omniprésente tout au long de la scolarité
4. L’inclusion scolaire, une réussite pour la diversité des publics
Problématique / hypothèses
Méthodologies
1. Les sujets de l’étude
2. Le matériel de l’étude
3. La mise en place
4. L’enquête
Résultats
1. En début d’année scolaire
2. En fin d’année scolaire
Discussion
1. La remise en cause de l’extinction de la lecture chez les jeunes
2. Les outils adaptés pour mesurer la fluence en lecture et le bien-être à l’école
3. L’origine des difficultés scolaires
4. La différenciation pédagogique comme réponse aux élèves en difficulté de lecture
5. Le lien entre bien-être à l’école et réussite scolaire
6. Les perspectives de l’inclusion scolaire
Conclusion
Annexes
Bibliographie