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La classification des surdités selon la sévérité
Les surdités sont également classées selon leur degré de sévérité. Celui-ci se mesure grâce à l’audiométrie tonale notamment. Le patient doit percevoir des sons transmis à différentes fréquences. L’intensité du seuil de perception caractérise la sévérité. Une audition normale correspond à la perception des sons entre 0 et 20 dB
– Surdité légère:
Perte de 21 à 40 dB, la voix normale est perçue mais pas la voix chuchotée. Les bruits familiers sont généralement reconnus.
– Surdité moyenne:
Perte de 41 à 70 dB, seule la voix forte est perçue, une gêne peut être constatée lorsque la source sonore s’éloigne, le sujet cherche souvent une aide visuelle notamment les mouvements labiaux de son interlocuteur.
– Surdité sévère:
Perte de 71 à 90 dB, seule la voix forte est perçue lorsqu’elle est à côté de l’oreille, les bruits forts sont eux aussi perçus.
– Surdité profonde:
Perte de 91 à 119 dB, le sujet ne perçoit plus la parole, des bruits graves puissants peuvent encore être perçus mais ils sont non reconnus.
– Surdité totale ou cophose:
Perte de plus de 120 dB, aucun son n’est perçu. La cophose peut aussi être définie, même si le seuil tonal est meilleur que 120 dB, dans le cas où il n’y a aucune compréhension de la parole.
Les mesures de la surdité
La fréquence d’un son est mesurée en hertz (Hz) et son intensité en décibels (dB). L’oreille humaine est capable de percevoir des sons allant de 20 Hz à 20 KHz, sachant que les fréquences d’une conversation courante se situent entre 250 Hz et 4 000 Hz.
L’audiométrie tonale : un test subjectif
Cet examen mesure la perte auditive, en envoyant des sons dans chaque oreille afin d’obtenir le seuil de perception pour chaque son envoyé dans l’oreille. Sept fréquences sont généralement testées : 125, 250, 500, 1000, 2000, 4000 et 8000 Hz. Le patient doit se manifester quand il perçoit un son.
Les résultats sont transcrits sous forme d’un diagramme qui donne la courbe audiométrique du patient. De manière réglementaire, en France, les résultats de l’oreille droite sont en rouge et ceux de l’oreille gauche en bleu.
L’audiométrie se fait en conduction aérienne, avec l’utilisation d’un casque, et en conduction osseuse avec un vibrateur. Cette dernière permet de prendre en compte uniquement le traitement du son par la cochlée, car il n’y pas de passage par la chaîne tympano-ossiculaire contrairement à la voie aérienne. Pour cela, un vibrateur est situé derrière l’oreille au niveau de l’os de la mastoïde. Le testeur peut ensuite calculer le Rinne audiométrique, c’est-à-dire la différence entre la courbe osseuse et la courbe aérienne. Dans les cas d’une audition normale et d’une surdité neurosensorielle, le Rinne est positif, les résultats de la courbe aérienne sont supérieurs à ceux de la courbe osseuse. Dans le cas d’une surdité de transmission, le Rinne est négatif, les résultats de la courbe aérienne sont inférieurs à ceux de la courbe osseuse.
L’épreuve de Rinne consiste à placer un diapason sur la mastoïde, le testeur le fait vibrer, puis lorsque le seuil de perception est atteint il le place devant le pavillon de l’oreille. Pour l’audition normale et la surdité neurosensorielle, le sujet entend de nouveau le son lorsqu’il est placé devant le pavillon car l’oreille moyenne amplifie le son de 40 dB. Dans les surdités de transmission, le sujet n’entend pas lorsque le diapason est devant le pavillon de l’oreille.
Sur le diagramme, si les courbes en conduction osseuse et aérienne sont abaissées de plus de 20 dB, et dissociées l’une de l’autre, il s’agira d’une surdité de transmission. Si ces deux mêmes courbes sont abaissées de plus de 20 dB et sont accolées, le diagnostic sera une surdité neurosensorielle.
L’audiométrie vocale : un examen objectif
L’audiométrie vocale permet de mesurer l’intelligibilité de la parole et donc la capacité de compréhension de l’individu. Pour cela, le testeur fait répéter 10 mots au patient à des intensités de 0 à 100 dB, et il trace une courbe d’intelligibilité en comptabilisant le pourcentage de mots correctement répétés pour une fréquence donnée. Dans les cas de surdités de transmission, la courbe est généralement “adaptée” à la courbe du normo-entendant, contrairement aux surdités neurosensorielles où la courbe n’est plus parallèle à la normale, se caractérisant par une inclinaison plus prononcée. Ceci indique soit une destruction des neurones de la cochlée (neuropathie), soit une atteinte du nerf auditif (neurinome…).
Il est très pertinent de comparer les résultats des audiométries vocale et tonale.
D’autres tests objectifs
– La tympanométrie ou impédancemétrie:
Elle permet de mesurer la force d’opposition à la mise en vibration de la chaîne tympano-ossiculaire grâce à un impédancemètre. Une onde sonore est envoyée dans l’oreille du sujet par une sonde placée dans son conduit auditif. L’onde réfléchie par le tympan est enregistrée, ce qui permet de mesurer l’impédance du système en la comparant à l’onde envoyée.
La variation d’impédance est retranscrite sous forme de graphique. Pour une oreille normale, le pic de la courbe est centré sur la pression 0. Ce test permet donc d’évaluer l’intégrité de l’oreille moyenne.
– Le réflexe stapédien:
Il peut être réalisé en complément de la tympanométrie. Pour cela un son d’intensité progressive est envoyée dans l’oreille du sujet, le réflexe stapédien doit se déclencher vers 95dB, l’étrier se contracte et l’impédance croît. Ce test est aussi utilisé pour objectiver le phénomène de recrutement.
– Les otoémissions acoustiques (OEA):
Une sonde est placée dans le conduit auditif externe, le testeur enregistre la réponse acoustique lors d’une stimulation ou lors d’une émission spontanée. Les otoémissions acoustiques permettent de tester l’activité des cellules ciliées externes (Voyage au centre de l’audition – Spécialites | Cochlea, s. d.).
– Les potentiels évoqués auditifs (PEA):
Ils peuvent être mesurés en conduction aérienne mais aussi en conduction osseuse, même si cette dernière est encore peu utilisée en France. Un masquage doit être réalisé pour optimiser les résultats de cet examen. Ces potentiels évoqués permettent d’enregistrer la réponse du nerf auditif, du tronc cérébral, de ses différents relais ainsi que des structures auditives sup-thalamo-corticales. 5 ondes doivent être visualisées sur l’enregistrement des PEA, chacune correspondant à un relais spécifique, la 1ère étant celle du nerf auditif (Truy et al., 2018).
– L’électrocochléographie:
Elle mesure le potentiel cochléaire global, en réponse à une stimulation électrique (sonde placée soit dans le conduit auditif, soit au travers du tympan au contact de la cochlée).
Sont enregistrés :
● Le potentiel microphonique qui est le reflet de l’activité des CCE.
● Le potentiel de sommation grâce aux cellules ciliées et en particulier les CCE.
● Le potentiel d’action composite venant de l’activité des fibres nerveuses (Truy et al., 2018).
Les aides auditives et les prothèses
Différentes aides auditives peuvent intervenir dans la réhabilitation de l’audition (Grosbois & Le Pellec, 2006; Vergnon, 2008).
– Le contour d’oreille, qui se place derrière l’oreille : aide auditive auparavant la plus classique, elle réhabilite la plupart des problèmes auditifs mais reste assez visible. Elle est aujourd’hui utilisée pour les surdités les plus sévères. En revanche, les appareils les plus modernes, dits “open”, comportent une partie localisée derrière l’oreille mais très discrète, quasiment invisible. C’est la raison pour laquelle la dénomination utilisée est “open” et non pas contour.
– Les appareils intra auriculaires : il existe 3 types de modèles, l’intra-conque, l’intra-conduit et l’intra-canalaire. Ils sont assez discrets mais ne sont pas adaptés à toutes les surdités.
– Les lunettes auditives : les aides auditives sont placées sur les branches, elles utilisent la conduction osseuse.
– Les aides jetables ou semi-jetables, qui peuvent être portées en moyenne 4 semaines et qui balaient l’inconvénient de l’entretien et de l’hygiène des intra-auriculaires. Ce ne sont pas des appareillages mais des amplificateurs.
– Des aides auditives implantables à conduction osseuse (BAHA®, Ponto®) : elles sont utilisées pour des surdités pour lesquelles une prothèse auditive conventionnelle n’est pas utilisable (aplasie de l’oreille, suppurations chroniques, séquelles post-traumatiques ou post-opératoires ou pathologies de l’oreille externe). On peut aussi les utiliser dans les surdités totales (cophose) unilatérales : dans ce cas, le son transmis dans la boite crânienne parvient à l’autre oreille par voie osseuse. C’est le principe de la pseudo-stéréophonie. Le boitier vibrant est connecté à l’os du crâne par un implant en titane (fixture) vissé dans l’os crânien derrière l’oreille ; certains systèmes plus récents reposent sur une conduction aimantée, ou un système plus complexe semi-implantable).
– Les implants cochléaires ou implants de l’oreille interne : ils sont utilisés uniquement pour des surdités neurosensorielles, totales et bilatérales. Ils envoient une stimulation électrique aux fibres nerveuses du nerf auditif dans la cochlée. Cet implant est donc placé au niveau de l’oreille moyenne lors d’une chirurgie. Il présente une partie externe qui perçoit le signal sonore et une partie interne.
– L’implant de l’oreille moyenne : il est constitué d’un électroaimant (vibrateur) connecté au niveau de l’enclume ou d’un autre osselet, d’un récepteur sur la mastoïde et d’un audio-processeur externe. On peut utiliser cet implant dans le cadre de surdités neurosensorielles moyennes à sévères et dans les surdités de types mixtes. Ici, le son est amplifié sans passer par l’oreille externe.
Il existe également des accessoires pour les aides auditives (Vergnon, 2008) :
– Pour améliorer l’intelligibilité de la parole dans le bruit, le patient peut utiliser un système haute fréquence (ou système HF), cet appareil a toutefois un coût assez important.
– Il existe aussi des boucles d’induction (Boucle T – magnétique), elles pallient les difficultés concernant la distance, les bruits ambiants, les phénomènes de réverbération, les déformations dues aux écouteurs ou haut-parleurs. Cependant, elles restent peu utilisées car elles sont encore insuffisamment répandues.
Prévalence : quelques chiffres
Plus de 12 millions de français seraient concernés par la presbyacousie. En 2050, une personne sur trois serait presbyacousique en France (Leusie, 2015).
En Europe, au-delà de 70 ans, 30% des hommes et 20% des femmes ont une perte auditive de plus de 30 dB (Trivalle, 2016). L’incidence est donc plus élevée pour les hommes.
Les différents types de presbyacousie
Il existe différents types de presbyacousie en fonction du lieu de l’atteinte :
– La presbyacousie sensorielle : dégénérescence des cellules ciliées de l’organe de Corti
– La presbyacousie neurale : dégénérescence des voies et des centres nerveux de l’audition
– La presbyacousie métabolique : dégénérescence de la strie vasculaire
– La presbyacousie mécanique : perte de l’élasticité de l’oreille moyenne et du tympan
Etiologie
La presbyacousie est multifactorielle :
– Facteurs individuels : l’âge, le sexe, la génétique, un contexte vasculaire.
– Facteurs environnementaux : exposition aux bruits, prise de médicaments ototoxiques.
Elle peut être concomitante à un autre type de surdité.
L’oto-rhino-laryngologiste (ORL)
La première consultation chez l’ORL est souvent à la demande du conjoint ou de l’entourage proche, le patient faisant régulièrement répéter. Elle peut aussi faire suite au dépistage si celui a été réalisé par le médecin traitant, un autre professionnel de santé ou lors d’une journée de prévention.
Il est important de penser à un examen de l’audition pour tout bilan général, y compris dans certaines pathologies neuro-dégénératives telles que la maladie d’Alzheimer et la maladie de Parkinson.
À la suite du dépistage de la surdité, l’ORL effectue des tests complémentaires afin de déterminer le type de surdité et le niveau de perte auditive.
Il réalisera alors en plus de l’acoumétrie, un examen anatomique de l’oreille avec un otoscope, une audiométrie tonale et vocale ainsi qu’une tympanométrie.
Un interrogatoire devra également avoir lieu, le médecin s’intéressera alors à une plainte éventuelle au niveau de la compréhension des phrases, à une sensation de sons brouillés, de gêne dans le bruit ou encore de douleur aux sons de forte intensité. Il demandera au patient s’il augmente le volume de la télévision, s’il entend certains sons tels que le chant des oiseaux, des bruits extérieurs comme une sonnerie ou un moteur de voiture et s’il comprend les conversations téléphoniques. Un des objectifs sera alors de faire prendre conscience au patient de sa baisse d’audition, et de l’importance de sa prise en charge. Pour cela, il est nécessaire d’expliquer au patient ce qu’est la presbyacousie, ses conséquences et son évolution qui tend vers une aggravation.
Afin de pallier les difficultés liées à cette pathologie, la mise en place d’appareillage auditif est conseillée.
Le médecin ORL et les médecins généralistes ayant suivi une formation dans le cadre du développement professionnel continu (DPC) en otologie médicale agréée sont les seuls professionnels à pouvoir prescrire un appareillage. Celui-ci peut se faire pour toute perte moyenne supérieure à 30 dB ou pour une perte de plus de 35 dB à une fréquence de 2000 Hz.
L’audioprothésiste
L’audioprothésiste peut lui aussi dépister et conseiller la première consultation chez un ORL.
C’est la seule profession habilitée à appareiller le patient à la suite de la prescription.
Il doit prendre le temps d’écouter la plainte, les craintes du patient, tout en lui exposant les bénéfices d’une aide auditive, ses limites et ses contraintes.
Tous ces éléments couplés au résultat de l’audiométrie déterminent le choix du type d’appareillage.
Si nécessaire, l’audioprothésiste réalise une empreinte du conduit auditif externe. En effet, l’appareil doit être totalement adapté à l’oreille du patient afin d’optimiser le confort de port tout en assurant les fonctions de transmission du son et en évitant les sifflements.
Avec les progrès technologiques de nouvelles prothèses (de type « open ») peuvent être portées sans prise d’empreinte préalable, mais elles ne compensent que de faibles pertes auditives. L’audioprothésiste propose ensuite des essais de différents appareils et le patient choisira ce qui lui conviendra le mieux.
Enfin il accompagne le patient dans le réglage pendant plusieurs mois voire plusieurs années et dans l’entretien des appareils. Le réglage des appareils est primordial puisqu’il existe une variabilité interindividuelle aux niveaux acoustique, neurosensoriel et cognitif.
L’orthophoniste
Le rôle de cet acteur dans le parcours de soin de la presbyacousie est souvent négligé ou alors réduit à la suppléance par lecture labiale. Il n’en est rien.
Quand la prise en charge est bimodale, c’est-à-dire que le patient est appareillé et qu’il suit une rééducation auditivo-verbale, le constat d’un meilleur gain auditif, d’une meilleure capacité de communication et de meilleurs scores cognitifs peut être fait (Guglielmi et al., 2019).
De plus, elle améliore la qualité de vie du patient et l’entente du couple aidant/patient (Leusie, 2015).
Avant toute prise en charge, l’orthophoniste doit réaliser un bilan, sur prescription médicale. Celui-ci a pour buts de tester l’intégration auditive, l’apport de la lecture labiale, la sélectivité dans le bruit, les fonctions cognitives et le niveau de langage oral (Hecht, 2018).
Cette prise en soins s’inscrit ensuite dans une démarche écologique c’est-à-dire adaptée aux difficultés et demandes du patient.
Les axes de la prise en charge orthophonique sont multiples :
– L’orthophoniste délivre des conseils afin d’optimiser les échanges entre le patient et ses interlocuteurs.
Ces conseils peuvent être :
✓ Préciser à l’interlocuteur qu’on a une déficience auditive et ne pas cacher sa prothèse auditive ;
✓ Faire remarquer qu’on n’a pas compris et qu’on aimerait que notre interlocuteur répète ;
✓ Se placer face à lui ;
✓ Demander de parler moins vite ;
✓ Ne pas avoir honte car tout le monde peut ne pas avoir compris, notamment dans un milieu bruyant ;
Les conseils peuvent aussi porter sur l’utilisation de la prothèse et la prévention des différentes pannes qu’il pourrait rencontrer.
– La rééducation porte également sur un travail auditif. Le patient doit s’habituer aux nouvelles sensations et aux nouveaux sons perçus par l’oreille avec les aides auditives. Il est nécessaire d’apprendre à détecter ces sons, les discriminer, les reconnaître et les identifier tout en abaissant les seuils de reconnaissance. Pour parvenir à cela, l’orthophoniste peut utiliser le principe de répétition avec des listes de mots, de logatomes et des phrases du quotidien.
– L’audition et la vision étant intimement liées, il est intéressant d’utiliser des moyens de compensations visuelles comme la lecture labiale. En effet, celle-ci lève les ambigüités de l’information auditive et fournit un feedback positif confirmant ou non la reconnaissance des mots en lecture labiale (Truy et al., 2018).
L’orthophoniste peut aussi enseigner d’autres moyens de compensations visuelles telles que le Langage Parlé Complété (LPC), les signes de la langue des signes française (LSF), le français signé ou la dactylologie. Ces moyens de compensations renforcent le système auditif et deviennent indispensables lorsque le patient est dans le bruit.
– La suppléance mentale doit être complémentaire et ponctuelle. Il s’agit de développer la mémoire et les stratégies de déduction.
Elle est efficace uniquement quand elle est occasionnelle. Si elle devient nécessaire en permanence elle sera trop coûteuse en énergie et fera décrocher le patient. Il ne faut pas hésiter à vérifier régulièrement que le patient « entend » et non devine en glissant des logatomes ou des absurdités dans des phrases significatives.
– L’orthophoniste doit aussi veiller à entretenir la motivation du patient en lui apportant du soutien dans ses moments de difficultés. Il est important de le rassurer et de lui redonner confiance.
L’orthophoniste participe également au réglage de l’appareil, au sein du « couple audioprothésiste-orthophoniste ». Il aide aussi à l’habituation au port de l’appareillage et cherche à maintenir la communication du patient. Dans les centres d’implantation cochléaire, il n’est pas rare de voir des orthophonistes modifier les réglages de certains implants cochléaires.
L’aidant
Véritable partenaire de l’orthophoniste, l’aidant peut être présent aux séances d’orthophonie et lors des entraînements quotidiens du patient. Il est formé au « training auditif » de son proche et il peut noter dans un cahier toutes les difficultés rencontrées (Leusie, 2015).
Il peut encourager le patient dans le port de ses appareils auditifs (Vergnon, 2008).
Les difficultés rencontrées dans l’appareillage
Le principal obstacle à la prise en charge du malentendant est un défaut d’appareillage.
L’étude de F. R. Lin et al. (2011) montre que 40% des adultes avec une perte auditive moyenne portent des aides auditives et seulement 3.4 % des adultes avec une perte légère.
Une étude plus récente de l’Eurotrack confirme ces chiffres en France. En effet sur les 9,3% de français malentendants, seulement 34% d’entre eux seraient appareillés (Association Européenne des Fabricants d’Aides Auditives, EHIMA, 2015).
Le taux d’équipement augmente avec la gravité de la limitation fonctionnelle, 18 % des personnes portent des appareils si la limitation fonctionnelle auditive est moyenne, contre 22% si elle est grave et 33% si elle est très grave (DRESS & Santé Publique France, s. d.).
Malgré ce faible taux d’appareillage, 84 % des utilisateurs sont satisfaits de leurs aides auditives. Elles leur permettent d’améliorer leur qualité de vie au moins occasionnellement, pour 86 % d’entre eux, notamment au niveau de la communication et de la vie sociale. Cette satisfaction augmente avec le nombre d’heures d’utilisation de l’appareil auditif.
La question de la cause du non-appareillage pour la majorité des malentendants se pose alors. Différentes raisons ont été identifiées (Association Européenne des Fabricants d’Aides Auditives, EHIMA, 2015; Vergnon, 2008) :
– La moitié des malentendants n’ont pas de prescription médicale pour leur perte auditive. Cela s’explique d’une part par le fait que les malentendants n’évoquent pas leur déficit auditif au médecin. D’autre part, s’ils en ont parlé, le médecin a jugé que la pathologie ne nécessitait pas d’appareillage ou que la perte auditive était inférieure à 30 dB de perte.
– Des raisons psychologiques : les malentendants peuvent être dans le déni de leur surdité, son installation étant insidieuse. Ils peuvent également minimiser leur perte et ne pas la juger assez sévère pour s’appareiller.
De plus, le refus de l’appareillage peut être lié à la culture du vieillissement. Ne pas entendre, porter des appareils sont des signes de vieillesse. L’aspect esthétique des appareils devient alors un problème. Pourtant ce n’est pas l’appareillage qui fait devenir vieux mais bien le fait de s’isoler parce que nous n’entendons pas.
– Le coût des appareillages auditifs : le prix moyen d’une prothèse est de 1500 à 2000 euros. Le montant pris en charge par la Sécurité sociale peut atteindre 100% du tarif de base fixé à 199.71 euros et celui des complémentaires santé est en moyenne de 400 euros. Le reste à charge du patient est donc conséquent. Récemment, la réforme issue de la loi dite « Macron » (arrêté relatif au « 100% santé ») va permettre d’améliorer le taux de remboursement des appareils auditifs. Le reste à charge du patient atteindra progressivement 0 euro d’ici janvier 2021 (Arrêté du 14 novembre 2018 portant modification des modalités de prise en charge des aides auditives et prestations associées au chapitre 3 du titre II de la liste des produits et prestations prévue à l’article L. 165-1 du code de la sécurité sociale, 2018).
– Un handicap trop important pour pouvoir porter des prothèses auditives, telles une démence ou des difficultés motrices comme l’arthrose pour manipuler les appareils.
Hormis ce non-appareillage, nous constatons d’autres obstacles à la prise en charge de la presbyacousie. En effet, quand il est présent, l’appareillage auditif peut être considéré comme intrusif dans le conduit, et l’habituation à la prothèse n’est pas simple. La personne appareillée devra se réhabituer à entendre certains sons, apprendre à utiliser sa prothèse et à l’entretenir. La présence d’un aidant peut sembler nécessaire, mais certains patients sont isolés. L’audioprothésiste et l’orthophoniste doivent travailler en étroite collaboration afin d’optimiser la prise en charge du patient presbyacousique. Cependant l’audioprothésiste travaille trop souvent de manière isolée, le patient ne généralise donc pas ses nouvelles sensations auditives dans l’environnement sonore du quotidien. L’orthophoniste, comme nous l’avons vu, prend trop peu en charge cette pathologie à laquelle il ne se sent pas suffisamment formé.
Les troubles neurocognitifs
Les démences ou troubles neurocognitifs majeurs
Selon la définition du dictionnaire d’orthophonie, la démence correspond à une diminution irréversible des facultés intellectuelles (Brin, 2014).
Une IRM morphologique doit être réalisée dans le diagnostic de syndrome démentiel. Elle permet de localiser l’atrophie cérébrale et d’en mesurer l’importance (Dubois & Michon, 2015).
Il en existe plusieurs types (Dubois & Michon, 2015) :
– Les dégénérescences lobaires frontotemporales (DLFT):
✓ La démence fronto-temporale (variante frontale des DLFT) : le patient présente plutôt des troubles neuropsychiatriques avec notamment une modification progressive du comportement et de la personnalité, des troubles exécutifs et des difficultés au niveau de la mémoire de travail et de la théorie de l’esprit. Des troubles mnésiques peuvent également apparaître à n’importe quel stade de la maladie.
✓ La démence sémantique (variante temporale des DLFT) : les symptômes sont caractérisés par un important manque du mot avec des troubles de la compréhension lexicale et une perte des concepts. Cependant la phonologie et la syntaxe restent correctes. On constate aussi des troubles de la mémoire épisodique ainsi que des troubles du comportement avec un égocentrisme cognitif et comportemental.
– Les démences sous corticales:
Leur atteinte est située au niveau des noyaux gris centraux. Ce terme regroupe la paralysie supranucléaire progressive, la chorée de Huntington et la démence qui peut accompagner la maladie de Parkinson. Au niveau des symptômes, on constate une lenteur d’accès à la mémoire avec un ralentissement de la pensée, des difficultés de synthèse et des changements de personnalité.
Les critères diagnostiques du trouble neurocognitif majeur du DSM-5 sont les suivants :
A. Preuve d’un déclin cognitif significatif par rapport à un niveau antérieur de fonctionnement dans un ou plusieurs domaines cognitifs (attention complexe, fonctions exécutives, apprentissage et mémorisation, langage, activités perceptivo-motrices ou cognition sociale) reposant sur :
1. une préoccupation du sujet, d’un informant fiable, ou du clinicien concernant un déclin significatif du fonctionnement cognitif .
2. une altération importante des performances cognitives, idéalement documentée par un bilan neuropsychologique standardisé ou, à défaut, par une évaluation clinique quantifiée.
B. Les déficits cognitifs interfèrent avec l’autonomie dans les actes du quotidien (c.-à-d. tout au moins une aide nécessaire dans les activités instrumentales complexes de la vie quotidienne comme payer ses factures ou gérer la prise de ses médicaments).
C. Les déficits cognitifs ne surviennent pas exclusivement dans le contexte d’un état confusionnel (délirium).
D. Les altérations cognitives ne sont pas mieux expliquées par un autre trouble mental (p. ex. un trouble dépressif caractérisé, une schizophrénie).
Pour compléter le diagnostic il est nécessaire de spécifier l’étiologie, la présence ou non d’une perturbation du comportement et le niveau d’atteinte de l’autonomie (léger, moyen, grave) (Crocq et al., 2016).
Les troubles neurocognitifs légers
Le trouble neurocognitif léger est un syndrome désignant l’état symptomatique prédémentiel. Les critères diagnostiques du trouble neurocognitif léger du DSM-5 sont les suivants (Crocq et al., 2016) :
A. Preuve d’un déclin cognitif modeste par rapport à un niveau antérieur de fonctionnement dans un ou plusieurs domaines cognitifs (attention complexe, fonctions exécutives, apprentissage et mémorisation, langage, activités perceptivomotrices ou cognition sociale) reposant sur :
1. une préoccupation du sujet, d’un informant fiable ou du clinicien concernant un léger déclin du fonctionnement cognitif .
2. une altération modeste des performances cognitives, idéalement documentée par un bilan neuropsychologique standardisé ou, à défaut, par une évaluation clinique quantifiée.
B. Les déficits cognitifs n’interfèrent pas avec les capacités d’autonomie dans les actes du quotidien (c.-à-d. que les activités instrumentales complexes de la vie quotidienne comme payer ses factures ou gérer la prise de ses médicaments sont préservées mais un plus grand effort, des stratégies compensatoires ou un aménagement peuvent être nécessaires).
C. Les déficits cognitifs ne doivent pas survenir exclusivement dans le contexte d’un état confusionnel (délirium).
D. Les déficits cognitifs ne sont pas mieux expliqués par un autre trouble mental (p. ex. un trouble dépressif caractérisé, une schizophrénie).
Le trouble neurocognitif léger vient de l’anglais Mild Cognitive Impairment (MCI).
Il existe 3 sous types de MCI (Dubois & Michon, 2015) :
– La MCI amnésique où seule la mémoire est touchée, l’évolution tend souvent vers la maladie d’Alzheimer.
– La MCI multidomaine où différents domaines sont touchés mais pas forcément la mémoire. Elle peut évoluer vers les différentes démences.
– La MCI single non memory domain dans laquelle un domaine est spécifiquement déficitaire mais la mémoire est intacte. Elle peut évoluer vers une démence frontotemporale ou une aphasie primaire progressive.
L’étiologie des troubles neurocognitifs
D’après le DSM-5, les étiologies des troubles neurocognitifs peuvent être (Crocq et al., 2016) :
– Une maladie d’Alzheimer.
– Une dégénérescence lobaire frontotemporale..
– Une maladie à corps de Lewy.
– Une maladie vasculaire.
– Une lésion cérébrale traumatique.
– L’usage d’une substance/d’un médicament.
– Une infection par le VIH.
– Une maladie à prions.
– Une maladie de Parkinson.
– Une maladie de Huntington.
– Une autre affection médicale.
– Des étiologies multiples.
– Non spécifié, c’est-à-dire qu’elle ne remplit pas l’ensemble des critères d’un quelconque trouble de la classe diagnostique des troubles neurocognitifs.
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Table des matières
Partie 1 : Etat des lieux
I. L’audition : généralités
A. Le fonctionnement de l’audition
1. L’oreille externe
2. L’oreille moyenne
3. L’oreille interne
B. Les différents types de surdité
C. La classification des surdités selon la sévérité
D. Les mesures de la surdité
1. L’acoumétrie
2. L’audiométrie tonale : un test subjectif
3. L’audiométrie vocale : un examen objectif
4. D’autres tests objectifs
E. Les aides auditives et les prothèses
II. Presbyacousie
A. Généralités
1. Définition
2. Prévalence : quelques chiffres
3. Les différents types de presbyacousie
4. Etiologie
5. Evolution
6. Conséquences
B. Parcours de soin
1. Dépistage
2. L’oto-rhino-laryngologiste (ORL)
3. L’audioprothésiste
4. L’orthophoniste
5. L’aidant
C. Les difficultés rencontrées dans l’appareillage
III. Le déclin cognitif
A. Les troubles neurocognitifs
1. Les démences ou troubles neurocognitifs majeurs
2. Les troubles neurocognitifs légers
3. L’étiologie des troubles neurocognitifs
B. La maladie d’Alzheimer
1. Définition
2. Prévalence
3. Symptômes et conséquences
4. Facteurs de risque et facteurs protecteurs
5. Traitements
IV. Lien entre presbyacousie et déclin cognitif
A. La presbyacousie augmente le risque de déclin cognitif
B. Les facteurs de risque expliquant le lien entre presbyacousie et déclin cognitif
1. La charge cognitive
2. Hypothèse de causes communes
3. Hypothèse en cascade
4. Hypothèse de surdiagnostic
5. Hypothèse « annonciateur »
C. L’appareillage a-t-il un impact favorable sur le déclin cognitif ?
V. La presbyacousie : un enjeu de prévention
A. Les raisons de cette prévention
B. Les trois niveaux de prévention
1. La prévention primaire
2. La prévention secondaire
3. La prévention tertiaire
Partie 3 : Plaquette d’informations
I. Objectifs
II. Méthodologie : rédaction d’une plaquette d’informations à destination des professionnels de santé
A. Choix du public
B. Choix de mise en page
C. Moyens de diffusion
D. Discussion
Conclusion
Annexe : Plaquette d’informations
Bibliographie
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