Les critères formels et syntaxiques du nom propre

Les critères formels et syntaxiques du nom propre

Dès le 19ème siècle, l’onomastique occupe une place très importante sur le terrain des sciences, elle est définie comme l’étude historique des noms propres. Selon J. Dubois « l’onomastique est une branche de la lexicologie étudiant l’origine des noms propres ». Elle était développée grâce à des chercheurs qui ont posé des bases solides, à l’image le fondateur d’onomastique Albert Dozart a crée la revue internationale d’onomastique en 1949 qui codifie les méthodes et les formules de la discipline. Donc, l’onomastique s’est proposée d’étudier la formation des noms propres : noms de personnes, de lieux, confondus leurs origines ainsi que leur propagation, puisque les noms propres occupent une place importante dans la langue. Cette importance se manifeste dans leur omniprésence dans n’importe énoncé de la vie courante, de la littérature ou de la presse. Néanmoins le nom propre était tenu à l’écart des analyses linguistiques jusqu’à une époque récente. D’ailleurs certains linguistes ne lui consacrent que de petites considérations car l’étude du nom propre ne relève pas du domaine de la linguistique, ce qui justifie l’apparition insignifiante de celui-ci dans les travaux de la linguistique. Cependant, l’écartement du nom propre des études linguistiques ne signifie pas le désintéressement des linguistes car la linguistique est toujours omniprésente puisqu’il s’agit du langage et de la langue. Mais au contraire celui-ci est pris en charge par une autre discipline qui lui est propre vu le caractère d’identification. Benveniste, considère que « ce qu’on entend ordinairement par nom propre est une marque conventionnelle d’identification sociale telle qu’elle puisse désigner constamment et de manière unique un individu unique » (problèmes de linguistique générale, 1974).

En effet, l’onomastique comme étant une discipline scientifique, se consacre entièrement à l’étude de ce nom propre pour rendre compte des différents critères motivationnels sur lesquels s’appuient les modes d’appellations et d’attributions de noms car tout nom doit impérativement jouir d’une motivation au moment de son attribution. Alors elle est en rapport avec les racines de l’homme, et elle permet à ce dernier de plonger dans ses sources et connaitre ses origines, en analysant les noms propres qui constituent des repères d’identification de tout peuple. Pour J-Dubois, le nom propre « est une souscatégorie des noms formée de termes qui sémantiquement, se réfèrent à un objet extralinguistique, spécifique et unique, distingué par sa dénomination des objets de même espèce : le nom propre est autoréférentiel, n’a pas d’autre signifié que le nom lui-même ».

Les noms sont divisés en deux catégories distinctes. Les premiers à apparaitre dans l’anthroponymie sont les noms individuels qui sont divisés à leur tour en trois sortes : les prénoms (se sont ceux que l’on a reçus à la naissance, ils servent à identifier une personne au sein de la même famille, on peut posséder un ou plusieurs) ; les surnoms (se sont ceux que l’on peut recevoir au cours de la vie) ; les pseudonymes (se sont ceux que l’on se donne soi même pour des raisons spécifiques). Ces noms individuels disparaissent juste après la mort des personnes qui les portent. Ensuite ils sont apparus les noms collectifs(les noms de famille), se sont ceux qui nous intéressent dans notre recherche.

Aujourd’hui les noms de familles sont uniques et héréditaires. Cependant dans la plupart des civilisations antiques les individus se distinguent par un seul nom, mais peu à peu ce nom sera accompagné d’un surnom (nom de famille) qui devient ensuite héréditaire. L’omniprésence des noms propres dans tous les cadres de la vie nous amène à le choisir comme un sujet de recherche. Aussi sa place particulière qu’il occupe dans la langue. Alors il est impossible de lire un journal, regarder la télévision ou écouter la radio sans la présence des noms propres et moins encore quand on s’appelle entre nous ; chaque personne porte son propre nom qui la distingue par rapport aux autres personnes. Ce qui nous a conduits aussi à choisir ce sujet c’est la curiosité de chacun de nous à connaitre l’origine, l’histoire et la signification du nom qu’il porte, car il se considère comme un caractère d’identification. Notre connaissance des noms propres nous vient de l’enseignement primaire, où on apprend à distinguer un nom propre d’un nom commun. Ainsi la consultation d’une grammaire du français indique que le nom propre n’est pas un nom comme les autres, puisqu’il a pour particularité de s’écrire avec une majuscule, de ne pas généralement prendre la marque du pluriel et de s’employer sans déterminant. On peut également lire que le nom propre n’a pas de sens et même qu’il ne relève pas de la langue . Par conséquent, le nom propre repose sur un certain nombre de critères qui le déterminent, et qui reviennent dans les grammaires. On distingue quatre sortes de critères ; il ya des critères formels : majuscule, l’intraductibilité, absence dans les dictionnaires, des critères syntaxiques : absence de déterminant et de marque du pluriel, un critère sémantique : pas de contenu significatif, et un critère référentiel : unicité de réfèrent distingué.

Analyse morphologique

Le nom propre repose sur des propriétés particulières qui le distinguent du nom commun. Cette idée de distinction que nous avons apprise depuis nos premières années de scolarité et dans les manuels de grammaire française qui distinguent clairement le nom propre du nom commun grâce à un certain nombre de critères de différents niveaux d’analyse citant par exemple le niveau morphosyntaxique (le nom propre se construit souvent sans déterminant, ou dans quelques cas avec la présence obligatoire d’un seul article défini et il ne se fléchit pas) et le niveau formel(le nom propre s’écrit avec une lettre majuscule, ne se traduit pas et ne peut pas être trouvé dans les dictionnaires).

Le présent chapitre a pour objectif l’analyse des patronymes de deux régions « Beni Maouche et Boukhlifa »sur les plans morphosyntaxiques. En effectuant cette recherche, nous avons remarqué que certains noms propres sont apparus avec la construction de l’état civil algérien, cela nous a amené à poser une question sur les paradigmes lexicaux et morphologiques qui font construire ces appellations. Dans ce but nous allons amener une classification des patronymes constituant notre corpus selon leur appartenance aux différentes langues en particulier l’arabe et le berbère ayant traversées les deux villes. Le système d’appellation berbère a été influencé d’une part par le contact de langue source avec une autre langue qui est l’arabe, et d’autre part par la propagation de la civilisation arabo-musulmane ce qui fait l’apparition des noms hybrides, composés et déformés. De plus, après notre étude des noms propres, on a constaté que certains patronymes ont gardé leur forme morphologique d’avant de la mise en place de l’état du pays ; par contre un grand nombre de ces noms ont subi des modifications morphologiques ou phonétiques. Cela explique la stratégie suivie par la l’administration de colonisateur pour des causes militaires et politiques qui s’inscrivent toutes dans le but de diviser le peuple algérien en appliquant la règle « diviser pour régner ».

Les critères typographiques et syntaxiques du nom propre 

Les critères typographiques

La majuscule
Dans la plupart des manuels, le nom propre est décrit comme le nom commençant par une lettre majuscule « les noms propres prennent toujours une majuscule » (M.GRESIVE). La majuscule initiale est donc présentée comme le premier critère dans les grammaires scolaires et une marque spécifique et définitoire du nom propre. Or, l’usage de la majuscule n’est pas pertinent. D’abord il faut souligner qu’il y a de nombreuses langues sans majuscule, des langues dans les quelles la distribution majuscule-minuscule est arbitraire, des langues enfin tous les noms prennent une majuscule comme l’Allemand. De plus pour le français même, la majuscule est une marque conventionnelle. Si l’usage de la majuscule est fixé à présent, ce n’est pas le cas dans l’ancien français, puisqu’il ne s’est établi que progressivement et tardivement (autour des XVI et XVII siècle) avec le développement de l’imprimerie.

l’intraductibilité
De nombreuses définitions décrivent le nom propre comme un élément qui ne se traduit pas. Une étude réalisée sur la traduction des Misérables en Polonais montre que 99% des noms propres de l’ouvrage ne sont pas traduits. il est clair que beaucoup des noms ne sont pas traduits : Brest, Morlaix, Los Angeles ne se traduisent pas (on ne dit pas Les Anges). Or, les noms propres les plus célèbres subissent souvent une traduction et ont des versions étrangères, comme les noms des capitales : London-Londres/ Napoli-Naples, ou les noms des pays : Allemagne- Germany/ Algérie- Algeria. De plus, la raison des différences phonétiques dans les autres langues finissent par constituer une traduction : on a parlé de, Mao Zedong, qui est la nouvelle transcription de Mao-Tsé-Toung (Homme d’État chinois, il a dirigé le parti communiste chinois et il est un des principaux fondateurs de la République populaire de Chine) dans le but d’être plus proche à la prononciation réelle.

L’absence dans les dictionnaires
Les noms propres ne se figurent pas dans les dictionnaires .cette théorie parait irréfutable. Cependant, on possède d’une part certains noms propres qui sont présentés dans les dictionnaires de la langue quand il s’agit des noms propres considérés comme des noms communs (poubelle, sandwich…). Et d’autre part des autres noms qui ne sont pas des noms propres sont également absents dans les dictionnaires (mots argotiques, néologismes, termes spécialisés…). « L’exclusion des noms propres des dictionnaires n’est pas donc une règle, même si elle est très répandue, et une perspective encyclopédique peut la remettre en cause » (S.LORROY.2004). Enfin, il faut rendre compte qu’il existe des dictionnaires pour les noms propres. Et en retournant à ce critère, il est comme les autres, n’est pas un critère définitoire.

Les critères syntaxiques

Absence de détermination
La construction du nom propre sans déterminant est le critère syntaxique le plus fréquent dans les grammaires. Le nom propre constitue un groupe nominal à lui tout seul, alors que le nom commun doit être déterminé : Jack est malade / le garçon est malade. D’une part, on ne dit pas je veux visiter la Canada, mais on dit je veux visiter Canada, mais dans un registre familier ou dans certains français régionaux, on peut employer un article défini devant un nom de personne : Le Franck est l’intelligent de la classe. Il est un gentil garçon, le John. D’une autre part, le déterminant peut être une partie intégrée du nom propre, dans ce cas il s’agit toujours d’un article défini :
– soit ce qu’on appelle un article, qui est constitutif de certains noms de lieux (régions, fleuves …) : La Seine, Le Rhône et qui est conservé dans l’emploi en discours : je vais à la Seine .
– Soit un article qui accompagne régulièrement des noms des pays (la France, l’Italie, les Pays Bas) mais il disparait lors de l’emploi en discours quand il s’agit d’un nom féminin singulier : je vais en France, je vais en Italie. On ne dit pas : je vais en Pays Bas mais je vais aux Pays Bas (à les Pays Bas).
Concernant les noms de personnes qui ont un article défini « inhérent » soit totalement intégré(Lafontaine), soit détaché (la Roche) mais qui est fixe et inamovible, qui ne se combine pas avec le contexte : on dit la famille de la Roche et non la famille du Roche, alors qu’on dit la famille du Canidés. De plus, on peut employer un article défini devant des noms propres de journal( le Soir), ou d’hôtels( Le Saphir, l’Etoile de Mer) et aussi devant certain noms d’artistes, ou d’auteurs( l’Aristote, la Deneuve).
Enfin, le nom propre est construit avec un déterminant, quand il est accompagné d’adjectifs ou de noms communs. Il existe de nombreuses structures :
– Dét-Adj-Npr : La belle Rosa. Ma chère Julia.
– Dét-Nc-Npr : Le facteur Rachid. Le chanteur Idir.
– Dét-Np-de N : Le Max de Marie.
– Ce- Nc-de-Npr : Cet amour de Charles. Ce con de Lenoir.
– Ce- Npr-de-Nc : Ce Séguin de ministre. Son Antoine de mari.
– Npr-Le-Adj : Fatma la courageuse. Youcef le charmant.
– Npr- le- Nc : Aristote le philosophe. Jésus le chrétien.
– Dét-Npr-Adj : Ma Kabylie précieuse. L’Algérie magnifique.

Pour conclure, les cas de détermination des noms propres sont fréquents dans le discours mais un grand nombre des grammaires normatives les traitent comme une simple exception de la règle grammaticale .

Absence de marque du pluriel
Le nom propre ne se fléchit pas, il est donc invariable et insensible à son contexte syntaxique : il a la flexion fixe et ne change pas en nombre. Néanmoins, certains cas particuliers permet d’employer la marque du pluriel ; quand il s’agit des noms des familles : les Dubois vont présenter un spectacle, ou des noms des lieux lorsque le référent désigné est constitué d’une pluralité : les États-Unis, les iles Salomon. Selon les grammaires de Grevisse, la marque du pluriel doit être portée aux dynasties (les Bourbons), et aux noms géographiques qui désignent plusieurs réalités (les Amériques, les Gaules). Concernant les emplois figurés, l’usage n’est pas fixé, et on ne peut vraiment pas s’appuyer sur ce critère car on trouve tous les emplois possibles.

Conclusion générale

Le but de ce travail est d’analyser et de décrire les patronymes de la région de Beni Maouche et de Boukhlifa, dont l’intention principale était d’étudier les aspects morphologiques et sémantiques qui interviennent dans la formation et l’attribution de ces noms. Par ailleurs, au cours de cette étude l’objectif était de comprendre les tendances générales qui déterminent le fonctionnement général des patronymes dans ces deux villes, aussi de dégager les facteurs qui influencent sur le système patronymique, et enfin de relever les structures morphologiques et sémantiques des noms de famille, et leur mode d’attribution. Après l’analyse morphologique et lexico-sémantique des noms de famille effectuée sur un corpus de 200 unités lexicales, nous avons pu saisir les différents mécanismes morphologiques et lexicaux qui influençaient sur la création de ces patronymes. Alors, après avoir mené une analyse sur le niveau formel, nous avons pu dégager les différentes formes des patronymes, à savoir la composition, l’hybridation et la dérivation, et nous remarquons que la patronymie dans ces deux villes se présente majoritairement sous des formes simples, mais aussi une présence minoritaire des formes composées. Cette diversité morphologique au niveau des patronymes a pu présenter l’aspect sémantique qui caractérise les noms des deux villes étudiées, qui s’est inspiré de l’environnement social, idéologique, géographique et religieux de la région. En conséquence, la prédominance de ce genre d’appellations reflète la réalité sociale des habitants de Bejaia et identifier leurs préoccupations quotidiennes à savoir leur attachement à la religion, à leurs métiers, leurs relations avec l’environnement, les montagnes, la terre et la nature en général. En outre, l’importance de cette étude ne s’arrête pas à montrer que le nom propre est une charge sémantique, et un marqueur d’identité de la personne mais aussi de montrer les facteurs principaux( facteurs historiques, religieux, géographiques…) qui ont fait ressortir ces appellations.

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre I : Analyse morphologique 
1. Les critères formels et syntaxiques du nom propre
2. Les classements des patronymes
Chapitre II : Analyse sémantique 
1. Les critères sémantiques et référentiels du nom propre
2. La signification des patronymes
3. Typologie thématique
4. Etude quantitative
Conclusion générale

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