Du latin grammatica et du grec grammatikos « lettré » de gramma « lettre », la grammaire se définit comme l’ensemble des règles à suivre pour parler et écrire correctement une langue selon le dictionnaire Robert. Le même dictionnaire définit la syntaxe comme l’étude des règles grammaticales d’une langue. Elle est aussi l’étude descriptive des relations existant entre les unités linguistiques et leurs fonctions.
En d’autres termes, la syntaxe peut se définir comme étant la partie de la grammaire traditionnelle qui étudie les relations entre les mots constituant une proposition ou une phrase, leurs combinaisons et les règles qui président à ces relations, à ces combinaisons. Le Robert définit la sémantique, comme étant la branche de la grammaire qui étudie le sens du lexique, les relations de sens que les mots peuvent avoir mais aussi la signification des phrases.
Ainsi le thème de notre mémoire porte sur l’étude syntaxique et sémantique des constructions corrélatives dans cinq (5) romans africains francophones dont les auteurs sont à la fois de l’Afrique de l’Ouest dont trois auteurs (deux Sénégalais et un Malien), et deux de l’Afrique Centrale (deux Congolais). Il s’agit des romans suivants : ‘’Ramata’’ de Abass Ndione, ‘’Celles qui attendent’’de Fatou Diome, ‘’Oui mon commandant’’d’Amadou Hampaté Ba, ‘’Le Pleurer-Rire’’ de Henri Lopes et enfin ‘’Chien Méchant’’de Emmanuel Dongala.
La corrélation peut se définir comme étant un rapport syntaxique dans lequel au moins, deux propositions sont dépendantes l’une de l’autre de sorte que sans l’une, l’autre semble moins explicite et ambigüe. Chacune des deux propositions est alors la corrélative de l’autre. Si l’on s’en tient exclusivement à cette définition stricte et rigoureuse de la corrélation, on en arrive donc à la particularité de cette notion qui se distingue ainsi de la notion de coordination ou de subordination, même si, elle s’y rapproche des deux cas dans ses multiples et variées formes de réalisations. Ainsi « La corrélation est généralement repérable au fait qu’existent dans les deux propositions des éléments reliés. Ils peuvent être identiques, comme plus, ou différents, comme si et que … ».
Le Grand Robert de la langue française définit la corrélation comme étant : « Rapport existant entre deux choses, deux notions, deux faits dont l’un implique l’autre et réciproquement ».En effet, « Deux termes sont corrélatifs, quand ils sont entre eux dans un rapport de dépendance » qu’on peut lire dans Le Lexique de la terminologie linguistique de J. Marouseau , évoqué par les organisateurs du Colloque sur La Corrélation, Aspects Syntaxiques et Sémantiques, Genève du 1-3 Septembre 2011 dans leur Appel à Communications.
CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE
CADRE THEORIQUE
PROBLEMATIQUE
La corrélation dans le cadre de la phrase complexe et au sens stricte du terme est une union, une association de deux propositions, deux séquences totalement dépendantes l’une de l’autre, mais aussi impliquant plus ou moins entre elles une relation logico-sémantique. L’interdépendance des propositions dans les constructions dites corrélatives est un aspect très important de la notion de corrélation et qui fait toute sa particularité distinctive d’avec les autres modes de complexification de la phrase à savoir la coordination juxtapositionnelle ou conjonctionnelle et la subordination qui constituent les modes les plus privilégiés. En effet Thomas Verjans dans son ouvrage intitulé ‘’La Subordination ’’ en donne les définitions suivantes :
‘’ La juxtaposition se définit comme l’instauration d’une relation entre deux termes, deux syntagmes ou deux propositions, de même niveau hiérarchique, et sans élément spécifique, sinon la ponctuation, qui la matérialise. Elle est parfois présentée comme une coordination. La coordination se définit comme l’instauration d’une relation entre deux termes, deux syntagmes ou deux propositions, également de même niveau hiérarchique, la relation se trouvant cette fois matérialisée par une conjonction de coordination, appartenant à la fameuse liste close : mais où et donc or ni car. La subordination se définit comme l’instauration d’une relation hiérarchique et unilatérale entre une proposition dite rectrice et une proposition dite subordonnée. On ajoutera que cette relation est récursive, en ce sens qu’une proposition subordonnée peut elle-même en inclure une autre qui peut elle-même en inclure une autre etc…la limite de ces inclusions successives n’intervenant de fait que pour des raisons cognitives et mémorielles. La corrélation correspond, dans son principe général, à une relation d’éléments qui s’impliquent réciproquement.’’
Ainsi, Thomas Verjans pouvait se référer à la définition de la corrélation donnée par les auteurs de ‘’La Grammaire d’aujourd’hui’’ pour étayer la sienne. En effet nous lisons dans ‘’La Grammaire d’aujourd’hui’’ : « La corrélation se caractérise en effet par l’absence totale d’indépendance entre les éléments qu’elle conjoint, et par la symétrie entre deux éléments interdépendants. » Selon les auteurs de ‘’ La Grammaire d’aujourd’hui’’, la corrélation est au carrefour de la parataxe et de l’hypotaxe, ce qui fait qu’elle constitue donc la base de la phrase complexe. Ainsi, la corrélation s’associe à la juxtaposition, la coordination et la subordination sans pour autant s’y substituer, d’où toute sa complexité. C’est dans cet ordre d’idée que nous nous posons la question à savoir si le phénomène de la corrélation se situe-til au niveau de sa syntaxe ou de son sémantisme, ou s’il relève des deux niveaux à travers une étude syntaxique et sémantique des constructions corrélatives relevées dans notre corpus.
DEMARCHE
ANALYSE DOCUMENTAIRE
Avant d’aborder cette étude syntaxico-sémantique sur les constructions corrélatives, nous avons jugé nécessaire comme de coutume à mener en revue quelques études ainsi que quelques travaux antérieurs qui ont été faits sur ledit sujet. Comme on a l’habitude de le rappeler : « Nous sommes des nains perchés sur des épaules de géants », aussi une recherche scientifique, si profonde soit-elle, doit s’appuyer sur les recherches qui l’ont précédée. Ainsi certains grammairiens se sont prononcés sur la corrélation dont nous envisagerons ici de faire passer en revue leurs résultats ou du moins leurs points de vue sur la question et enfin envisager à notre tour, la possibilité d’y apporter notre minime et modeste contribution pour l’avancement de la science.
LES CORRELATIVES NON HIERARCHISANTES
FONCTIONNEMENT SYNTAXIQUE
Les corrélatives non hiérarchisantes sont des constructions qui établissent une relation bilatérale, une interdépendance totale entre les propositions conjointes. Ces types de constructions qui, au plan formel et qui se superposent à la coordination – au sens qui inclut la juxtaposition – selon le terme de Djibril Thiaw, n’établissent donc aucun rapport d’indépendance ou de dépendance entre les propositions liées, d’où Modou Ndiaye dira qu’il n’est pas possible de déterminer une principale et une subordonnée au plan syntaxique . Ces réalisations dans notre corpus ont en tête des marqueurs comme plus, moins, autant, tantôt, soit, tel; et qui sont généralement réédités.
Le syntagme plus…plus
Ce type de construction est placé sous le compte de la macrosyntaxe. Elle sert à relier uniquement des propositions. Elle amène des constructions que M. J. Savelli appelle les ‘’Siamoises ’’ et que Modou Ndiaye range parmi les corrélatives distributives. Ces constructions ont en leurs têtes généralement, des marqueurs comme plus, moins réédités. Dans les exemples relevés dans notre corpus, la combinatoire des marqueurs est libre. Pour l’ensemble de notre corpus, on en a relevé vingt-quatre (24) en tout.
(1) ‘’ Il se trouve que, plus la somme détournée était élevée, plus l’impunité était garantie, …’’ (Ramata, P. 381)
(2) ‘’ Plus on approchait de la date du départ, plus le général passait des heures avec le protocole et son cabinet.’’ (Le Pleurer-Rire, P. 77)
(3) ‘’Plus on empêchait, affirmait-il, le peuple de se moquer de ses dirigeants et de rouspéter à tout ou à raison, plus on cristallisait soit des foyers de violences, soit des masses d’inertie, compliquant ainsi les taches du gouvernement.’’(Le Pleurer-Rire, P. 114) .
Les phrases citées ci-dessus ont été longtemps analysées comme des propositions liées par juxtaposition ou par coordination par les grammairiens ou linguistes alors qu’elles relèvent d’un autre type de liaison qu’on appelle corrélation. En effet, ces types de réalisations ressemblent à la juxtaposition et à la coordination au plan formel par la marque de la ponctuation qui est la virgule placée au milieu des deux propositions, et par une conjonction de coordination généralement la conjonction ‘’et’’ placée devant le terme corrélateur de la seconde proposition. Toutefois il est évident de se rendre compte aussitôt qu’aucune de ces deux propositions n’est indépendante ni dépendante de l’autre, les deux propositions étant dans une relation d’interdépendance d’où l’épreuve de suppression fait qu’aucune des propositions liées ne peut se suffire à elle seule , dira Henri Bonnard. Ce lien de corrélation est établi par l’adverbe de degré ‘’plus’’ généralement en position frontale de chaque proposition. Les propositions ainsi engagées dans la configuration corrélative sont en effet dans une relation de dépendance bilatérale et de symétrie parfaite.
Syntaxiquement, on ne saurait dire :
? ‘’ …, plus la somme détournée était élevée.
? ‘’ plus l’impunité était garantie.
? ‘’ Daba les entendait, et plus elle les écoutait.
? ‘’ plus elle s’interrogeait.
? ‘’ Mais plus ma voix montait.
? ‘’ plus elle se fermait et m’échappait.
En analysant chacune de ses propositions prises de façon isolée, on se rend compte facilement qu’elles sont solidaires et inséparables comme les ‘’sœurs siamoises ’’ selon les termes de Lilian Stage. Les premières propositions sont toutes suspensives et ont besoin de leurs binômes pour avoir un sens complet. L’adverbe plus dans la première proposition fait appelle à son homologue plus dans la seconde proposition qui le suppose. Cette implication mutuelle de plus…plus établit la corrélation et fonde la complémentarité syntaxique entre les deux propositions, « L’ensemble est couvert par une prosodie englobante…, » selon les termes de Modou Ndiaye. Dans ces constructions, la première proposition contenant la cause dont l’effet sera exprimé dans la seconde proposition, n’admettent donc point l’inversion des propositions au risque de perdre le sens initial de la phrase.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : CADRE THEORIQUE ET METHODOLOGIQUE
CHAPITRE I : CADRE THEORIQUE
I.1. PROBLEMATIQUE
I.2. CONTEXTE ET JUSTIFICATION
I.3. QUESTIONS DE RECHERCHE
I.4. OBJECTIFS
I.5. HYPOTHESES
CHAPITRE II : DEMARCHE
II.1. ANALYSE DOCUMENTAIRE
II.2.DEFINITION DES CONCEPTS CLES
II.3. CHOIX ET PRESENTATION DES OUVRAGES
II.4. METHODOLOGIE
DEUXIEME PARTIE : LES CORRELATIVES NON HIERARCHISANTES
CHAPITRE III : FONCTIONNEMENT SYNTAXIQUE
III – 1 – Le syntagme plus…plus
III – 2 – Le Syntagme tantôt…tantôt
III – 3 – Le Syntagme autant…autant
III – 4 – Le Syntagme Soit…Soit
III – 5 – Le Syntagme Tel…Tel
CHAPITRE IV : EFFET SEMANTIQUE
IV – 1 – Le Syntagme Plus…Plus
IV – 2 – Le Syntagme Tantôt…Tantôt
IV – 3 – Le Syntagme Autant…Autant
IV–4 – Le Syntagme Soit…Soit
IV – 5 – Le Syntagme Tel…Tel
TROISIEME PARTIE : LES CORRELATIVES HIERARCHISANTES
CHAPITRE V : FONCTIONNEMENT SYNTAXIQUE
III – 1 – Le Syntagme Si…que
III – 2 – Le Syntagme Tellement…que
III – 3 – Le Syntagme Tant…que
III – 4 – Le Syntagme Tel…que
III – 5 – La Subordination inverse
CHAPITRE VI : EFFET SEMANTIQUE
VI – 1 – Le Syntagme ‘’ Si … que ‘’
VI – II – Le Syntagme Tellement…que
VI – III – Le Syntagme Tant…que
VI – IV – Le Syntagme Tel(le)…que
VI – V –Le Syntagme A peine…que
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXE
TABLE DES MATIERES