Les conséquences du processus de socialisation

Valeurs : des objectifs artistiques mouvants ?

Selon l’association Artfactories/Autre[s]Parts , à ses débuts, L’Élaboratoire s’est voulu un lieu autogéré et collectif, un lieu de production artistique pluridisciplinaire (art de rue, danse contemporaine, théâtre, musique, vidéo, etc.), partagé, qui mettait à disposition des lieux de répétitions, des ateliers de création et des espaces collectifs.
Ses objectifs furent d’accueillir des compagnies, groupes de musique, artistes, mais également des associations. Ce fut aussi un espace de production et de coproduction de spectacles grâce à la mise en place de résidences artistiques. Mais aussi grâce à la volonté de dynamiser les projets artistiques du collectif, ils réalisèrent des actions culturelles en lien avec ceux-ci. L’enjeu principal du collectif fut de partager un lieu de travail et de vie afin de mutualiser les informations, les connaissances et les compétences afin de rendre possible la convergence artistique et culturelle . Mais ce fut surtout construire et s’intégrer dans le paysage culturel rennais afin d’être considéré comme « une vitrine des arts de la rue à Rennes sans pour autant être institutionnalisé ». Aujourd’hui, c’est encore un lieu de recherche artistique et d’expérimentations sociales et culturelles. Mais comme l’explique Jean-Pierre Boucher, il existe beaucoup de dissensions au sein du collectif . Selon lui, depuis la naissance de La Villale nombre d’artistes dans le collectif a diminué. Au début, ce sont essentiellement des artistes qui ont fait le collectif. Selon Jean-Pierre  Boucher, une majorité des artistes qui évoluent aujourd’hui à L’Élabo n’y vivent pas. Cependant, même s’il y a beaucoup d’ Élaborantins qui ne sont pas des artistes il en existe encore comme Benoît Guerin, comédien et crieur public, Camille Péricaud, plasticienne et circassienne ou encore David Bienassis, peintre et plasticien . En effet, c’est encore un lieu de résidences artistiques, de répétitions, d’événements artistiques et culturels, d’ateliers et de stages. Celui-ci a de nombreux espaces (ateliers couture, ateliers vélo, ateliers soudure, etc.) et salles de répétition, mais il propose aussi plusieurs événements au cours de l’année. Il y a par exemple Les Répèt’Publiquechaque troisième dimanche du mois qui présente les résidences en cours à L’Élabo, ou encore Le Marché de Noëlqui a lieu plusieurs week-ends du mois de décembre et qui présente plusieurs artisans du collectif et extérieur à celui-ci dans une ambiance festive. Récemment, le collectif a organisé ses vingt ans. Cet événement symbolique propose un ensemble d’expériences artistiques durant vingt jours à travers vingt lieux culturels de la ville de Rennes, ce qui affirme le positionnement artistique actuelle du collectif.

Conduites : autogestion et démocratie participative

L’Élaboratoire est un collectif autogéré qui fonctionne sur le modèle de la démocratie participative et de l’implication personnelle.
L’association ne dispose pas de salariés. Par la mise en place d’un système de participation elle tente d’expérimenter un « vivre autrement », en dehors du système marchand. Par ce système, les résidents s’engagent à nettoyer, entretenir et améliorer leur espace de travail et les espaces collectifs. Ils s’engagent également à présenter leur travail aux autres Élaborantins,à s’investir et enfin à être une force de proposition dans la vie associative du collectif.
De plus, l’association cherche à être indépendante financièrement par la mise en place d’une cotisation. Dans sa récente charte, il est possible d’adhérer à L’Élaboratoire à la journée pour un euro et par an pour trente euros (cent euros pour les groupes de plus de trois personnes) .Enfin, le collectif met à disposition ses locaux aux artistes externes qui désirent utiliser ses espaces en échange d’une Participation aux frais (PAF).
Il n’existe pas de critères de mise à disposition des lieux de travail et non plus de critères de sélection esthétique. Il suffit de s’inscrire sur le planning et de régler sa cotisation.
Selon sa charte, il suffit de contacter le collectif ou de se présenter à une réunion pour exposer son projet. Néanmoins, le collectif a la possibilité de se rétracter s’il survient une incertitude « sur une question matérielle ou humaine » . En effet, il semble que les membres du collectifpréfèrent appuyer leurs choix sur la rencontre et l’échange. Cela permet d’éviter d’accepter les personnes qui ne croient pas aux valeurs du collectif et qui utilisent simplement les dispositifs proposés par L’Élaboratoire, comme la facilité de ne pas payer de loyer. Selon Jean-Pierre Boucher, aujourd’hui beaucoup d’ Élaborantins sont des opportunistes à la suite d’une perte de la philosophie artistique des débuts . Si le collectif accueille une nouvelle personne au sein de ses lieux, un accord moral qui définit une éthique commune, la durée du séjour et les modalités de mise à disposition du lieu est mis en place.
Chacun des espaces du collectif dispose d’un référent. Les personnes qui souhaitent avoir accès aux ateliers proposés doivent demander l’accord préalable aux référents.
Néanmoins, tout le monde se partage les tâches – ménage, entretien, etc. – au quotidien.
Le collectif souhaite « un outil adaptable et géré par les utilisateurs, à travers des prises d’initiatives, des décisions et des responsabilités » . Quant aux espaces de création, ces personnes doivent s’adapter au planning mis en place. Concernant les lieux de vie, Le Terrain des chap’ et une partie du 48, le même fonctionnement doit être en vigueur étant donné que le collectif a la volonté de ne pas séparer la vie quotidienne et les activités artistiques.
Lemanque de structuration du collectif et sa préférence pour le partage, l’échange et la coopération informelle et spontanée au niveau de la gestion du lieu ne nous permet pas d’établir un descriptif précis du fonctionnement et de l’organisation de L’Élaboratoire.
Cependant au cours des années, le collectif met en place des réunions tous les mercredis soirs qui structure en partie son organisation. Depuis l’écriture de son projet provisoire en 2014, la direction du collectif estunecollégialité. De plus, chaque année celui-ci met en place un renouvellement des personnes qui le représente et qui correspond à cette volonté d’une gouvernance horizontale collective, plus adaptéà la clarification deson projet.

Paris

Après avoir présenté les collectifs rennais nous allons, dans ce chapitre, réaliser la description des projets, démarches, enjeux artistiques, culturels, politiques et/ou sociaux, les fonctionnements, les modes d’organisation et les histoires du Théâtre de verreet du 59 Rivoli, collectifs parisiens étudiés.
En détaillant ces aspects factuels, nous comprendrons les divergences par rapport aux NTA rennais.

Le Théâtre de verre

Le Théâtre de verreest le nom donné par l’association Co-arterà ses espaces occupés. Cette association est fondée en 2003 par Luis Pasina, artiste plasticien engagé dans l’histoire du squat artistique depuis 1976 en Europe. Dans une volonté de liberté, d’autonomie et d’écologie urbaine , cette association mène une existence nomade et éphémère en installant son Théâtre de verre dans différentes friches de Paris.
Lieu autogéré, convivial et pluridisciplinaire, Le Théâtre de verre est en quête d’une alternative sociale, politique et artistique du milieu institutionnel de l’art à Paris. Cet objectif transparaît à travers la mise à disposition d’espaces pour des ateliers, des spectacles, des stages, des expositions et des conférences organisés de façon alternative et destinés à démocratiser la culture. L’association interroge cette notion de démocratisation culturelle à travers un travail de recherche sociale. Son leitmotiv est participer, rencontrer et mutualiser.

Un nomadisme délibéré

Le principe premier du Théâtre de verre est le nomadisme. Selon Luis Pasina ces relogements consécutifs permettent à l’association d’être toujours en quête de nouveauté, de vitalité et d’autonomie pour ainsi éviter l’institutionnalisation . Aussi, depuis sa création, l’association Coartera déjà occupé cinq lieux à travers Paris.
Lors de notre entretien avec Luis Pasina, le 20 avril 2016, il expose l’histoire du collectif. Nous compléterons cette source par les informations récoltées dans les entretiens réalisés avec les élus et autres partenaires , puis par des sources journalistiques et administratives.
C’est le 21 mars 2003 que le collectif du Théâtre de verreoccupe son premier lieu dans une verrerie/miroiterie désaffectée au 6 impasse Barrier dans le 12e arrondissement de Paris. L’association Co-arter est créée la même année pour soutenir le projet.
Dans une logique de demande de reconnaissance de la culture « squat » par les pouvoirs publics, le collectif s’engage dès cette époque dans un processus de négociation avec la mairie du 12e arrondissement pour obtenir un relogement. Malgré le soutien des élus Verts et des gens du quartier, la mairie de Paris qui est propriétaire de cette friche a pour projet la construction de logements sociaux et d’une crèche . Elle décide d’expulser le collectif le 13 septembre 2004. L’association n’est pas relogée.
En octobre 2004, le collectif du Théâtre de verre décide d’ouvrir un autre squat dans un ancien dépôt de La Sernam – société française qui appartient à La SNCF- au 25/27 rue de l’Échiquier dans le 10e arrondissement de Paris. Le collectif développe alors son activité, augmente le nombre de ses adhérents, touche de plus en plus d’artistes et cherche à mettre en place une convention d’occupation précaire avec La SNCF.
Pourtant, ICF Habitat sablières – filiale d’ ICF Habitat en Île-de-France qui a pour mission de s’occuper des biens immobiliers de La SNCF – entame un procès pour occupation de fait. À travers une forte médiatisation de leur situation et d’une activité productive, Le Théâtre de verrereçoit le soutien de la mairie du 10e arrondissement et d’élus parisiens qui se placent en médiateurs entre la filiale et le collectif. Ce soutien permet à ce dernier de rester dans l’ancien dépôt rue de L’Échiquier jusqu’en 2006. Jean Rolland, chef de bureau des bâtiments culturels à la Direction des affaires culturelles de la mairie de Paris, situe l’intervention de la ville à cette période.
C’est alors que s’engage un nouveau dialogue avec les élus, par la volonté politique de Christophe Girard, adjoint à la culture de l’époque à la mairie de Paris. L’association et son Théâtre de verre détiennent pour la ville de Paris un intérêt local, que nous détaillerons plus tard dans ce mémoire. Dès lors, la ville s’engage à trouver un nouveau lieu au collectif, dans son parc de bâtiments, afin qu’il puisse développer son activité dans un cadre légal . C’est ainsi que la mairie de Paris lui propose de s’installer dans le futur 100 , situé dans le 12e arrondissement, en compagnie d’autres collectifs de squatteurs. Luis Pasina explique que les critères du dessein général sont flous. Le collectif souhaite que son propre projet soit reconnu et respecté . C’est alors qu’il refuse la proposition des pouvoirs publics.
Durant l’année 2006,Le Théâtre de verreest relogé par la ville de Paris au 5 impasse Bonne Nouvelle dans un ancien parking désaffecté du 10e arrondissement de Paris. Il signe une convention d’objectifs liant Co-arter à la Direction des affaires culturelles (DAC). Cette convention permet à l’association d’obtenir une friche qui est mise à disposition par la ville de Paris moyennant un loyer modéré et une occupation prédéterminée par le projet en cours et sans pouvoir excéder trois ans. En effet, en 2007 la ville de Paris doit mettre en place une réforme sur la gestion du domaine de celle-ci.
Cette réforme permet aux associations qui occupent des bâtiments municipaux, s’ils ont des missions particulières identifiées, d’acquérir une légitimité à l’occupation jusqu’au début des travaux . Ces bâtiments se nomment « lieux intercalaires ».
À l’automne 2009, la mairie demande au collectif de quitter l’ancien parking désaffecté . Le Théâtre de verre se voit ainsi délocalisé au 17 rue de la Chapelle dans le 18e arrondissement. Selon Luis Pasina, le collectif fut mal accueilli par les associations du quartier qui acceptèrent mal l’idée que ce collectif étranger au 18e occupe un lieu que les associations locales se sont vues refuser depuis des années.
Malgré cela, le collectif continue son développement et sa notoriété s’accroît.
Quand en juillet 2014, Le Théâtre de verreest appelé à quitter le 17 rue de la Chapelle, il impose à ses interlocuteurs de lui trouverunnouvel espace. Celui-ci ne doit en aucun cas être d’une surface inférieure à 1000 mètres carrés. Le collectif est intransigeant sur cette demande qui lui permet de préserver ses activités et son avenir. Alors quand la ville lui propose un lieu de cinq cents mètres carrés, l’association décide de manifester sur le parvis de l’Hôtel de Ville et redemande un lieu qui lui correspond. La manifestation est interdite, mais elle décide de la maintenir.

Valeurs : un travail de proximité, d’expérimentation solidaire et citoyenne par la création

Luis Pasina a la volonté de fonctionner en marge : « j’ai toujours eu une tendance marginale. J’ai toujours été résistant à la société » . Il tente de mettre en place avec l’association Co-arter et son nomadisme une alternative sociale, politique et artistique dans le milieu institutionnel de l’art parisien.
Grâce à l’art, la liberté se conquiert dit Luis Pasina . Alors par la sollicitation de la créativité de chacun, le collectif tente de mettre en pratique une alternative sociale fondée sur des « valeurs spirituelles et humanistes » afin de réinventer les relations entre les individus. L’associationCo- arterse place dans un processus d’écologie urbaine . Une alternative est proposée dans la construction d’un lieu populaire qui réinvente et interroge l’investissement de friches, le processus de création de l’art et sa mise en relation avec un public et son environnement. Et ceci par la non-sélection qui concerne l’accès aux espaces proposés par le collectif, par la mutualisation des outils, des savoirs et savoir-faire de la création. Mais aussi par la mise en commun des moyens de production, d’expression et de diffusion de l’art dans le but de redonner du sens à celui-ci. Pour ce faire, il propose des espaces de travail artistique (neuf espaces polyvalents, dont une salle de danse et une salle de cirque, un studio musique et un laboratoire photo), des espaces dédiés à des ateliers, des spectacles, des répétitions, des stages, des expositions et des conférences mis à la disposition de tous. Ces espaces et cette quête de mutualisation et de transmission sont aussi liés à la volonté d’aider les jeunes créateurs.
Mais le collectif travaille aussi à enrichir la vie culturelle du quartier dans lequel il est inscrit. Il propose des activités culturelles et artistiques et son soutien aux initiatives locales. Le Théâtre de verre est un lieu de diffusion et de création pluridisciplinaire, il ouvre un espace d’accueil de dix heures à vingt-deux heures, sept jours sur sept, pour qui veut venir se réunir. Il propose aussi plusieurs ateliers et stages, comme du taï-chi, du tango, du théâtre et un bal populaire mensuel.
À travers ces propositions, l’idée est de transformer ses pratiques par la mise en place d’une communauté autonome et expérimentale.

Conduites : un fonctionnement lié à l’itinérance du projet

Dans une volonté de mutualisation, l’association dispose de plusieurs espaces.
En échange de leurs occupations, elle demande une faible participation aux frais de fonctionnement et une cotisation annuelle. Pour les artistes en résidence, qui évoluent dans le lieu sur des périodes plus longues, l’association demande aussi de participer au fonctionnement global du Théâtre de verre, comme le ménage. De plus, ces artistes ont la possibilité de renouveler leur résidence pour trois mois et de recevoir des aides financières, matérielles et techniques de l’association.
Le collectif tente de ne pas faire de hiérarchie artistique par la non-sélection pour l’occupation de ses espaces, car il se veut un lieu d’ouverture et de liberté d’expression, un lieu d’expérimentation. Il accepte toutes les propositions qu’il reçoit et fait ses choix en fonction des disponibilités des espaces. Ainsi il refuse le cadre normatif du choix d’une identité artistique précise.
Le collectif se finance en partie avec la cotisation annuelle des adhérents et la participation aux frais de fonctionnement des personnes qui utilisent les services du théâtre. La ville de Paris, qui lui met à disposition un lieu intercalaire, considère ce soutien comme une subvention indirecte, un soutien en nature . Effectivement, la valeur actuelle du 12 rue Henri Ribière s’élève à 250 500 euros de loyer annuel et l’association ne paye qu’une redevance de 9630 euros sans charges. De plus, la Région Île-de-France finance quarante pour cent des salaires de deux emplois-tremplins . Pour sa part, Pôle Emploi finance à hauteur de soixante à soixante-quinze pour cent des salaires pour les Contrats uniques d’insertion (CUI) et les emplois d’avenir . Enfin, La Ligue de l’enseignement permet à l’association d’accueillir trois volontaires en service civique. Ces collaborateurs permettent au Théâtre de verre de pérenniser et de consolider son fonctionnement par le recrutement de personnes pour la communication, l’administration, la comptabilité, le graphisme, la régie, etc.
Cependant, du fait du caractère nomade du Théâtre de verre, l’association doit adapter son fonctionnement et son organisation aux configurations particulières des lieux occupés. Elle doit, à chaque déménagement, « inventer une nouvelle manière d’agencer la mutualisation des processus de création » . Cela ne permet pas toujours au collectif d’être stable dans sa structuration.

Le 59 Rivoli

En proposant une alternative culturelle, Le 59 Rivolicherche à mettre en place au cœur de Paris, dans le premier arrondissement, un projet social et artistique. Gaspard Delanoë, artiste et cofondateur du 59, l’appelle un « after squat » . Par là, il considère que ce lieu garde l’essence même de l’esprit « squat », malgré le fait qu’il se régularise et s’officialise. Ce centre artistique pluridisciplinaire se compose de six étages, de 1300 mètres carrés et est ouvert six jours sur sept. Il est utilisé pour la création et pour la diffusion/exposition d’œuvres d’art.

En finir avec l’itinérance

Lors de notre entretien du 22 avril 2016, Gaspard Delanoë explique les raisons de la légalisation du 59 Rivoli et les détails de ce processus. Nous compléterons ces informations par celles récoltées dans l’entretien réalisé avec Sylvie Gurski, chargée des collectifs d’artistes à la Direction des affaires culturelles de Paris , puis par des sources journalistiques et administratives.
En 1980, le mouvement des squats d’artistes démarre à Paris. Gaspard Delanoë explique qu’il découvre ce mouvement en 1994 . En 1996, il intègre le squat du Pôle pi . À la suite de l’expulsion de cette occupation, il continue d’ouvrir d’autres squats tels que celui de La Bourse dans le deuxième arrondissement de Paris. À la fermeture de ce dernier,le 4 septembre 1999, Gaspard Delanoë et ses amis artistes, Kalex et Bruno (ils appellent leur trio « KGB »), pénètrent dans un ancien immeuble du Crédit lyonnais situé dans le premier arrondissement au 59 rue de Rivoli. Ils cherchent un endroit pour créer, exposer et vivre. Le trio se retrouve face à un bel immeuble de six étages et de 1300 mètres carrés laissé à l’abandon.
Pendant un mois, le trio, aidé d’une dizaine d’autres artistes, travaille à réhabiliter ce bâtiment devenu insalubre. Le 59 ouvre ses portes aux visiteurs et prend le nom de Chez Robert électron libre, évoquant un écriteau qui existait au rez-de-chaussée. Des vernissages, performances, spectacles et expositions gratuits sont organisés dès le départ.

Prise en charge des coûts : la convention d’objectifs

Après avoir soutenu les collectifs par la mise à disposition d’un lieu conventionné et de sa mise aux normes, le soutien des pouvoirs publics se fait dans la prise en charge d’une partie des coûts de la légalisation.
Les pouvoirs publics contribuent de manière importante à la prise en charge des frais occasionnés par la légalisation, la mise aux normes et le fonctionnement de ces lieux.
L’audit réalisé par la ville de Paris précise que pour Le 59 Rivoli, celle-ci achète l’immeuble en 2005 pour 4,6 millions d’euros. De plus, elle demande à l’association un loyer modeste de huit cent euros par an alors que le loyer est estimé, compte tenu de la situation immobilière parisienne, à 280 000 euros. Enfin, les charges d’un montant de 5575 euros, qui sont normalement payés par le collectif n’ont jamais été réclamées par la ville de Paris.

Contraintes et perspectives à la socialisation

Par un contrôle gestionnaire, respectant le droit, l’État bureaucratique diffuse et impose certaines valeurs, normes et conduites comme légitimes dans l’imaginaire collectif et pousse à l’uniformisation bureaucratique et à la régularisation de ces nouveaux espaces. « Les inégalités de pouvoir fondées sur des normes ou des règles sociales [ou légales et institutionnelles] permettent aux individus d’accepter de se soumettre aux exigences des personnes en situation d’autorité (puisque ce comportement est jugé compatible avec le devoir d’obéissance inhérent à ces relations) ».
Ces NTA qui respectent les procédures qui émanent du droit voient leurs occupations se légaliser pour enfin se régulariser, se structurer et se professionnaliser de manière identique et similaire aux institutions qu’ils critiquent. Par cette homogénéisation des usages, leurs valeurs et conduites originelles tendent à disparaître. Néanmoins, l’État aujourd’hui n’est plus seul détenteur du pouvoir. La décentralisation et la participation de plus en plus importante des collectivités locales et des associations dans l’action publique remettent en cause la notion d’État comme figure centrale du pouvoir.
Comment les pouvoirs publics et les NTA, malgré une domination légale et rationnelle, arrivent-ils à faire perdurer les valeurs et conduites originelles des collectifs ?
Nous étudierons ici les contraintes dégagées de cette socialisation et les alternatives proposées par les NTA et leurs partenaires pour s’en dégager.

L’horizontalité, le nomadisme et l’autonomie financière

Afin de garder une part d’autonomie dans leur projet, les collectifs cherchent à utiliser plusieurs dispositifs comme l’horizontalité, le nomadisme et l’autonomie financière. Malgré une perte de liberté, cela permet « une continuité qui reflète les tentatives des militants d’appliquer leurs idées d’une société idéale à leur propre mouvement » , note Hans Pruijt. Malgré un lieu régularisé, « la résistance n’est pas finie », selon Luis Pasina. Il est important de se questionner sur la manière de faire perdurer l’espoir et l’utopie, car celui-ci ne croit pas que « l’adaptation inconditionnelle au modèle dominant social soit un signe de bonne santé ».
De manière à être une alternative au modèle économique dominant et à ses formes d’organisations sociales entrepreneuriales de division du travail et de hiérarchisation, ces lieux choisissent un mode d’organisation horizontale pour une prise de décision par consensus.
Dans l’analyse institutionnelle, les chercheurs parlent d’ « Effet Lapassade » en référence au sociologue Georges Lapassade et à son analyse de l’autogestion pédagogique. Cet effet serait l’invention de nouvelles techniques pour détourner le fonctionnement d’un système institutionnel verrouillé, comme avec l’autogestion mise en place à l’école avant et après mai 1968 que le sociologue étudie. Ici, l’organisation horizontale permet aux collectifs de ne pas se laisser enfermer dans une organisation qui serait la reproduction sociale du système bureaucratique.

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Table des matières
Remerciements
Sommaire
Introduction
Partie I. Présentation des lieux étudiés
Chapitre I. Rennes
Chapitre II. Paris
Partie II : Du développement de la mobilisation
Chapitre I. De la protestation à la considération
Chapitre II. De la considération à la négociation
Partie III. Les conséquences du processus de socialisation
Chapitre I. Contraintes et perspectives à la socialisation
Chapitre II. La production et le maintien d’un « nous » dans la socialisation
Conclusion
Bibliographie
Sources
Annexes
Entretiens
Table des matières

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