Les conséquences de la négligence chez les enfants
Les conséquences de la négligence sur le développement d’un enfant sont nombreuses. Le fait d’être laissé seul ou d’avoir un parent inaccessible sur le plan émotionnel peut entraîner un sentiment de stress intense chez l’enfant, une peur de l’abandon, un sentiment d’impuissance ou un sentiment de vide. Des difficultés émergeant de la relation parent-enfant favorisent, chez les bébés négligés, des perturbations sévères dans la relation d’attachement (Young, 2005), telles que le développement d’un type d’attachement insécure ou d’un attachement désorganisé envers la mère (Agence de la Santé et des services sociaux de la Mauricie et du Centre-du-Québec, 2012; Barnett, Ganiban & Cicchetti, 1999). Sroufe (2005) ajoute que le type d’attachement désorganisé est, en lui-même, un des facteurs permettant de prédire les difficultés d’adaptation tout au long de la vie. Smith et Fong (2004) identifient, quant à eux, des conséquences de la négligence en ce qui concerne le développement physique, cognitif et comportemental ainsi qu’en ce qui a trait au développement social et émotionnel de l’enfant.
À court terme, les conséquences chez l’enfant se définissent principalement par la tristesse, l’apathie, la passivité ainsi que les interactions sociales déficientes (Agence de la santé et des services sociaux de la Mauricie et du Centre-du-Québec, 2012; Young, 2005).
Durant les cinq premières années de vie, certains sentiments sont observés chez l’enfant négligé, tels qu’un sentiment de honte, de doute ou même de peur envers la figure parentale qui peut se transformer en évitement (Agence de la santé et des services sociaux de la Mauricie et du Centre-du-Québec, 2012) .
L’implication parentale, qu’est-ce que c’est?
Bien que plusieurs auteurs aient souligné l’importance d’impliquer les parents dans le processus d’intervention, peu d’études définissent clairement le concept d’implication parentale. Selon Pleau (2013), le peu d’écrits sur la question pourrait s’expliquer par le fait que le concept d’implication parentale ne semble utilisé qu’au Québec. La recension des écrits de Littel, Alexander et Reynolds (2001) démontre d’ailleurs que les études publiées en langue anglaise préfèrent les termes «engagement», «participation», «coopération» et «conformité au traitement» au concept d’implication parentale. Au Québec, les rares études qui tentent de définir l’implication parentale s’intéressent surtout à la perception que les intervenants de la protection de la jeunesse en ont (Pleau, 2013; Saint-Jacques et al., 2000; Villeneuve, 2010; Villeneuve, Maltais & Pouliot, 2012). Ainsi, Saint-Jacques et al. (2000) ont mené une étude qualitative à l’aide de groupes de discussion (n = 7) portant sur les perceptions des intervenants (n = 38) de la protection de la jeunesse quant à la définition de l’implication parentale. S’inspirant de Blumenthal et Weinberg (1984), ces chercheurs ont défini l’implication parentale comme « l’inclusion ou la participation active du père ou de la mère dans les activités, tâches, services et les prises de décision tout au long de l’intervention en protection de la jeunesse » .
Les facteurs liés aux caractéristiques des familles
D’une part, les recherches réalisées à ce jour révèlent certains facteurs liés aux familles ou à leur environnement, qui facilitent ou nuisent à l’implication des parents dans l’intervention. D’une part, certains auteurs notent que la problématique vécue par l’enfant peut influencer l’implication des parents dans l’intervention, ces derniers ayant plus tendance à s’impliquer lorsque l’enfant vit des problèmes de comportement plutôt que lorsqu’il est victime d’abus ou de négligence (Poirier, 1998; Saint-Jacques et al., 2000; Villeneuve, 2010). L’étude de Famularo, Kinscherff, Bunshaft, Spivak et Fenton (1989) révèle, quant à elle, que les parents suivis uniquement pour négligence se conformeraient plus au traitement que ceux ayant commis des abus sexuels et physiques. En outre, la reconnaissance des parents de la présence d’un problème dans lequel ils ont un rôle à jouer favoriserait l’implication de ces derniers dans la recherche de solutions dans l’intervention (Altman, 2008; Saint-Jacques et al., 2000; Villeneuve, 2010). Ainsi, plus les parents sont motivés et qu’ils accordent de l’importance à l’intervention, plus ils y participent (Beaudoin, Jacob, Saint-Jacques, Sasseville, Simard & Turcotte, 2005; Beaupré & Tremblay, 1992; Poirier, 1998). À cet égard, Kazdin (2000) affirme que les familles qui expérimentent le plus d’obstacles dans l’intervention la perçoivent généralement comme moins justifiée.
L’intervention en contexte de négligence : facteurs associés et éléments à considérer
Plusieurs auteurs ont, jusqu’à maintenant, soulevé l’importance d’impliquer les parents dans l’intervention auprès des familles en difficulté (Hess, Minthum, Moelhman & Pitts, 1992). Dans un contexte de négligence, l’implication des parents est vue comme une voie essentielle, puisque le désinvestissement parental est inévitablement une cible d’intervention à travailler (Saint-Jacques et al., 2000). Afin d’améliorer les soins à l’enfant et la qualité de la relation parent-enfant, la collaboration de même que la mobilisation des parents sont requises, sans quoi l’enfant est susceptible d’être confié à d’autres ressources en vertu de la LPJ. Les intervenants sociaux des centres jeunesse et des CSSS sont en contact avec des parents aux prises avec plusieurs difficultés, telles que la pauvreté, la monoparentalité, l’isolement, la faible scolarisation, la toxicomanie, les troubles de santé mentale, ainsi que les antécédents de violence, de négligence ou de placement dans la famille d’origine (Beaudoin et al., 2005; Éthier et al., 2000). Ces facteurs de risque sont plus présents chez la clientèle des services de protection que chez les parents qui bénéficient des services des CSSS (Beaudoin et al., 2005). Il n’en demeure pas moins que les intervenants des CSSS sont également confrontés à des situations de détresse sociale qui constituent un risque sérieux de négligence ou des cas de négligence avérée pour lesquels la sécurité ou le développement n’est pas compromis (Éthier et al., 2000). Depuis les nouvelles orientations prises à la suite des modifications apportées à la LPJ, les intervenants des CSSS rencontrent de plus en plus de situations de négligence transitoire et chronique. En effet, le tribunal de la jeunesse peut, s’il le juge nécessaire, ordonner l’exécution de mesures vers d’autres ressources, telles que les services de première ligne.
Les facteurs de risque et de protection associés à la négligence
Tout d’abord, le contexte socioculturel comprend des conceptions qui font référence aux rapports entre les générations, entre les hommes et les femmes, aux rôles des parents et des enfants, de même qu’à l’éducation des enfants (Schnurr, 2012). Certaines normes socioculturelles, telles que les rapports de forces entre les genres, les inégalités de pouvoir, la tolérance à la violence, l’entraide communautaire ainsi que le fait de percevoir les enfants comme des objets, influencent le climat d’une société et peuvent contribuer à un contexte d’abus chez les enfants (Agence de la santé et des services sociaux de la Mauricie et du Centre-du-Québec, 2012; Schnurr, 2012).
En ce qui concerne le contexte socio-économique, la pauvreté dans laquelle vivent bon nombre de ces parents, qui s’explique souvent par un faible niveau de scolarité ainsi que par l’absence de perspectives professionnelles ou d’emploi, apparaît comme un facteur de risque important à considérer dans le développement de la négligence (Cyr et al., 2012; Éthier & Lacharité, 2000; Mayer, 2007; Schrnurr, 2012; Smith & Fong, 2004; Young, 2005). En effet, un contexte socio-économique précaire diminue les chances, chez les parents, de pouvoir s’occuper d’un enfant dans des conditions satisfaisantes (Schnurr, 2012).
En ce qui a trait au contexte familial ou social, on retrouve différents facteurs de risque de négligence, c’est le cas, notamment, des naissances rapprochées (Agence de la santé et des services sociaux de la Mauricie et du Centre-du-Québec, 2012), de l’absence de réseau social (Agence de la santé et des services sociaux de la Mauricie et du Centre-du Québec, 2012; Cyr et al., 2012; Éthier & Lacharité, 2000; Schnurr, 2012; Smith & Fong, 2004), de la monoparentalité (Trocmé et al., 2005), de l’absence du père (Smith & Fong, 2004), de l’absence de soutien et d’appui, de la méconnaissance des ressources, du fait de vivre de la violence conjugale (Agence de la santé et des services sociaux de la Mauricie et du Centre-du-Québec, 2012; Cyr et al., 2012; Dubowitz & Bennett, 2007; Schnurr, 2012) ainsi que de l’insalubrité (Milot, Éthier, St-Laurent, 2009). En cas d’isolement social, les réseaux sociaux formels et informels ne peuvent pas exercer leur rôle de soutien. À l’intérieur de la famille, une mésentente conjugale durable peut diminuer les aptitudes éducatives des parents, du moins temporairement (Schnurr, 2012). Éthier, Couture et Lacharité (2004) identifient la présence d’un père à la maison comme un facteur de risque de négligence chronique.
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Table des matières
Introduction
Problématique
La négligence : définitions
La négligence : un problème de taille
Les conséquences de la négligence
Recension des écrits
L’implication des parents dans l’intervention
L’implication parentale, qu’est-ce que c’est ?
Les facteurs qui favorisent ou nuisent à l’implication parentale
Les facteurs liés aux caractéristiques des familles
Les facteurs liés aux intervenants
Les facteurs liés au contexte organisationnel
L’intervention en contexte de négligence : facteurs associés et éléments à considérer
Les facteurs de risque et de protection associés à la négligence
Les principaux éléments à considérer dans l’intervention en contexte de négligence
La nature des difficultés
La planification conjointe des interventions
La perspective familiale
Le réseau social de la famille et les actions collectives
Le soutien professionnel individualisé et le soutien non professionnel
Les actions directes envers les enfants
Les limites des recherches actuelles
Cadre de référence
L’approche centrée sur les forces : principes guidant l’implication des parents dans l’intervention
La méthodologie de l’intervention selon l’approche centrée sur les forces
Le concept de force dans l’étude des rôles parentaux
La pertinence de l’approche centrée sur les forces dans la présente étude
Méthodologie de la recherche
La stratégie de recherche
Les objectifs de la recherche
La population à l’étude et la démarche d’échantillonnage
La méthode de collecte de données
L’analyse des données
Les considérations éthiques
Résultats
Les caractéristiques sociodémographiques et professionnelles des répondantes
Le discours des intervenantes sur le concept d’implication parentale
La définition de l’implication parentale
Les principaux mots-clés caractérisant l’implication parentale
Les attentes des intervenantes sociales des CSSS face aux parents
Les comportements et les attitudes d’un parent impliqué
Le point de vue des répondantes quant aux facteurs associés à l’implication parentale
Les facteurs favorables à l’implication parentale
Les facteurs liés aux caractéristiques personnelles, familiales et environnementales des parents
Les facteurs liés aux attitudes et comportements des parents dans l’intervention
Les facteurs liés à la pratique des intervenantes
Les facteurs liés au contexte et au soutien organisationnels
Les facteurs faisant obstacles à l’implication parentale
Les facteurs liés aux caractéristiques personnelles, familiales et environnementales des parents
Les facteurs liés aux attitudes et comportements des parents dans l’intervention
Les facteurs liés à la pratique des intervenantes
Les facteurs liés au contexte et au soutien organisationnels
Le point de vue des répondantes quant à l’implication parentale dans les situations de négligence
Les forces et les limites du jeune et de ses parents
Les forces et limites des parents
Les forces et les limites des jeunes
Les facteurs favorisant l’implication parentale dans les situations de négligence
Les facteurs faisant obstacles à l’implication parentale dans les situations de négligence
Le point de vue des répondantes sur les stratégies favorisant l’implication parentale en contexte de négligence
Les stratégies mises de l’avant lors de l’évaluation de la situation du parent
Les stratégies mises de l’avant lors de l’élaboration des objectifs d’intervention
Les stratégies mises de l’avant afin de répondre aux objectifs d’intervention
Les retombées de l’implication parentale
Les retombées positives de l’implication parentale
Les retombées négatives de l’implication parentale
Les recommandations des répondantes afin de favoriser l’implication parentale en CSSS
Les recommandations s’adressant aux intervenants
Les recommandations s’adressant aux chefs de service
Les recommandations s’adressant aux dirigeants d’organisation et aux instances gouvernementales
Discussion
Les définitions de l’implication parentale
Les forces identifiées chez les parents lors du processus d’intervention
Les facteurs favorisant et faisant obstacles à l’implication parentale
Les retombées de l’implication parentale
Conclusion
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