Les connaissances et pratiques des jeunes femmes, de 20 à 24 ans, face à l’oubli de pilule

Comparaison avec la population générale

   Nous avons cherché à comparer notre population à la population générale française. Selon l’INSEE, il y avait au 1er janvier 2019, 1 855 535 femmes de 20-24ans en France (14). Selon cette source, on trouve :
 2,2 naissances pour 100 femmes de 15 à 24ans en 2018 (1,6% dans notre étude) (15)
 1,05% de femmes mariées dans les 20 – 24ans en 2017 (1,31% dans notre étude) (16)
 40% des 21-24ans en emploi (31,2% dans notre étude en cumulant les actives et les femmes en recherche d’emploi) (17)
 34% en études initiales, dont 10% cumulant les études et un emploi (71,9% dans notre étude en cumulant étudiantes + « autres ») (17) En 2013, 71% des jeunes (femmes et hommes) de 20 à 24 ans avaient un baccalauréat. Dans notre population : 98,95% ont le niveau baccalauréat. Notre étude a donc interrogé des femmes avec un niveau d’étude, plus élevé que dans la moyenne nationale (18). Nous ne pouvons donc pas transposer nos résultats à l’échelle nationale. Les données pour la région Bretagne étant données pour la tranche 15-24ans, nous n’avons pas pu faire de comparaison. Il faut donc souligner que ce sont des résultats sur une période donnée, et dans une zone géographique indéfinie.

Analyse de la connaissance et façon de gérer l’oubli

   23% des femmes déclarent ne pas prendre le comprimé oublié, au moment où elles se rendent compte de l’oubli. Cela représente plus d’une femme sur 5. Le même taux qui est retrouvé dans une étude de 2014 interrogeant les femmes sous pilule. Cette étude menée en CPEF est intéressante car, même si elle ne fixait pas de limite d’âge, 40% de sa population avait entre 21 et 25 ans. 1 femme sur 5 (20,3%) déclarait qu’il fallait attendre la prise du prochain comprimé pour prendre le comprimé oublié (21). En 2017, un mémoire d’étudiante sage-femme s’est penché sur les connaissances des femmes de tout âge sur leur pilule. 20,9% d’entre elles disaient également ne pas prendre le comprimé oublié immédiatement (22). Les résultats de notre enquête sont concordants avec ces 2 études. La bonne information de la femme et du couple au moment de la prescription apparaît donc encore ici comme prépondérante. Le CNGOF rapporte dans ses recommandations de 2018, que l’échec d’une contraception est associé à son utilisation non optimale. Il recommande d’informer sur la nécessité d’une bonne observance (23). Dans notre étude, la notice est la première source d’information consultée par les femmes (44,2%), internet venant ensuite (23%). Dans ce même mémoire d’étudiante sage-femme mené en 2017, 70% disent solliciter un professionnel de santé en cas de doute sur la conduite à tenir en cas d’oubli. 68% disent se référer à la notice, internet est consulté par 39,5% d’entre elles (22). Nos résultats diffèrent mais on voit là, la place très importante de la notice ; c’est un document sur lequel le prescripteur peut s’appuyer en consultation. Concernant le lien vomissement/risque de grossesse, une part importante des femmes se sait non protégée. Malgré tout, plus d’une femme sur 10 ne savaient pas quoi répondre et près de 7% ne faisaient pas de lien entre les deux : 22% de la population ne fournit pas la bonne réponse. En comparaison, dans l’étude menée en 2014 dans un CPEF, 52% des femmes interrogées disaient savoir que les vomissements étaient à risque de grossesse non désirée (21). Il est donc indispensable également de majorer les informations auprès des patientes sur ces risques et que cela apparaisse sur le document qui sera fourni à la patiente au moment de la prescription. Le lien est moins net en ce qui concerne le risque que représentent les diarrhées. 60% des femmes se pensent protégées du risque de grossesse, malgré une diarrhée dans les 4 heures suivant la prise de la pilule. Or, une diarrhée peut entraîner des problèmes de malabsorption ; les substances actives n’étant pas correctement assimilées, cela reviendrait à un oubli de pilule avec donc un risque de grossesse. Réalisée en 2006, l’étude GRECO a interrogé 551 femmes. Elle s’est penchée sur les grossesses survenues sous contraception; parmi lesquelles 9,8% étaient attribuables à des vomissements et 6,9% à des diarrhées. La première cause étant l’oubli, à 61% des cas (24). Le CNGOF rappelle dans ses recommandations pour la pratique clinique, publiées en 2018, qu’il est « recommandé d’informer les patientes utilisant une contraception orale de la conduite à tenir en cas de vomissements ou de diarrhée importante, qu’elle qu’en soit l’origine (médicamenteuse ou non), selon les préconisations de la HAS, de l’ANSM et les données pharmacologiques (HAS) » (23).

Rôle du prescripteur

    Peu de femmes déclarent avoir reçu un document récapitulatif sur la conduite à tenir en cas d’oubli (14,4%). Dans le mémoire d’une étudiante sage-femme de 2017, traitant des connaissances sur leur pilule, 40,8% des femmes disent avoir reçu un document en consultation (22). Nous retrouvons une proportion bien plus basse. Ceci pourrait s’expliquer par le fait que 2 CPEF distribuaient les questionnaires dans cette même étude menée en 2017 ; ces centres ont peut être une distribution de documents plus systématique. Il semble exister de grosses disparités dans les pratiques professionnelles rapportées. Une certaine uniformisation des pratiques pourrait être envisagée. C’est ce que met en avant la  » la Stratégie Nationale de Santé Sexuelle » (agenda 2017-2030), à l’axe III, objectif 2 ; le fait de « réduire les grossesses non prévues et non désirées ». Ceci passant notamment par un renforcement de la formation initiale et continue des professionnels de santé (25). Il pourrait, par exemple, être intéressant de développer le fait d’associer systématiquement la prescription d’une contraception à un document expliquant précisément la gestion des oublis ; ou encore le fait de donner des sites internet et applications mobiles fiables de référence pour les utilisatrices. C’est le cas de l’application « Pill’Oops », application créée par le Planning Familial, pour faciliter la gestion quotidienne de la pilule. Des petites cartes d’informations sont disponibles et pourraient donc être distribuées en consultation [Annexe IV – Carte informative de l’application PILL’OOPS] Au moment de la consultation, le prescripteur et la femme aborderaient ensemble la démarche à suivre en cas d’oubli, en s’appuyant sur ce document (schéma, petite carte). La femme devrait être incitée par le prescripteur à toujours garder sur elle ce document (avec la pilule, dans son portemonnaie par exemple). En 2013, une étudiante dans le cadre de sa thèse en médecine a interrogé les femmes sur la conduite à tenir en cas d’oubli de pilule ; celles qui ont reçu une information écrite et orale ont, statistiquement, un meilleur taux de réponse au questionnaire (26). En Angleterre, une étude datant de 1998 décrit également que la délivrance de documents résumés sur la conduite à tenir de l’oubli de pilule, améliore la bonne gestion de celle-ci (27). De même, il apparaît pertinent de changer les idées reçues sur la contraception d’urgence, cellesci pouvant être un frein à son utilisation. En 2015, un sondage mené par Harris Interactive détaille que près d’un tiers des 15 – 24 ans pense que la contraception d’urgence peut rendre stérile. Dans ce même sondage, seules 22% des interrogées se considèrent « très bien informées » sur la contraception en général ; 58% estiment être « plutôt bien informées ». Concernant la contraception d’urgence, seulement 6% des interrogées se disent très bien informées et 41% plutôt bien informées (28). Dans une autre étude, Sophie Lemaître, en 2008, dans le cadre de sa thèse de médecine, interroge près de 2 000 femmes sur ces questions. Elle indique que, parmi les femmes ayant oublié leur pilule depuis plus de 12 heures et ayant eu un rapport sexuel dans les 5 jours précédents, 38,8% d’entre elles répondent qu’elles ne prennent pas la contraception d’urgence car elles estiment que le risque de grossesse est trop faible et 12,6% considèrent qu’il est trop tard pour la prendre (13). Là encore un document à destination des patientes existent : l’Assurance Maladie et l’Ordre des Pharmaciens ont fait une carte explicative sur la contraception d’urgence [Annexe V – Carte informative sur la contraception d’urgence de l’Assurance Maladie et du Cespharm].Cette dernière pourrait être délivrée systématiquement lors de la prescription de la contraception d’urgence. Le rôle éducateur du prescripteur apparait donc comme prépondérant dans la prise en charge contraceptive. Ainsi, les recommandations de la HAS précisent que le professionnel prescripteur se doit d' »évaluer » l’observance du patient face à la contraception  » : fréquence et circonstances des oublis, trouver avec la femme l’horaire le mieux adapté pour éviter un oubli, réévaluer ses connaissances et réitérer les conseils sur la conduite à tenir en cas d’oubli et sur la contraception d’urgence (à utiliser le plus rapidement possible après le rapport à risque) » (29). Une majorité de femmes prend sa pilule le soir ; une prise matinale peut être encouragée si l’observance n’est pas bonne. S’il y a un oubli, la femme a toute la journée pour s’en rendre compte et palier à cet oubli. Si l’observance reste non optimale, il faudrait discuter avec la femme d’un changement de contraceptif. L’utilisation d’un document support répertoriant précisément la gestion des oublis et les différentes situations à risque d’échec est un atout supplémentaire.

Place de la sage-femme

   Les sages-femmes sont peu représentées comme prescripteurs de la pilule contraceptive. Seules 25 femmes de notre étude, soit 6,5%, ont consulté une sage-femme dans ce cadre. De la même manière, l’étude pilote du projet OPTIMEGE, en 2014, a recruté 158 patientes et aucune n’a cité la sage-femme comme prescripteur de leur pilule contraceptive (30). Nous pouvons penser que l’activité de suivis gynécologiques de prévention des sages-femmes est en cours de développement. Autorisées depuis la loi HPST de 2009, à réaliser les suivis gynécologiques et de prévention, leur rôle est encore grandement méconnu. Il apparait logique de les replacer comme acteurs majeurs de santé publique devant la pénurie grandissante de médecins spécialistes et généralistes. La sage-femme peut assurer le suivi gynécologique de prévention et la prescription de tous les moyens de contraception chez les femmes en bonne santé. En cas de pathologie, elle se doit d’orienter vers un médecin généraliste ou spécialiste. Dans un communiqué de presse datant de décembre 2017, Mme.Curat, présidente du Conseil National de l’Ordre des Sages-Femmes disait : « Ces rôles doivent être communiqués clairement au grand public afin de ne plus laisser les femmes désemparées face à des difficultés d’accès aux soins » (31). Nous pouvons penser que les jeunes femmes souhaitant débuter une contraception, consultent en priorité le « gynécologue de famille »,  orientées par leur mère ; ou encore, leur médecin généraliste, par facilité d’accès ou par connaissance de la personne. Nous voyons dans notre figure 8 « Réalisation des actes en fonction des prescripteurs », que dans notre population, les femmes ayant consulté une sage-femme, se sont davantage vues remettre un document explicatif. Près de 90% d’entre elles disent avoir reçu une information sur la conduite à tenir en cas d’oubli. Nous pouvons imaginer que les sages-femmes étant axées sur la physiologie, prennent davantage de temps avec les femmes pour s’assurer de la bonne gestion de leur pilule, ou du moins leur donner toutes les chances d’y parvenir. Cette compétence a été attribuée aux sages-femmes depuis maintenant 10 ans et il est manifestement nécessaire de continuer à multiplier les actions d’informations auprès du grand public et des professionnels de santé.

Pistes d’améliorations et propositions

   Plusieurs axes peuvent être envisagés pour diffuser de l’information et donner les bons outils aux femmes pour qu’elles agissent correctement lors d’un oubli de pilule. La pénurie de gynécologues et de médecins généralistes grandissant, il apparait important de développer les consultations par les sages-femmes, pour les jeunes femmes en bonne santé et donc y compris les prescriptions de contraceptifs. Il peut être pertinent de développer les CCP : Consultation de Contraception et Prévention. Elles s’adressent aux mineures de 15 à 18 ans qui consultent pour l’instauration d’une première contraception. Autant que possible, ce rendez-vous n’abordera que le sujet contraceptif ; le professionnel axe aussi la consultation sur la prévention des maladies sexuellement transmissibles. Par exemple, en cas d’urgence, une autre consultation pourra être proposée. En plus d’agir pour la santé publique, les jeunes femmes reçoivent une information complète et spécifique, au début de leur prise de contraception (36) et constitue une réelle éducation sur cette thématique. Cette consultation permet d’aborder les antécédents, le mode de vie de la femme, les différents types de contraception existants, et ce que la femme attend de cette dernière. C’est ce que propose le modèle BERCER de l’OMS : la démarche d’accompagnement dans le choix contraceptif de la femme suit une logique éducative ou de counselling. La consultation suit 6 étapes : Bienvenue – Entretien – Renseignement – Choix – Explication – Retour. L’implication de la femme / du couple dans le choix contraceptif permet d’augmenter l’observance, la compréhension et la satisfaction à long terme (37). Il faut renforcer les formations professionnelles à ce niveau et leur faire connaître les outils à leur disposition pour pouvoir en parler en consultation et remettre des documents supports [Annexe VII – Plaquette informative oubli de pilule, INPES] [Annexe VIII – Schéma récapitulatif oubli de pilule].Les professionnels devraient s’affranchir également d’un conseil minimal. Il consiste en une explication qui se veut systématique et brève (moins de 3 minutes). Initialement développé pour aider au sevrage tabagique, il peut également être utilisé en contraception. Son efficacité a été prouvée, en comparaison à l’absence de conseil (38). Ainsi, une étudiante en médecine montre en 2011 que des femmes ayant reçu un conseil minimal sur la conduite à tenir en cas d’oubli et un document récapitulatif par leur prescripteur (mais n’abordant pas les risques liés aux vomissements et aux diarrhées et la possible mise en place d’un DIU comme contraception d’urgence) ont une meilleure connaissance de la gestion d’oubli de pilule, 3 mois après avoir reçu cette information (32). Le document support précis remis systématiquement lors de consultation peut également être un vrai recours pour les femmes lors d’un oubli ; tout comme les sites internet de référence et les applications pour smartphones, de sources fiables et reconnues par les professionnels médicaux. La question de la prescription anticipée systématique de la contraception d’urgence se pose. En avril 2013, la HAS publie des recommandations sur la prescription et délivrance à l’avance de la contraception d’urgence. Elle ne recommande pas une prescription systématique, mais envisage une prescription anticipée au cas par cas (accès difficile à une pharmacie, difficultés financières). Elle met en avant le risque de moins bonne observance, de comportements sexuels à risque en matière d’IST ou de moindre recours à une contraception régulière (39). L’implication du partenaire dans la contraception permettrait d’être une ressource complémentaire en cas de questionnements. Si ce partenaire est également bien informé de la gestion de la contraception : il peut être une aide précieuse face au risque de grossesse non désirée. Il semble donc pertinent de majorer leur rôle et d’impliquer le couple dans cette prise de contraceptif.

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Table des matières

I. Glossaire
II. Introduction
III. Méthodologie
1. Objectifs de l’étude
2. Type d’étude
3. Population de l’étude
a. Description de la population
b. Critères d’exclusion
4. Méthode
a. Elaboration du questionnaire
b. Recrutement et diffusion
5. Analyse des données
IV. Résultats
1. Caractéristiques socio-professionnelles de la population
2. Résultats
a. Les habitudes des femmes
b. Le moment de la prescription
c. Les connaissances des femmes sur la gestion de l’oubli de pilule
d. Le profil des femmes
e. Questionnaires incomplets
V. Discussion
1. Limites de l’étude
a. Comparaison avec la population générale
b. Biais de la population ayant répondu
c. Biais d’accès à internet
d. Biais de volontariat
e. Limites sur la forme du questionnaire
2. Intérêts de l’étude
a. Taux de réponses satisfaisant
b. Première étude de cette population sur le sujet
c. Sujet d’actualité
3. Analyse des résultats – Comparaison aux données de la littérature
a. Connaissances des femmes et gestion de l’oubli
a – 1. Analyse de la connaissance et façon de gérer l’oubli
a – 2. Rôle du prescripteur
a – 3. Place de la sage-femme
b. Profil type d’utilisatrices de la pilule plus à risque d’oubli
b – 1. Résultats significatifs
b – 2. Comparaison aux données de la littérature
4. Pistes d’amélioration et propositions
VI. Conclusion
VII. Bibliographie
VIII. Annexes

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