LES CONCEPTS EN CHIMIE EN LIEN AVEC LE LANGAGE SYMBOLIQUE REPRÉSENTATIONS DES ÉLÈVES

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Concepts en chimie et langage symbolique

Pour Vygotski (2013), les concepts scientifiques, à distinguer des concepts quotidiens, et leur apprentissage seraient étroitement liés au langage. Ceci peut s’appliquer au langage symbolique de la chimie mais sa réciproque également : le langage symbolique de la chimie, ainsi que son apprentissage, sont étroitement liés aux concepts qu’ils représentent. Après avoir repris dans un premier temps ce que l’on entend par concept, nous nous intéressons à ceux représentés par le langage symbolique et les idées des élèves à leur propos repérées par différentes recherches en didactique de la chimie, en particulier espèce chimique, ou substance pure, et transformation chimique pour le niveau macroscopique, puis atomes et molécules pour le niveau microscopique. Nous présentons ensuite le bilan des difficultés des élèves et la manière dont les enseignants envisagent l’apprentissage du langage symbolique, déjà repérés dans différents travaux. Nous indiquons enfin les différentes progressions proposées en didactique de la chimie pour l’apprentissage de ces différents concepts et ce vers quoi nous souhaitons tendre.
Qu’est-ce qu’un concept ?
Selon Vergnaud cité par Weil-Barais (1994, p. 458), les concepts peuvent être définis comme un triplet de trois ensembles » :
l’ensemble des situations de référence qui donnent du sens au concept ;
l’ensemble des invariants opératoires qui sont constitutifs du concept ;
l’ensemble des signifiants (systèmes symboliques) qui permettent de symboliser le concept ainsi que ses propriétés et les situations qu’il permet de traiter (le plan du signifiant).
La formation des concepts nécessite pour l’élève la mise en relation de ces trois niveaux. Le sens des symboles est dans un premier temps associé aux situations de référence. La diversité des situations rencontrées permet d’élaborer les invariants opératoires. Ceux-ci permettent de définir le sens des symboles dans un deuxième temps. Si nous transposons à la chimie, les noms, les symboles et les formules arrivent dans un premier temps et permettent de représenter les espèces chimiques pour le niveau macroscopique, les atomes et les molécules pour le niveau microscopique. À partir des situations rencontrées, les invariants opératoires caractérisant les espèces chimiques, les atomes et les molécules sont élaborés. Cette deuxième étape permet de donner tout son sens au langage symbolique. Les modèles, outils interprétatifs et prédictifs, sont ensuite élaborés à partir du réseau des concepts (Ruthven et al., 2009, p. 335). Espèces chimiques, atomes, molécules participent à l’élaboration du modèle particulaire de la matière et du modèle de la réaction chimique. Les représentations chimiques vont s’enrichir du travail permettant l’adéquation progressive entre les objets et les invariants. Avec la prise en compte de propriétés nouvelles, le chimiste va développer ses représentations, par exemple de la formule brute à la formule développée et aux représentations spatiales en lien avec l’isomérie.
Lemeignan et Weil-Barais (1993) distinguent deux types de concepts : les catégoriels et les formels.
Les concepts catégoriels :
ils sont définis dans la « tradition empiriste » à partir d’une collection d’objets représentatifs (Weil-Barais, 1994, p. 455) qui ont en commun des attributs qui permet de les caractériser, malgré les différences qu’ils peuvent avoir par ailleurs » (Barth, 2001, p. 38). Barth définit la structure opératoire du concept (Figure 10) par une « étiquette », des attributs et des exemples. Prenons le concept de la particule élémentaire en chimie. Sa dénomination, ou étiquette » (Barth, 2001), est « atome ». Sous la dénomination atome, on retrouve toutes les particules caractérisées par les attributs suivants pour un élève du second degré : un numéro atomique, un nombre de masse, une charge nulle et une valence. L’étiquette n’a pas d’importance à elle seule, l’essentiel étant de savoir « pourquoi on appelle un objet par ce nom et comment il est relié à d’autres concepts » (Barth, 2001, p. 48). Les exemples sont pour les principaux issus des premières lignes du tableau périodique. L’atome est différent de l’ion par sa charge et de l’élément chimique par son nombre de masse. On pourrait ainsi dire qu’un concept offre une règle de classification (Barth, 2001).
Cependant à la différence du carré (Figure 10), le nombre d’atomes, ou d’« exemples » est limité avec une « étiquette » qui lui est également propre, son symbole, et ses propriétés, « attributs », qui le caractérisent. Chaque atome, à la différence du carré, a sa propre « carte d’identité ». Les concepts catégoriels sont souvent en mémoire sous la forme « de prototype » ou exemplaire réunissant l’ensemble des caractéristiques les plus saillantes du concept » (Lemeignan & Weil-Barais, 1993, p.53). Pour l’atome, le carbone ne jouerait-il pas ce rôle ?
Les concepts formels :
Pour les « rationalistes », les régularités ne sont pas premières pour définir le concept. Le concept est avant tout « une entité mentale élaborée en vue de pouvoir expliquer et agir » (Weil-Barais, 1994, p. 456). Dans les disciplines scientifiques, il a souvent le « statut d’outil intellectuel » qui permet « d’agir autrement sur le savoir » (Cohen-Azria, Daunay, Delcambre-Derville, Lahanier-Reuter & Reuter, 2013, p. 37). Les concepts répondent à des besoins d’explication et de prédiction. Cassirer (cité par Lemeignan & Weil-Barais, 1993, p.55) les qualifie de « formels ». Pour leur élaboration, ils nécessitent un passage par l’abstraction mais ils n’auront de sens que confrontés à l’expérience. Fabre reprenant la vision de Bachelard indique que « la conceptualisation n’est ni une abstraction ni une épuration de l’expérience, mais bien une émergence » (Fabre, 2005, p. 62). Les élèves ne peuvent les construire seuls. Il est sans doute nécessaire de les amener à poser les hypothèses pour interpréter ou pour prédire des situations expérimentales (Lemeignan & Weil-Barais, 1993). Les concepts « formels » peuvent à leur tour être de plusieurs types. Certains, par exemple, sont de « nature relationnelle », se définissant par leurs relations avec les autres comme les concepts de force ou d’accélération en mécanique (Lemeignan & Weil-Barais, 1993, p. 55). D’autres renvoient à des « entités hypothétiques » et on retrouve à nouveau dans cette catégorie l’atome (Lemeignan & Weil-Barais, 1993, p. 55).
Le cas du concept atome est singulier. Il peut à la fois être interprété comme un concept catégoriel dans la vision empiriste : les atomes existent et il faut les caractériser par leurs attributs. On peut aussi le comprendre comme une construction de la pensée, hypothèse structurante du modèle particulaire de la matière permettant d’interpréter aussi bien les changements d’état que les transformations chimiques à travers le modèle de réaction chimique.
Enfin, qu’ils soient catégoriels ou formels, les concepts scientifiques ne sont jamais définis de façon isolée mais toujours à travers un réseau, ce qui permet notamment de les distinguer des concepts quotidiens (Cohen-Azria et al., 2013). Pour Bachelard, tout savoir doit être systématique en s’inscrivant dans des corps théoriques, les concepts se définissant alors les uns par rapport aux autres (Fabre, 2005). Quel est alors ce réseau entre espèces chimiques, atomes et molécules pour des élèves de collège au cycle 4 ? Les atomes sont les briques élémentaires de la molécule et se conservent au cours des réactions chimiques. Les molécules sont les plus petits composants des espèces chimiques et sont constituées d’atomes. Elles ne se conservent pas au cours des réactions chimiques. Les espèces chimiques sont constituées d’un nombre gigantesque4 de la même molécule. Ce modèle particulaire permet d’interpréter les différents états de la matière. Les espèces chimiques se caractérisent au niveau macroscopique par un ensemble de propriétés physiques et chimiques, leurs attributs. Elles se modifient au cours de processus générant (souvent) des événements perceptibles dont la description conduit à définir une transformation chimique (Kermen, 2016). Ces dernières sont modélisées par des réactions chimiques. Le modèle de la réaction chimique, modèle macroscopique, permet d’interpréter les proportions dans lesquelles les espèces chimiques réagissent et se forment. Ces proportions différencient les transformations chimiques des mélanges. Elles apparaissent dans l’équation chimique qui représente la réaction chimique. Au niveau microscopique, les atomes se conservent au cours des réactions chimiques. A l’aide de la double lecture possible de l’équation chimique, macroscopique et microscopique, le principe de conservation des atomes5 permet de prédire les proportions dans lesquelles les espèces chimiques réagissent. Ces concepts ont tous leur représentation : noms et symboles pour les atomes, noms et formules chimiques pour les molécules et les espèces chimiques, et équations chimiques pour les réactions chimiques. Ces dernières peuvent se lire et s’interpréter au niveau macroscopique et au niveau microscopique. Nous avons essayé de représenter cet ensemble de concepts, modèles, niveau et symbolisation un peu plus loin dans la thèse (Figure 12). Nous allons maintenant balayer les représentations des élèves à propos de ces différents concepts déjà repérés par la recherche en didactique de la chimie.

Les concepts en chimie en lien avec le langage symbolique : représentations des élèves

La façon dont les élèves disposent des différents concepts va déterminer la manière dont ils vont aborder un nouvel apprentissage et les situations problématiques (Weil-Barais, 1994). Nous présentons maintenant différents travaux ayant repéré les idées des élèves à propos des concepts de substances, de transformation chimique et de particules.
Le nombre d’Avogadro n’est donné aux élèves qu’à partir de la seconde au moment de l’introduction de la mole.
La notion d’élément n’est pas définie avant la seconde.

Concept macroscopique : substance pure, corps pur ou espèce chimique

De nombreuses recherches ont mis en évidence le fait que la notion d’espèce chimique ou de substance pure ou de corps pur ne va pas de soi pour les débutants et qu’elle pose des problèmes aux étudiants. Roletto et Piacenza (1994) montrent que les élèves italiens associent spontanément des critères de sens commun pour identifier les substances pures. On trouve notamment celui de mélange/non mélange et pour certains élèves ce critère est exclusivement visuel. Ils observent également l’opposition corps composé/corps simple. Une substance pure serait alors composée d’un seul élément chimique. Les élèves utilisent très peu le critère particulaire et, quand c’est le cas, ils associent très souvent la substance pure à un seul type d’atomes. Ils relèvent également un critère écologique et naturaliste véhiculé selon eux par les media comme pollué ou non pollué, pour non pur et pur. Solomonidou et Stavridou (1994) montrent à la même époque que « la construction et le fonctionnement du concept de réaction chimique dépendent du concept scientifique de substance » et constatent que les élèves français n’ont toujours pas construit ce concept à la fin du secondaire. Elles montrent que le cadre de la vie quotidienne ne permet pas les observations qui pourraient amener le concept de substance pure (Stavridou & Solomonidou, 1998). C’est bien à l’enseignant de proposer les conditions permettant l’élaboration de ce concept.
Il revient donc à l’enseignement de la chimie la responsabilité de favoriser l’extension catégorielle des élèves, en assurant les conditions qui leur permettront de se familiariser avec les substances, leurs diverses propriétés et changements, et qui vont préparer la construction du concept de substance chez eux. (Solomonidou & Stavridou, 1994, p. 86)
Johnson (2000, 2002) parvient aux mêmes conclusions. Le concept scientifique de substance, différencier du « concept quotidien » (Vygotski, 2013), n’est pas naturel pour les enfants. Ils ne peuvent en effet imaginer que celles-ci peuvent se transformer en d’autres substances et perdre ainsi leur identité. L’idée que les substances dihydrogène et dioxygène n’existent plus dans l’eau et qu’il n’y a plus qu’une seule substance, l’eau, ne va pas de soi. Les élèves n’acceptent pas non plus spontanément l’idée qu’un corps composé est une substance à part entière. Il est perçu comme un mélange de corps simples conservant leurs propriétés (Fillon, 1997 ; Furio, Bullejos & de Manuel, 1994 ; Talanquer, 2007). Johnson (2000) constate que les enseignants ne reconnaissent pas l’idée de substance comme essentielle à enseigner, considérant que le concept est compris, et se contentant souvent de détailler uniquement les propriétés. Pourtant l’étude historique indique que la notion ne va pas de soi. Celle-ci, reliée la notion de substance simple et pure au début du XIXe siècle, est définie soixante ans plus tard comme constituée d’une seule entité microscopique, la molécule. Les formules chimiques (brutes puis développées) qui apparaissent avec les entités microscopiques (atomes puis molécules) deviennent l’outil de représentation de l’espèce chimique. La notion de substance pure évolue à nouveau avec le développement de la chimie du XXe siècle : formes allotropiques, composés non stœchiométriques, chimie des solutions, etc. L’eau « pure » est composée bien évidemment de molécules d’H2O mais on y trouve également des ions hydronium et hydroxyde provenant de l’équilibre acido-basique de l’eau réagissant avec elle-même. La définition, une seule entité microscopique, ne peut plus être considérée comme correcte. Comment peut-on alors définir une substance pure ? Pour (Bachelard, 2010), la pureté est une œuvre humaine et en a alors la relativité.
En fait puisque la science positive solidarise la notion de pureté avec la notion d’opération de purification, on ne peut écarter le relativisme de la pureté. […]la ligne des purifications n’est jamais sûre de viser une purification absolue […]. La pureté d’une substance est donc une œuvre humaine. Elle ne saurait être prise pour une donnée naturelle. Elle garde la relativité essentielle des œuvres humaines. (Bachelard, 2010, p. 78‑79)
La substance pure est donc une notion idéale mais nécessaire pour les chimistes ( Schummer, 1998). van Brakel (2014) différencie la substance pure de l’espèce chimique : « A material, phase, or substance has a (macroscopic) chemical composition and a (molecular) species composition » (2014, p. 21).
Dans la suite de ce travail, nous allons nous intéresser à l’introduction de la notion de substance pour les élèves de collège. Nous ne ferons pas la distinction entre substance pure et espèce chimique au sens proposé par Van Brakel (2014). Nous serons également amenée à utiliser le terme de corps pur puisque la notion d’espèce chimique est introduite sous cette dénomination dans les programmes de cycle 4. Nelson (2003) considérant qu’il est nécessaire de proposer un enseignement progressif aux novices propose de débuter avec différentes définitions se référant au niveau macroscopique et basées sur des observations expérimentales. Il caractérise une substance pure par les températures de changement d’état, leur état physique à température et pression données, la couleur, la densité, la solubilité et par les actions chimiques avec d’autres substances, ce que Stavridou et Solomonidou (1998) pourraient qualifier de carte d’identité. Johnson (2000) propose de centrer l’enseignement du concept d’espèce chimique sur l’utilisation de ses propriétés et d’éviter de se contenter de leur énumération. Les substances peuvent être divisées en deux classes : les corps simples et les corps composés qui peuvent eux-mêmes se décomposer en corps simples (Nelson, 2003, p. 21). Cet auteur propose la définition suivante, tout en restant ouvert à toutes suggestions :
partir d’un bilan des recherches effectuées au cours des trente dernières années, Talanquer (2009) identifie les différentes hypothèses implicites que l’on peut attribuer aux élèves et aux étudiants à propos de la structure de la matière. Il élabore une classification indiquant l’évolution possible des raisonnements à plusieurs stades de l’apprentissage de façon générale et dans différentes catégories spécifiques (Figure 11).

Concepts de transformation chimique et réaction chimique

En rendant compte d’observations expérimentales macroscopiques mais qui s’interprètent à l’échelle microscopique, et en s’appuyant sur de nombreux concepts de la chimie (espèces chimiques, modèles particulaires, stœchiométrie, quantité de matière, équilibre chimique, etc.), la réaction chimique est un concept intégrateur qui cumule un grand nombre de difficultés propres à la chimie (Barlet & Plouin, 1994). Le transfert de l’observable au modélisable nécessite une grande capacité d’abstraction qui n’est pas toujours acquise par les étudiants. Les élèves n’utilisent jamais spontanément le niveau microscopique pour interpréter ce qui se passe au cours d’une transformation chimique (Barlet & Plouin, 1994). Le modèle particulaire ne semble pas opératoire pour interpréter la transformation chimique (Fillon, 1997 ; Talanquer, 2007). S’il n’y a pas de demande explicite à utiliser le modèle particulaire, les étudiants ne sont pas tous capables de fournir une explication macroscopique/microscopique cohérente d’une transformation chimique (Solsona, Izquierdo pas à faire à partir des seules propriétés macroscopiques. Méheut (1989) avait déjà indiqué qu’il est nécessaire de renforcer l’apprentissage des techniques de séparation et d’identification des substances pour vérifier s’il y a ou non apparition de nouvelles espèces chimiques, ce que les élèves ont du mal à percevoir.
Nombreuses sont les recherches qui ont montré les difficultés des élèves dans ce domaine. En Israël en fin d’étude secondaire, Ben-Zvi, Eylon et Silberstein (1987) montrent que 10% des élèves continuent à ne pas savoir répondre à des questions élémentaires à partir des équations chimiques. Laugier et Dumon (2000) observent la primauté des aspects perceptifs partir de raisonnements analogiques primitifs. Si le système réactionnel noircit, alors on a formé du charbon. Ils notent également dans une autre recherche l’absence d’interaction des réactifs (Laugier & Dumon, 2003). Cela peut conduire à l’idée que les produits se forment à partir des réactifs sans interaction entre eux par des processus indépendants (Furio et al., 1994).
La transformation chimique est parfois interprétée comme la séparation des propriétés d’une substance et de la substance (Laugier & Dumon, 2000 ; Solomonidou & Stavridou, 1994) ou comme le résultat de l’action d’un agent (qui n’est pas modifié) sur un patient (qui subit une modification) (Solomonidou & Stavridou, 1994). On peut également trouver dans les explications des élèves la préexistence des produits à l’intérieur des réactifs (Laugier & Dumon, 2000 ; Solomonidou & Stavridou, 1994). Laugier et Dumon (2004) constatent la difficulté d’acquisition de la notion de réactif limitant.
Au moment des programmes de lycée entrés en vigueur à la rentrée 2000, les concepteurs ont renouvelé l’approche du concept de réaction chimique en introduisant celui de transformation chimique. Nous pouvons qualifier ce dernier de concept « scolaire »,
construit et travaillé dans l’espace scolaire » (Cohen-Azria et al., 2013, p. 37). Ils introduisent donc la distinction entre la « transformation, menant un système chimique d’un état à un autre, et la réaction chimique, responsable de cette transformation chimique, et qui est un modèle à l’échelle macroscopique » (Davous et al., 1999). Kermen et Méheut (2009, 2011) situent la transformation chimique dans la réalité idéalisée, la réaction chimique étant placée quant à elle dans le registre des modèles macroscopiques. À partir d’observations en classe, Kermen (2016) constate qu’il est difficile pour les élèves de séparer la réalité idéalisée d’un élément de modèle qui l’interprète. Elle suggère que la difficulté est peut-être accentuée « du fait qu’on utilise les mêmes symboles (les formules chimiques) pour décrire la situation expérimentale (la composition qualitative du système initial, la réalité idéalisée) et écrire l’équation de réaction ».

Ce que disent et font les enseignants

Après l’analyse des contraintes institutionnelles (programmes et ouvrages scolaires) puis des difficultés des élèves face au langage symbolique de la chimie, nous avons cherché à approcher ce que font les enseignants lorsqu’ils introduisent pour la première fois le langage symbolique de la chimie. Au début de la recherche, nous avons contacté des enseignants de collège pour leur demander de faire passer le questionnaire à leurs élèves et éventuellement accepter de se faire filmer dans leur classe. Nous leur avons envoyé un questionnaire nous permettant d’avoir un premier aperçu de ce qu’ils proposent à leurs élèves pour le langage symbolique. Neuf enseignants ont répondu et deux parmi eux ont accepté d’être filmés en classe au moment de l’introduction des formules chimiques en quatrième. Nous présentons dans ce chapitre les réponses des enseignants à quatre questions qui font écho aux résultats du questionnaire élèves puis l’analyse des deux séances filmées.

Un questionnaire enseignant

Ce questionnaire (Annexe 6) devait nous permettre de prendre contact avec des enseignants de collège et leur montrer les objectifs de notre recherche. Nous présentons ici les réponses à trois questions. Deux apportent un éclairage à certaines réponses obtenues aux.

Enquêtes préalables

questionnaires élèves : l’association du langage symbolique au niveau microscopique ou au niveau macroscopique, les règles données aux élèves pour les formules chimiques. La troisième montre les difficultés rencontrées par les enseignants par rapport au cadre institutionnel des programmes au moment de l’introduction du langage symbolique.

Présentation

Celui-ci a été envoyé par messagerie électronique à des enseignants de collège. Nous avons recueilli neuf réponses. Les enseignants sont issus de plusieurs régions en France et ont tous plus de dix ans d’ancienneté. Un se déclare plutôt physicien, trois plutôt chimistes et les autres ne pas avoir de préférence. L’analyse des résultats n’a pas de valeur statistique. Nous donnons ici les réponses à trois questions ouvertes. Pour présenter les résultats, chaque enseignant est désigné par la lettre C, pour Collège, et par un numéro. La première question doit nous permettre d’évaluer si les enseignants ont conscience que le langage symbolique peut à la fois décrire le niveau microscopique et le niveau macroscopique. Avec la deuxième question, nous cherchons à savoir si les enseignants proposent des règles à leurs élèves pour l’écriture des formules brutes. Dans la troisième question, nous demandons aux enseignants s’ils expliquent aux élèves la position des atomes dans les modèles moléculaires.

Résultats

À propos des niveaux macroscopique et microscopique

Dans la question 1.a (Annexe 6), les enseignants doivent critiquer un exercice extrait d’un ouvrage de quatrième. En 1.b (Annexe 6), nous leur rappelons les difficultés des élèves à se repérer entre le niveau macroscopique et le niveau microscopique. Nous leur demandons à nouveau de réagir à l’exercice proposé. En effet, celui-ci n’est pas suffisamment explicite pour faire la distinction entre ces deux niveaux. La formule CH4 est notamment utilisée à la fois pour la molécule et pour le gaz mais sans que cela ne soit précisé.
Deux enseignants, C2 et C7, semblent avoir tout de suite repéré le problème des représentations utilisées par l’exercice mais ils ont peut-être lu la question b avant de répondre à la question a.
C2 propose une reformulation plus rigoureuse de la première question de l’exercice. « a. Rappelez la formule d’une molécule de méthane » (Réponse C2)
C7 propose de réorganiser l’exercice en distinguant explicitement le niveau macroscopique et microscopique et en regroupant les questions faisant appel au même registre.
Cet énoncé mélange dans l’ordre des questions le niveau macroscopique et le niveau microscopique. Je le reprendrai entièrement pour que l’on soit tout d’abord au niveau macroscopique et que l’on arrive d’abord à l’écriture en toute lettre du bilan de la réaction : méthane + dioxygène → eau + dioxyde de carbone. Pour cela, je pourrais faire mobiliser des connaissances du cours (la combustion du méthane dans l’air nécessite du dioxygène et éventuellement les tests d’identification de l’eau et du dioxyde de carbone) Ensuite seulement, je ferais explicitement mobiliser les connaissances du cours (exemple : la molécule de méthane peut être représentée par la formule CH4) pour permettre l’écriture du bilan selon cette forme : CH4 + O2 → H2O + CO2 » (Réponse C7)
Pour les autres enseignants, même s’ils proposent tous des corrections à apporter à l’exercice, aucun ne relève la difficulté de la formule brute qui représente à la fois la molécule et l’espèce chimique. Après la question b, ils sont cinq sur les sept à reconnaître que l’exercice peut entraîner des difficultés entre les deux registres. Mais seul C8 propose une reformulation allant dans ce sens en regroupant, comme C7, en premier les questions au niveau macroscopique avant de passer au niveau microscopique. Deux enseignants, C3 et C4, ne voient pas le problème.

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Table des matières

INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE : ENJEUX DE LA RECHERCHE
CHAPITRE 1 : LE REGISTRE SYMBOLIQUE DE LA CHIMIE
1. ÉLABORATION DE LA NOMENCLATURE, DES SYMBOLES ET DES FORMULES CHIMIQUES
2. LES REPRÉSENTATIONS SYMBOLIQUES EN CHIMIE : LANGUE OU LANGAGE ?
3. LES REGISTRES ET NIVEAUX DE LA CHIMIE
CHAPITRE 2 : CONCEPTS EN CHIMIE ET LANGAGE SYMBOLIQUE
1. QU’EST-CE QU’UN CONCEPT ?
2 LES CONCEPTS EN CHIMIE EN LIEN AVEC LE LANGAGE SYMBOLIQUE REPRÉSENTATIONS DES ÉLÈVES
3. DIFFICULTÉS D’APPRENTISSAGE DU LANGAGE SYMBOLIQUE
4. UNE PROGRESSION TENANT COMPTE DE L’APPRENTISSAGE DU LANGAGE SYMBOLIQUE
CHAPITRE 3 : CADRES MÉTHODOLOGIQUES
1. ENSEIGNER LE LANGAGE SYMBOLIQUE PAR L’HISTOIRE DES SCIENCES : UNE RECONSTRUCTION DIDACTIQUE
2. POUR L’ANALYSE DE L’ÉLABORATION HISTORIQUE DU LANGAGE SYMBOLIQUE : LA PROBLÉMATISATION
3. POUR L’ANALYSE DES PRATIQUES ENSEIGNANTES : LA DOUBLE APPROCHE DIDACTIQUE ET ERGONOMIQUE
CHAPITRE 4 : PROBLÉMATIQUE ET QUESTIONS DE RECHERCHE
1. PROBLÉMATIQUE
2. QUESTIONS DE RECHERCHE
PARTIE 2 : ENQUÊTES PRÉALABLES
CHAPITRE 1 : LE CONTEXTE INSTITUTIONNEL
1. LES PROGRAMMES
2. ANALYSE DES OUVRAGES SCOLAIRES DE CINQUIÈME ET QUATRIÈME
3. CONTEXTE INSTITUTIONNEL : CONCLUSION
CHAPITRE 2 : L’ENQUÊTE DIDACTIQUE : ÉLÈVE ET LANGAGE SYMBOLIQUE
1. OBJECTIF DU QUESTIONNAIRE
2. MÉTHODOLOGIE
3. RÉSULTATS ET DISCUSSION
4. LES DIFFICULTÉS ÉLÈVES : CONCLUSION
CHAPITRE 3 : CE QUE DISENT ET FONT LES ENSEIGNANTS
1. UN QUESTIONNAIRE ENSEIGNANT
2. OBSERVATION DE DEUX SÉANCES DE CLASSE « ORDINAIRES »
3. CE QUE DISENT ET FONT LES ENSEIGNANTS : CONCLUSION
CONCLUSION PARTIE 2
PARTIE 3 : ENQUÊTE HISTORIQUE
INTRODUCTION
CHAPITRE 1 : ÉLABORATION DU LANGAGE
1. AVANT LAVOISIER : LE PASSAGE À UNE SCIENCE
2. LAVOISIER OU L’ÉLABORATION D’UNE NOMENCLATURE
3. LES FORMULES DE DALTON
4. LES FORMULES DE BERZELIUS
5. LES FORMULES DES ORGANICIENS
CHAPITRE 2 : LA FORMULE CHIMIQUE AU CŒUR DES DÉBATS
1. UNE MÊME FORMULE MAIS PLUSIEURS INTERPRÉTATIONS
2. DES CONTROVERSES
3. UNE FORMULE MACROSCOPIQUE OU MICROSCOPIQUE ?
CONCLUSION DE L’ENQUÊTE HISTORIQUE
PARTIE 4 RECONSTRUCTION DIDACTIQUE
CHAPITRE 1 APPORT DE L’ENQUÊTE HISTORIQUE POUR L’ÉLABORATION DES RESSOURCES
1. REGARDS CROISÉS ENQUÊTES HISTORIQUES ET ENQUÊTES DIDACTIQUES
2. HISTOIRE DES SCIENCES POUR LE MEDIA : LES RAISONS DE L’ÉLABORATION DES FORMULES CHIMIQUES
CHAPITRE 2 : ÉLABORATION DES RESSOURCES
1 CHOIX DES RESSOURCES
2. LES SCÉNARIOS
CHAPITRE 3 : PREMIÈRES UTILISATIONS DES RESSOURCES
1. COMPARAISON INTRA-PERSONNELLE AVEC OU SANS LES RESSOURCES
2 UTILISATION DES DIALOGUES PAR UN ENSEIGNANT
CONCLUSION PARTIE 4
CONCLUSION GÉNÉRALE ET PERSPECTIVES
CONCLUSION
UNE ENQUÊTE INSTITUTIONNELLE
UNE ENQUÊTE AUPRÈS DES ÉLÈVES
UNE ENQUÊTE SUR LES PRATIQUES DES ENSEIGNANTS
UNE ENQUÊTE HISTORIQUE
L’ÉLABORATION ET LES PREMIÈRES UTILISATIONS DU MEDIA
PERSPECTIVES DE RECHERCHE
LES ÉLÈVES PEUVENT-ILS CONSTRUIRE DES RAISONS ?
LA FORMATION DES ENSEIGNANTS
L’ÉLABORATION D’UN NOUVEAU CURRICULUM
BIBLIOGRAPHIE

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