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Epidémiologie
La consommation de cocaïne est mal connue sur le plan épidémiologique en raison de son caractère illicite d’une part et d’autre part parce qu’il est difficile de fixer la limite entre usage abusif et dépendance.
Alors, certaines études notamment anglo-saxonnes, ont utilisé les critères diagnostiques des classifications internationales telles que le DSM IV (Diagnostical and Statistical Manuel of mental disorders IV) ou la 10ème Classification Internationale des maladies (CIM-10) afin d’évaluer la fréquence de la dépendance à la cocaïne en population générale. (4)
Les origines et mécanismes neurobiologiques de la dépendance
Le processus addictif se déroule en trois étapes pendant lesquelles on observe des modifications progressives du comportement de consommation : (9)
– La première étape est une phase non pathologique où l’individu fait un usage récréatif de la drogue. Ceci peut être considéré comme un comportement « normal » qui existe dans une large proportion de la population humaine, et ce, qu’il s’agisse des drogues légales ou illégales.
– La seconde étape, l’usage intensif, commence par une augmentation de la fréquence et de la quantité de drogue consommée ; c’est la première phase pathologique modérée. Néanmoins, l’individu reste organisé et est généralement bien intégré dans la société.
– La troisième et dernière étape de ce processus amène à l’état pathologique le plus grave. Dans ce cas, l’individu perd largement le contrôle de sa consommation de drogue et devient dépendant. La prise de produit devient son activité principale ; la dégradation de sa vie sociale devient alors inévitable, de même que les rechutes, même après une période d’abstinence prolongée.
La vraie question est : « comment la recherche de plaisir se transforme-t-elle en besoin ? »
Il faut savoir que toutes les drogues susceptibles de déclencher une dépendance chez l’Homme ont une propriété commune : l’augmentation de la quantité de dopamine (molécule du plaisir et de la récompense). De manière plus spécifique, la cocaïne inhibe la recapture de la dopamine en bloquant, au niveau synaptique, son transporteur (Dopamine Active Transporter, DAT), protéine de membrane que l’on trouve notamment sur les terminaisons des neurones mésocorticolimbiques.(10) Il en résulte une augmentation de la transmission dopaminergique au niveau du système limbique, aussi appelé « circuit de la récompense ». C’est la potentialisation de cette transmission qui serait en partie responsable de la très forte dépendance psychique observée avec la cocaïne.
Description d’une substance psychoactive : la cocaïne
Historique
L’usage millénaire (entre 2600 et 5000 ans) des feuilles de coca est attesté par des inscriptions sur des poteries et des tombes chez les Incas et dans les civilisations pré-incas. A l’époque la cocaïne servait de plante médicinale, de stimulant, ou encore d’objet rituel.
Puis introduite en Europe au XVIème siècle, après la conquête du Pérou, elle fut employée par les médecins en infusion et en décoction pour de nombreux traitements.
C’est en 1859 qu’Albert NIEMANN isola et purifia la cocaïne. Celle-ci fut alors utilisée en tant qu’anesthésique local en ophtalmologie (par Karl KOLLER en 1870) et en odontologie (par HALTED en 1884). Par la suite, dès la fin du XIXème siècle, son usage fut détourné et ses propriétés addictives ont été rapidement reconnues. (5) Au XXème siècle l’usage de la cocaïne, qui était jusqu’alors réservé aux milieux aisés, se démocratise touchant ainsi toutes les couches sociales. C’est à partir de la fin des années 1970 que la consommation de cocaïne connait une forte augmentation, notamment avec l’apparition du « crack », dérivé fumable à bas prix de la cocaïne. La France est à ce jour le quatrième pays d’Europe consommateur de cocaïne après l’Espagne, le Royaume-Uni et l’Italie ; et loin derrière les Etats-Unis où son obtention est plus aisée.
Les produits et leurs modes de consommation
La cocaïne est extraite des feuilles du coca, un arbuste originaire d’Amérique du Sud. Elle se présente sous deux formes :
– Une forme chlorhydrate (poudre blanche) obtenue à partir de la feuille de coca. Celle-ci peut se prendre par voie nasale (sniff) ou par voie intraveineuse (IV), notamment en association avec de l’héroïne (on parle alors de speedball). Les injections IV induisent un effet quasi immédiat contrairement à l’utilisation par voie intramusculaire ou sous-cutanée. (5)
D’autre part afin d’éviter l’inconfort de l’inhalation, certains consommateurs ont pris l’habitude de se frotter les gencives avec la poudre.(14) Cela semble donner une sensation forte, semblable à ce que procure l’inhalation, probablement à cause de la nature voisine des muqueuses et de leur riche vascularisation.
– Une forme base qui circule sous l’appellation « crack » ou « free base ». C’est un dérivé du chlorhydrate de cocaïne, résultant de l’adjonction de bicarbonate ou d’ammoniac. Cette transformation permet une cristallisation de la poudre en petits cailloux destinés à être fumés principalement (15).
Son action est donc extrêmement rapide. Si l’effet est quasi immédiat, il est également très bref (moins de 10 minutes), ce qui pousse le sujet à recommencer tout de suite sous peine d’une chute psychologiquement difficile. Ceci entraîne une dépendance très forte et quasi instantanée. Il est dit du crack que « si on commence, on ne peut pas s’arrêter ».(16) A noter que le crack est nettement moins pur que la cocaïne, ce qui rend son coût peu élevé et donc sa consommation plus importante surtout en milieu festif.
Les effets de la cocaïne sur l’organisme
Effets Pharmacocinétiques (17):
Les effets euphorisants sont pratiquement instantanés étant donné que la cocaïne atteint le cerveau en 3 à 5 secondes lorsqu’elle est fumée sous forme de crack, en 12 à 16 secondes lorsqu’elle est injectée par voie IV et entre 3 et 5 minutes lorsqu’elle est inhalée. L’effet maximum est atteint dans les 20 minutes suivant la prise.
Tableau 3: Pharmacocinétique de la cocaïne (d’après Egred et al. Post Med J, 2005).(17)
Le pic plasmatique est atteint en 3 minutes lorsque la cocaïne est fumée, et en 15 à 20 minutes lorsqu’elle est consommée par voie intranasale. L’inhalation de fumée (crack) est la forme la plus addictive compte tenu de la brièveté des effets. (17)
Seulement 5% de la cocaïne est excrétée par voie urinaire sans être métabolisée. Tandis que 80% est métabolisé en métabolites inactifs par des cholinestérases hépatiques et plasmatiques. La plus grande partie de la cocaïne consommée et de ses métabolites est éliminée de l’organisme après 24 heures, quelle que soit la voie d’administration.(18)
Effets Pharmacodynamiques:
On a vu précédemment que les effets de la consommation de cocaïne résultent pour la plupart d’une intense stimulation du système nerveux sympathique, par blocage de la recapture présynaptique de neurotransmetteurs (dopamine). Il en résulte une dilatation des bronches, une accélération de l’activité cardiaque et respiratoire, une dilatation des pupilles, une augmentation de la sudation et de la tension artérielle, ainsi qu’une diminution de l’activité digestive. (19)
Effets cliniques : intoxication aiguë par la cocaïne:
Le début des effets et les effets ressentis dépendent de la voie d’administration, des individus et de la dose consommée.
Sur le plan psychologique, la consommation occasionnelle d’une faible dose de cocaïne entraîne une sensation de bien-être et d’euphorie associée à un effet psychostimulant. Le sujet est hyperactif, insomniaque, il ressent une impression de confiance en soi et une plus grande efficience mentale. On remarque également une hypervigilance, une désinhibition sociale, une facilitation de la communication et une élévation de la libido. (20)
Cette phase est couramment appelée le « rush ». A forte dose, l’utilisateur peut être sujet d’une agitation intense accompagnée d’hallucinations.
Ces effets sont biphasiques. La phase d’excitation étant suivie d’une phase de dépression appelée « descente », laquelle se caractérise par une dysphorie, une asthénie, une irritabilité, une anxiété et une perte de l’estime de soi. Ces symptômes peuvent débuter 20 minutes après la prise et durer quelques heures. (21)
Les usagers tentent souvent de gérer cette phase par la consommation d’autres psychotropes (cannabis, alcool, héroïne…) pouvant engendrer une dépendance secondaire, voire une overdose.
Enfin, la cocaïne n’engendre pas de dépendance physique. En revanche la dépendance psychique est intense et précoce (15), conduisant à des envies irrépressibles d’en consommer (craving) rapidement après la dernière prise. De plus, cette dépendance psychique s’accompagne d’une accoutumance (tolérance), c’est-à-dire d’une nécessité d’augmenter les doses pour éprouver un même effet. (22) Par conséquent, tout usage de cocaïne peut être considéré comme un usage à risque.
Les complications psychiatriques
La consommation de cocaïne entraîne très souvent des troubles de la vigilance associés à une désorientation temporo-spatiale et à un sentiment de persécution. Le sujet a l’impression d’être espionné ou persécuté par son entourage ou par la police. Cette paranoïa peut se rencontrer chez les 2/3 des patients dépendants à un moment ou à un autre de leur évolution. (23) (24)
La cocaïne peut aussi induire des épisodes délirants aigus (pharmacopsychose) qui ont tendance à devenir de plus en plus fréquents et de plus en plus sévères avec la répétition de la consommation. (25) Les symptômes psychotiques persistant 1 à 2 semaines après l’arrêt de la consommation sont tout de même plus rares.
D’autre part, d’après des études épidémiologiques menées en population générale telle que l’Epidemiology Catchment Area (ECA), les troubles dépressifs sont les troubles psychiatriques les plus fréquemment associés à la dépendance à la cocaïne. (26)
Dans l’étude NESARC la plus récente, 62.5% des sujets dépendants à la cocaïne ont présenté un trouble de l’humeur au cours de leur vie (dépression majeure 50% ; dysthymie 23%), 45% des troubles anxieux (24% des attaques de panique, 16% des phobies sociales, 15% des troubles anxieux généralisés). (27) Ces troubles dépressifs peuvent mener à des tentatives de suicide (21) non négligeables puisque dans l’étude de l’auteur Roy, 39% des sujets d’une population de patients cocaïnomanes ont fait une ou plusieurs tentatives de suicide. (28)
Les complications somatiques
L’administration prolongée peut entraîner des complications somatiques (pouvant être parfois mortelles) liées à la stimulation du système nerveux sympathique par la cocaïne, telles que des complications cardiovasculaires, neurologiques, pulmonaires, obstétricales mais aussi systémiques.
Complications cardiovasculaires
Il faut savoir que la cocaïne est, de loin, le toxique illicite présentant les plus fréquentes et les plus sévères atteintes cardiovasculaires. (29)
Les modifications hémodynamiques liées à l’absorption de cocaïne comprennent :
– Une vasoconstriction puissante des artères coronaires ;
– Une élévation de la fréquence cardiaque et de la pression artérielle systémique (et donc une augmentation du besoin en O2 du myocarde) ;
– Une hyperactivation et agrégation plaquettaire pouvant induire une thrombose.(30)
Parmi ces atteintes cardiovasculaires, on note :
Risque d’infarctus du myocarde (IDM):
Le symptôme cardiovasculaire le plus fréquemment rencontré chez les usagers de cocaïne est la douleur thoracique amenant souvent à consulter. Elle peut être accompagnée de palpitations, dyspnées, anxiété, vertiges, nausées pouvant évoquer d’autres complications.(17)
C’est en 1982 que l’association IDM et cocaïne est rapportée pour la première fois. C’est en 1984 que l’on suggère l’existence de l’IDM chez les patients cocaïnomanes en l’absence de lésions coronaires et en 1985 chez des patients totalement sains, sans aucun facteur de risque cardiovasculaire. (31)
Les différentes études rapportées sont concordantes quant aux caractéristiques des sujets présentant un IDM induit par la prise de cocaïne. L’homme (87%), jeune (38 ans en moyenne), fumeur (91%), sans antécédent cardiaque (68%), consommateur chronique de cocaïne (95%), avec une consommation récente (<24h) par voie nasale (65%) est la victime typique de l’infarctus du myocarde. (32)
De plus il faut savoir que le risque d’IDM est plus élevé dans les heures qui suivent la consommation, sans lien avec la quantité ou le mode d’administration. D’après l’étude d’Hollander et al. 2/3 des IDM surviennent dans les 3 heures après l’usage de cocaïne. (33)
Par ailleurs, dans 76% des cas, la consommation de cocaïne est associée à la prise d’alcool et de tabac. L’association de polyconsommations exacerbe la toxicité cardiaque et augmente le risque d’infarctus. Elle est à l’origine de 80% des morts subites principalement de cause cardiovasculaire (62%) chez les consommateurs de cocaïne.(17)
Risque de trouble du rythme:
L’usage de cocaïne peut entraîner de multiples troubles du rythme ou de la conduction, habituellement transitoires et réversibles avec l’élimination de la cocaïne. Des cas de tachycardie supraventriculaire, tachycardie ventriculaire, tachycardie et bradycardie sinusale, fibrillation ventriculaire et asystolie ont été rapportés. (34) Les troubles du rythme peuvent être mortels. Lorsqu’ils surviennent quelques heures après l’intoxication, ils témoignent généralement d’une ischémie myocardique.
Risque de cardiomyopathie:
Des cas d’hypertrophie ventriculaire gauche et de dysfonction systolique ont été décrits chez des patients usagers au long cours de cocaïne. Plusieurs autres cas ont montré des cardiomyopathies dilatées chez des usagers chroniques ou une dysfonction myocardique profonde après un usage aigu et massif de cocaïne. (35) Ces cardiomyopathies hypertrophique et dilatée observées favorisent la survenue d’IDM, de troubles du rythme et de morts subites. (36)
Risque de dissections aortiques:
Quelques cas cliniques de dissection aortique secondaire à l’usage de crack ont été décrits. Il s’agit d’un déchirement de la paroi de l’aorte. Ce phénomène est rare et très grave car il peut conduire à la rupture totale de l’aorte et à une mort certaine. L’association à une hypertension artérielle semble très fréquente (79%). (17)
Rashid et al. ont rapporté 12 cas de dissection aortique (83% d’hommes, âge moyen 43 ans) survenus après un usage récent de cocaïne. L’intervalle moyen entre l’usage de cocaïne et le début des symptômes étant de 12 heures. Parmi ces 12 cas, 4 patients sont morts ; la plupart étaient jeunes avec des antécédents d’hypertension mal stabilisée. (37)
Risque d’endocardite infectieuse:
Lorsqu’elle est administrée par voie intraveineuse, la cocaïne est associée à une augmentation du risque de développer une endocardite bactérienne sur le coeur droit lésant la valve tricuspide ; alors que dans l’endocardite d’origine dentaire ce sont essentiellement les valves du coeur gauche qui sont touchées.
Le mécanisme demeure encore inconnu. La tachycardie et l’hypertension artérielle (HTA) accompagnant les abus de cocaïne induiraient l’apparition de lésions valvulaires. Celles-ci semblent favoriser l’invasion bactérienne et la greffe des impuretés, en association avec un éventuel effet immunosuppresseur de la cocaïne. (38) Ainsi, la recherche et la suppression des foyers infectieux bucco-dentaires sont essentielles pour éviter que des germes venus de la pulpe et du péri-apex ne se greffent sur la valve endommagée.
Risque de thrombose veineuse et artérielle:
La thrombose, c’est-à-dire la formation d’un caillot dans une veine ou une artère, se manifeste cliniquement par une ischémie aiguë d’un membre. Certaines études ont pu montrer le lien entre l’inhalation de cocaïne ou de crack et la survenue, dans les 9heures qui suivent en moyenne, d’un début de thrombose artérielle. Chacun des cas a été confirmé par l’angiographie, et après anamnèse, aucun des sujets ne présentaient d’antécédents personnels ou familiaux d’évènements thromboemboliques. (32) Une thrombose est souvent à l’origine d’un infarctus du myocarde chez le cocaïnomane. (17)
Risque d’accident vasculaire cérébral (AVC):
Depuis une vingtaine d’années, de nombreuses données convergent en faveur de l’existence d’un lien entre la survenue d’AVC chez de jeunes patients (moins de 50 ans) et la consommation de substances illicites, et notamment la cocaïne. Le lien causal direct reste cependant difficile à démontrer en raison de la présence d’autres facteurs de risque (diabète, hypertension, tabagisme…). (39)
L’utilisation de cocaïne sous forme de « crack » est associée à des accidents vasculaires tant ischémiques qu’hémorragiques, alors que la cocaïne sous la forme de chlorhydrate serait davantage associée à des complications hémorragiques, surtout lorsqu’elle est administrée par voie intraveineuse. (40)
Suite à un AVC, le pronostic fonctionnel des patients cocaïnomanes est non seulement plus médiocre, mais le risque de mortalité intra-hospitalière est également 3 fois plus élevé que chez les patients ne consommant pas de cocaïne. (41)
Complications pulmonaires
Les complications pulmonaires sont liées quasi exclusivement à la consommation de crack ou de free base. De fines particules de cocaïne sous sa forme basée sont alors inhalées, atteignant les voies respiratoires les plus profondes, entraînant des complications aiguës en quelques minutes voire en quelques heures.
Parmi ces manifestations aiguës sont surtout retrouvées : une toux (quasi constante), une respiration sifflante, et plus rarement des crachats sanglants (hémoptysies). Ces symptômes peuvent persister en cas de consommation au long cours (conséquence de l’irritation chronique des voies respiratoires). (42)
Des barotraumatismes à l’origine de pneumothorax ou de pneumopathies (bronchiolite oblitérante, oedème pulmonaire non cardiogénique, hémorragie intra-alvéolaire…) sont également des complications relativement fréquentes. Néanmoins la fréquence réelle et l’étendue des lésions pulmonaires causées par la cocaïne restent encore incertaines. (43) Le crack est également responsable de l’apparition de crises asthmatiques sévères ou de l’aggravation d’un asthme préexistant. (44)
Complications rénales
L’usage régulier de drogue peut entraîner des lésions au niveau du parenchyme rénal. Quant à l’intoxication à la cocaïne, elle est associée à de multiples cas de lésions vasculaires dont l’infarctus rénal, qui reste rare malgré tout. Il s’agit d’une ischémie d’une partie ou de l’ensemble du rein secondaire à une thrombose artérielle. Ce sont les effets vasoconstricteurs et thrombotiques de la cocaïne qui semblent être les principaux facteurs déclencheurs d’un infarctus rénal. (45)
Par ailleurs, la consommation chronique et excessive de cocaïne évolue indéniablement vers une insuffisance rénale aiguë. Cette évolution est progressive et irréversible.
Complications infectieuses
On note chez les toxicomanes un trouble de l’immunité lié à :
– L’action des drogues ;
– La malnutrition ;
– Des facteurs psychologiques et au stress.
Un sujet toxicomane est beaucoup plus sensible aux infections qu’un sujet témoin.
D’une manière générale, les infections sont liées à la voie d’injection intraveineuse, en particulier les infections au virus de l’hépatite C et au VIH. On retrouve des infections bactériennes locales (abcès locaux) ou générales (endocardites, pneumopathies, bactériémies), des infections virales, parasitaires, ainsi que des infections sexuellement transmissibles (notamment la syphilis). (46)
Complications obstétricales
La consommation de drogues pendant la grossesse est un problème majeur de santé publique aussi bien en Europe qu’aux Etats-Unis. Il est très difficile de décrire les effets spécifiques de chaque substance étant donné qu’il s’agit souvent de poly-consommations de produits illicites ou non (tabac, alcool, cannabis, cocaïne, etc…). Le cumul des effets de chacune des substances entraîne une amplification des dommages allant jusqu’à une morbidité, voire une mortalité de plus en plus fréquente.
L’exposition à la cocaïne durant la grossesse augmente le risque d’hématomes rétro-placentaires, d’avortements spontanés (en particulier au cours du premier trimestre), mais aussi de retards de croissance intra-utérine, et d’accouchements prématurés. (47)
En induisant une vasoconstriction placentaire, la cocaïne peut être responsable d’une souffrance foetale aiguë ou chronique. Des morts subites in utero sont également rencontrées, dues à une intoxication aiguë ou à une malformation cardiaque létale. Des malformations des membres, de l’appareil génito-urinaire, cardio-vasculaire, visuel, auditif ou du système neurologique sont également possibles.(47)
Les nouveau-nés de mères consommatrices de crack, plus souvent prématurés et de faible poids, peuvent présenter des signes de sevrage avec hypertonie et insomnie et plus rarement des convulsions. Le risque de mort subite du nourrisson est d’environ 15%, soit trois fois plus élevé que chez l’enfant né d’une mère consommant de l’héroïne. (48)
En ce qui concerne l’enfant, il semblerait que la toxicité de la cocaïne induise des conséquences à long terme (troubles visuels, retard mental, perturbations neurologiques). On remarque davantage de troubles comportementaux comme le manque de concentration, la désorganisation et l’hyperactivité chez les enfants ayant été exposé à la cocaïne pendant la grossesse. (49)
Etiologies des pathologies bucco-dentaires
La salive
Son rôle
La salive est un fluide organique sécrété par les glandes salivaires principales (parotides, sous-maxillaires et sub-mandibulaires) et accessoires (labiales, palatines, linguales…). L’innervation de ces glandes est assurée par le système sympathique et le système parasympathique, responsable d’une sécrétion abondante, fluide et claire.
La salive participe activement à l’équilibre et à la protection du milieu buccal en assurant : (50)
– La neutralisation des acides produits pendant le processus cariogène (c’est le pouvoir tampon).
– Le nettoyage mécanique des surfaces dentaires et des muqueuses en réduisant l’accumulation de plaque.
– La réduction de la solubilité de l’émail grâce à l’action des ions phosphates, calcium, et fluorures qu’elle contient (reminéralisation).
– Et en présentant une action anti-bactérienne grâce aux enzymes et aux immunoglobulines.
Les modifications salivaires chez le toxicomane
Si certaines études (Di Cugno et al., 1981 ; Scheutz, 1984) (51) ont montré que la plupart des drogues empêche l’influx parasympathique de déclencher le travail des glandes salivaires (grâce à leur propriété anti-cholinergique), ce n’est pas le cas pour la cocaïne. Malgré ses effets sympathomimétiques, on n’a pas vraiment trouvé de lien entre la consommation stricte de cocaïne et la diminution du flux salivaire. (52) En revanche les consommateurs de crack présentent une hyposialie significative par rapport à une population non addicte. (53)
Les conséquences de l’hyposialie varient selon le sujet, le type de drogue mais aussi selon la fréquence de consommation. Dans tous les cas on constate une diminution du pH salivaire et une accumulation de plaque dentaire responsables de caries et de maladies parodontales. (54)
Le mode de vie
L’alimentation
Pris par le besoin prédominant de la drogue, le toxicomane a un régime alimentaire déséquilibré. Il se nourrit essentiellement de sucreries, sodas et nourriture de fast-food ; il se retrouve alors rapidement en état de malnutrition avec des carences en protéines et en vitamines. Ceci a pour conséquence une fonte musculaire, des troubles de l’hémostase (carence en vitamine K), et des troubles immunitaires. Ces carences associées à l’action sialoprive des drogues aboutit à l’acidification du milieu buccal favorisant la formation de plaque dentaire et l’apparition de caries.
L’hygiène bucco-dentaire
Tout comme l’alimentation, le toxicomane se désintéresse de son hygiène bucco-dentaire. Celle-ci est très souvent déplorable voire inexistante, ce qui favorise là encore l’accumulation de plaque bactérienne et prédispose à la carie. (14)
La perception de la douleur sous l’effet de la drogue
Un des principaux mécanismes d’action de la cocaïne est l’inhibition des canaux sodiques, responsable d’un effet stabilisant de membrane ou « effet anesthésique local ». (56) De ce fait le cocaïnomane perçoit les douleurs dentaires de manière très faible voire nulle. Les effets analgésiques masquent les symptômes douloureux des réactions inflammatoires aiguës ou subaiguës d’origine dentaire et retardent le traitement approprié.(14)
Ainsi l’usager se présentera au cabinet dentaire lorsqu’il sera en état de manque (par réveil de la douleur) ou lorsque les douleurs seront trop fortes pour être masquées par l’effet anesthésiant de la drogue. (14)
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Table des matières
1 – DEFINITIONS
2 – NOTIONS DE DEPENDANCE ET DESCRIPTION D’UNE SUBSTANCE PSYCHOACTIVE : LA COCAÏNE
2.1 – Epidémiologie
2.2 – Les origines et mécanismes neurobiologiques de la dépendance
2.3 – Description d’une substance psychoactive : la cocaïne
2.3.1 – Historique
2.3.2 – Les produits et leurs modes de consommation
2.3.3 – Les effets de la cocaïne sur l’organisme
3 – LES COMPLICATIONS GENERALES DE LA CONSOMMATION DE COCAÏNE
3.1 – Les complications psychiatriques
3.2 – Les complications somatiques
3.2.1 – Complications cardiovasculaires
3.2.2 – Complications pulmonaires
3.2.3 – Complications rénales
3.2.4 – Complications infectieuses
3.2.5 – Complications obstétricales
3.3 – Tableau récapitulatif
4 – LES PATHOLOGIES BUCCO-DENTAIRES
4.1 – Etiologies des pathologies bucco-dentaires
4.1.1 – La salive
4.1.1.1 – Son rôle
4.1.1.2 – Les modifications salivaires chez le toxicomane
4.1.2 – Le mode de vie
4.1.2.1 – L’alimentation
4.1.2.2 – L’hygiène bucco-dentaire
4.1.3 – La perception de la douleur sous l’effet de la drogue
4.2 – Les effets de la cocaïne sur les tissus durs
4.2.1 – Les caries
4.2.2 – Les différents types d’usure
4.2.3 – Les fractures dentaires
4.3 – Les effets de la cocaïne sur les tissus mous
4.3.1 – Les maladies parodontales
4.3.2 – Pathologies des muqueuses
4.3.2.1 – Candidose et glossite
4.3.2.2 – Les infections sexuellement transmissibles (IST) : les répercussions buccales
4.3.3 – Les perforations naso-palatines
4.4 – Tableau récapitulatif
5 – PRISE EN CHARGE EN PRATIQUE QUOTIDIENNE
5.1 – Généralités sur la relation thérapeutique
5.1.1 – De l’anxiété à la manipulation
5.1.2 – La difficulté de coopération
5.1.3 – L’aspect financier
5.1.4 – Le facteur temps
5.1.5 – Les risques à connaître
5.2 – Conduite à tenir vis-à-vis du patient usager de cocaïne
5.2.1 – Identification des patients consommateurs de cocaïne
5.2.2 – Prise en charge médicale
5.2.3 – Prise en charge bucco-dentaire
5.2.3.1 – Précautions générales
5.2.3.2 – Précautions spécifiques
5.2.4 – Tableau récapitulatif
CONCLUSION
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