Le trouble bipolaire des adolescents est maintenant largement reconnu dans la communauté scientifique et depuis trois décennies des travaux concernant ses spécificités et sa prise en charge apparaissent dans la littérature. Ce trouble bipolaire de l’adolescent est fréquent et sa prévalence est estimée à 1 % de la population juvénile dans la littérature. Cette maladie apparaissant tôt, à période de vulnérabilité, peut entraîner des graves complications et conséquences lorsqu’elle n’est pas traitée. En effet, le trouble bipolaire peut entraîner un risque suicidaire majeur, des conduites addictives, une déscolarisation et une désocialisation. Ainsi, une prise en charge adaptée représente un enjeu majeur dans l’évolution du trouble bipolaire chez l’adolescent. Le traitement médicamenteux indispensable à la stabilisation du trouble ne semble malheureusement pas suffisant étant donné les taux de rechute, d’hospitalisations et de mauvaise observance importants à cet âge. Il y a quelques années l’éducation thérapeutique est apparue en Amérique du Nord avec quatre objectifs principaux : optimiser le traitement médicamenteux, prévenir les récidives, améliorer la qualité de vie et consolider l’alliance thérapeutique. La psychoéducation chez l’adulte bipolaire à fait l’objet de nombreuses publications et permet d’améliorer considérablement l’évolution de la maladie. Par contre, ce n’est que très récemment que le milieu médical s’est intéressé à l’éducation thérapeutique spécifique aux adolescents bipolaires. Les quelques études mettent en avant des résultats prometteurs en terme d’amélioration des symptômes et de l’observance médicamenteuse.
Généralités sur le trouble bipolaire
épidémiologie
Le trouble bipolaire est une pathologie chronique alternant des phases d’expansion de l’humeur avec une augmentation de l’énergie et des activités (manie ou hypomanie), et des baisses de l’humeur (dépression), avec des intervalles libres plus ou moins longs. Selon le DSM 5, les troubles bipolaires sont catégorisés en trouble bipolaire de type I, trouble bipolaire de type II et trouble bipolaire non spécifié.
– Les troubles bipolaires de type I sont caractérisés par la présence d’au moins un épisode maniaque ou mixte.
– Les troubles bipolaires de type II sont caractérisés par la survenue d’un ou de plusieurs épisodes dépressifs majeurs et d’au moins un épisode d’hypomanie.
La durée moyenne d’un épisode varie entre 4 et 13 mois, avec des épisodes maniaques plus courts que les épisodes dépressifs. Le trouble bipolaire est caractérisé par la présence de récurrences chez plus de 90 % des patients. La première récurrence survient le plus souvent au cours des deux premières années suivant l’épisode initial .
En France, la prévalence du trouble bipolaire est estimée entre 1 % et 2,5 %. Pour le trouble bipolaire de type I, la prévalence se situe autour de 0,6 % . Pour le trouble bipolaire de type II, la prévalence est de l’ordre de 0,4 %, selon les critères du DSM-IV-TR. Les formes subsyndromiques, également appelées trouble bipolaire NOS (« not otherwise specified »), ne correspondant pas au trouble bipolaire de type I ou II définis dans le DSM-IV-TR. Ces formes subsyndromiques ont une prévalence de 1,4 %. Les patients bipolaires passent environ 20 % de leur vie dans des épisodes thymiques.
Le sexe ratio est de 1.
L’âge de début est variable :
● 15 ans pour l’âge d’apparition des premiers symptômes,
● 18,7 ans pour l’âge du diagnostic,
● 22 ans pour l’âge du premier traitement,
● 25,5 ans pour l’âge de la première hospitalisation.
Le trouble bipolaire possède une forte composante génétique. Si un enfant a un antécédent au premier degré de trouble bipolaire alors son risque d’être bipolaire est d’environ 20 %. Si ses deux parents ont un trouble bipolaire, ce risque monte à 50–60 %. Un début précoce, avant 18 ans, est un facteur de mauvais pronostic. Il y a un plus grand nombre de récurrences, d’épisodes mixtes, de cycles rapides, des périodes d’euthymie plus courtes, et une moins bonne réponse aux thymorégulateurs. Les abus de substances et les troubles anxieux comorbides sont plus fréquents. Le taux d’actes médicolégaux est plus important .
Ils présentent aussi davantage d’antécédents familiaux de troubles de l’humeur, d’antécédents personnels de violence (verbale, physique ou sexuelle), de difficultés d’apprentissage, et de trouble bipolaire à cycles rapides. Le taux de mortalité par suicide est dans ce cas également plus élevé. Enfin, le trouble bipolaire est la sixième cause mondiale de handicap pour la population âgée de 15 à 44 ans.
Les femmes bipolaires ont plus que les hommes une polarité prédominante dépressive, comme un début dépressif alors que les hommes souffrent plus souvent de troubles comorbides addictifs. Les femmes ont une plus grande prévalence de dépression avec symptômes psychotiques et de troubles comorbides de l’axe II. On retrouve plus d’antécédents personnels et familiaux de tentative de suicide chez les femmes. Les femmes rapportaient plus des taux plus importants de troubles du comportement alimentaire comorbide, de changement de poids, d’appétit et d’insomnie durant la dépression .
Par contre, les tentatives de suicide sont plus violentes chez les hommes (pendaison, arme à feu…) . On retrouve plus souvent chez les hommes que chez les femmes un épisode maniaque qui inaugure le trouble bipolaire de type I. Ils ont des taux plus importants de dépendance à l’alcool, au cannabis, de jeux pathologiques et de trouble des conduites comorbides .
Les comorbidités du trouble bipolaire
Les comorbidités sont fréquentes dans le trouble bipolaire. Il apparaît qu’environ 65% des patients bipolaires présentent une comorbidité psychiatrique .
Les comorbidités addictives:
Les conduites addictives sont retrouvées de manière importante dans le trouble bipolaire. Celles-ci toucheraient environ 40 % des sujets bipolaires alors qu’elles touchent 10 % de la population générale . L’abus de substances illicites et d’alcool favorisent les rechutes thymiques et l’apparition d’éléments psychotiques, peuvent chroniciser un épisode dépressif et majorer la fréquence des états mixtes, des cycles rapides et le risque suicidaire. Dans l’addiction à l’alcool, il existe une proportion plus grande d’hommes que de femmes. Cependant le risque de développer une dépendance est plus élevé chez les femmes . 37 % des patients alcoolo-dépendants souffriraient d’un autre trouble mental. L’alcoolodépendance serait associée à un risque multiplié par 6,3 d’avoir un trouble bipolaire .
Les comorbidités anxieuses:
42% des patients bipolaires auraient une comorbidité anxieuse . Les troubles anxieux les plus souvent retrouvés sont : le trouble panique avec ou sans agoraphobie avec une prévalence vie entière de 20% ; la phobie sociale (16%) ; la phobie simple (10%) ; le TOC (9%) ; le stress post- traumatique (7%) ; le trouble anxiété généralisé (3%).
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE
I. Généralités sur le trouble bipolaire
a) Epidémiologie
b) Les comorbidités du trouble bipolaire
c) Les complications du trouble bipolaire
d) Les impacts socio-économiques
e) Les spécificités du trouble bipolaire chez l’adolescent
II.Les recommandations internationales
a) Les recommandations Françaises
Haute Autorité de Santé (H.A.S)
b) Les recommandations Britanniques
National Institute for health and Clinical Excellence (N.I.C.E)
c) Les recommandations Canadiennes
CAnadian Network for Mood and Anxiety Treatments (CA.N.M.A.T)
d) Les recommandations Américaines
American Psychiatric Academy (A.P.A)
III.Les différents types d’interventions psychosociales
1. La psychoéducation individuelle
2. La psychoéducation de groupe chez les adultes bipolaires
a) La Family Focused Treatment (FFT)
b) La Thérapie Cognitive et Comportementale (TCC)
c) L’InterPersonal and Social Rythm Therapy (IPSRT)
d) La psychoéducation
3. La psychoéducation de groupe chez les adolescents bipolaires
a) La FFT-A
b) La Child and Family Focused Cognitive Behavioral Therapy (CFF-CBT)
c) Les MultiFamily Psychoeducation Groups (MFPG)
d) L’IPSRT-A
e) La Dialectical Behavior Therapy pour les Adolescents
f) Des recommandations dans l’éducation thérapeutique des enfants et des adolescents dans les maladies somatiques
g) La littérature a montré des résultats prometteurs sur l’éducation thérapeutique chez des enfants
IV.Les groupes de psychoeducation existants en France
a) Pour les adultes
b) Pour les adolescents
DEUXIEME PARTIE
I.Le groupe de psychoéducation de Rouen
II.La création d’un programme d’éducation thérapeutique destiné aux jeunes bipolaire à Rouen
III.Présentation des patients
a) Vignette clinique numéro 1 : Le cas de Laura, 21 ans
b) Vignette clinique numéro 2 : Le cas de Natacha, 23 ans
c) Vignette clinique numéro 3 : Le cas de Stéphanie, 22 ans
d) Vignette clinique numéro 4 : Le cas de Marion, 21 ans
e) Vignette clinique numéro 5 : Le cas de Carole, 17 ans
f) Vignette clinique numéro 6 : Le cas de Gabriel, 20 ans
g) Vignette clinique numéro 7 : Le cas de Barbara, 17 ans
h) Vignette clinique numéro 8 : Le cas de Frederic, 18 ans
IV. Analyse des résultats
a) Caractéristiques épidémiologiques des jeunes de l’échantillon
b) Particularités épidémiologiques
c) Analyse de la participation
d) Analyse des résultats au questionnaire de base des connaissances avant et après le groupe
e) Observance médicamenteuse
f) Taux de rechutes thymiques (dépression, manie, état mixte)
g) Taux d’hospitalisation
h) Taux de satisfaction
V. Discussion des résultats
CONCLUSION
ANNEXE