Les origines
Les premières liaisons radios aéronautiques remontent au début du XXe siècle. A cette époque les ballons dirigeables et les avions communiquaient en radiotélégraphie dans la bande aéronautique des 900 mètres grâce à un opérateur navigant d’aéronef. Durant le vol une antenne pendante, au bout de laquelle un plomb de lestage portait l’indicatif radio de l’aéronef, était déroulée pour établir les communications. Et depuis les systèmes utilisés n’ont cessé d’évoluer au gré des avancées technologiques et des nouveaux besoins émergents. Ces communications entre les aéronefs et le sol se sont rapidement avérées indispensables pour améliorer la sûreté et l’efficacité des vols. En 1917, le premier émetteur récepteur radio pour avion a été inventé et la première communication radio entre un avion et le sol a été effectuée. Mais ce n’est seulement qu’au début des années 1930 qu’il est devenu techniquement et commercialement possible d’installer une radio à bord des avions. C’est d’ailleurs à cette même époque que la société ARINC (Aeronautical Radio INCorporated), un acteur important du domaine, a été fondée. Dans les années 1940, la radio devenue disponible sur la plupart des avions a permis de généraliser les communications vocales. Toutefois, il s’agissait souvent de systèmes propriétaires de qualité et de fiabilité médiocres opérant dans la bande HF comprise entre 3 MHz et 30 MHz.
Les limites de capacité des communications vocales
C’est après la seconde guerre mondiale que l’aéronautique a connu une évolution majeure avec le début de l’aviation commerciale et le transport de passagers. Les premières compagnies aériennes ont alors fait leur apparition. La nécessité de structurer, d’homogénéiser, et de réglementer les moyens de communications est vite apparue nécessaire Et c’est dans ce contexte que Organisation de l’Aviation Civile Internationale (OACI) a été créée en 1947 dans le but d’élaborer des normes pour standardiser le transport aéronautique international. C’est aussi en 1947, lors de la conférence mondiale des radiocommunications, organisée par l’Union Internationale des Télécommunications (UIT), que la bande VHF de 118 à 132 MHz est allouée aux services aéronautiques mobiles. Cette bande est alors divisée en 70 canaux de 200 kHz.
Le transport aérien de masse tel que nous le connaissons encore aujourd’hui a commencé à la fin des années 50, lorsque la compagnie PanAm a mis en service le Boeing 707. Et depuis le trafic aérien n’a cessé d’augmenter, saturant rapidement les ressources offertes par les systèmes de communication sol bord et les premiers 70 canaux disponibles. L’espacement entre les canaux a été rendu possible grâce à l’amélioration de la précision de détection de la fréquence des porteuses. On est ainsi passé de 200 kHz à 100 kHz en 1958, puis à 50 kHz en 1964 et à 25 kHz depuis 1972. Dans la même période, la bande allouée aux communications aéronautiques par l’UIT a augmenté. En 1959, elle a été étendue jusqu’à 136 MHz, puis jusqu’à 137 MHz en 1979. De plus, une sectorisation de l’espace aérien a été mise en place permettant notamment une réutilisation des fréquences sur différents secteurs suffisamment éloignés. En 1994, il a été décidé de réduire encore l’espacement des canaux de 25 kHz à 8,33 kHz. Cette séparation a été appliquée en Europe au-dessus du niveau de vol FL 245 (soit 24 500 pieds ou soit 7,5 km environ) à partir d’octobre 1999, puis au-dessus du niveau de vol FL 195 à partir de mars 2007.
Aujourd’hui, les fréquences de radiocommunication sont très convoitées. Il est donc difficile d’étendre la bande aéronautique VHF. De plus, la séparation des canaux de 8,33 kHz correspond à l’espacement minimal qui permet de transmettre de la voix avec une qualité suffisante, avec la modulation actuelle DSB-AM (Double Side Band – Amplitude Modulation). Il est donc à présent très difficile d’augmenter la capacité des systèmes de communications vocales. Cette augmentation est pourtant nécessaire pour répondre notamment à la croissance du trafic aérien.
Après deux reculs successifs, un après les attentats de septembre 2001 aux Etats-unis puis lors de la crise économique de 2008, le transport aérien reste aujourd’hui le moyen de transport qui se développe le plus rapidement. La figure 2.1 illustre les prévisions d’augmentation du trafic aérien en Europe d’ici 2020 par Eurocontrol qui est une organisation intergouvernementale européenne, fondée en 1963 et dont la mission est d’harmoniser et d’unifier la gestion de la navigation aérienne en Europe. On peut voir dans cette figure des prévisions de croissance annuelle de plus de 5% jusqu’en 2020 dans certaines parties de l’Europe. La congestion des systèmes de communications devrait donc s’accroître dans les prochaines années et ce, dans un contexte de besoins croissants pour le contrôle aérien, les compagnies, et les passagers.
Les communications de données numériques et le concept CNS/ATM
A la fin des années 70, les compagnies aériennes ont pris conscience du potentiel et de l’intérêt de proposer des communications basées sur les liaisons de données numériques sol bord en introduisant l’ACARS : Aircraft Communications Addressing and Reporting System. Ce système, appelé aussi Plain Old ACARS (POA) pour sa première version, utilise les canaux VHF de 25 kHz réservés aux communications vocales. Il offre un débit de 2,4 kbps et a pour but d’échanger des messages textes entre l’avion et la compagnie aérienne. Le mot ”ACARS” désigne aussi le format de ces messages. La première application était ”OOOI” pour ”Out, Off, On, In”. Elle a pour but de mieux gérer le temps de travail des pilotes, et donc leur rémunération. En effet, elle leur permet d’envoyer à la compagnie l’heure exacte à laquelle l’avion quitte la porte (Out), décolle (Off), atterrit (On) puis revient à la porte (In). D’abord basé sur un protocole orienté caractères puis orienté bits, l’ACARS a rapidement connu diverses améliorations et est ainsi devenu le moyen privilégié pour ce type de communication. Il a par la suite été enrichi d’autres applications dédiées aux plans de vol ou à des données météo par exemple.
En 1983, un comité dédié aux futurs systèmes de navigation aérienne a été créé à l’OACI. Il s’agit du comité FANS (Future Air Navigation System). Il était chargé d’étudier, d’identifier et de développer de nouveaux concepts opérationnels et de nouvelles technologies dans le domaine des communications, de la navigation et de la surveillance (CNS) aérienne, pour faire face aux nouveaux besoins et à la croissance du transport aérien mondial. Un fait marquant de ce comité a été l’introduction du concept CNS/ATM (Communication, Navigation, Surveillance / Air traffic Management). Il a été approuvé lors de la dixième conférence de la navigation aérienne en 1991 et a pour but d’améliorer la capacité et l’efficacité du transport aérien, tout en garantissant la meilleure sûreté possible. Concernant les communications sol bord, le changement majeur proposé par le comité FANS porte sur la manière même dont les pilotes et les contrôleurs au sol vont communiquer entre eux. Le moyen de communication primaire doit ainsi passer progressivement des communications vocales aux communications de données numériques telles que précédemment décrites avec l’ACARS pour les compagnies aériennes. Les communications vocales en VHF et HF, ou plus récemment par satellite, devraient rester disponibles mais seront réservées aux situations d’urgence. Dans un premier temps, les communications numériques entre le pilote et le contrôleur, par exemple via l’application CPDLC (Controller Pilot Data Link Communications), sont prévues pour une utilisation dans les espaces aériens océaniques ou polaires, mais elles devraient aussi remplacer à terme les communications vocales en bande VHF dans les zones continentales denses. Le mode de communication basé sur l’échange de données numériques est généralement appelé datalink dans le domaine aéronautique. Il doit permettre d’automatiser autant que possible les tâches de communication, et donc de faciliter et fiabiliser les échanges entre l’avion et le sol, permettant ainsi d’améliorer l’efficacité, la capacité et la sûreté du transport aérien. De plus, il doit aussi contribuer au désengorgement des fréquences dédiées aux communications aéronautiques. A bord de l’avion par exemple, les messages CPDLC sont affichés et envoyés à partir de terminaux dédiés, appelés DCDU (Data Communication Display Unit) sur les Airbus A320/A330/A340.
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Table des matières
INTRODUCTION
1 Notice individuelle
1.1 Curriculum Vitae
1.2 Liste des travaux
1.3 Activités de recherche
1.4 Activités d’enseignements
1.5 Implications Collectives et Responsabilités Administratives
2 Introduction : Les Communications sol bord dans le domaine aéronautique
2.1 Les origines
2.2 Les limites de capacité des communications vocales
2.3 Les communications de données numériques et le concept CNS/ATM
2.4 Les services pour le contrôle aérien, les compagnies, et les passagers
2.5 Les systèmes de communications de données pour le contrôle aérien
2.5.1 Les solutions basées sur des liaisons directes avec le sol
2.5.2 Les solutions basées sur des liaisons par satellite
2.6 Les systèmes de communication de données pour les passagers
2.6.1 Les solutions basées sur des liaisons par satellite
2.6.2 Les solutions basées sur des liaisons directes avec le sol
2.7 Les limites des systèmes existants et les perspectives
2.8 Organisation du mémoire
3 Les architectures de communications par satellite et leur application au domaine aéronautique
3.1 Les réseaux de communications par satellites
3.1.1 Principes généraux
3.1.2 La famille DVB
3.1.3 Amélioration des performances de TCP dans un réseau satellitaire
3.1.3.1 Les versions de TCP
3.1.3.2 Le « mandataire améliorant les performances » ou PEP (Performance Enhancing Proxy)
3.1.3.3 Le modèle de simulation
3.1.3.4 La plateforme d’émulation
3.1.3.5 Evaluation des performances de TCP sur un lien par satellite
3.2 Les communications par satellite dans le contexte aéronautique
3.2.1 Généralités
3.2.2 Optimisation d’un réseau d’accès par satellite pour les communications aéronautiques
3.2.2.1 Définition du système et gestion de la ressource
3.2.2.2 Architecture de l’équipement bord
3.2.2.3 Résultats des simulations et analyse
3.2.3 Dimensionnement des ressources pour les communications aéronautiques par satellite en espace océanique
3.2.3.1 Système et simulations
3.2.3.2 Dimensionnement des ressources en espace océanique
3.2.4 Sécurisation des communications aéronautiques
3.2.4.1 Contexte et principe général
3.2.4.2 La gestion adaptative de la sécurité
3.2.4.3 Méthode d’évaluation de la gestion adaptative de la sécurité
3.2.4.4 Résultats de l’évaluation du gestionnaire SecMan
4 Les communications aéronautiques sol bord multisaut
4.1 Des MANET aux VANET et des VANET aux AANET
4.2 Contexte et objectifs
4.3 Hypothèses et faisabilité
4.4 Système proposé
4.5 Etude des performances
4.5.1 Evaluation de la capacité disponible
4.5.2 Routage hiérarchique basé sur un clustering
4.5.3 Evaluation des performances avec une application réaliste
CONCLUSION