Les communautés d’artistes urbains à Nantes Métropole. Etude de terrain

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Le développement est composé de trois parties et neuf chapitres.

La Partie 1, Le cadre scientifique d’une étude géographique sur les communautés de pratique, présente le contexte de la recherche dans lequel la thèse s’effectue, en montrant l’intérêt scientifique d’étudier les communautés de pratique dans la discipline géographique et les enjeux que cela revêt. Le Chapitre 1 pose le cadre de la recherche et introduit conceptuellement l’objet sociologique à l’étude : les communautés de pratique. Le Chapitre 2 s’intéresse aux interactions sociales dans l’espace public, et expose les concepts et notions d’innovation sociale et de développement territorial qui permettent de construire la problématique et les hypothèses de recherche. Le Chapitre 3 expose et explique la problématique de la thèse, en posant quatre hypothèses, avec une orientation scientifique dirigée vers la recherche des conséquences des interactions entre les communautés de pratique et les pouvoirs publics, comme pouvant être à l’origine d’innovations sociales et de développement territorial. Le choix du terrain d’étude principal y est exposé.
La Partie 2, Les communautés d’artistes urbains à Nantes, étude de terrain, est centrée sur le terrain d’étude principal. L’enjeu de cette partie est de montrer les éléments de contexte géographique, politique et culturel dans lesquels les objets à l’étude se trouvent. Il s’agit également de montrer comment l’étude a été menée, pour enfin exposer les résultats, quant aux rapports que ces communautés de pratique entretiennent avec le territoire. Le Chapitre 4 a pour objectif de poser les éléments de contexte de l’étude de terrain, en montrant comment Nantes s’est orienté politiquement vers un développement basé sur la culture. Nous posons également les éléments de définition de l’art urbain. Le Chapitre 5 vient expliquer la méthodologie qui a été déployée pour mettre en œuvre l’enquête de terrain. Le Chapitre 6 expose les résultats de l’enquête de terrain concernant les communautés de pratique étudiées, leur diversité et leur fonctionnement.

Approches des communautés à géographie variable

En géographie, comme dans le reste des sciences humaines et sociales, la communauté est un objet qui fait débat et les approches scientifiques qui en sont faites expriment des manières de penser la géographie différentes, reflétant parfois des spécificités culturelles.

Prudence scientifique et culturelle dans la géographie sociale française, dissension avec la géographie postmoderne

La construction politique de la France explique une approche des communautés culturelle distanciée, invitant souvent à un usage prudent et limité du terme, voire volontairement péjoratif, et ce dans la plupart de domaines et catégories sociales du pays. Le champ de la géographie humaine n’est pas exempt de cette attitude et de ce rapport ambigu, discret, incertain ou interrogatif. Ainsi, en 2006, les géographes français Vincent Gouëset et Odile Hoffmann s’interrogeaient, dans un chapitre de l’ouvrage Faire et penser la géographie sociale, sur les rapports entre les communautés et la géographie française, en posant l’hypothèse éponyme « Communauté. Un concept qui semble poser problème à la géographie française ». Ce texte pose plusieurs constats. Tout d’abord, est rappelé le caractère soluble des frontières d’une communauté et donc la difficulté d’en définir les contours, ainsi que son usage plus fréquent dans le langage courant que dans la recherche. Afin de permettre une approche simplifiée de la communauté, il est suggéré de considérer celle-ci comme un objet « éminemment contextuel […] et heuristique, qui permet de décrypter des logiques d’affiliation collective à un temps t, dans un environnement donné » (2006, p. 264). L’impossibilité de décrire certaines communautés actuelles, notamment dans le cadre du « néo-tribalisme post-moderne » dont parle Maffesoli (2000)16, comme des groupes fixes est ici assumée, en rappelant que les communautés peuvent être extrêmement mouvantes, résultant de combinaisons complexes entre temporalités réduites et appartenances variées. Pour les auteurs, le terme de communauté ne peut être considéré que du point de vue de ceux qui s’y réfèrent et à leurs « logiques d’action », et ne peut prendre sens que dans la perspective « de la construction et de la pratique sociale » (2006, p.265). L’approche des communautés par la géographie française, quand bien même elle existe et tente d’évoluer, reste en partie orientée par une grille de lecture « traditionnelle » de ces groupes. Ainsi, Jacques Lévy définit une communauté comme étant un « groupe non choisi auquel l’individu délègue de manière automatique, globale et irréversible sa compétence et son action » (LEVY, LUSSAULT, 2013, p. 201). Cette vision de la communauté la rapproche de celle de Tönnies, distinguant la communauté qui enferme dans le groupe, de la société qui libère l’individu. Ce point de vue empêche la possibilité de voir en elle un groupe porteur d’actions collectives, à visées innovantes et libératrices de problèmes rencontrés dans la société.
En France, cette approche ambivalente et prudente des communautés peut être éclairée par l’importance de la géographie sociale comme courant scientifique prépondérant dans le champ disciplinaire de la géographie humaine. Bien que trouvant ses origines à la fin du 19ème siècle, généralement attribuées à Elisée Reclus, la géographie sociale s’est développée, en France, à partir des années 1970. La discipline connait alors une période de remise en question scientifique, en lien avec les transformations sociétales d’alors, et s’engage un processus de réflexion et de repositionnement épistémologique. Des géographes souhaitent s’émanciper de la géographie académique, héritée de l’école vidalienne, conservatrice et dominée par la géographie physique, tout en échappant aux orientations positivistes de la « nouvellegéographie » d’inspiration américaine (DI MEO, 2008). La géographe Renée Rochefort, précurseure de ce courant, définit dès 1972 la géographie sociale comme étant « l’étude de la fonction sociale de l’espace et de la condition spatiale de l’homme, envisagées dans une triple direction, les espaces sociaux, la stratégie spatiale des groupes et sous-groupes sociaux, la structuration sociale de l’espace » (1972, p. 396). L’institutionnalisation de la géographie sociale française va s’opérer progressivement, notamment à partir des universités du Grand Ouest, dont certains chercheurs vont poser les jalons scientifiques, toujours en place aujourd’hui, notamment avec l’ouvrage Géographie sociale (Frémont et al., 1984) qui expose les éléments de compréhension de ce courant. La géographie sociale y est définie comme « l’exploration des interrelations qui existent entre les rapports sociaux et les rapports spatiaux, plus largement entre société et espace » (p. 90). Ce courant s’inscrit et se revendique comme appartenant au champ des sciences sociales (ALDHUY, 2006). En effet, la géographie sociale s’est constituée dans la recherche d’une meilleure compréhension des problèmes sociaux ou plus largement des questions de société (inégalités sociales, mouvements sociaux, dynamiques électorales…), en s’inspirant parfois de certains auteurs anglo-américains issus de la géographie radicale, tels que Richard Peet ou David Harvey. Car, tout comme la géographie radicale, la géographie sociale est imprégnée par une lecture marxiste de la société, ce qui lui donne un caractère engagé (CAILLY, in LEVY, LUSSAULT, 2013). L’originalité et la rupture qu’apporte la géographie sociale se manifeste, selon Laurent Cailly, « dans la manière dont elle définit son objet : portée par l’ambition d’attribuer à la géographie une place privilégiée dans le champ des sciences sociales, donc d’assurer son désenclavement, elle décentre remarquablement la discipline d’une analyse des paysages et l’espace en général, vers une analyse de la relation entre faits sociaux et faits spatiaux ou, mieux, entre rapports sociaux et rapports spatiaux. En ce sens, elle ne se contente pas d’étudier la distribution des faits sociaux dans l’espace […] mais analyse comment les faits de société, qui forment indissociablement des rapports sociaux et des rapports spatiaux, fabriquent, produisent et organisent l’espace » (in LEVY, LUSSAULT, 2013, p. 932). L’objet de la géographie sociale est centré sur les rapports spatiaux, système de relations qu’entretiennent les hommes avec les espaces, ses usages et représentations, ses pratiques et les jeux d’acteurs qui s’y déploient. Ainsi, comme le résume Guy Di Méo, « la géographie sociale met l’accent sur les interactions de rapports sociaux et spatiaux. Elle accorde une place privilégiée aux acteurs, à leurs représentations, plus largement à l’action sociale et aux systèmes territorialisés qu’elle constitue. Sur la base d’une nouvelle définition des objets de la recherche (lieux, territoires, paysages, mais aussi effets sociospatiaux de fragmentation, de ségrégation, d’inégalité et de distinction), elle a contribué au renouveau global de la géographie contemporaine, à son incontestable socialisation. Elle offre aussi un ensemble de problématiques et de méthodes utiles pour l’aménagement du territoire et le développement territorial » (2008, p. 13).
Si elle se définit comme science des pratiques et actions des groupes sociaux dans leurs rapports à l’espace, comme outil de compréhension d’un monde rempli d’injustices et d’inégalités, la géographie sociale tient à se distinguer d’autres courants de la géographie auxquelles elle pourrait être rapprochée, telles que la géographie postmoderne et la géographie culturelle, largement développées dans le monde anglo-américain.

Appréhender et questionner les communautés de pratique : une approche singulière du fait communautaire

La communauté de pratique est un concept formulé par Etienne Wenger, à la fin des années 1990, dans le champ disciplinaire de la gestion des connaissances, à propos de leur diffusion et échange au sein des entreprises. L’on peut définir une communauté de pratique comme étant « un groupe d’individus qui partagent des intérêts et des compétences communes, et qui en interagissant, cherchent à résoudre un problème ou mener à bien un projet commun » (AMISSE et al., 2013, p. 188). Une communauté de pratique est fondée pour et par des individus concernés par un objet commun, dont ils cherchent ensemble à promouvoir la valeur, améliorer la visibilité ou défendre les intérêts. L’engagement des individus est central dans la constitution d’une communauté de pratique : il s’agit pour le membre de la communauté d’avoir choisi de participer à l’échange de connaissances, d’informations, de savoir-faire et de compétences avec les autres membres, afin de remplir le ou les objectifs constitutifs de cette dernière. Wenger et Snyder nous indiquent ainsi que « l’appartenance à une communauté de pratique est autodésignée » (2000, p. 142), en être membre est donc un acte volontaire. Par sa participation à une communauté de pratique, un individu s’engage dans des actions collectives, dont l’un des ressorts principaux est l’échange du savoir et l’apprentissage collectif. La communauté de pratique est issue de la mobilisation de réseaux d’acteurs menant à l’augmentation des connaissances par leur diffusion. Autrement dit, chaque membre apporte son « bagage » de connaissances, savoir-faire, réseaux et le partage avec les autres. La dimension identitaire prend une place importante dans le fonctionnement des communautés de pratique (qui est par ailleurs unique à chacune). Lave et Wenger (1991) indiquent que cette identité forte caractérise la communauté de pratique, notamment dans le fait que les règles sont inventées par et pour ses membres. Il s’agit donc d’une communauté qui tend à l’autonomie. Dans le cas des communautés de pratique développées par le management de certaines entreprises, pour développer les compétences, réseaux et connaissances, il faut noter que l’autonomie est l’un des facteurs de réussite (GOSSELIN et al., 2010). Le concept de communauté de pratique, basé sur l’action collective, l’identité et la poursuite d’objectif commun, est intéressant pour analyser des initiatives collectives, sous l’angle de la communauté. L’usage de ce concept dans des cadres autres que celui du management des entreprises peut apporter un regard innovant sur l’étude des actions collectives.

 Origines et définitions d’un concept

L’apprentissage comme point de départ

A partir des années 1990, il y a un regain d’intérêt des milieux universitaires de la gestion pour l’apprentissage organisationnel, que Gérard Kening définit comme « un phénomène collectif d’acquisition et d’élaboration de compétences qui, plus ou moins profondément, plus ou moins durablement, modifie la gestion des situations et les situations elles-mêmes » (2006, p. 297)18. Les études de gestion sur l’apprentissage, développées au cours du 20ème siècle, se concentraient alors essentiellement sur l’amélioration des compétences individuelles. Avec le regain d’attention pour l’apprentissage organisationnel se pose, à la fin du siècle dernier, la question du développement de la cognition collective. C’est-à-dire que l’on cherche à comprendre et évaluer le rôle que l’apprentissage collectif peut avoir au sein des organisations, pour améliorer leur efficacité. Deux raisons expliquent le retour à des recherches approfondies sur l’apprentissage organisationnel à cette époque. Tout d’abord, l’environnement entrepreneurial se trouve dans une conjoncture plus complexe et changeante, ce qui nécessite un apprentissage (un développement durable de nouvelles compétences) rapide et efficace. Deuxièmement, les recherches sur les organisations se penchent plus sur les processus entre individus que sur les structures elles-mêmes, donc ce regain d’intérêt pour l’apprentissage organisationnel participe d’un nouvel élan scientifique pour ces questions. De nombreux travaux se développent à cette période afin de trouver des points de convergences scientifiques et contribuer à une théorie de l’apprentissage organisationnel (CHANAL, 2000, p.1). Des auteurs vont particulièrement se pencher sur le rôle de l’action et de l’expérimentation dans le processus de l’apprentissage collectif et chercher à développer une théorie de l’action organisée.
C’est dans ce contexte scientifique que va apparaitre pour la première fois, en 1991, le terme de communauté de pratique, dans l’ouvrage de Lave et Wenger19 : Situated Learning: Legitimate Peripheral Participation20. Cet ouvrage traite de l’apprentissage situé, c’est-à-dire du processus de cognition située ou localisée, qui rend le fait d’apprendre indissociable de l’action. La connaissance à acquérir est donc à trouver dans des activités, qui dépendent des contextes sociaux, culturels et environnementaux. La participation des néophytes à des tâches, au départ périphériques, les rend peu à peu compétents, puis chevronnés et les placent au fil du temps au centre de ce que les auteurs définissent comme des communautés de pratique. Ces dernières sont posées comme étant des structures sociales de l’apprentissage collectif. Les auteurs ne vont pas – de leur propre aveu – se focaliser sur la construction d’une définition claire et poussée de la communauté de pratique. Celle-ci est un objet que même ses théoriciens peinent à définir de manière très fixe et à le différencier d’autres groupes de travail. Néanmoins, les éléments exposés dans Situated Learning: Legitimate Peripheral Participation permettent de poser que les communautés de pratique sont des « groupes réalisant une activité commune, en apprenant à faire les choses ensemble, en situation et grâce à leurs interactions » (MEBARKI, 2011, p.62). Il faudra attendre 1998 pour qu’Etienne Wenger vienne apporter une analyse plus fine des communautés de pratique, en les conceptualisant, dans son ouvrage référence Communities of Pratice, Learning, Meaning and Identity21. L’auteur y apporte des éléments de définition et des caractéristiques affinées, et pose les bases d’un concept qui sera largement utilisé par ses pairs par la suite, et développé dans de nombreuses organisations afin de mettre en place des groupes d’apprentissage collectif.

Eléments de définition

Etienne Wenger est le principal auteur à avoir conceptualisé les communautés de pratique. Pour le théoricien, la communauté de pratique est une structure constituée par des individus engagés dans un processus d’apprentissage collectif, dans un domaine qu’ils partagent. Partant de cela, les exemples peuvent être extrêmement nombreux et peuvent rendre l’objet large, à ce stade de sa définition et de ses caractérisations. L’auteur parle notamment de la communauté de pratique comme pouvant être un groupe d’artistes qui cherchent de nouveaux modes d’expression, un réseau de chirurgiens qui souhaitent explorer de nouvelles technologies ou méthodes, une tribu qui cherche à survivre dans un milieu hostile…Wenger pose la définition d’une communauté de pratique comme étant « un groupe d’individus qui partagent un intérêt, un ensemble de problèmes ou une passion pour un sujet et qui approfondit ses connaissances et son expertise dans ce domaine en interagissant de manière continue » (2002, p. 4). L’on peut voir grâce à cette définition simple, les éléments qui vont former la communauté de pratique et les dimensions que cette dernière va pouvoir prendre. Il s’agit d’un système social basé sur les interactions entre les membres qui le constituent, dans le but d’atteindre des objectifs communs. Muller précise ce propos en ajoutant que les communautés de pratique « sont des groupes d’individus qui partagent des compétences et intérêts communs et qui interagissent constamment dans le but d’accomplir un projet commun, ou de résoudre des problèmes partagés par leurs membres. Pour ce faire, les membres d’une communauté de pratique sont amenés à développer leurs compétences »22 (2006, p.383). La communauté de pratique est un objet social qui va opérer comme une structure articulant l’apprentissage, le savoir-faire et l’action collective. C’est en interagissant que les membres de la communauté de pratique vont développer leur apprentissage collectif, donc améliorer leurs compétences dans le domaine d’intérêt partagé et en conséquence trouver collectivement les moyens de résoudre les problématiques ou les objectifs qu’ils partagent. L’apprentissage est donc, dans le cas des communautés de pratique, considéré comme un vecteur de solutions nouvelles. Augmenter la connaissance collective multiplie les chances de développer ses facultés à mener à bien un projet. Pour le dire autrement « une communauté de pratique correspond à un groupement d’individus partageant un intérêt commun et échangeant entre eux leurs connaissances et compétences de manière créatrice, afin d’accroître l’efficacité des organisations » (GOSSELIN et al., 2010, p.36). Les communautés de pratique agissent comme des « dispositifs de coordination » (COHENDET et al. 2011, p.31) où les compétences individuelles sont mises en valeur (COHENDET et al., 2003, p.108). Les communautés de pratique, bien qu’ayant souvent été étudiées par le prisme des sciences de gestion, ne sont pas uniquement réservées au strict cadre des entreprises et peuvent se retrouver dans tout type d’organisation, formées autour de tout type de pratiques, avec des morphologies variables dans le temps, l’espace et le mode de fonctionnement. Il est à noter que les communautés de pratique sont des structures sociales qui peuvent se trouver partout au sein de la société et que, consciemment ou non, la plupart des individus appartiennent à une ou plusieurs de ces communautés. Avant d’entrer dans les détails explicatifs des communautés de pratique, nous pouvons dire qu’il s’agit de communautés basées sur l’échange et la coopération. Partager ses compétences, en apprenant les uns des autres, via des pratiques communes, permet de créer de meilleures conditions pour mener un projet commun, ou développer de nouvelles connaissances. La communauté de pratique est donc une organisation sociale porteuse d’innovation, ce qui est l’un de ses principaux rôles et l’une de ses premières fonctions. 

Relations de proximité et dimensions spatiales dans la constitution des communautés de pratique : du local au global

Wenger (1998) explique que pour que les caractéristiques permettant d’identifier des communautés de pratique en tant que telles soient présentes, il est nécessaire que celles-ci se constituent à l’échelle locale. Cette proximité géographique permet aux membres des communautés d’interagir fréquemment, de partager les mêmes expériences, d’échanger rapidement les informations, de se voir souvent c’est-à-dire de rendre possible les trois critères posées précédemment pour forger une communauté (engagement mutuel, entreprise commune et répertoire partagé). Si l’échelle locale est l’une des conditions d’émergence et de durabilité d’une communauté de pratique qui rappelons-le, dans la théorie de Wenger, se situe au sein d’une entreprise, ce dernier propose un autre objet pour étudier les relations entre groupes à des échelles géographiques différentes.
Wenger utilise le terme constellation pour décrire et analyser les interactions entre groupes et individus ayant des pratiques communes ou proches, mais ne constituant pas de communautés de pratique dans la mesure où la proximité physique, entre autres, ne leur permet pas de répondre aux critères de ces dernières. Cela permet de passer à une échelle d’analyse plus large, en envisageant les liens qui peuvent exister entre individus et communautés de pratique et étudier comment ses interactions influent sur les pratiques. Les constellations sont formées par les communautés de pratique, ou des pratiquants, qui se ressemblent, mais qui ont des spécificités propres dépendant de leur contexte particulier, notamment géographique.
Les caractéristiques qui permettent d’identifier les constellations de pratique sont25 :
– « Avoir des racines historiques semblables
– Servir une même cause ou appartenir à un organisme commun
– Être dans la même situation
– Avoir des membres communs
– Partager des artefacts
– Être proche géographiquement et interagir
– Avoir des styles et des discours qui se chevauchent
– Être en compétition pour les mêmes ressources »
Le terme de « constellation de pratique » utilisé par Wenger renvoie à l’expression « constellation de lutte » employée par Gaye Theresa Johnson, pour décrire et analyser les luttes d’émancipations ethniques dans les années 1940 et 1950 à Los Angeles. L’auteure explique ainsi : « J’utilise la métaphore spatiale ‘constellations de lutte’ pour localiser ces activités [de lutte sociale]. Les étoiles en constellations sont en lien les unes avec les autres, parce que prises ensemble elles forment un schéma, mais elles ont aussi leur propre existence » (2013, p. 2). Cette métaphore illustre ce que sont les constellations de pratique.
Pour résumer, les communautés de pratique sont des groupes fondés sur des pratiques concernant un domaine particulier, partagées par des individus liés par un sentiment d’appartenance communautaire construit autour de leurs pratiques. Les pratiques sont des ensembles d’actions auxquelles les pratiquants donnent du sens, via la négociation de sens et la dualité participation / réification, c’est-à-dire via les échanges entre expérimentation et chosification de l’expérience vécue. Les dimensions communautaires s’expriment via des liens identitaires et des modes de fonctionnement alliant l’engagement mutuel, l’entreprise commune et le répertoire partagé. Le caractère local permet une proximité géographique nécessaire à la constitution des communautés de pratique. Le terme de constellation de pratique permet d’envisager et d’analyser les liens entre des communautés de pratique ou des individus partageant des pratiques à une échelle plus large.

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Table des matières

Introduction générale
Partie 1 : Le cadre scientifique d’une étude des communautés de pratique en géographie
Chapitre 1 : Des communautés, aux communautés de pratique comme objets d’étude en sciences sociales
Chapitre 2 : Quels champs de recherche pour une étude des communautés de pratique en géographie
Chapitre 3 : Etudier les communautés de pratique dans leurs relations aux territoires
Partie 2 : Les communautés d’artistes urbains à Nantes Métropole. Etude de terrain
Chapitre 4 : Le développement de la métropole nantaise par la culture, et l’émergence de l’art urbain comme expression artistique dans l’espace public. Contextualisation du terrain d’étude
Chapitre 5 : Eléments méthodologiques de l’enquête de terrain
Chapitre 6 : Des communautés de pratique d’art urbain à Nantes Métropole. Différentes communautés pour différentes pratiques
Partie 3 : Les communautés d’artistes urbains, actrices de recompositions socio-spatiales dans la métropole nantaise ?
Chapitre 7 : Communautés d’artistes urbains et pouvoirs publics : des acteurs du territoire en interactions polymorphiques
Chapitre 8 : Quelles contributions des communautés d’artistes urbains aux évolutions sociospatiales de métropole ?
Chapitre 9 : L’usage des communautés de pratique comme objets d’étude en géographie sociale. Retour critique et essai de bilan sur le travail de recherche
Conclusion générale
Bibliographie

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