LES CHIENS DITS DE CONDUITE DE TROUPEAU
Vers une valorisation du chien malgré la mécanisation
Le chien de conduite a perdu son attrait au lendemain de la seconde guerre mondiale. Les systèmes d’élevage ont évolué à ce moment-là vers une intensification de la production, le nombre d’éleveurs a fortement diminué, la mécanisation a envahi tous les domaines du monde agricole, les systèmes de clôture sont devenus performants et les nouveaux critères de production animale ont privilégié la conduite en bâtiments. Tout cela a pu expliquer la désaffection des éleveurs pour le chien de conduite, dont l’image restait associée à un élevage extensif peu performant et dépassé. Mais depuis une trentaine d’année, les nouvelles conditions d’élevages (agrandissement des troupeaux, diminution de la main d’oeuvre, mesures incitant à l’extensification et au retour à l’herbe) ont redonné une chance aux chiens de conduite de s’exprimer. Aujourd’hui, on demande au chien de conduite de travailler sur de nouvelles espèces, autres que ovines (bovins allaitants, caprins, voire porcins), de travailler dans de nouveaux environnements (salles de traite, stabulations, couloirs de contention…) et avec autant d’efficacité que plusieurs personnes, et d’effectuer des actions au contact des animaux (montée en bétaillère, entrée en salle de traite ou couloir de contention).
La transformation des conditions de l’élevage bovin ou ovin a changé les conditions d’utilisation du chien de berger. Il y a de moins en moins de gardiennage en présence du berger du fait de la conduite en parc et des clôtures, et de plus en plus de conduite et de manipulation des animaux. Un chien de conduite est un auxiliaire précieux qui permet de conduire d’une salle à l’autre, de faciliter la rentrée et la sortie en salle de traite, dans le calme et la précision. Il est également capable de se faufiler entre plusieurs vaches dans un couloir de contention pour les amener à reculer. C’est une aide indispensable et peu couteuse, qui permet d’économiser un temps précieux dans un monde où la main d’oeuvre manque et où l’éleveur est souvent pluriactif pour subvenir à ses besoins. Mais entre-temps, bon nombre de races aux qualités bergères se sont totalement ou partiellement reconverties à des activités de garde, de défense, de police ou de beauté, l’activité troupeau étant en déclin. La reconversion a été totale pour le berger allemand, quasi complète et en passe de le devenir pour le berger belge malinois; elle est partielle pour le beauceron. Pour les races, la disparition, la diminution ou la déviation des anciennes utilisations pratiques s’accompagne presque toujours d’un renforcement de la fonction de chien d’agrément, qui conduit à accorder une attention privilégiée à l’aspect extérieur de l’animal (format, morphologie, pelage) au détriment des anciens critères d’aptitudes au travail. Face à la lente dégradation de la valeur pastorale des races de chiens de berger français, de nombreux éleveurs se sont tournés vers les races de conduite britannique, dont l’emblème est le Border collie.
Le Border collie, import anglais ( Il est le plus populaire des chiens de bergers.
Ce chien britannique a su imposer sa suprématie en peu de temps. Précoce, soumis et précis, le border collie est la race la plus plébiscitée par les bergers. La taille du border se situe aux alentours de 50cm pour un poids de 20 kilogrammes (kg). La couleur la plus répandue reste le noir et blanc, suivi du tricolore, du bleu merle, du rouge et plus rarement du rouge merle. Que son poils soit plus ou moins long, ondulé ou lisse, que ses oreilles soient droites ou pliées, cela importe peu tant qu’il est construit pour être fonctionnel. Sa particularité est de travailler avec des allures coulantes, presque rampantes. Il avance la tête basse, le train arrière surélevé, en fixant intensément le troupeau. Contrairement aux races bergères françaises qui se mettent rapidement au trot, et suivent le troupeau, le border collie ne gère pas sa fatigue et est toujours en plein effort : il se déplace d’un point à un autre à pleine vitesse pour contourner les bêtes, tout en maintenant sa distance, et reste extrêmement concentré sur le moindre déplacement de son troupeau. Cette façon de travailler le destine plutôt aux travaux brefs.
En Angleterre, il a été conçu pour changer les brebis de parc, les bêtes non gardées étant trop farouches, elles nécessitent l’emploi un chien très discret, travaillant de loin et se déplaçant rapidement. Plus à l’aise en zone de plaine ou semi-montagneuse, il a gardé, de son climat natal, une certaine fragilité à la chaleur. Il arrive aussi que pour certains types d’exploitation, il manque un peu d’endurance et de mordant. Néanmoins ce chien extrêmement intelligent et réceptif au dressage est capable d’être formé à tout type de travail (en bâtiments ou d’un chien avant de l’avoir vu travailler. La possession résulte des deux premières qualités, c’est la manière dont le chien aborde les animaux et prend le contrôle du troupeau.
Le beauceron, le chien de ferme français
Ce grand chien noir et feu ou arlequin est aussi appelé Berger de Beauce ou bas-rouge. Les mâles mesurent entre 65 et 70 centimètres (cm) et les femelles de 61 à 68cm. Ils portent obligatoirement les doubles ergots bien attachés. Leur poils est ras, facile d’entretien, le sous poils est gris souris. La queue représente un « J », portée basse. Usuellement de couleur noir avec des marques feu aux extrémités des pattes et au-dessus des yeux, les deux petites taches marron supra-oculaires donneraient l’impression que le chien a quatre yeux. Ce critère a été sélectionné car il aurait une influence sur les bêtes. Autrefois, les oreilles étaient taillées en pointe pour ajouter à l’apparence prédatrice du chien, mais la législation actuellement en vigueur en France l’interdit. Ce chien est particulièrement adapté à la conduite d’un important troupeau dans des régions peu escarpées. Il travaille avec un trot allongé qui le rend très endurant. Plus efficace sur des troupeaux de plus de 1000 ovins ou sur les bovins, son important impact naturel posant des problèmes sur les petits troupeaux.
En effet, sa couleur foncée, sa grande taille, son ossature forte impressionnent naturellement. Ce chien d’aspect pourtant inquiétant est doux dans son travail. Il est rare qu’il morde, mais, en revanche, il se sert de son corps pour bousculer la brebis qui lui tient tête. Au troupeau, le beauceron recherche naturellement le contact. C’est-à-dire qu’il travaille près des bêtes, passant près d’elles et se frottant aux dernières. Face à cette attitude et pour travailler sur des troupeaux moyens ou petits, il faut lui apprendre à prendre ses distances pour ne pas inquiéter la troupe. Par sa grande taille, il est plus à l’aise dans le travail en extérieur, et a une aptitude naturelle pour faire la rive (servir de clôture) par sa façon de travailler. Le beauceron demande un maitre ferme et juste ; d’un caractère affirmé, il allie force et sérénité une fois qu’il a compris ce qu’on attendait de lui. Contrairement au Border collie, c’est un chien tardif, qui demande un long travail de dressage. en extérieur) et d’exploitation. C’est avec cette souplesse de caractère, et la précocité au travail que le border collie gagne ses galons auprès des utilisateurs.
On distingue également trois qualificatifs propres au Border collie qui sont l’oeil (ou pouvoir visuel), la puissance et la possession. L’oeil est propre au Border collie, et est à la fois l’expression de la capacité du chien à se concentrer sur les animaux et le moyen par lequel il les place sous son contrôle. En effet, en fixant les bêtes, comme un prédateur le ferait pour sa proie, le chien établit un lien avec elles, et elles se fixent également sur lui, réagissant au moindre mouvement. La puissance est la capacité du chien à obtenir le mouvement des animaux, et contrairement à l’oeil ce n’est pas une spécificité du Border collie. Un chien avec une puissance forte obtiendra très facilement le mouvement des animaux alors qu’un animal avec une puissance faible les fera peu bouger. il est souvent difficile de prévoir la puissance.
Le berger des Pyrénées (34) (9) (28)
C’est la plus petite race bergère française. De 38 à 48cm pour les mâles, de 38 à 46cm pour les femelles, ce chien est également appelé labrit. De couleur généralement fauve, il peut aussi être noir, gris ou arlequin. Il compense sa petite taille par un maximum de vivacité, d’aboiements intempestifs et par un coup de dents facile. Malheureusement, ce petit chien a conquis le coeur du grand public, faisant ainsi dériver sa sélection loin du travail. Si l’aspect du chien est assez bien conservé, hormis une taille qui tend vers le minimum, c’est surtout son caractère qui en a pâti. La sélection actuelle a produit des chiens extrêmement méfiants et craintifs, de tels chiens étant incapables de gérer un troupeau. Il s’agit pour les bergers de trouver un chien ayant conservé un caractère compatible avec le travail sur troupeau, tâche rendue plus difficile pour cette race que pour d’autre comme le border collie. Le berger des Pyrénées est une petite race montagnarde, très vif et endurant, il peut travailler pendant des heures sous les climats les plus durs. La chaleur comme la neige ne l’effraient pas. Ce petit chien garde sans problème 2000 brebis par son énergie et son fort caractère. Néanmoins choisir de travailler avec un berger des Pyrénées implique une grande rigueur, jugé comme difficile à dresser, il reste un chien de passionnés.
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Table des matières
INTRODUCTION
LES CHIENS DITS DE CONDUITE DE TROUPEAU
1.Genèse des chiens de conduite : une utilisation tardive devenue indispensable
1.1 Émergence des chiens de conduite (16) (32)
1.2 Facteurs expliquant cette expansion (16) (32)
1.3 Vers une valorisation du chien malgré la mécanisation (34)
2.Les chiens de conduite : plusieurs races, une même fonction
2.1 Tempérament d’un chien de conduite (34) (40) (46) (52)
2.2 Panel des races présentes en France
3.Suprématie du border : des aptitudes bergères sélectionnées
3.1 Historique de la sélection dans son pays d’origine (40) (46
3.2 Confirmation du chien : un test de ses aptitudes
4.Sélectionner des chiens de conduite, des approches différentes
4.1 Les concours de troupeau (4) (21)
4.2 Éleveurs/utilisateurs (51)
4.3 Le bouche à oreilles ou marché parallèle
4.4 Problèmes soulevés par l’actuelle sélection
LES CHIENS DITS DE PROTECTION DE TROUPEAU
1.L’ évolution du pastoralisme
1.1 Une filière en crise depuis 25 ans (6) (35) (36) (48) (50)
1.2 Le pastoralisme une valorisation des espaces (48) (50)
1.3 Pâturage libre et écosystème
1.4 Une contrainte inattendue pour ce nouveau siècle : la réintroduction des grands prédateurs
1.5 Mesures de protection (19)
2.Le chien de protection, une solution plébiscitée
2.1 Nombre de chien au travail (39)
2.2 Le chien de protection : une part du paysage
2.3 Le chien de protection la solution ?
3.Les touristes : un nouvel élément du paysage pastoral
3.1 Le tourisme montagnard (20) (43)
3.2 Interactions avec les chiens de protection (22) (23) (39)
3.3 Vers une sélection des chiens
3.4 Prévention et campagnes d’information (19)
3.5 Vers une cohabitation réussie (49)
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
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