Les chants des travaux ménagers

Les Fule (singulier Pullo)

   Ce sont les praticiens de l’élevage, nomades ou sédentaires, islamisés, animistes. Ils se subdivisent en plusieurs fractions (lei) Les Peuls nomades sont appelés «fule jeeri ». Ils habitent la brousse du jeeri (le Haut-pays) et pratiquent le nomadisme pastoral. On les retrouve dans le Ferlo (Sénégal), dans les départements de Mbout, Monguel et de Sélibaby (Mauritanie). La majeure partie d’entre eux sont animistes et croient en Dunndari, Geno et autres divinités peules. Ils possèdent des connaissances magiques et considérables : la prévision de la pluie, la connaissance de la faune et de la flore, dans le cadre de la pharmacopée traditionnelle…On les appelle aussi laddankooe (hommes de la brousse). Parmi les fractions qui constituent ce groupe, on peut citer les Njengel, Lacce, woddaae, uruure, mbaalnaae Les Peuls sédentaires sont appelés « « waalwaale », ceux qui habitent le Waalo, dans les villages (saare, pluriel cahe). Ils sont devenus agriculteurs tout en continuant à pratiquer l’élevage. Ils confient la garde de leurs troupeaux à des aynaae (bouviers). Ce sont les Deeniyankooe (descendants de Koli Teella), les Saybooe, les Yirlaae, les Samankooe, les Jaawe, les Uurure. Ils vivent essentiellement dans les villages de Garli, Koillo, Kiiriire, Hombo, Haawre, Jolol, Aali Wuuri, Ngijilon Janjooli, Horkaere, Walel, Sincu Garba… D’autres vivent à Cali, Kanel, Tinaali, Nganno, Bappelel, Jamaa Alwaali (d’où est originaire Usmaan Dan Fodio est le fondateur de l’empire Sokoto au Nigéria). Il faut noter que les Peuls Deeniyankooe et les Yaalale sont des Lawakooe, c’est-à-dire qu’ils pouvaient accéder au pouvoir à l’époque des Satigi, de 1559à 1776

Les Subale (singulier de Cubballo)

  Disséminés le long du fleuve Sénégal, les pêcheurs sont l’un des groupes sociaux les plus indépendants. C’est-à-dire le moins subordonné à n’importe quel autre groupe social. Ils vivent en communauté sous la direction d’un doyen qui porte généralement le titre de Jaltaae. Leurs connaissances magiques relatives au monde aquatique leur permettent un droit de passage envers tout non- pêcheur qui veut traverser le fleuve. Ce dernier est leur apanage comme la terre l’est au Laman qui n’est rien d’autre que celui qui détient les terres dans la société wolof. Toute leur existence est basée sur le fleuve. Selon Sow Ibrahima : ce commerce avec l’eau serait lié à l’origine de leur caste qui remonterait à Noé selon un de nos informateurs qui précise qu’à la fin du Déluge, Noé voulant s’établir sur les terres encore inondées par endroits, demanda des volontaires qui partiraient en éclaireurs à la recherche de terres habitables. Personne ne voulut quitter l’arche pour s’aventurer dans des terres encore en grande partie recouvertes d’eau. Noé fut obligé de choisir (subde en pulaar), lui-même, des hommes. Ceux qui étaient désignés, Subaae (les choisis) s’enfoncèrent dans les terres et découvrirent que les eaux en se retirant, lissaient sur place des poissons. Ces subale seraient les ancêtres de nos subale d’aujourd’hui. Ce serait u écart de langage qui aurait déformé le terme de Subaae que résulterait le nom de Subale. 15 Pour être respecté dans cette société il faut la maitrise de l’eau et avoir des connaissances mystiques qui montrent les valeurs du vrai Cuballo. En ce sens, il va fonder une culture qui leur est propre à la faveur de leur activité professionnelle. Marquet, Jacques définit d’ailleurs cet aspect comme : Une autre perspective, elle est un système du groupe à son environnement. L’adoption la plus urgente consisterait à tirer du milieu naturel ce qu’il faut pour que la vie des individus soient assurées… C’est pourquoi l’éducation des biens est le fondement de toute une culture…Cette production dépend des ressources naturelles qu’offrent l’habitat d’une société et des techniques d’exploitations dont dispose cette société. Les autres secteurs d’une culture-monde, art, ect ne pourront se développer qu’entre les limites établies par la production. Cette de l’ensemble de la culture par rapport au couple environnement-technique est particulièrement marquée dans les sociétés qui ne dépassent guère le niveau de subsistance.  Contrairement aux Fule et aux Torooe, qui observent une certaine retenue dans leur langage, les Subale, jouissent d’une liberté d’expression totale. Ils n’hésitent pas à employer un langage cru, grossier et indirect, libéré de toute censure sociale.

Les maccue (les esclaves)

   Au rebut de l’échelle sociale, ils sont sans terre, ne possèdent pas de biens et vivent sous la dépendance des autres groupes sociaux. Aujourd’hui, l’esclavage n’existe plus sous sa forme ancienne, mais leur condition n’a pas évolué dans les mentalités. Cette structure s’est, en quelque sorte, figée et chaque société essaie de pratiquer l’endogamie la plus stricte. Cela n’empêche pas de rencontrer quelques pratiques qui font exception. Des échanges matrimoniaux à l’intérieur des deux catégories sociales. Dans la catégorie des Rime, ces échanges matrimoniaux se font quelques fois entre Fule et Jawame, puis entre Fule et Torooe ; Subale et Seee. Dans une société aussi complexe, la classe sociale des Rime constitue la charpente principale autour de laquelle viennent se greffer toutes les autres, car elle détient les moyens économiques (bétail et terres de culture) nécessaire à leur survie. Il y a donc des rapports de dépendance qui peuvent revêtir diverses formes, mais qui traduisent toujours la même réalité.

La solidarité

   Selon Le Grand Robert, « la solidarité peut être définie comme une relation entre personnes ayant conscience d’une communauté d’intérêts, qui entraine, pour un élément du groupe, l’obligation de ne pas desservir les autres et de leur porter assistance ». Au Fuuta, la solidarité est une évidence car il a toujours existé diverses organisations de solidarité qui ont fonctionné comme institutions visant au moins le maintien des conditions de vie des gens et l’assistance sociale, particulièrement en milieu rural. Cette société connait donc, depuis ses origines, l’importance de la pratique des actions de coopération qualifiée le plus souvent de solidarité traditionnelle. Qu’il s’agisse de production, de consommation ou de toute autre activité. C’est ainsi que dans « Pilage autour d’un mortier » on note l’entraide entre les femmes qui se passent le pilon lors de leur regroupement. Durant ce rassemblement, les femmes exposent toutes leurs difficultés ainsi que les peines liées à leur condition de vie, elles deviennent ainsi des complices mais aussi des amies qui partagent toutes leurs souffrances. Elles disent ainsi ceci
e ndefi e ndefti, ndefti e adtini
Cibi jam jam gole rewbe
Kodde urle jiile, kam e kodde kecce
Kodde urle maa kodde cuurte
Elles ont fini et les ont servis !
Cibi jam-jam, corvées des femmes !
Kodde urle bus à tour de rôle avec des kodde kecce !
Kodde urle consommés avec des kodde cuurte »
Cette forme de solidarité est décrite dans Une si longue lettre de Mariama Ba. Dans cette œuvre, Ramatoulaye et Aissatou ressassent toute leur douleur quotidienne car victimes des abus de la vie conjugale. Elles partageaient tous leurs chagrins et secrets. Cette amitié raffermissait leur relation au point qu’elles se considéraient comme sœurs issues de la même famille: Tu m’as souvent prouvé la supériorité de l’amitié. Le temps, la distance, autant que les souvenirs ont consolidé nos liens et font de nos enfants, des frères et sœurs. Dans ce type de relation, chaque personne est tenue de s’acquitter de ses devoirs et d’assumer sa part de la vie communautaire pour recevoir en retour le soutien de la collectivité. Les femmes affichent donc une aide mutuelle réelle entre elles et celle-ci leur permet de prendre en charge leurs véritables problèmes. Cette entraide est très importante pour la femme peule qui s’occupe de son foyer. Cette solidarité exige une assistance physique et morale afin de réussir et de mettre en pratique certaines vertus qui font la force de la famille. La tradition peule mesure pleinement l’importance ou l’affermissement des relations sociales au niveau du village et de la communauté. Leurs entreprises visent à réaliser des objectifs sociaux et individuels pour permettre à un membre du groupe de faire face à une situation qui nécessite la collaboration de tous. Dans « Apprêt de la nouvelle mariée », les femmes s’entraident et s’unissent pour que la nouvelle mariée puisse vivre en symbiose dans son nouveau foyer. Toutes les jeunes filles de son âge l’accompagnent et la conseillent pour qu’elle adopte les bonnes attitudes. Les relations amicales, qui se créent un peu partout, découlent de ce besoin de solidarité. Les membres de la belle-famille la reçoivent et lui montrent leur disponibilité à l’assister dans sa nouvelle vie. Mais, elle doit, de son côté, aussi faire preuve de bonne volonté pour s’intégrer comme le montre cet extrait de chant :
So o jaii halfeede, so o fini ma o yonngo
So o jaii weldeede so o fini ma o yonngo
So o jaii haadeede so fini ma o yonngo
Si elle accepte d’être soumise, elle gardera la tête haute!
Si elle est aimable, elle gardera la tête haute!
Si elle est ouverte, elle gardera la tête haute !
Elle a ainsi besoin d’une amie, d’une conseillère qui lui apprend les normes du mariage. Ainsi René Larrier dit : « Les amitiés fournissent le soutien émotionnel dans les circonstances difficiles et par conséquent sont essentielles à la survie des femmes ». Cet esprit d’équipe, qui les caractérise, ne s’acquiert pas par hasard; il est le fruit de l’action éducative reçue dans la famille. En milieu rural, l’esprit de partage et d’entraide occcupent une place majeure. Ce qui montre l’ouverture de la famille à la collectivité sans aucun ressentiment tenace. La solidarité sociale peule est si forte que l’on ne peut abandonner un des siens en besoin à quelque génération que l’on peut situer le degré de parenté. La solidarité n’est qu’une projection de la coopération familiale.

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Table des matières

INTODUCTION
PREMIERE PARTIE : PRESENTATION ET STRATIFICATION DE LA SOCIETE PEULE
ChapitreI : Société
Présentation de la communauté Peule
Situation géographique
Historicité
Mode d’élection
Chapitre II : Cadre de vie
Les Rime
Les Fule
Les Tooroe
Les See
Les Jaawame
Les Subale
Les eee
Les Naalankooe
Les Maccue
DEUXIEME PARTIE : PRESENTATION DU CORPUS
Présentation des genres lyriques : le Leele, Njaare nayi yoo, Waala fenndo, Ar leloyo en, Jamfa dewgal
Chant 1 Chantez les vaches
Chant 2 : L’absence de mon bien-aimé
Chant 3 : Waala fenndo
Chant 4: Allons-nous-coucher
Chant 5 : Deception de mariage
Chant 6 : Ciel nuageux
Chant 7: Malheur à cette jambe
Présentaion des genres liés à la cérémonie de mariage : So jombaajo yalti galle, Lengi fule, Wango
Chant 8 : Aménagement de la nouvelle mariée
Chant 9 : Lengi fule
Chant 10 : Wango
Chant 11: Louange à Allah
Chant 12 : Pilage autour d’un mortier
TROISIEME PARTIE : ANALYSE THEMTIQUE ET STYLISTIQUE
Chapitre I : Etude thématique
Thème 1 : La solidarité
Thème 2 : Le mariage
Thème 3 : L’immigration
Chapitre II : Analyse stylistique
L’allitération
L’assonance
L’anaphore
La métaphore
CONCLUSION
Références bibliographiques

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