Les tumeurs stromales gastro-intestinales ou Gastro Intestinal Stromal Tumor (GIST) sont définies actuellement comme des tumeurs mésenchymateuses du tube digestif présentant des caractéristiques histologiques évocatrices (prolifération de cellules le plus souvent fusiformes, parfois épithélioïdes, rarement pléiomorphes) et exprimant habituellement, mais non constamment l es récepteurs KIT ou PDGFRA (le récepteur alpha du PDGF), à un niveau suffisant pour permettre sa détection par une technique immunohistochimique .
Il s’agit de tumeurs rares dont la prise en charge diagnostique et thérapeutique doit obligatoirement faire appel à une équipe pluridisciplinaire. Le principal traitement curatif des GIST est l’exérèse chirurgicale. Des traitements par inhibiteurs de la tyrosine kinase ont montré de très bons résultats en termes de survie des patients avec tumeurs irrésécables. L’introduction des inhibiteurs de la tyrosine kinase a amélioré la survie des patients avec des GIST de haut degré de malignité même métastatiques.
RAPPELS THEORIQUES
HISTORIQUE
Les tumeurs stromales digestives étaient traditionnellement considérées comme étant de nature musculaire lisse, sur la base de leur localisation murale et leur ressemblance avec les léiomyomes et les léiomyosarcomes d’autres sites. (1) (2) Depuis 1960, les multiples travaux immunohistochimiques effectués sur ces tumeurs apparaissent discordants en montrant parfois des différenciations nerveuses ou schwanniennes, ce qui a conduit, en 1977, Henry Appelman à utiliser le terme de léiomyome cellulaire de l’estomac, et à évoquer une possible origine cellulaire multipotente pouvant avoir une différenciation musculaire lisse. (3) Le nom de « tumeur stromale » est alors cité pour la première fois en 1983. Mazur et Clark utilisent ce terme pour les tumeurs qui ne sont ni des léiomyomes typiques ni des schwannomes typiques, ce sont des tumeurs indifférenciées ayant pour origine une cellule mésenchymateuse immature. (4) En 1984, Herrera et al(5) décrivent sous l’appellation de pléxomes ou pléxosarcomes, une variété de tumeurs stromales d’évolution bénigne ou maligne, présumée issue des nerfs du système nerveux autonome du tube digestif. Walker et Drovak(1) (2) (6) remplacent en 1986 le terme de pléxome et plexosarcome par celui de tumeurs du système nerveux autonome du tube digestif GANT (gastrointestinal autonomus nerve tumors) dont le diagnostic repose sur des critères ultra structuraux. Dernièrement, la découverte de la protéine c- kit, qui est un récepteur d’un facteur de croissance et qui est exprimée par la majorité des tumeurs stromales, a pris une place prépondérante dans la définition de celles-ci, alors que les autres tumeurs avec lesquelles elles étaient auparavant confondues et qui sont en fait beaucoup plus rares dans le tube digestif ne l’expriment pas : les léiomyomes (exprimant la desmine, la caldesmone ou la colponine), les léiomyosarcomes et les schwannomes (exprimant la protéine S100).
EPIDEMIOLOGIE
Les GIST constituent 1% des tumeurs malignes digestives dont 2% des cancers de l’estomac et 0,1% des cancers du colon. Leur incidence est de 15 à 20 par millions d’habitants dans les pays occidentaux. L’incidence des GIST est inférieure à 5000 cas par an aux Etats-Unis et à 1000 cas par an en France.il n’y a pas de prédominance géographique ou ethnique ; selon les études réalisées, aucune prédominance nette n’est retrouvée sur le sexe. Les GIST peuvent être observées à tout âge avec une prédominance de 50 à 60 ans (les GIST pédiatriques sont relativement rares). Il existe une prédisposition génétique dans les GIST humaines. En effet, des formes familiales de GIST ont été décrites chez l’homme et peuvent être associées à des anomalies pigmentaires(14). Chez ces malades, les GIST sont généralement multiples. La localisation gastrique est la plus fréquente (70%), suivie de l’intestin grêle 30%) et à un degré moindre (10%) viennent le colon, le rectum et encore plus rarement l’œsophage et le mésentère. Les GIST ont un risque accru en cas de neurofibromatose de type1 (maladie de RECKLINGAUSHEN). L’association à la triade de CARNEY est possible. La triade de CARNEY est en fait une combinaison syndromale d’une GIST avec un paragangliome extrasurrénalien et un chondrome pulmonaire. (17) Jusqu’à aujourd’hui, on a dénombré à l’échelle internationale moins de 20 cas de GIST familiales, principalement en France et au Japon.
ETIOPATHOGENIE
La cause des GIST reste très mal comprise. L’origine de leur apparition réside dans un gène défectueux conduisant à une modification au sein d’un récepteur (protéine) de signaux disposé à la surface de certaines cellules au sein d’une protéine recepteur. La plupart des GIST mettent en jeu des mutations du gène c-kit, tandis qu’une minorité implique des mutations du gène PDGFR.
Les cellules de Cajal et GIST
Les GIST sont des tumeurs stromales donc issues des tissus mésenchymateux. Elles dérivent des cellules de Cajal. Les cellules des GIST sont caractérisées par la mutation très fréquente de l’oncogène c-kit (codant pour le récepteur membranaire CD117). Plus rarement, il s’agit d’une mutation du gène codant pour le récepteur PDGFRA. Dans les deux cas, la mutation entraine une activation excessive des récepteurs membranaires CD117 ou PDGFRA responsables de la transformation maligne , L’origine embryologique des cellules de Cajal a été discutée depuis leur découverte il y a une centaine d’années. Elles étaient considérées comme des cellules neuronales ou gliales. Par ailleurs, une origine à partir de la crête neurale a été soulevée. Cependant, avec l’avènement de l’immunohistochimie, les filaments intermédiaires de ces cellules étaient marqués par la vimentine, et non par les marqueurs de la crête neurale, ce qui était compatible avec une origine ou une différenciation mésodermique. Les cellules interstitielles de Cajal sont des cellules fusiformes disposées en réseau complexe détecté au niveau du plexus myentérique et, à certains degrés, au niveau des couches musculaires de l’estomac et de l’intestin grêle. Une étude morphologique détaillée de ces cellules et une autre électro physiologique ont montré qu’elles interviennent dans la régulation de la motricité digestive, comme cela a été démontré dans la maladie de Hirshprung où une diminution du nombre des cellules de Cajal est présente.
Les récepteurs tyrosines kinases et GIST
Les tumeurs stromales digestives sont pour la plupart caractérisées par une mutation activatrice dans deux gènes codant pour des protéines de forte homologie appartenant à la famille des récepteurs à activité tyrosine kinase classe III, c- kit et PDGFR Alpha. Ces mutations aboutissent à une activation permanente de la voie de transduction sous jacente et à une activation des signaux mitogènes.
C–kit ou CD 117
La protéine c- kit, produit du proto- oncogène c- kit, est un récepteur transmembranaire à activité tyrosine kinase dont le ligand naturel est le facteur de croissance stem cell factor (SCF). Le gène Kit est situé sur le bras long du chromosome 4. Lorsque le récepteur kit est activé par la fixation de son ligand ou induit par une mutation, des signaux intracellulaires sont transmis par de multiples voies métaboliques de signalisation, dont la voie Ras/MAPK et la voie PI3K/AKT. Cette cascade de réactions moléculaires intracellulaires permet la transduction du signal de la membrane plasmique au noyau, entraînant ainsi la prolifération, la différenciation, la croissance et la survie de la cellule. Le récepteur c- kit est exprimé à la surface des cellules souches hématopoïétiques, des mélanocytes, des cellules de la lignée germinale et de la lignée neurectodermique et joue un rôle important dans l’hématopoïèse, la mélanogenèse, la spermatogenèse et la genèse des cellules de Cajal.
PDGFR A
PDGFR Alpha est un récepteur transmembranaire, son ligand est le PDGF (platelet derived growth factor) sécrété essentiellement par les plaquettes et également par l’endothélium et les mastocytes. En se liant au PDGFR, PDGF augmente la synthèse de certaines protéines, l’activité de la stromélysine (une collagénase) et la prolifération cellulaire. Il a un effet vasoconstricteur et angiogénique.
Un travail du groupe Fletcher s’est intéressé aux GIST, chez qui kit n’est ni muté ni surexprimé. Ces auteurs ont recherché dans ces tumeurs la surexpression d’un autre récepteur à activité tyrosine kinase. C’est ainsi qu’ils ont observé une forte surexpression du récepteur alpha au PDGF. Les mutations concernent le PDGFR Alpha dans environ 7% des cas de GIST. Ces mutations siègent principalement au sein de l’exon 18 (6%), plus rarement au niveau de l’exon 12 (moins de 1%). La surexpression de ces deux récepteurs tyrosine kinase kit et PDGFR A, semble exclusive l’une de l’autre, puisque les tumeurs sur exprimant kit expriment peu ou pas PDGFR A et vis versa.
Autres anomalies
D’autres anomalies génétiques apparaissent secondairement, notamment des altérations et des pertes de segments du chromosome 14, 22 et 1. Une analyse récemment effectuée par Microarray d’expression identifie d’autres gènes surexprimés et potentiellement activés in vivo dans les GIST. Leur rôle dans la progression tumorale reste à établir.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE
I.HISTORIQUE
II.EPIDEMIOLOGIE
III.ETIOPATHOGENIE
1. Les cellules de Cajal et GIST
2. Les récepteurs tyrosines kinases et GIST
2.1- C–kit ou CD 117
2.2-PDGFR A
IV.ANATOMIE PATHOLOGIE
1. Macroscopie
2. Microscopie optique
3. Microscopie électronique
4. Immunohistochimie
4.1- Le CD 117 ou c- kit
4.2- Le CD 34
4.3- La protéine h –caldesmone
4.4- L’actine musculaire lisse
4.5- La Desmine
4.6- La protéine S100
4.7-La NSE
5. La biologie moléculaire
V.DIAGNOSTIC POSITIF
I. DIAGNOSTIC CLINIQUE
1. Circonstances de découverte
2. Examen clinique
II. DIAGNOSTIC PARACLINIQUE
1-Analyse histologique
2-Place de la biopsie
3-La tomodensitométrie
4-L’échographie
5-l’endoscopie
6- L’écho- endoscopie
7-L’imagerie par résonance magnétique
8-La tomographie par émission de positons
9-Autres examens
VI.DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
1) Léiomyome et léiomyosarcome
2) Schwannome
3) Sarcome de kaposi
4) Carcinome sarcomatoïde
5) Tumeur fibreuse solitaire
6) Mélanome
7) Séminome
8) Liposarcome indifférencié
VI- BILAN D’EXTENSION
VII.ETUDE PRONOSTIQUE
1. Facteurs pronostiques
1.1-Critères cliniques
1.1.1-L’âge
1.1.2-Le sexe
1.1.3-Le caractère asymptomatique et la découverte fortuite
1.1.4-La localisation tumorale
1.2-Critères morphologiques
1.3-Critères anatomopathologiques
1.1.3-La macroscopie
1.2.3-Les facteurs histopronostiques
1.3.3-La génétique
2- Classifications pronostiques
VII. TRAITEMENT
1. Buts
2. Moyens
2.1-La chirurgie
2.1.1-La chirurgie à visée curative
2.1.1.1- Voies d’abord
2.1.1.2- Principes de la chirurgie
2.1.1.3- Techniques chirurgicales
2.1.2-La chirurgie à visée palliative
2.2-La chimiothérapie
2.3-La radiothérapie
2.4-Le STI 571 (GLIVEC®)
2.5-Les autres inhibiteurs de la tyrosine kinase
3. INDICATIONS THERAPEUTIQUES
3.1- Les tumeurs localisées non métastatiques
3.2- Tumeurs métastatiques ou localement avancées
4. Modalités de surveillance
4.1-La surveillance clinique
4.2-La surveillance biologique
4.3- La surveillance radiologique
DEUXIEME PARTIE
I. MATIERIELS ET METHODES
1. Le recrutement des patients
1.1-Critères d’inclusion
1.2-Critères d’exclusion
2. Les paramètres étudiés
II.NOS OBSERVATIONS
2.1Observation numero1
2.2Observation numéro 2
2.3Observation numéro 3
III. RESULTATS
1. EPIDEMIOLOGIE
1.1-Répartition des malades selon l’âge et le sexe
1.2-Répartition des malades selon le siège de la lésion
1.3- Associations lésionnelles
2. ETUDE CLINIQUE
2.1- Circonstances de découverte
2.2-Examen clinique
3. ETUDE PARACLINIQUE
3.1-La tomodensitométrie
3.2-L’échographie
3.3-L’endoscopie
4. TRAITEMENT
4.1- Traitement chirurgical
4.2-Traitement médical
5. Etude anatomopathologique
5.1- La taille tumorale
5.2- Le type cellulaire
5.3- Profil imunohistochimique
6.évolution
7. Surveillance à long terme
TROISIEME PARTIE
CONCLUSION