Les causes de mortalité néonatale chez les chiots
Les substituts et compléments colostraux
En élevage porcin, l’insuffisance de consommation en colostrum a été identifiée comme étant l’une des causes majeures de mortalité néonatale (Edwards, 2002). La mortalité néonatale a majoritairement lieu entre la naissance et 3 jours de vie et affecte principalement les porcelets dont le poids de naissance et le gain de poids moyen sont faibles. La prise de colostrum, évaluée grâce au poids de naissance et à la prise de poids en 24 heures, a été associée à une concentration en IgG, une température rectale et une glycémie plus élevées chez des porcelets âgés d’un jour. Les porcelets qui sont morts durant la première semaine présentaient un poids de naissance et une vitalité faibles, la faible vitalité à la naissance étant un signe d’hypoxie durant la mise-bas. Ces porcelets plus faibles ont consommé moins de colostrum, perdu du poids, et ont ainsi présenté une hypoglycémie et une absorption faible d’IgG, qui sont les signes prédictifs de mortalité néonatale chez le porcelet (Devillers et al., 2011).Chez les lapins, un taux de croissance plus élevé a été mis en évidence chez les lapereaux dont le poids de naissance est plus important : les lapereaux les plus lourds ont absorbé plus de colostrum et l’ont converti de façon plus efficace en masse corporelle (ils gagnent en masse corporelle immédiatement après la prise de colostrum). Cette meilleure conversion du colostrum en masse corporelle s’explique par le fait que les lapereaux les plus lourds avaient comparativement plus de partenaires de la portée autour d’eux dans le nid, ils devaient faire moins d’efforts pour rester en position centrale et pouvaient ainsi maintenir une température corporelle plus élevée favorisée par leur rapport surface/volume réduit et plus favorable (Rödel et al., 2008).
Les apports du colostrum
Les effets délétères observés en l’absence de consommation suffisante de colostrum peuvent être expliqués par ce qu’il apporte au nouveau-né : le colostrum a en effet une valeur nutritionnelle et immunologique. Au premier jour de lactation, le colostrum de chienne contient 548kJ/100g (Mila et al., 2015) et une concentration en immunoglobulines G de 19,4g/L. La concentration en IgG sérique à 48 heures de vie, utilisée comme marqueur du transfert passif d’immunité, est fortement corrélée au taux de croissance au cours des deux premiers jours de vie et à la mortalité néonatale (Mila et al., 2014).
Apports immunologiques
Le lait maternel contient également des facteurs qui aideraient à réguler et augmenteraient l’efficacité de l’immunité, tels que les cytokines et les cellules mémoires, qui aident à la protection contre certains antigènes et pathogènes et agissent comme des facteurs de signalisation au sein de la muqueuse intestinale. Certains oligosaccharides pourraient également servir de liaison avec des bactéries pathogènes, empêchant leur adhésion à l’épithélium intestinal alors que les lysozymes et lactoferrines ont une activité antivirale. Le lait maternel pourrait ainsi limiter la contamination par de nombreux agents pathogènes auxquels sont sensibles les nouveau-nés comme E. coli ou Staphylococcus (Lönnerdal, 2000).
Apports nutritionnels
L’énergie apportée par le colostrum peut également expliquer le lien entre la prise insuffisante de ce dernier et les facteurs de risque de mortalité néonatale tels qu’une hypoglycémie, une hypothermie et un faible taux de croissance. Jusqu’au sevrage, le nouveau né dépend du colostrum et du lait pour couvrir ses besoins nutritionnels. Le profil nutritionnel du lait maternel est considéré comme optimal pour le chiot et les recommandations de nutrition néonatale s’inspirent de la composition du lait maternel (tableau 2). Le lait maternel couvre généralement les besoins énergétiques des nouveau-nés avec un apport calorique estimé à environ 200 kcal/kg de poids vif jusqu’à l’âge de 4 semaines (Kirk, 2001).Le colostrum est la première sécrétion mammaire produite après la mise-bas ; après deux à trois jours de lactation, la transition vers la production de lait s’effectue. Macroscopiquement, le colostrum est jaune et plus visqueux que le lait. Le colostrum diffère également du lait de par sa haute concentration protéique (plus de deux fois celle du lait sécrété à 2 semaines post-partum, le colostrum étant particulièrement riche en immunoglobulines) et une concentration en matière grasse légèrement plus élevée (de 10% par rapport au lait sécrété au 14ème jour de lactation). La concentration glucidique est en revanche plus faible (la concentration en lactose double entre le premier et le 14ème jour de lactation). La concentration en minéraux évolue également avec le temps : la concentration en calcium et phosphore augmente jusqu’au 14ème jour de lactation (tableau 2) (ChastantMaillard et Mila, 2016).
La valeur énergétique du colostrum est d’au moins 20% supérieure à celle du lait : 52% de l’énergie fournie par le colostrum sont sous forme de protéines et 40% proviennent des lipides. Les faibles variations de valeurs énergétiques du colostrum qui peuvent exister entre les chiennes s’expliquent principalement par des variations de concentration lipidique.
Les immunoglobulines et l’énergie fournies par le colostrum ont une influence sur le risque de mortalité des chiots au cours de la période néonatale. Néanmoins, la qualité immunologique et la valeur énergétique du colostrum ne sont pas corrélées (ChastantMaillard et Mila, 2016).
Autres apports
Le colostrum contient également de nombreuses substances bioactives comme la prolactine, des corticostéroïdes, l’insuline, la progestérone, la leptine et de nombreux facteurs de croissance essentiels au développement normal des organes. Chez les porcelets, l’IGF1 (Insulin-like Growth Factor) présent dans le colostrum joue un rôle dans le développement du tractus gastro-intestinal, stimulant la synthèse protéique (Farmer et Devillers, 2006). Chez les chiots, la prise colostrale augmente la masse intestinale de façon importante dans les 24 premières heures de vie (42% du poids de la muqueuse intestinale) ; la prise alimentaire, la capacité de digestion et d’absorption augmentent donc également (Paulsen et al., 2003). La prise colostrale insuffisante, observée chez les chiots dont la croissance est faible au cours des deux premiers jours de vie, pourrait ainsi réduire l’absorption nutritionnelle et causer un taux de mortalité plus élevé chez les chiots par la suite (Mila et al., 2015). Le colostrum canin contient également de nombreuses cellules (dont des macrophages, des neutrophiles et des lymphocytes) qui sont absorbées par le chiot avant la fermeture de la barrière intestinale. Par la suite, soit elles rejoignent la circulation générale, soit elles jouent un rôle dans l’immunité cellulaire, humorale ou locale dans le tractus digestif (Wheeler et al., 2007).
Les substituts possibles
Lorsque la chienne est absente ou ne produit pas assez de colostrum, il est indispensable de fournir au chiot un substitut de colostrum pour limiter la mortalité néonatale. Un substitut idéal serait à la fois une source d’immunoglobulines et d’énergie ; la meilleure solution consiste à avoir une autre chienne ayant mis bas au cours des 24 à 48 heures qui précèdent. Dans ce cas, la chienne peut adopter les chiots, ou une partie du colostrum qu’elle produit peut être collecté, éventuellement congelé et administré aux chiots (Chastant-Maillard et Mila, 2016). Passé ce délai, le lait de la chienne adoptante constituera une source d’énergie suffisante mais la concentration en IgG sera insuffisante. En effet, entre le premier et le 21ème jour de lactation, la valeur énergétique du lait ne perd que 20% alors que dès le 7ème jour, la concentration en IgG du lait représente le quart de celle du colostrum .Si des substituts énergétiques existent et montrent de bons résultats chez les nouveaunés, en l’absence de substitut idéal, combinant apport nutritionnel et immunologique, la création d’une banque de colostrum paraît être la meilleure solution disponible actuellement. En effet, traire une chienne est généralement facilement réalisable et les éleveurs peuvent prélever le lait des chiennes deux jours après la mise-bas, dès lors que les chiots nouveau-nés ont consommé du colostrum et acquis une immunité passive. Le colostrum peut être collecté dans de petits tubes en plastique et congelé pour être décongelé au besoin et administré à la dose d’1,5ml par 100g de poids vif de chiot par jour (Chastant-Maillard et Mila, 2016).
De plus, le lait des chiennes est considérablement différent de celui des ruminants (tableau 3) ; le lait de ces espèces n’est donc pas adapté comme seule nutrition pour des chiots et le lait de remplacement doit avoir un profil nutritionnel similaire à celui du lait de chienne.
Les sources d’immunoglobulines envisageables
Les laits maternisés commercialisés ne contiennent pas d’immunoglobulines canines. En revanche, le sérum d’un chien adulte en contient mais à une concentration 3 fois inférieure à celle du colostrum. L’administration de sérum canin, prélevé sur des chiens adultes, par voie orale à des chiots privés de colostrum permet d’augmenter la concentration en IgG circulants mais de façon minime par rapport à celle obtenue avec la consommation normale de colostrum. L’administration par voie sous-cutanée pourrait permettre d’atteindre le seuil de concentration en Ig minimal protecteur (230 mg/dl) mais des réactions locales (œdème souscutané) rendent cette voie inutilisable (Poffenbarger et al., 1991; Bouchard et al., 1992).Le colostrum bovin, facilement accessible, pourrait être utilisé comme source d’immunoglobulines hétérologues mais son intérêt immunologique chez le chiot pour l’acquisition d’une immunité systémique reste à étudier. Les IgY constituent également une source envisageable : des anticorps spécifiques dirigés contre des agents pathogènes canins (E. coli et CPV2), collectés chez des poules vaccinées contre ces pathogènes, peuvent être administrés à des chiots par voie orale d’IgY à des chiots avant la fermeture de la barrière intestinale. La croissance des chiots de grandes races et la richesse du microbiote digestif sont ainsi améliorés au cours de la période néonatale (Olivier, 2014; Mila et al., 2016).A défaut d’un substitut complet du colostrum, un apport énergétique proche de celui du colostrum doit au moins être fourni aux chiots privés de colostrum pour diminuer la mortalité néonatale. Les laits maternisés ne constituent pas une source d’immunoglobulines mais ont une concentration énergétique d’environ 1kcal/ml (soit environ la moitié de l’apport énergétique du colostrum), ce qui permet un soutien nutritionnel.
Les sources énergétiques possibles
Les chiots doivent recevoir une supplémentation alimentaire s’ils perdent plus de 4% de leur poids de naissance dans les 24 premières heures qui suivent la naissance ou si leur poids de naissance est faible (plus de 25% inférieur à la moyenne de la race) (Mila et al., 2015). Il faut cependant être vigilant et ne pas suralimenter les chiots puisqu’il s’agit de la cause de diarrhée non infectieuse la plus importante chez les chiots orphelins pendant les trois premières semaines de vie. La quantité de lait de remplacement à administrer aux nouveaunés doit donc être calculée précisément : 20% du poids vif du chiot à donner en 6 à 8 repas sur 24 heures (Mosier, 1978).Apporter un substitut énergétique aux chiots nouveau-nés dont le poids de naissance est faible peut s’avérer délicat puisqu’il s’agit d’administrer de petites quantités de lait à intervalles réguliers de 2 à 3 heures afin d’éviter une suralimentation. Le besoin énergétique d’un chiot nouveau-né est d’environ 20 à 26 kcal/100g de poids vif par jour et la capacité maximale de l’estomac est d’environ 4ml/100g de de poids vif. Il n’est pas attendu des chiots nourris avec un lait de remplacement qu’ils parviennent à maintenir des taux de croissance comparables à ceux des chiots ayant accès au colostrum de la mère (Lawler, 2008). Néanmoins, des chatons nourris avec un lait de substitution peuvent avoir des taux de croissance supérieurs à ceux des chatons ayant accès au colostrum maternel ad libitum (Remillard et al., 1993). De plus, des études en médecine humaine montrent que les nourrissons nourris avec du lait maternisé ont pris plus de poids que les ceux nourris au sein après les 3 à 4 premiers mois de vie (Rogers et al., 1997). Or, ce lait ne peut apporter que les nutriments essentiels, mais ne peut pas fournir l’ensemble des autres constituants du colostrum aux effets bénéfiques décrits précédemment. Un apport nutritionnel supplémentaire pourrait permettre d’ajouter un apport d’énergie et d’augmenter la prise de poids chez les chiots nouveau-nés et de diminuer ainsi la proportion de chiots à risque de mortalité néonatale qui ne consommeraient pas assez de colostrum.Des porcelets supplémentés 3 jours après la naissance avec du lait maternisé ad libitum en complément du lait maternel ont présenté une croissance plus rapide et un poids supérieur (6,6kg contre 5,7kg) au moment du sevrage à celui des porcelets non supplémentés. Un nombre plus important de porcelets du groupe supplémenté ont également atteint le sevrage et ils ont atteint 110kg de poids corporel trois jours avant les porcs du groupe non supplémenté (Wolter et al., 2002). Une autre étude, menée sur 135 porcelets élevés avec leur mère et supplémentés avec du lait maternisé concentré en nutriments en libre accès d’un à 21 jours après la naissance, a montré que les porcelets du groupe supplémenté sont significativement plus lourds après 21 jours de supplémentation que les porcelets du groupe témoin. Le poids de l’intestin grêle des porcelets supplémentés est plus élevé que celui des porcelets témoins tout comme le ratio poids/longueur de l’intestin. Si la longueur des villosités intestinales et le nombre de cellules caliciformes sont les mêmes dans les deux groupes, les porcelets supplémentés avec le lait maternisé concentré ont des cryptes intestinales plus profondes, où une expression cellulaire nettement augmentée d’un marqueur de prolifération cellulaire (PCNA : Protein Cell Nuclear Antigen) a été mise en évidence. De plus, cette étude suggère également que ces porcelets expriment de façon plus marquée le gène IGF1 dans leur jéjunum, ce qui serait lié à la régulation de la prolifération cellulaire du tractus intestinal et à sa croissance (de Greeff et al., 2016).Une des questions qui se pose est de savoir quel est le facteur le plus limitant pour le chiot dans le colostrum : l’énergie ou l’immunité. En termes de fréquence, 20% des chiots à 2 jours sont en déficit d’immunité passive et 30% sont en déficit énergétique (Mila et al., 2015). En termes de volume de colostrum consommé nécessaire, 1,3 ml/100g de chiot (pour un chiot dont la concentration en IgG sérique est de 2,3 g/l, avec un taux d’absorption de 40%, un hématocrite de 35% et un taux d’IgG dans le colostrum de 20g/l) sont nécessaires pour assurer un apport immunitaire suffisant alors que 12 ml/100g sont requis pour les apports énergétiques (avec un besoin énergétique de 212 kcal/kg par jour si le colostrum fournit 19800 kcal/l) (Chastant-Maillard et Mila, 2016).
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Table des matières
LISTE DES FIGURES
LISTE DES ABRÉVIATIONS
INTRODUCTION
PREMIÈRE PARTIE : ÉTUDE BIBLIOGRAPHIQUE
I- Les causes de mortalité néonatale chez les chiots
A- Immaturité à la naissance
1- Les anomalies congénitales
2- Une croissance fœtale retardée
3- Un part dystocique
4- Un déficit de prise colostrale
5- Les maladies infectieuses
B- Signes cliniques prédictifs d’une augmentation du risque de mortalité néonatale
1- L’hypoxie
2- L’hypothermie
3- L’hypoglycémie
4- La déshydratation
5- Une perte de poids Les substituts et compléments colostraux
II- Les substituts et compléments colostraux
A- Les apports du colostrum
1- Apports immunologiques
2- Apports nutritionnels
3- Autres apports
B- Les substituts possibles
1- Les sources d’immunoglobulines envisageables
2- Les sources énergétiques possibles
DEUXIÈME PARTIE : ÉTUDE EXPÉRIMENTALE
I- Matériels et méthodes
A- Population étudiée
B- La supplémentation
C- Suivi clinique
1- Le poids
2- La glycémie
3- La température
4- Mortalité
D- Outils statistiques
II- Résultats
A- Croissance
1- Croissance des chiots
a. Gain de poids
b. Taux de croissance
2- Les chiots en déficit de croissance entre 0 et 2 jours
3- Effet de la supplémentation
a. Sur la croissance des chiots
b. Sur la proportion de chiots en déficit de croissance
B- Glycémie
1- Glycémie des chiots
2- Hypoglycémie
3- Effet de la supplémentation
a. Sur la glycémie des chiots
b. Sur la proportion de chiots à glycémie basse
C- Température
1- Température des chiots
2- Les chiots en hypothermie à 48 heures
3- Effet de la supplémentation
a. Sur la température des chiots
b. Sur la proportion de chiots en hypothermie
D- Mortalité
1- Mortalité des chiots
2- Mortalité des chiots dont le poids de naissance est faible (quartile Q1)
3- Effet de la supplémentation
a. Sur la mortalité des chiots
b. Sur la mortalité des chiots du quartile Q1
E- Les chiots présentant au moins un facteur de risque de mortalité néonatale
1- La proportion de chiots présentant au moins un facteur de risque
2- Effet de la supplémentation
III- Discussion
A- La population étudiée
1- Influence du format racial
2- Influence du poids de naissance
3- Influence du sexe
4- Les populations de chiots à risque de mortalité
B- L’effet de la supplémentation
1- Sur la croissance des chiots
2- Sur la glycémie et la température des chiots
3- Sur la mortalité néonatale
4- Sur les populations de chiots à risque
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
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