Les besoins spécifiques des élèves ayant un TSA
Les caractéristiques cognitives, langagières et comportementales spécifiques aux élèves ayant un TSA demandent une adaptation particulière des services éducatifs qui leur sont offerts (Dionisi, 2013). De plus, la plupart des enfants présentant un TSA sont non-verbaux et communiquent essentiellement à l’aide de pictogrammes. Chaque enfant est différent et ne réagit pas de la même façon à divers stimuli. Il est parfois même question d’hypo et/ou d’hyper-sensibilité. En effet, certains enfants sont plus ou moins sensibles, par exemple aux bruits, à la lumière, au toucher, etc. (Bhat, Landa, & Galloway, 20 Il). Les enfants ayant un TSA présentent des altérations au niveau des interactions sociales (American Psychiatrie Association, 2003). Notamment, de la difficulté de fonctionner en groupe. Les interventions qui leur sont destinées doivent préférablement être réalisées de façon individuelle pour ainsi éviter qu’il y ait trop de stimuli dans leur environnement qui pourraient amener l’enfant à se désorganiser. Cette particularité engendre des problématiques dans la planification des interventions offertes à ces élèves. S’ajoute à cela les nombreuses crises liées à l’anxiété qui sont provoquées par une situation ou un stimulus inattendu ou inconnu.
Pour répondre aux besoins des élèves ayant un TSA et pour favoriser leur développement global, les enseignants sont amenés à adapter l’environnement ainsi que leurs approches pédagogiques. Les établissements québécois accueillant des élèves présentant un TSA ont, pour la majorité, instauré le modèle TEACCH (Treatment and Education o/Autistic and related Communication-handicapped CHiidren), élaboré par Schopler et ses collaborateurs, en 1971 (Schopler, Brehm, Kinsboume, & Reichler, 1971). Ce programme vise le développement « [ … ] de l’autonomie de l’enfant dans divers contextes : l’école, la famille et la conununauté » (Goupil, 2007), p. 264). Selon ce modèle, la classe est aménagée de façon à ce que l’élève repère facilement les différents endroits où il pourra réaliser les tâches qui lui sont demandées: (a) espace de travail individuel; (b) espace pour manger; (c) espace pour jouer; (d) espace pour l’hygiène personnelle; Ce) espace pour les apprentissages avec l’enseignante, etc. L’environnement se veut le plus confortable et sécurisant possible pour l’élève, ce qui signifie peu de stimuli, comme des lumières tamisées et des interventions à voix basse.
Tel que précisé précédemment, l’enfant ayant un TSA utilise peu ou pas la parole pour conununiquer. Il se réfère donc à ce qu’il voit pour comprendre et s’orienter. En classe, tout doit être imagé: (a) l’horaire de la journée; Cb) les routines; (c) les outils pédagogiques et Cd) les tâches à réaliser (Dionisi, 2013; Goupil, 2007). Cela demande une planification’ et une organisation rigoureuse du déroulement de chaque journée et des activités éducatives. Dans le cadre de la présente étude, l’école où a été implanté le programme d’intervention utilise principalement le modèle SACCADE (Structure et Apprentissage Conceptuel Continu Adapté au Développement Évolutif) qui s’apparente au modèle TEACCH (Schopler; et al., 1971) pour structurer et planifier leurs activités pédagogiques. Le modèle SACCADE vise le développement de la personne en tenant compte des besoins fondamentaux et du fonctionnement cognitif propre aux élèves ayant un TSA (Harris son & St-Charles, 2012). Par exemple, lorsque les éducatrices désirent communiquer avec leurs élèves, elles disent d’abord leur prénom, puis elles attendent quelques secondes avant de poursuivre leurs consignes. Cette manière de fonctionner permet aux éducatrices de capter l’attention de leurs élèves en leur laissant le temps de traiter l’infonnation reçue. Les éducatrices utilisent également le langage conceptuel propre au modèle SACCADE pour faciliter la communication avec leurs élèves ayant un TSA. Tout est donc imagé : Ca) l’horaire de lajoumée; Cb) les endroits où ranger; Cc) les routines quotidiennes; Cd) les choix de collations et de repas; etc. Ce qui permet aux élèves d’avoir un support visuel constant qui favorise leur compréhension. Les enseignants et les intervenants qui oeuvrent auprès des enfants ayant un TSA doivent continuellement adapter leur matériel pédagogique dans le but de le rendre accessible et compréhensible. L’utilisation des pictogrammes et de la technologie, comme l’ordinateur ou la tablette électronique, est de plus en plus présente dans les milieux spécialisés. Le tout dans le but de faciliter la communication et la compréhension des élèves pour ainsi favoriser leur développement global.
Le contrôle postural et les déficiences motrices
Le contrôle postural est à la base de la motricité. C’est grâce à cette capacité de contrôler son corps dans l’espace que les individus sont en mesure de conserver leur équilibre pendant la réalisation de mouvements précis. Quelques études menées auprès d’enfants présentant un TSA pour vérifier la présence de déficiences au niveau du contrôle postural ont relevé des instabilités (Chang, Wade, Stoffregen, Hsu, & Pan, 2010; Molloy, Dietrich, & Bhattacharya, 2003). Cependant, l’étendue des oscillations varie en fonction des stimuli sensoriels. Ces derniers ont été modifiés pendant les tâches révélant ainsi que les enfants ayant un TSA utilisent essentiellement les informations visuelles pour maintenir leur posture et leur équilibre. Chez les individus ayant un développement typique, les oscillations posturales diminuent avec l’âge, ce qui ne semble pas être le cas chez ceux ayant un TSA. Cette constatation amène donc les chercheurs à penser que le système de contrôle postural n’atteindrait jamais le niveau de maturation dit « adulte» chez la population présentant un TSA (Fournier et al., 2010). Les auteurs spécifient qu’un système de contrôle postural immature est un facteur limitatif pour le développement des habiletés motrices.
Cela a un impact important sur les activités de locomotion et de manipulation ainsi que sur la qualité de vie des personnes atteintes. Certaines études se sont penchées sur l’existence d’un retard moteur chez les enfants ayant un TSA. Tout comme la sévérité des symptômes liés à l’autisme, le degré de déficience motrice varie d’un individu à l’autre. Il semble que les enfants ayant un TSA sont moins coordonnés et présentent de plus faibles capacités motrices que ceux à développement typique. Leurs déficits se situent autant au niveau des membres inférieurs que supérieurs ainsi que de la motricité globale et fine (Fournier, Hass, Naik, Lodha, & Cauraugh, 2010; Provos t, Lopez, & Heimerl, 2007). D’autres auteurs soulèvent également l’aspect qualitatif dans la réalisation de mouvements. Par exemple lors de la passation du Test de développement de la motricité globale, 2″ édition (TDMG-2), les faibles résultats obtenus par les enfants sont associés à la qualité de l’exécution des mouvements et non à l’échec des tâches (Pan, Tsai, & Chu, 2009; Staples & Reid, 2010).
À l’intérieur de ce test, les participants effectuent des tâches liées aux habiletés fondamentales de locomotion et de contrôle d’objets. Les enfants ayant un TSA ont de la difficulté dans l’exécution de ces activités. Ce qui serait lié à leur manque de coordination et à leur incapacité à bien dissocier les différentes parties de leur corps. Le fait que les habiletés motrices des enfants ayant un TSA soient limitées occasionne des perturbations dans la réalisation de tâches quotidiennes. Une étude a été menée auprès d’enfants âgés entre 3 et 4 ans pour vérifier la relation entre les difficultés motrices, sensorielles et les habiletés de la vie quotidienne. Encore une fois , une très grande variabilité des résultats ne permet pas d’en généraliser l’interprétation (Jasmin et al., 2009). Néanmoins, les auteurs ont démontré une relation entre les déficiences sensorielles et le niveau des habiletés de la vie quotidienne. La même relation a été observée avec les difficultés motrices, surtout en lien avec la motricité fine.
En effet, les enfants ayant un TSA démontrent des déficiences du point de vue de la motricité globale et fine. Ce qui a pour impact de les limiter dans l’ exécution de tâches quotidiennes comme se vêtir, attacher des boutons ou une fermeture éclair, se nourrir, utiliser des ustensiles, se laver, se brosser les dents, écrire, etc. Un nouvel aspect a été apporté dans l’étude de Jasmin et ses collaborateurs (2009) et il s’agit des habiletés sensorielles. Ces dernières font partie intégrante de la proprioception, qui fait référence à la perception qu’a un individu de la position des parties de son corps dans l’espace. La proprioception est possible grâce aux informations sensorielles recueillies par les propriocepteurs, analysées par le cerveau et retransmises aux différents systèmes (De Lièvre & Staes, 20 Il). Les difficultés de proprioception et les déficiences au niveau des habiletés sensorielles sont deux autres facteurs qui s’ajoutent à la liste des possibilités qui influencent les capacités motrices des enfants ayant un TSA (Lane, Young, Baker, & Angley, 2010).
L’intervention motrice La présence des déficits moteurs chez les enfants ayant un TSA ainsi que leurs impacts négatifs sur le développement global et dans la réalisation de tâches de la vie quotidienne ont été démontrés. L’intervention motrice fait partie des solutions possibles pour améliorer la qualité de vie et le développement de cette clientèle. Quelques auteurs se sont penchés sur l’intervention motrice et son impact sur le développement moteur de jeunes ayant un TSA. Pan, en 2010, a mené une étude visant à déterminer les effets d’un programme d’exercices de natation sur les habiletés aquatiques et les comportelTIents sociaux d’enfants âgés entre 6 et 9 ans ayant un TSA (C.-Y. Pan, 2010). À la suite des 10 semaines de réalisation du programme, les enfants participants au projet démontraient des amél iorations au niveau de leurs habiletés aquatiques ainsi qu’une diminution des problèmes de comportement anti-sociaux. De leur côté, Zachopoulou et ses collaborateurs ont évalué les effets d’un programme expérimental intégrant de la musique et des mouvements rythmiques sur les habiletés de saut et d’équilibre dynamiques d’enfants d’âge préscolaire ayant un TSA (Zachopoulou, Tsapakidou, & Derri, 2004). Les résultats obtenus soutiennent que le programme a eu des effets positifs sur les capacités rythmiques des enfants. Ce qui laisse supposer qu’il est possible d’améliorer les compétences motrices liées à la locomotion et à la coordination chez cette clientèle.
Précédemment il a été question des déficiences au niveau des habiletés sensorielles qui seraient liées aux difficultés motrices chez les enfants ayant un TSA. Pfeiffer et ses collaborateurs ont donc tenté une intervention favorisant l’intégration sensorielle dans le but de vérifier son efficacité auprès de cette clientèle (Pfeiffer, Koenig, Kinnealey, Sheppard, & Henderson, 20 II). Les participants de cette étude étaient des enfants âgés entre 6 et 12 ans présentant un TSA ou un Syndrome d’Asperger. Au cours de l’intervention, les enfants étaient amenés à réaliser des activités visant à stimuler leurs sensations, surtout aux niveaux tactile, vestibulaire et proprioceptif. À la suite des six semaines d’intervention, des progrès ont été observés dans le traitement des informations sensorielles, dans les fonctions socio-affectives et dans les habiletés de motricités fines de ces enfants. Dans la littérature, les interventions sont souvent menées auprès des jeunes enfants ayant un TSA. Pourtant, il a été démontré que les déficiences motrices devenaient plus prononcées avec l’âge (Lloyd, MacDonald, & Lord, 2011). Dans cet ordre d’idée, Pitetti et ses collaborateurs ont évalué l’efficacité d’un programme de marche sur tapis roulant sur la capacité d’exercice et l’indice de masse corporelle (IMC) d’adolescents âgés entre 16 et 19 ans présentant un TSA sévère (Pitetti, Rendoff, Grover, & Beets, 2007). À la fin des neuf mois d’intervention, les participants avaient augmenté leur fréquence de marche, leur vitesse et leur élévation ainsi que le nombre de calories dépensées. Ils avaient également diminué leur !MC.
|
Table des matières
CHAPITRES 1. INTRODUCTION
La prévalence et les caractéristiques du trouble du spectre de l’ autisme
L’intégration scolaire au Québec
Les besoins spécifiques des élèves ayant un TSA
II. PROBLÉMA TIQUE
Le contrôle postural et les déficiences motrices
L’évaluation des habiletés motrices
L’intervention motrice
Le cours d’éducation physique et à la santé
L’ Î1uitation motrice
III. PROGRAMME D’INTERVENTION
L’approche sensori -Iuotrice
L’étude des besoins
La pertinence du programme d’intervention
Les objectifs de l’étude
IV. MÉTHODOLOGIE
Le milieu scolaire
Les participants – Élèves
Les participants – Personnels scolaires
Les Inodalités éth iques
Le programme d’intervention sensori-motrice
L’élaboration du programme: un aperçu
L’implantation du programme
La supervision du programme
Les outils d’évaluations qualitatives
Les entrevues individuelles
La cueillette et l’analyse des données qualitatives
Les outils d’évaluations quantitatives
Le Test de développement de la motricité globale (TDMG-2)
La cueillette et l’analyse des données quantitatives
Les limites de l’étude
V. RÉSULTATS ET DISCUSSION
L’état de la situation avant l’implantation
Le premier objectif – Les conditions d’implantation
Le premier objectif – Les facteurs facilitant et les obstacles
Le niveau d’appropriation des éducatrices
Les forces et les faiblesses du programme d’intervention
Le deuxième objectif – Les impacts sur les interventions des éducatrices
Le deuxième objectif – Les impacts sur le développement des élèves
Les éléments du programme qui ont eu du succès
Les éléments du programme jugés moins favorab les
Les résultats obtenus au TDMG-2
Les habi letés de contrôle d’obj ets
Les habiletés de locomotion
Les élèves s’étant le moins améliorés
Les épreuves du TDMG-2
La qualité des interventions
L’imitation motrice
VI. CONCLUSION
RÉFÉRENCES
Télécharger le rapport complet