Les caractéristiques des exploitations déterminent la logique des riziculteurs

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Cadre conceptuel et théorique

Notions théoriques

Notion sur le Champ Ecole Paysan

La vulgarisation permet de transmettre les technologies appropriées aux agriculteurs afin de les aider à améliorer leur productivité et leur revenu. Selon Malassis (1973), le rôle de la vulgarisation est (i) d’informer les agriculteurs et assurer la diffusion des innovations en organisant des structures de participation, (ii) de contribuer avec l’aide de services spécialisés à une formation fonctionnelle, et (iii) de détecter les leaders réels,1 capables d’apporter l’adhésion réelle du groupe à des opérations de développement acceptées.

Différentes méthodes de vulgarisation ont été développées dans plusieurs pays d’Afrique dont Madagascar pour améliorer la sécurité alimentaire des ménages. Le CEP englobe les approches participatives de développement et de diffusion de technologies (Cf. Annexe II). Son objectif est d’aider les agriculteurs à maîtriser et à appliquer les techniques de gestion agricoles dans leurs exploitations respectives (CTA, 2012). Le Champ Ecole des producteurs est un cadre d’apprentissage des adultes, basés sur le principe de l’éducation non formelle, formation participative réalisée au niveau d’une communauté (FIDA Afrique, 2007). Le CEP fait appel aux principes de l’apprentissage expérientiel ou l’apprentissage par la pratique. Les producteurs collectent les données au niveau de leurs propres champs, les analysent et décident des actions à mener sur la base de ce qui est réellement observé. Pour chacune des activités, le principe reste l’auto-découverte et les participants apprennent sur les causes et les effets des interactions (Gbaguidi , 2004). De ce fait, toutes les activités sont orientées de manière à : (i) développer chez le paysan des capacités réelles d’identification, d’analyse et d’interprétation des situations et informations en rapport avec les problèmes de son champ, (ii) l’aider à prendre des décisions adéquates sur la base de l’analyse de ses propres observations et de l’Analyse de l’Agro-Eco-Systémique ou AAES (Cf. Annexe V 1) et, (iii) évaluer les résultats pour une réorientation judicieuse de ses interventions (Sissoko et al., 2012). A cet effet, la formation obtenue par les paysans constitue un moyen d’augmenter la capacité de résilience des riziculteurs. La résilience se réfère aux dynamiques par rapport à différents état d’équilibre stables (Cf. Annexe V.6). La résilience s’agit de la quantité de perturbation que le système peut absorber avant de changer pour d’autre régime stable qui est contrôlé par différentes variables et caractérisé par différentes structures (Brand, 2007).

Théorie relative à la diffusion d’une innovation

Schumpeter définit une innovation, dans le Mémento de l’Agronome en 2002 comme «une nouvelle combinaison des moyens de production» et Olivier de Sardan dans le même livre la considère comme «une greffe de techniques, de savoirs ou de modes d’organisation inédits sur les techniques, savoirs ou modes d’organisation en place». Mais on peut également avancer que l’innovation consiste à faire passer de l’économie traditionnelle à l’économie de marché. Ainsi, la diffusion de l’innovation constitue un processus complexe. Des modèles ont été proposés pour mettre en exergue la diffusion d’une innovation (Steyer et Zimmerman, 2001 et Rogers, 1983). Cette étude a considéré le modèle diffusionniste développé par Rogers et l’innovation comme l’expérimentation populaire discutée dans le Mémento de l’agronome (2002).
• Modèle diffusionniste de Rogers
Selon Rogers (1983), le processus d’adoption peut se décrire comme une séquence d’étapes suivies par le consommateur du stade de la découverte jusqu’à son adoption ou son rejet. Dans cette étude l’EAF est considéré comme étant le consommateur de l’innovation. Ce processus se subdivise en six (6) étapes. La figure en Annexe IV reflète le processus d’adoption des innovations par les consommateurs.

Rogers a établi sa théorie sur un ensemble de typologies dans le but de suivre l’évolution du taux d’adoption qui décrit une courbe en S. Ce taux d’adoption est considéré comme la variable descriptive essentielle de la diffusion. Selon Rogers, l’innovation atteint d’abord un premier individu d’une population ou un premier village d’une région et se diffuse ensuite spontanément de proche en proche par effet de contamination, un peu similaire à une épidémie. Ce modèle rapporte le nombre d’adoptants en fonction du temps. La courbe en S permet de distinguer cinq (5) types d’adoptants: les pionniers, les innovateurs, la majorité précoce, la majorité tardive et les retardataires (Cf. Annexe IV).
Néanmoins, ce modèle dans la première édition de Rogers intitulé « Diffusion of innovation » est critiqué par son caractère pro-innovateur , en particulier en ce qui concerne la typologie des adoptants en « types-idéaux ». Ce modèle diffusionniste ne tient pas en compte de la décision des usagers après l’adoption. Ils peuvent opter à n’importe quel moment de rejeter l’innovation. La troisième édition de la théorie de Rogers met en exergue la notion de « réinvention » par le biais de laquelle les consommateurs, c’est-à-dire les EAFs, modifient le dispositif qu’ils adoptent (Gbaguidi, 2004).
• Innovation comme une adaptation
Les systèmes de production des paysans sont le résultat de micro-innovations qui les transforment en permanence mais qui sont également adaptées à leur environnement (Ministère des affaires étrangère Français, 2002). Robert Chambers, Arnold Pacey et Lori Ann Thrupp dans le Mémento de l’Agronome (2002) considèrent l’idée des paysans expérimentateurs selon laquelle la vulgarisation a pour but d’apporter un éventail d’options et de soutenir les agriculteurs à adapter certaines de ces options à leur système productif. Cette approche fait le lien entre les pratiques paysannes et la méthode scientifique. Elle consiste à transférer la science, et non la technique aux agriculteurs. Ainsi, la vulgarisation consiste à encourager les paysans à faire des expérimentations simples pour les traduire en concepts agronomiques (Benoit & Schneider, 2007).

Approches systèmes et filières

Les généralités relatives au principe de la vulgarisation par le dispositif CEP et les théories liées à la diffusion des innovations retenues pour la conduite de ce travail se réfèrent aux concepts de l’approche système, du système de production et de l’approche filière.
Un système est un ensemble d’éléments en interaction dynamique, organisés en fonction d’un but. Chaque élément composant le système a son utilité pour l’accomplissement de l’objectif et ne peut être dissocié de l’ensemble (Ranaivoson, 2010). Les interactions entre les éléments notamment les activités agricoles des EAFs démontrent leur complémentarité et leurs relations (Sigward, 2002). L’approche système (Cf. Annexe V.2) consiste à considérer tous les éléments composants le milieu et qui agissent en interaction dynamique en vue d’atteindre un objectif (Ranaivoson, 2010).

Le système de production (Cf. Annexe V.3) se rapporte aux combinaisons des ressources mobilisé par les producteurs proportionnels à ses principaux facteurs de productions. Ainsi, l’analyse du système de production consiste à étudier la combinaison de différents facteurs qui sont ressources naturelles, travail, consommation intermédiaires et biens équipements (Boudin, 1987). L’étude de système de production fait référence à l’étude de comportement de l’exploitation pour qu’il puisse répondre à ses besoins et optimiser son profit à partir des moyens dont il dispose (Boudin, 1987).
Et enfin pour mieux appréhender le comportement des riziculteurs, l’approche filière (Cf. Annexe V.4) permet de présenter le système économique auquel est affilé le producteur. La filière est un système d’agents qui concourent à produire, transformer, distribuer et consommer un produit ou un type de produit (Duteurtre, 2000). Elle peut être considérée comme étant une compilation systématique de méthodes d’actions orientées pour encourager le développement économique avec une perspective de chaîne de valeur (GTZ, 2007). C’est une méthode d’analyse technique et économique des circuits commerciaux prenant en compte différents aspects (Duteurtre, 2000).

Portée des concepts et notions théoriques sur l’étude

L’analyse du comportement des riziculteurs pour le dispositif CEP situe les pratiques paysannes ainsi que les nouvelles technologies vulgarisées dans une démarche systémique. L’étude tente de voir deux (2) aspects différents:
– L’évaluation du système de production des ménages rizicoles mettant en évidence les variables déterminant la pratique des innovations et l’évolution de l’adoption des innovations par ces ménages agricoles compte tenu du moyens à leurs disposition,
– Et l’analyse de l’environnement méso et macro-économique de l’exploitation à travers la démarche systémique incluant l’approche filière et l’approche système pour la caractérisation des éléments paramétriques influant l’adoption des innovations par le dispositif CEP.

Démarche globale

La démarche globale comprend: (i) la phase préliminaire, (ii) la phase de descente sur terrain, (iii) les phases de saisie et d’apurement des données et (iv) la phase d’analyse et d’interprétation des données.

Phase préliminaire

La phase préliminaire consiste à la préparation des travaux sur terrain. Elle comprend :
– la revue bibliographique,
– l’élaboration de questionnaires et,
– la préparation de guides d’entretien à remplir auprès des personnes ressources pour avoir des informations concernant les thèmes étudiés.

Revue bibliographique

Cette étape permet de prendre connaissance des investigations effectuées auparavant. Elle consiste à faire des recherches et des synthèses bibliographiques et webographiques sur les thèmes (i) la monographie de la Région de l’Anosy, (ii) le Projet AROPA au niveau national et au niveau de la Région d’Anosy, (iii) la filière riz à Madagascar et en particulier dans la zone d’étude, (iv) les approches de la vulgarisation effectuées auparavant (v) les méthodes d’enquête et d’analyse des données et (vi) les études socio-économiques et techniques relatives à la diffusion des innovations rizicoles. Une synthèse bibliographique des documents consultés est présentée en Annexe XXII.

Elaboration de questionnaires et de guides d’entretien

Le questionnaire (Cf. Annexe VI) a été établi pour le recueil d’informations auprès des riziculteurs et les associations CEP en vue de vérifier les hypothèses émises. Il a été élaboré de façon à obtenir des informations sur :
– la taille et le nombre des actifs par ménage,
– le mode d’accès à la terre et le mode de faire valoir,
– les systèmes de culture et d’élevage pratiqués,
– leurs perspectives par rapport aux pratiques SRI/SRA
– les autres activités génératrices de revenu,
– les matériels agricoles utilisés,
– les besoins en main d’œuvre pour la riziculture et les autres activités agricoles, et
– les problèmes liés à l’agriculture, à l’élevage et à l’adoption des innovations rizicoles.
Un guide d’entretien (Cf. Annexe VI) a été élaboré pour recueillir des informations auprès des personnes ressources. Il a été conçu de telle sorte que les entretiens soient orientés vers les thèmes du mémoire.

Cas du District de Taolagnaro

Pour le District de Taolagnaro, trois (3) facteurs exercent des influences positives sur la décision des exploitants agricoles à étendre leur surface de rizière où ils appliquent les innovations.

Niveau d’étude du chef d’exploitation

Contrairement au District d’Amboasary, le niveau d’étude du chef d’exploitation exerce une influence positive sur la décision des producteurs dans le district de Fort-Dauphin. Elle est significative au seuil de 10%. Une amélioration du niveau moyen d’éducation des exploitants doubleraient les chances pour qu’ils procèdent à l’extension de leur parcelle de pratique

Rendement à l’hectare sur les parcelles de pratique

Les résultats du modèle logit ont montré que l’augmentation du rendement influe fortement sur le choix des paysans avec un seuil de signification de 1%. Les chances pour que l’exploitant agrandisse sa superficie d’application seraient deux fois plus importante avec une amélioration de rendement d’une unité.

Trésorerie du ménage

L’objectif du projet est d’améliorer la porte feuille du ménage. L’analyse des données démontre que la trésorerie du ménage est significative à 10%. La valeur d’exp (β) égale à 1 insinue qu’il y a 50% de chance que l’exploitant ou le ménage augmente ou maintient son superficie de pratique.

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Table des matières

INTRODUCTION
1. MATERIELS ET METHODES
1.1 Matériels
1.1.1 Justification du choix du thème
1.1.2 Justification de la zone d’étude
1.1.3 Localisation de la zone d’étude
1.2 Méthodes
1.2.1 Cadre conceptuel et théorique
1.2.1.1 Notions théoriques
a. Notion sur le Champ Ecole Paysan
b. Théorie relative à la diffusion d’une innovation
c. Approches systèmes et filières
1.2.1.2 Portée des concepts et notions théoriques sur l’étude
1.2.2 Démarche globale
1.2.2.1 Phase préliminaire
a. Revue bibliographique
b. Elaboration de questionnaires et de guides d’entretien
1.2.2.2 Phase de descente sur terrain
a. Entretien auprès des personnes ressources
b. Enquête auprès des riziculteurs
1.2.2.3 Saisie et apurement des données
1.2.2.4 Analyse et interprétation des données
1.2.3 Démarche de vérification des hypothèses
1.2.3.1 Hypothèse 1 : Les caractéristiques des exploitations déterminent la logique des riziculteurs
a. Sous-hypothèse 1.1 : Les ressources des exploitations influent sur le choix des riziculteurs à adopter les innovations diffusées
b. Sous-hypothèse 1.2 : Les moyens mobilisés pour la pratique des techniques vulgarisées sont différents selon le type d’exploitation rizicole
1.2.3.2 Hypothèse 2 : L’appropriation des innovations dépend de l’état de l’environnement dans laquelle évolue l’exploitation
a. Sous-hypothèse 2.1 : L’état de la filière reflète le comportement des riziculteurs
b. Sous-hypothèse 2.2 : Les contraintes relatives à la mise en œuvre des formations constituent des facteurs de blocage des groupements CEP dans l’appropriation des techniques
1.3 Limite de la méthodologie
2. RESULTATS
2.1 Caractéristiques des exploitations
2.1.1 Parcelles d’application des riziculteurs
2.1.2 Facteurs d’adoption spécifiques à chaque district
2.1.2.1 Cas du District d’Amboasary Sud
a. Genre du chef de ménage
b. Niveau d’étude du chef d’exploitation
c. Taille du ménage
d. Revenus agricoles extra riz
e. Autosuffisance en riz
2.1.2.2 Cas du District de Taolagnaro
a. Niveau d’étude du chef d’exploitation
b. Rendement à l’hectare sur les parcelles de pratique
c. Trésorerie du ménage
2.1.3 Description des exploitations
2.1.3.1 Typologie des riziculteurs
a. Résultat de l’analyse sous nuée dynamique
b. Résultats du reclassement par l’AFD
2.2 Environnement externe de l’exploitation
2.2.1 Analyse de la filière riz
2.2.1.1 Cartographie de la filière riz
2.2.1.2 Analyse des points forts et points faibles de la filière
a. Analyse des éléments positifs
b. Analyse des éléments négatifs
2.2.1.3 Analyse FFOM de l’environnement des riziculteurs
a. Forces
b. Faiblesses
c. Opportunités
d. Menaces
2.2.2 Environnement organisationnel des groupements CEP
2.2.2.1 Logistiques de réalisation du CEP
2.2.2.2 Contraintes de réalisation des tâches des agents sur terrain
2.2.2.3 Multitâches du leader facilitateur
3 DISCUSSIONS ET RECOMMANDATIONS
3.1 Discussions
3.1.1 Caractéristiques des pratiques des exploitations rizicoles
3.1.1.1 Faiblesse des surfaces des parcelles d’application
3.1.1.2 Déterminants des choix du riziculteur pour l’extension de la surface des pratiques
a. Zone d’études
b. District d’Amboasary Sud
c. District de Tolagnaro
3.1.1.3 Pratique paysanne dans la Région reflète la logique des exploitations
a. Ressources à disposition des EAF différentes
b. Importance du système d’entraide
c. Valeurs socio-économiques des zébus au sein des exploitations
d. Convictions des EAF dans l’adoption d’innovation différente
e. Recours aux salariats agricoles à des degrés différents pour les activités hors entraides
f. Faiblesse des superficies de pratique des techniques vulgarisées
g. Faiblesse de rendement de pratique des innovations promues par rapport au rendement potentiel
3.1.1.4 Typologie selon la note cadre du service aux agriculteurs : base de référence par le projet au lancement du programme
a. Implication des types d’EAF
3.1.2 Importance de l’environnement des exploitations
3.1.2.1 Contrainte institutionnelle pour vulgarisation agricole à Madagascar
a. Défaillance des services publics
b. Autres projets de développement comme facteurs de risque de non efficience
3.1.2.2 Appuis concentrés en amont de la filière
a. Accès aux intrants de proximité
b. Variation des prix sur le marché
3.1.2.3 Facteurs limitant la production rizicole dans la zone
a. Risques liés à l’environnement
b. Risques agricoles
3.1.2.4 Influence sociale pour l’adoption et la pratique de techniques diffusées
a. Economie prédominée par un pouvoir lignager
b. Portée des formations sur les non membres
3.1.2.5 Fonctionnement du CEP pour la « Tsipala 2013 » : atout pour le retard mais contraintes pour la continuité
3.2 Recommandations
3.2.1 Amélioration de l’environnement des exploitations
3.2.1.1 Sécurisation des épargnes
3.2.1.2 Education et formation en milieu rural
3.2.2 Amélioration du dispositif CEP
3.2.2.1 Renforcement du dispositif CEP
3.2.2.2 Capitalisation des expériences antérieures
3.2.2.3 Mise en place de services d’accompagnement fonctionnelles
3.2.3 Dispositif CEP à la professionnalisation des producteurs
3.2.3.1 Appui à l’émergence de nouvelles organisations de producteurs et au renforcement des organisations existantes
3.2.3.2 Amélioration des moyens
3.2.3.3 Promotion des autres activités agricoles
3.2.3.4 Utilisation de la Technique d’Information et de Communication (TIC)
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE

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