Les caractéristiques de certaines communautés zooplanctoniques
Les recherches impliquant le zooplancton en général et les copépodes et les Artemia sp. en particulier ont été et restent abondamment représentées dans la littérature. Ainsi, les processus physiques et biologiques ayant une influence sur la dynamique des communautés planctoniques, et particulièrement celles des copépodes et des Artemia sp., sont relativement bien connus, ces travaux soulignent l’importance de ces espèces dans l’écosystème aquatique.
Cependant, peu d’études ayant trait aux milieux saumâtres en général et aux marais salants en particulier, sont disponibles dans la littérature (Davis, 2000). Étudier ces communautés zooplanctoniques vivant dans les milieux extrêmes, comme les salines, est donc devenu indispensable pour améliorer la connaissance de ces biotopes.
Le zooplancton
Le plancton est l’ensemble des organismes (animaux, autotrophes, archéobactéries ou bactéries) dérivant aux grés des courants dans les eaux douces, saumâtres et salées. Cette communauté s’oppose au necton pouvant nager à contre-courant et contrôler sa position dans la colonne d’eau (céphalopodes, poissons et mammifères marins). Parmi les organismes planctoniques, le compartiment hétérotrophe se nourrissant de matières organiques autochtones et allochtones issues des végétaux ou d’autres animaux constitue le zooplancton. Ce dernier peut être alors herbivore ou/et carnivore (Bougis, 1974). Ce groupe de plancton présente divers comportements alimentaires : filtration, prédation et symbiose avec le phytoplancton autotrophe.
Le zooplancton, maillon essentiel dans les réseaux trophiques aquatiques joue un rôle clé dans le transfert de la matière et d’énergie entre les petits producteurs primaires et les niveaux trophiques supérieurs (Levinsen et Nielsen, 2002). Ainsi, il est considéré comme un consommateur qui régule la biomasse phytoplanctonique, notamment lors des efflorescences. Le compartiment zooplanctonique joue également un rôle important dans les cycles biogéochimiques, notamment dans le cycle du carbone, transférant celui-ci des niveaux inférieurs vers les plus hauts niveaux trophiques tels que les larves et les juvéniles de poissons. L’abondance et la distribution du zooplancton sont fortement influencées par les facteurs physico chimiques, l’état physique de la colonne d’eau ainsi que la distribution et l’abondance des autres espèces. Le zooplancton peut survivre dans les milieux à salinité extrême comme les salines. Ce plancton joue un rôle fondamental dans la chaîne alimentaire et dans l’équilibre du milieu environnant. Il est largement dominé dans la plupart des hydrosystèmes par les copépodes planctoniques.
Les copépodes
En se basant sur leur taille, leur diversité et leur abondance, les copépodes sont considérés comme « les insectes de la mer » (Huys et Boxshall, 1991). De nombreux travaux ont eu pour objectifs d’étudier la diversité, la dynamique, les habitats, les modes de vie et le développement larvaire de ces petits crustacés planctoniques, afin de comprendre leurs rôle dans l’écologie, la biologie trophique, la gestion des pêches et aussi dans l’aquaculture (Drillet et al., 2011). D’autres travaux ont montré l’utilisation possible des copépodes dans l’évaluation de l’impact des contaminants dans l’écosystème marins (Forget-Leray et al., 2005). Ce modèle s’est avéré pertinent pour révéler la présence des polluants organiques comme les agents antifouling, les pesticides (Staton et al., 2002), les hydrocarbures aromatiques polycycliques (PAH) (Lotufo, 1997) et les polychlorobiphényles (PCB) (Magnusson et al., 2007) dans les écosystèmes marin. De même, ce taxon sert à évaluer le risque associé à l’exposition aux perturbateurs chimiques endocriniens (EDC) (Marzio et al., 2013). Ainsi, dans certains pays, les copépodes sont utilisés pour faire des essais de réglementation toxicologique (Edmar, 2002). D’autres recherches se sont focalisées sur les copépodes comme des bio-indicateurs et un système d’alarme signalant les changements climatiques (Greene et Pershing, 2007) vue leur petite taille et leur courte durée de vie. Ces crustacés répondent rapidement aux changements environnementaux et sont considérés, de ce fait, comme des indicateurs biologiques des masses d’eaux (Hays et al., 2005) et des biomarqueurs des changements des écosystèmes aquatiques (Marques et al., 2011). Enfin, certaines espèces de copépodes sont utilisées dans l’aquaculture. Ces copépodes sont des proies pour les larves de poissons comme les morues, les flétans, les poissons plats et les barramundis (O’Bryen et Lee, 2005).
Classification
Les copépodes forment une sous-classe appartenant à la classe des maxillopodes dans le sousembranchement des crustacés constituant une subdivision de l’embranchement des arthropodes.
Règne : Animal
Embranchement : Arthropodes
Sous embranchement : Crustacés
Classe : Maxillopodes
Sous classe : Copépodes .
Les copépodes sont considérés comme l’un des plus importants groupes d’invertébrés en nombre d’espèces dans les systèmes marins et estuariens (Ki et al., 2009). Les adultes des copépodes font partie du méso zooplancton (200 µm – 12 mm) (Bradford-Grieve et al., 1999). Ils constituent l’une des principales composantes du zooplancton métazoaire (Mauchline, 1998). Ils forment un groupe extrêmement diversifié comprenant 200 familles, 1650 genres et 11500 espèces décrites (Huys et Boxshall, 1991 ; Humes, 1994). La diversité réelle reste néanmoins encore largement sous-estimée car ce nombre couvre seulement 15 % du nombre actuel des espèces de copépodes sur la planète selon l’estimation de Machida et al. (2002), plusieurs d’entre elles n’étant pas encore identifiées. Avec plusieurs milliers d’espèces connues, les Harpacticoida, les Calanoida et les Cyclopoida sont les groupes de copépodes les mieux représentés. Leur densité et leur dynamique sont très variables suivant les écosystèmes et la saison considérée (Drira et al., 2009).
Abondance et distribution
Les copépodes surclassent tout autre organisme zooplanctonique au sein de l’écosystème aquatique du point de vue abondance avec 70 à 90 % de la biomasse totale du zooplancton (Nybakken, 2001). Dans les lagunes et les estuaires, les copépodes représentent 80 à 95 % de la biomasse zooplanctonique globale (Heerkloss et al., 1990) et 70 % dans les océans (Wells, 1984). Les copépodes ont colonisé divers écosystèmes et habitats aquatiques : des environnements d’eau douce aux environnements marins et hypersalins ; presque tous les régimes de température et donc toutes les latitudes (des écosystèmes polaires aux tropicaux en passant par les écosystèmes tempérés) et toutes les altitudes, des milieux montagneux (Elgmork et Halvorsen, 1998) aux fosses abyssales (Wolff, 1960) et sur les sites hydrothermaux (Heptner et Ivanenko, 2002). En raison de leur large distribution, les copépodes ont développé divers style de vie (Huys et Boxshall, 1991) qui leur ont permis de s’adapter aux différents milieux. Ce compartiment animal existe sous divers formes : libre ou parasite, planctonique ou benthique.
|
Table des matières
Introduction générale
Chapitre I : Synthèse bibliographique
A. Les salines
B. Les caractéristiques de certaines communautés zooplanctoniques
I. Le zooplancton
II. Les copépodes
II.1. Classification
II.2. Abondance et distribution
II.3. Rôle trophique
II.3.a. Copépodes : proies
II.3.b. Copépodes : prédateurs
II.4. Rôle des copépodes dans les cycles biogéochimiques
III. Les Artemia
III.1. Répartition
III.2. Modes de nutrition et rôle trophique
C. Utilisation des acides gras pour l’étude des réseaux trophiques
I. Définition et structure
II. Rôle et utilisation des AG en tant que marqueur des relations trophiques planctoniques
III. AG et paramètres environnementaux
IV. AG et synthèse
V. AG et réserves énergétiques
D. Acquisition des données moléculaires
I. La notion d’espèce et les problèmes liés à la taxonomie
I.1. La notion de délimitation d’espèce
I.1.a. L’espèce morphologique
I.1.b. L’espèce phylogénétique
I.2. Les problèmes de taxonomie
II. Les marqueurs moléculaires
II.1. Les marqueurs utilisés
II.1.a. ADN mitochondrial versus ADN nucléaire?
II.1.b. Les marqueurs microsatellites ou SSR (Simple Sequence Repeat)
II.2. L’identification moléculaire par code barre ADN (DNA barcode)
III. Utilisation des marqueurs moléculaires
III.1. En écologie
III.1.a. Étude de la diversité génétique et de la génétique des populations
III.1.b. La biogéographie, la phylogénie et la phylogéographie
III.2. Les espèces cryptiques
IV. Quelques exemples d’études moléculaires sur le zooplancton
Chapitre II : Étude de la relation entre les communautés zooplanctoniques et les paramètres environnementaux de la saline de Sfax
A. Introduction
B. Matériels et Méthodes
I. Présentation générale du site d’étude
I.1. Les avants pièces
I.2. Les partènements extérieurs
I.3 Les partènements intérieurs
I.4. Les avants pièces maîtresses
I.5. Les pièces maîtresses
I.6. Les tables salantes (TS) ou cristallisoirs
I.7. Les bassins réservoirs
II. Bassins et fréquence d’échantillonnage
III. Les facteurs environnementaux
III.1. La température, le pH et la salinité
III.2. Les matières en suspension
III.3. Les sels nutritifs
III.4. Les pigments chlorophylliens
IV. Les facteurs biotiques (peuplements zooplanctoniques)
IV.1. Prélèvement et conservation des échantillons
IV.2. Identification taxonomique et dénombrement
V. Techniques d’analyse statistique
C. Résultats
I. Les Paramètres physico-chimiques et biologiques
II. Abondance relative et structure des peuplements zooplanctoniques
III. Analyse des communautés zooplanctoniques et relation avec les paramètres environnementaux
D. Discussions
Chapitre III : Étude de la composition biochimique en acides gras (AG) du zooplancton de la saline de Sfax couplée aux facteurs environnementaux
A. Introduction
B. Matériels et Méthodes
I. Prélèvement et conservation des échantillons
II. Dosage des acides gras chez le zooplancton
II.1. Extraction des lipides
II.2. Méthylation et identification par Chromatographie en Phase Gazeuse
II.3. Indices trophiques
II.4. Analyse en Composantes Principales (ACP)
C. Résultats
I. Analyse de la composition lipidique
II. Analyse statistique
D. Discussion
Chapitre IV: Étude génétique des espèces zooplanctoniques de la saline de Sfax
A. Introduction
B. Matériels et Méthodes
I. Prélèvement et conservation des échantillons
II. Extraction d’ADN génomique
III. Réaction de polymérisation en chaîne
IV. L’électrophorèse
V. Élution des fragments d’ADN à partir du gel d’agarose
VI. Clonage des fragments d’ADN
VI.1. Ligation des produits d’élution dans le vecteur pGEM-T
VI.2. Transformation et sélection bactérienne
VI.3. Repiquage et PCR sur colonie
VI.4. Extraction plasmidique
VI.5. Séquençage des fragments d’intérêt
VII. Outils d’analyses bioinformatiques
C. Résultats
I. Caractérisation phylogénétique des communautés zooplanctoniques
I.1. Étude phylogénétique des populations d’Artemia salina prélevé de M2
I.1.a. Avec un fragment du gène 18S
I.1.b. Avec un fragment du gène 16S
I.2. Étude phylogénétique des copépodes
II. Génétique des populations chez A. salina et P. grani
II.1. Génétique des populations chez A. salina
II.2. Génétique des populations chez P. grani
D. Discussion
Conclusion générale