Le cacaoyer
La plante Variabilité génétique de T.cacao
Il existe 3 grands groupes de cacaoyer: Criollo, Forestano et Trinitario. Le Criollo qui signifie «local » en espagnol et dont les fruits sont généralement verts puis rouge, représente 1% du commerce mondial. Il rassemble les cacaoyers qui sont domestiqués depuis très longtemps et qui fournissent du cacao aux arômes très recherchés. On les croise encore dans de vieilles plantations mais ils ont été délaissés car ils sont très sensibles aux maladies dont la moniliose et la pourriture brune et ont une croissance lente. Le groupe Forastero plus diversifié que le précédent représente 80% de la production mondiale actuelle. Ces cacaoyers se retrouvent donc très majoritairement dans les plantations des principaux pays producteurs. Ils possèdent des fruits verts qui jaunissent à maturité et dont les fèves sont plus ou moins aplaties. Ses qualités gustatives sont reconnues. Enfin, le Trinitario rassemble les hybrides issus des croisements entre les deux groupes précédents. Il présente des types très diversifiés et hétérogènes. On le retrouve aussi dans les principaux pays producteurs puisqu’il représente environ 20% du commerce mondial. Le Trinitario fournit un cacao de qualité intermédiaire (Mossu, 1990) (Barrel, et al., 2009). De manière générale, on estime que 70% des cacaoyers cultivés appartiennent à des populations peu ou pas sélectionnées. L’autre partie vient de variétés hybrides sélectionnées et issues d’un croisement inter-groupe. Les critères de sélection se basent sur la qualité mais surtout sur la productivité et la résistance aux maladies. On note aussi que 5% des variétés seraient clonales (Barrel, et al., 2009).
Nous présentons ici quelques caractères physiologiques du cacaoyer. On observe généralement la première floraison vers la troisième ou quatrième année après la germination même si elle peut se produire dès la deuxième année pour les arbres très précoces. Généralement, les cacaoyers d’une même plantation ont leurs périodes de floraison synchrones. Même s’il y a des fleurs toute l’année, on distingue tout de même deux pics de floraisons marqués par an (Mossu, 1990). Le cacaoyer produit donc toute l’année mais il existe cependant deux pics de production que l’on appellera récolte intermédiaire et récolte principale (CNUCED;OMC, 2001). Ces deux pics ont lieu en juin-juillet pour la production intermédiaire et novembre-décembre pour la principale. A début de son développement, le fruit est appelé « chérelle ». C’est lorsqu’il a atteint sa taille définitive après 5 à 6 mois que l’on parle de cabosse. Il est important de mentionner que indépendamment des maladies, la perte des chérelles peut être due à un dessèchement sur l’arbre. Ce phénomène est une sorte de mécanisme physiologique de régulation de la fructification et peut affecter 20 à 90% des chérelles formés (Mossu, 1990). Les caractères des cabosses c’est-à-dire la forme, la taille et la couleur sont extrêmement variables selon le génotype. Le poids du fuit oscille entre les variétés. Une cabosse pèse en moyenne 400 à 500 g et contient 100 à 120 graines ce qui donnera une production de 35 à 40 g de cacao marchand (Barrel, et al., 2009).
De nombreux facteurs écologiques interviennent pour que la croissance, la floraison et la fructification du cacaoyer soit optimale et régulière. De par la complexité de leurs interactions, il est difficile de connaitre exactement l’influence de chacun (Mossu, 1990). Pour que le cacaoyer soit productif, la température doit être comprise entre 20 et 32°C avec un optimum de 25°C. Le minimum absolu requis est de 10°C. En dessous la plante stoppe sa croissance (Mossu, 1990). La pluviométrie est un facteur écologique très important car il peut affecter les rendements d’une année sur l’autre. Comme le cacaoyer est une plante relativement sensible au déficit hydrique, les pluies doivent être abondantes (1500-2000mm/an) et réparties sur la totalité de l’année. Si ce n’est pas le cas, il peut entrer en concurrence avec d’autre plantes (d’ombrage ou adventices). Cependant, le cacaoyer tolère une saison sèche à condition qu’elle ne dure pas plus de 3 mois (Mossu, 1990) (Barrel, et al., 2009).
Pour son bon développement, le cacaoyer a donc besoin d’une atmosphère chaude et humide. Par conséquent, l’humidité relative est généralement élevée : environ 70-80% la journée et atteint 100% la nuit. Pour préserver cette humidité atmosphérique il est important de protéger la plantation du vent (brise-vent, arbres d’ombrages etc.) (Mossu, 1990). Comme nous l’avons précisé précédemment, le cacaoyer est un arbuste de sous-bois, c’est pourquoi il est cultivé traditionnellement sous ombrage (naturel ou artificiel). Un ombrage provisoire et relativement dense est indispensable pendant les trois premières années de croissance. Il ne doit pas laisser passer plus de 50% de la luminosité. Cependant, le cacaoyer est par la suite capable de s’adapter aux différentes conditions de lumières. Il peut croître sous un ombrage très dense à condition que la température avoisine les 32°C. En revanche, il a été montré que l’ombrage devient un facteur limitant à la production dans le cas où tous les autres facteurs écologiques sont extrêmement favorables. Le maintien ou non de l’ombrage est un choix qui doit être fait en fonction des conditions climatiques et des moyens économiques dont dispose le producteur : apport d’engrais ou d’insecticides par exemple. Rappelons, qu’un ombrage permanent permet de limiter les besoins et par conséquent assure une production plus régulière malgré des rendements moins importants qu’en plein soleil : la pression parasitaire est plus intense en plein soleil (Mossu, 1990) (Barrel, et al., 2009). Enfin, le sol est aussi un élément important à prendre en compte dans la production de la plante. Le bon développement du cacaoyer nécessite un sol qui assure une bonne rétention de l’eau, légèrement acide (pH entre 5,5 et 7) ainsi qu’une teneur en matière organique élevée (Barrel, et al., 2009).
Les systèmes de production
La cacaoculture est la principale source de revenu de 5 à 6 millions de petits producteurs dans le monde. Les superficies de leurs exploitations sont en général comprises entre 2 et 10 ha. Les rendements moyens sont très variables mais ils atteignent en moyenne 350 kg/ha (Jagoret, et al., 2015). Les systèmes de production de cacao sont multiples et vont de la monoculture, et plantations à ombrage léger jusqu’aux systèmes agroforestiers (SAF) complexes (Jagoret, et al., 2014) (Deheuvels, 2011). Dans le modèle intensif, on applique le principe de monoculture suite à une défriche totale d’une parcelle forestière. Les plantations maintiennent de bons rendements durant les vingt premières années puis la production s’effondre car le sol s’appauvrit. Dans ces systèmes intensifs, les producteurs n’ont ni les moyens, ni le savoir faire pour appliquer des produits phytosanitaires et fertiliser leurs sols. La durée de vie de ces exploitations est de 20 à 30 ans. Les producteurs vont ensuite installer de nouvelles parcelles sur une zone forestière défrichée (Jagoret, et al., 2014). Ce modèle peu durable est retrouvé dans une grande partie des pays producteurs de cacao comme la Côte d’Ivoire (Jagoret, 2011). La cacaoculture sous SAF propose un modèle plus diversifié qui apporte des rendements satisfaisants tout en diminuant la consommation d’intrants. La durée de vie des parcelles agroforestières peut dépasser cinquante ans car l’association d’espèces fruitières et forestières contribue au maintien du sol en réduisant l’érosion et en maintenant sa fertilité (Jagoret, et al., 2014). L’Amérique centrale est à ce titre un exemple où les systèmes agroforestiers à base de cacaoyers sont associés à plusieurs dizaines d’espèces ligneuses et non ligneuses (Deheuvels, 2011).
La moniliose
La moniliose est une maladie causée par le pathogène Moniliophthora roreri. Ce champignon est un basidiomycète de l’ordre des Agariscales et appartenant à la famille des Marasmiaceae. Il attaque les fruits de l’espèce Theobroma dont T .cacao (Aime, et al., 2005) (Phillips-Mora, 2003). Les premières traces de moniliose remontent à 1851 en Colombie (Phillips-Mora, et al., 2007). Aujourd’hui elle est présente dans de nombreux pays d’Amérique latine comme au Venezuela et plus récemment en Amérique centrale, puisqu’elle n’a été signalée au Costa Rica qu’en 1978 et au Mexique en 2005 (González, et al., 2008). Les pertes causées par M.roreri sont peu importantes à l’échelle mondiale, car cette maladie est absente des principaux pays producteurs de cacao. Cependant, elle reste le principal facteur limitant de la production dans de nombreux pays d’Amérique comme au Costa Rica (Ploetz, 2007) (Mariau, 1999). A l’échelle de la parcelle, on estime en moyenne une perte de récolte de 30% mais on peut atteindre 100% lorsque les conditions de développement de M.roreri sont favorables (Phillips-Mora, et al., 2007). Nous détaillerons dans cette partie les principaux symptômes ainsi que le cycle de développement de M. roreri. Symptômes Les symptômes causés par M.roreri sont observés sur les fruits de T.cacao. Il existe une multitude de symptômes qui varient selon l’âge de la cabosse.
Les cabosses âgées de moins de 2 mois sont plus susceptibles d’être touchées par la maladie et le délai d’incubation est de 40 jours. Les premiers symptômes sur les cabosses relativement jeunes sont l’apparition de point huileux et la déformation de la cabosse. Des lésions et des tâches de couleur brun-café vont envahir la surface du fruit causant des nécroses. Au bout de 3-5 jours, on observe la formation d’un tapis blanc-crème qui va libérer des spores. A l’intérieur du fruit, les fèves se nécrosent et forment une masse compacte (End, et al., 2014). A l’extérieur, la cabosse est momifiée. On compte alors 7 à 43 millions de spores par centimètres carré, ce qui est amplement suffisant pour la dispersion de la maladie. Pour les cabosses âgées de plus de 2 mois, le délai d’incubation est plus long (60 jours) et les premiers symptômes se manifestent par l’apparition de tâches sur le fruit. A ce stade, l’infection se limite à de la pourriture sur la coque et n’atteint pas ou peu les fèves. Les cabosses sont le plus souvent viables en termes de récolte (Thévenin, et al., 1996) (Sánchez Mora, et al., 2012).
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Table des matières
Résumés
Liste des abréviations
Remerciements
Introduction
1 Contexte de l’étude
1.1.1 Le cacaoyer
1.1.2 La plante
1.1.3 Les systèmes de production
1.2 Les bioagresseurs du cacaoyer
1.2.1 La moniliose
1.2.2 La pourriture brune
1.3 Les systèmes agroforestiers tropicaux
1.3.1 Définitions et généralités
1.3.2 Les services écosystémiques fournis par les systèmes agroforestiers
1.3.3 La complexité des agroforêts
1.4 La structure spatiale des arbres en système agroforestier
1.4.1 Définition de la structure spatiale, intérêts et applications
1.4.2 Présentation des premiers résultats de l’étude
1.4.3 Application au contexte présent : la zone d’Upala
1.5 Objectif et hypothèse de l’étude
2 Matériel et méthodologie de l’étude
2.1 Matériel : la sélection des parcelles
2.2 Méthodologie : cartographie des dispositifs
2.3 Comptage de cabosses et calcul de l’indice d’attaque
2.4 Caractérisation de l’organisation spatiale des individus
2.4.1 Caractérisation de la moyenne des environnements locaux
2.4.2 Classification ascendante hiérarchique des dispositifs
2.4.3 Caractérisation de l’environnement local individuel
2.4.4 Modèle linéaire mixte généralisé
3 Résultats de l’étude
3.1 Résultats obtenus pour un dispositif
3.2 Variabilité de l’indice d’attaque au sein des parcelles
3.3 Classification ascendant hiérarchique des dispositifs en fonction de la structure spatiale
3.4 Résultats à l’échelle individuelle
3.4.1 Résultats obtenus pour la moniliose
3.4.2 Résultats obtenus pour la pourriture brune
4 Discussion liée à l’étude
4.1 Avantages et limites de l’étude
4.1.1 L’analyse statistique
4.1.2 Le comptage et la coupe sanitaire
4.1.3 Qualité de l’ombrage
4.2 Discussion générale
4.2.1 A l’échelle de l’individu
4.3 Discussion à l’échelle de la parcelle
5 Perspectives de l’étude
Conclusion générale
Bibliographie
Table des annexes
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