Les bed blockers du CHUPPA résidant hors Guadeloupe

Les limites de l’étude

     Notre travail présente de nombreuses limites. Tout d’abord, il est de faible puissance : seulement 87 patients inclus après application des critères d’inclusion et d’exclusion, sans analyse statistique possible du fait du volume de recrutement insuffisant. D’autre part, de nombreux biais sont à noter :
– Biais de sélection : l’étude est monocentrique. Même si le CHUPPA représente un des centres hospitaliers de référence du bassin antillais, la population qui s’y présente est issue d’un même bassin de vie, et n’est pas représentative de la situation sociale de l’ensemble de la population antillaise.
– Biais de classement ou d’information : l’étude étant réalisée rétrospectivement, beaucoup de données sont manquantes. De plus, certaines données retrouvées dans les dossiers étaient imprécises et ont pu être interprétées de manière subjective. Certains dossiers étaient non archivés ou inexistants, voire dénués d’information. De plus, des erreurs de codage des pathologiessont fréquemment commises par les médecins, entraînant des GHM et GHS erronés, des mauvaises attributions de DMS relative au diagnostic principal, de tarification, et a fortiori une erreur lors de l’analyse financièredes dépenses hospitalières. D’autres erreurs sont également commises lors de la saisie informatique des données par les secrétaires, entraînant alors un biais d’information et de sélection.
– Biais de résultats car l’étude des coûts a des limites pour plusieurs raisons : les données concernent uniquement l’année 2016 ; elle est réalisée sur l’ensemble des GHM produits par chaque activité (UF) ; il est impossible de cibler le coût réel d’un GHM déterminé, et donc impossible d’identifier le coût réel des bed blockers identifiés dans notre étude ; les dépenses recensées dans chacune des UF, via le système d’informations (GEF) n’ont pas fait l’objet d’une mise à jour par rapport à la réalité du terrain (affectation non exhaustive des dépenses de manière générale, et surtout celles du personnel qui représentent près de 70% de la dépense totale) malgré le fait que deux types de coûts ont été calculés : par UF et par spécialité (une spécialité pouvant contenir plusieurs UF), permettant un ajustement des dépenses. Cependant, les coûts identifiés ici correspondent à un coût moyen par GHM produit au sein d’une unité fonctionnelle, et non pas au coût réel des séjours étudiés.En aucun cas cette étude des coûts ne retrace la réalité exhaustive du terrain. Les résultats sont donc approximatifs, car aucun calcul n’a été approfondi. De plus, certains patients ont été hospitalisés dans plusieurs services au cours de leur séjour, mais un seul service n’a été pris en compte dans notre travail, car le fractionnement des séjours est impossible à réaliser, entraînant là aussi un biais pour l’analyse financière.

Issues des résultats de notre étude

    Les facteurs identifiés dans notre étude comme pouvant êtreliés à l’allongement de la durée de séjour sont en partie des facteurs constitutionnels, donc non modifiables : l’âge, le sexe, la nationalité. D’autres facteurs ne sont également pas modifiables, aucun plan d’action n’est donc envisageable : le lieu de vie, la situation familiale et professionnelle, le score de Charlson, le score d’autonomie ADL, le diagnostic principal. On peut cependant proposer des solutions à partir des facteurs modifiables : le mode d’entrée, le score d’aidant, le type de couverture sociale etla couverture par une mutuelle complémentaire, le type et le service d’hospitalisation, la connaissance des procédures de sortie difficile par le personnel hospitalier, le mode d’entrée, le mode de sortie, la destination, la période d’entrée et de sortie, les causes du dépassement de la DMS.Nous pouvons légitimement penser que la considération des facteurs de risque de sortie difficile des patients dont le lieu de résidence se trouve hors île principale, constitue un point essentiel et primordial si l’on veut réduire les durées de séjour, c’est pourquoi nous allons aborder les différentes solutions envisageables à la réduction des durées de séjour pour les patients résidant hors Guadeloupe, sur le plan médical, social, institutionnel, et du transport.
a)Sur le plan médical : A partir des causes médicales du dépassement de la DMS, nous pouvons établir une liste simple de
solutions aux problèmes cités en annexe [11]: assurer une asepsie permanente et optimale ; effectuer des bilans diagnostic et étiologique complets ; optimiser le programme du bloc opératoire ; prise en charge optimale de la douleur ; prise en charge du patient dans sa globalité ; demande précoce d’avis spécialisé ; prévention des complications de décubitus. D’autres solutions sont à envisager, telles que :
– La sensibilisation et la formation des médecins au projet de sortie (36)13 ;
– Le renseignement du dossier médical ;
– L’utilisation d’une fiche de renseignement dès l’admission ;
– L’utilisation du document de sortie d’hospitalisation 13 ;
– L’application de la procédure de sortie difficile 14.
b)Sur le plan social : Les causes sociales au dépassement de la DMS nousont permis d’établir une liste simple de solutions aux problèmes cités en annexe [11] : anticipation des sorties difficiles par sollicitation précoce du service social, après désignation d’une personne responsable de contacter l’assistante sociale ; renseignement de la personne de confiance dès l’admission ; répartition équitable des services à charge par les assistantes sociales avec attribution de DECT ; favoriser les modes de sortie en HAD ; demandes précoces et complètes de places en institution. D’autres solutions sont à envisager :
– La diminutiondu délai entre le signalement au service social et la sortie du patient (37) ;
– L’intervention de l’Equipe Mobile Gériatrique ;
– L’intervention de l’UCSP 14, 15 ;
– La collaboration avec le GIP RASPEG (Mme CHAULLET, directrice)16 ;
– L’utilisation du logiciel TRAJECTOIRE ;
– L’optimisation des demandes de placements ;
– L’amélioration du suivi social de ville (38, 39) ;
– La lutte contre l’isolement social.
c)Sur le plan institutionnel : Les causes institutionnelle, organisationnelle ou administrativeau dépassement de la DMS, nous ont permis d’établir une liste simple de solutions aux problèmes cités en annexe [11] : optimisation du planning des blocs opératoires avec libération de plages horaires d’urgence ; libérer des places dans les services, notamment en SSR afin de fluidifier le parcours de soins et libérer des places pour les patients en attente d’hospitalisation.

Les études à propos des bedblockers

    Nous avons sélectionné les études de la littérature se rapprochant au maximum de notre sujet d’étude.
a) Etude des journées non pertinentes d’hospitalisation(33) : L’ensemble des résultats de notre étude est à compléter avec ceux de l’étude de H. LEULEU et coll. qui met en relation les deux principales méthodologies utilisées dans la détection d’augmentation de la durée d’hospitalisation.
b) L’étude de D Somme et coll.(27) : Cette étude réalisée dans deux services de gériatrie analyse les facteurs médicaux-sociaux prédictifs de journées d’hospitalisation non pertinentes.
c) L’étude de BB Ingold et coll.(31) : L’étude de Ingold et coll. (2000) analyse elle aussi les facteurs médicaux-sociaux responsables de journées non pertinentes pour des patients dont le critère d’inclusion est ici l’âge (> 75ans).
d) L’étude de PO Lang et coll. (28) : L’étude réalisée à Strasbourg en 2005 par PO. Lang et coll. tente de définir les marqueurs précoces d’augmentation de la durée d’hospitalisation de patients âgés de plus de 75 ans en étudiant les séjours supérieurs à deux limites de temps : 30 jours, et la borne supérieure de la durée théorique de séjour du GHM.
e) Etudes sur l’influence de l’organisation de la sortie sur les coûts : Une enquête conduite dans deux hôpitaux universitaires de Pennsylvanie (43) s’est attachée à mesurer l’impact économique direct de la mise en place d’un protocole de planification de la sortie et de suivi à domicile de patients âgés à risque, les dépenses étant évaluées sur la base des remboursements de soins médicaux intervenant dans les 6 mois après la sortie. Les coûts ont été évalués à 1,2 million de dollars dans le groupe témoin contre 0,6 million pour le groupe de patients ayant bénéficié de ce protocole. D’autres études concluent au même résultat (44, 45, 46, 47, 48).
f) Etudes traitant de l’intérêt d’une sortie précoce : Selon Scott (49), la diminution de la durée de séjour (réduite de 53 % en moyenne entre 1970 et 1987 en France) résulte de différents facteurs : changement des pratiques, amélioration des techniques, modification du remboursement des hospitalisations, introduction de techniques de gestion, développement de la chirurgie ambulatoire, pression croissante visant à diminuer les budgets hospitaliers, volonté d’accroître le nombre d’admissions. Les opinions des auteurs sont mitigées quant à l’intérêt réel des sorties précoces (50, 51).

Conclusion

    Notre étude prend toute sa place dans ce panel de travaux traitant des facteurs de risque d’augmentation de la durée d’hospitalisation et de l’efficience des services hospitaliers dans l’organisation de la sortie des patients. L’identification de ces facteurs nous a permis d’envisager des voies d’amélioration pour tenter d’optimiser la fluidité du parcours de soins. Les actions de ville reposent en premier lieu sur le médecin référent qui est le premier maillon de cette chaîne sociale, et dont le rôle est de coordonner les différentes actions à entreprendre. De même, l’amélioration de la coordination entre les services sociaux de ville et hospitaliers doit se poursuivre dans la lignée des réseaux déjà existants. La préparation de la sortie du patient s’inscrit dans la continuité de sa prise en charge. De la qualité de cette étape de la chaîne de soins dépendra une évolution rapide vers l’amélioration de son état de santé, de son autonomie, de son éducation, ainsi que la prévention d’une ré-hospitalisation future. Il est donc primordial :
– d’identifier les enjeux de la sortie d’hospitalisation ;
– d’améliorer la qualité des pratiques professionnelles de préparation à la sortie des patients ;
– de faciliter l’interaction entre les différents professionnels de santé ;
– d’intégrer le processus de sortie dans la démarche qualité de l’établissement selon les recommandations HAS ;
– d’acquérir une culture de qualité et de sécurité des soins ;
– de développer la prise en compte de l’environnement du patient (familial, médical, social, culturel, etc) pour améliorer la continuité des soins ;
– de s’approprier des outils existants permettant d’analyser et élaborer un parcours de soins ;
– d’optimiser la sortie des patients dès leur admission tout en sécurisant leur prise en charge ;
– de repérer et gérer les situations complexes ;
– de maîtriser la qualité des processus et de la prise en charge des patients ;
– de maîtriser la DMS, élément clé de l’efficience économique ;
– de s’inscrire dans le respect des bonnes pratiques selon le cadre juridique et les référentiels relatifs au management de la prise en charge des patients ;
– d’évaluer la performance des services en matière de maîtrise des durées de séjours ;
– de maîtriser les outils de gestion de projet et de gestion du changement pour impulser une dynamique collective d’évolution des organisations et des pratiques professionnelles.
Par ailleurs, une étude des ré-hospitalisations précoces des patients sortis serait intéressante. Elle nous permettrait de savoir si le choix de la destination de sortie était adapté à la situation médicosociale et au devenir des patients, et s’il n’engendrait pas un taux de ré-hospitalisations précoces supérieur. Si tel était le cas, cela justifierait alors une meilleure évaluation médicale et sociale des patients, autant d’un point de vue de la santé du patient lui-même que d’un point de vue d’Economie de Santé. Cette donnée supplémentaire nous aurait donc permis de développer la notion de « sortie adaptée ». Notre étude n’a concerné que les hospitalisations des patients résidant hors Guadeloupe, sur une durée d’un an, ce qui représente une très faible proportion des patients hospitalisés annuellement au CHUPPA, mais qui ont néanmoins été responsables de dépenses financières importantes, s’élevant approximativement à 2 008 015.87 euros. Une étude incluant les patients résidant en Guadeloupe semble être nécessaire afin de compléter notre travail, et définir des actions à mettre en place pour palier au déficit économique du CHUPPA.

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Table des matières

I. INTRODUCTION
1. La définition du bed blocker
2. La définition de la sortie d’hospitalisation
3. Les conséquences sur le SAU 
4. Un contexte géographique particulier 
A. Le CHUPPA : le carrefour des Antilles et de la Guyane
B. Une mission à assurer
C. La problématique du retour à domicile
5. Un contexte démographique et socio-culturel préoccupant
A. Une population diversifiée
B. Une population vieillissante
C. La problématique du maintien à domicile
a) Mutation familiale et sociale
b) Des difficultés multiples
D. Des établissements d’hébergements en nombre insuffisant
E. La situation des dépendances de l’Archipel Guadeloupéen
6. Un enjeu de Santé Publique et d’Economie de Santé
A. L’organisation de l’offre de soins : des difficultés particulières
B. Un enjeu économique
C. Un enjeu de qualité de soins
7. Optimisation des durées d’hospitalisation
8. L’importance des facteurs sociaux
9. Nos objectifs et nos hypothèses
10. Conclusion
II. MATERIEL & METHODES
1. Méthodes de sélection
A. La population de l’étude
B. Les services d’inclusion
C. La période d’inclusion
D. La méthode d’inclusion
E. Les critères d’exclusion
F. Cas des séjours multiples pour un même patient
2. Constitution de la base de données
A. Données du département de Santé Publique
B. Données collectées dans les dossiers médicaux
C. Données du Bureau des Admissions
D. Données de la Direction des Affaires Financières (DAF)
E. Questionnaires de renseignements
F. Construction des indicateurs
3. Méthodes d’observation et d’évaluation
A. Choix des indicateurs
B. Etude Statistique
III. RESULTATS
1. Description de la population étudiée
A. Données sociodémographiques
B. Données relatives au séjour hospitalier
C. Données relatives à la gravité clinique
D. Données relatives à la durée d’hospitalisation
E. Données relatives au dépassement de la DMS
2. Analyse financière
A. Recouvrement des titres
a) Titre 1
b) Titre 2
B. Dépenses par services
C. Conclusion
IV. DISCUSSION
1. Les forces de l’étude
2. Les limites de l’étude
3. Analyse des résultats
4. Les pistes d’amélioration
A. Issues des résultats de notre étude
a) Sur le plan médical
b) Sur le plan social
c) Sur le plan institutionnel
d) Sur le plan du transport
e) Sur le plan économique
f) Conclusion
B. Issues de la littérature
5. Cette étude parmi les autres
A. Les études à propos des bedblockers
a) Enquête Perte d’Autonomie
b) Etude des journées non pertinentes d’hospitalisation
c) L’étude de D Somme et coll
d) L’étude de BB Ingold et coll
e) L’étude de PO Lang et coll
f) Etudes sur l’influence de l’organisation de la sortie sur les coûts
g) Etudes traitant de l’intérêt d’une sortie précoce
B. Notre étude, un travail unique
C. Comparaison des résultats
6. Conclusion
V. BIBLIOGRAPHIE
VI. ANNEXES

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